INFLUENCE
DEL’INGESTION
DEPROTÉINES IODÉES
SUR LES RÉSERVES VITELLINES DE L’OVOCYTE CHEZ
LAPOULE DOMESTIQUE
PAR
L. LACASSAGNE
Station de Recherches avicoles
Centre national de Recherches
zootechniques
Jouy-en-Josasl,es travaux destinés à étudier l’action de la
thyroxine (distribuée
pure ou sous forme de
protéine
iodée ou depoudre
dethyroïde desséchée)
sur la
ponte
sont très nombreux.Malgré
demultiples
différences de conditionsexpérimentales,
il semble que les résultatspuissent
se résumercomme suit :
Chez les
poules
de deux ans etplus,
leléger hyperthyroïdisme
pro-voqué
parl’ingestion
deprotéines
iodées augmente laponte
soit parune meilleure intensité
(TURNER
et col. 1945 a,1946, OLOUFA, 1954),
soit par un
allongement
de lapériode
deponte (T URNER
et col. 1945b, 1948
, 1 949).
Chez les
poulettes
ayant 14 mois ou moins en débutd’expérience
un traitement similaire n’a aucune influence sur le nombre d’oeufs
pondus (A
SMUNDSON
et PINSKY, Ig35 ;CHARLET-I!ERY,
1,EPOY,F R ANÇOIS,
1053 ; D!LPON,1056 ; GODFREY,
I(!4(! ; LiLUE,SIZFMOPE,
MILLIGAN etB IRD
, IC)52 ;
S AVA GE, T URN E R ,
KEMPSTER et HOGAN, 1952 ; HUTT etGow!, 194 8).
Ces deux derniers auteursremarquent
un fléchissement de laponte
durant les huitpremières
semaines de traitement. De même, BERG et BEARSE 1951, obtiennent une chute de
production
durant les10
premières
semaines de leurexpérience. Cependant,
TURNER et col.1945
b, remarquent
dans les mêmes conditions uneaugmentation
deproduction
par retard du déclin saisonnier de laponte.
Seuls de tous ces auteurs ASMUNDSON 1931, ASMUNDSON et PINSKY 1935
, mentionnent une diminution du
poids
de vitellus contenu danschaque
ovuleaprès ingestion
depoudre
dethyroïde desséchée,
sanschangement
de laproduction
totale. Pour lasimplification
du texte,nous
appelons
ovule tout ovocyte détaché de l’ovaire et cecidepuis
la( 1
) Avec la collaboration technique de Mlle GATE et M. GiLLET.
rupture
du folliculejusqu’à
laponte
de l’oeuf, que la fécondation soit intervenue ou non durant cet intervalle.A la suite de ces travaux il nous a paru intéressant :
- de chercher s’il se
produit
un abaissement des réserves vitellines dechaque
ovule chez des animaux soumis à des doses dethyroxine égales
à celles recommandées par TURNER et col. 1945 a etgénérale-
ment
employées
dans les travaux serapportant
à l’étude de l’action desprotéines
iodées sur laponte.
- dans l’affirmative de vérifier ultérieurement si cet abaissement est
compatible
avec le maintien de laproduction
ou est àl’origine
d’unfléchissement de la
ponte
tel que l’ont observé HUTT et GOWE194 8
etBE R
G et BEARSE 1951. Cela afin de mettre en évidence les différentes
régulations susceptibles
de seproduire
au niveau du follicule en vue dumaintien de l’ovulation et
d’apporter quelques
éléments nouveaux àl’étude de l’interaction
ovogénèse-ovulation.
MÉTHODE
Huit
poules
Rhode XWyandotte
nées à la même date etâgées
de IO mois au début de
l’expérience
furentséparées
en 2lots,
un témoinet un traité recevant une ration contenant 0,044p. 100 de caséine iodée à z,3 p. 100de dl
thyroxine.
Les animaux traitésingéraient
ainsi en moyennechaque jour
220 ug dethyroxine
parkilogramme
depoids
vif.Pendant la
durée
del’expérience
les animaux furent conditionnésen lumière de
façon
à leur fournir 12 heures d’éclairement. Pour chacun des lots lapériode
de base fut de trois semaines ainsi que lapériode
de
traitement,
ces deuxpériodes
de 21jours
étantséparées
par un inter- valle de4 8
heurespris
commepériode
de transition.Le
poids
dechaque
ovule fut évalué parpesée
directeaprès
ablation des chalazes et essuyagecomplet pratiqué
en faisant rouler lejaune
sur une feuille de
papier légèrement
absorbant de manière à amenertous les
points
de sa surface au contact dupapier.
Cetteméthode, déjà employée
par BASTIAN et ZARROW 1055, constitue un moyenprécis
d’évaluer le
poids
de vitellus à l’état frais. L’erreur due àl’évaporation
est inférieure à 0,2 p. i o0o pour une durée de
pesée
de i minute. Leserreurs dues à
l’essuyage
sontégalement négligeables :
un double essuyage,une chalaze non
enlevée, manipulations jamais effectuées,
entraînentune erreur maximum de 4 p. i ooo.
Les ovules accidentés ne
figurent
pas aux tableaux I, II, III maissont
représentés
au tableau IV par la moyenne des ovules de lapoule
correspondante
durant lapériode
considérée. Deplus,
les chiffresqui
figurent
aux tableaux I, II, III, ainsi que l’estimation de la sécurité des moyennes des différents lotsproviennent
de calculs effectués surun nombre d’oeufs
identique
pourchaque poule
defaçon
à éviter leserreurs
qu’introduirait
pour un lot uneponte
différente parpoule,
étantdonné que dès le
début,
lepoids
des ovules diffère avecchaque
animal.RÉSULTATS
Durant la
période
de base aussi bien que durant lapériode
detraitement,
laponte
est demeurée sensiblement la même.Évolution
des réserves vitellines1
° Analyse par lot
Les résultats résumés dans le tableau ci-dessous montrent que la caséine
iodée,
à la doseindiquée,
abaisse lepoids
moyen dechaque
ovule.
La différence entre moyennes pour le lot témoin avant et
pendant
la
période
de traitement estégale
à -f-o,8 9
g et estsignificative
au seuilde i p. 100. Inversement, la différence entre moyennes pour le lot traité avant et
pendant
la distribution dethyroxine
estégale
à -o,18
et n’est passignificative.
Enfait,
dans la deuxièmephase expérimentale
se
rapportant
au lottraité,
nous devons considérer deuxpériodes :
unepremière période
durantlaquelle
les ovulespondus présentent
des couches de vitellusqui
n’ont pu être atteintes par le traitement. Sa durée est environ de 10jours,
dont 9jours
detemps
moyen dedéveloppement
d’un
ovocyte
dans saphase
degrand
accroissement et unjour
corres-pondant
à la formation de l’oeuf dans l’oviducte.Enfin,
une deuxièmepériode
durantlaquelle
les ovulespondus
ontpu subir le traitement dans la totalité de leurs réserves vitellines.
Nous
prendrons
comme limites de lapremière période
les datesdu 27 mars au 6 avril inclus. I,’examen des
graphiques
i et 2 nous dé-montre que la
période
ainsi définiecorrespond
à la durée réelle d’évolu- tion des ovocytes dans le cas del’expérience.
La deuxièmepériode
s’étenddonc du 7 au 18 avril inclus et donne les
résultats
suivants.Cette différence de -
0 , 5 8
estsignificative
au seuil de 5 p. 100. La moyenne depoids
de vitellus s’est donc abaissée durant le traitement.Or,
nous savons que lepoids
de l’ovule croît continuellement àpartir
de la date d’entrée en
ponte
etbeaucoup plus
vite en début deponte qu’en
fin deponte.
Dans le casqui
nouspréoccupe chaque période expé-
rimentale étant
égale
à 21jours,
nous pouvons supposer que sur unlaps
detemps
aussi courtl’augmentation
depoids
de l’ovule est unefonction linéaire du
temps.
Nous obtenons ainsiquatre
droites derégression (voir graphique
n°3 )
dont leséquations figurent
au tableauci-après :
y
représente
lepoids
de l’ovule et x le numéro d’ordre de l’oeuf. Le calcul montre que lesrégressions (r), ( 2 ), ( 3 )
sont effectivement linéaires.La
représentation graphique
de ceséquations
faitapparaître
labrusque
décroissance dupoids
de vitelluspendant
la distribution dethyroxine.
Décroissance mise en valeur par le fait que lespremiers
oeufspondus
ne sont peu ou pas affectés par le traitement contrairement auxoeufs
pondus
dans la deuxièmepériode.
Après
examen dugraphique
n° 3, il devient évident que dans le lot traité la différence des moyennes depoids
de vitellus desovocytes
détachés
de l’ovaire avant etpendant
la distribution dethyroxine
estbeaucoup plus grande qu’il n’apparaît
aux tableaux I et II. Il faut eneffet comparer la moyenne obtenue
pendant
le traitement à la moyennequi
aurait été atteinte sanslui ;
le calcul ainsi fait nous donne une diffé-rence virtuelle
supérieure
à i g.2
° Analyse par animal
Au tableau
n o 4
nous avonscomparé
la moyenne dupoids
desovules
pondus
par unepoule
durant la deuxièmepériode
de traitement ainsi que laquantité
totale de vitellusexportée
par l’animal durant cemême
temps,
aux valeurscorrespondantes
obtenuespendant
les douzederniers
jours
de lapériode
de base. l,es chiffresreprésentant
laquantité
de vitellus
exportée
en 12jours
ne sontqu’une approximation
de laquantité
de vitellus accumulée dans l’ovaire durant ces mêmesphases
de la
ponte.
Eneffet,
ces valeurs nereprésentent
réellement lesquantités
sécrétées que si la
production quotidienne
de vitellus demeure constante avant etaprès
lapériode
de contrôle durant un nombre dejours égal
à celui des
périodes étudiées,
cequi
n’est pas.La réduction moyenne du
poids
de vitellus par ovule parrapport
à la
période
de base est donc de :6,5
p. 100 pour lapoule
1218,6
p. 100 pour lapoule
709 o,4
p. 100 pour la
poule
740 4,
4 p. 100 pour la
poule 8 17 .
Chaque
animalrépond
donc defaçon
différente à un même taux dethyroxine incorporée
dans lapâtée.
Ce résultatpeut
être rattachésoit à une
ingestion plus
ou moinsimportante
denourriture,
soit àune
plus
ou moins bonne utilisationdigestive
de lathyroxine
contenuedans
l’aliment,
soit à un taux dethyroxine endogène différent,
soit àune sensibilité
inégale
à un même taux dethyroxine.
Pour l’ensembledu
lot,
la différence dequantité
de vitellusexportée
durant les 12 der- niersjours
de lapériode
de base et les 12 derniersjours
de lapériode
de traitement est de - 33,72 g soit une diminution de 5,4 p. 100 pour
un nombre d’ovulations
apparent
demeuréidentique.
Enfait,
il estimpossible
d’affirmer que ce nombre n’a pas subi dechangement
étantdonné que sur une aussi courte
période
une différence de unjour
dansla durée
d’expérience peut
introduire une erreur voisine de 5 p. 100 parsimple
fait que la ponte est constituée de séries.I,es travaux antérieurs ne
peuvent également
lever cette incertitude et seule la détermination de la durée d’évolution du folliculepeut
nousapporter
uneréponse
définitive. ASlVIUNDSON et Prn-sKy zg35, ont montré que la réduction dupoids
de l’ovulecorrespond
à un taux moindre dedépôt quotidien
de vitellus dans le follicule cequi
les amène à conclureque la durée d’évolution du follicule doit demeurer
inchangée.
Cetteconclusion demande à être vérifiée par une méthode directe car admettre que le
follicule
met le mêmetemps
pour arriver àmaturité,
le taux d’ovulations demeurantinchangé,
c’est admettre que la réduction de lavitellogenèse
totale estproportionnelle
à la réduction par ovule.RÉSUMÉ
La distribution à des
poules âgées
de 10mois,
deprotéines iodées,
renfermant 1,3 p. 100 de dl
thyroxine,
à la dose de o,0.!4 p. 100dansla
ration,
faitapparaître
au cours des troispremières
semaines de traitement :- une inhibition de
l’augmentation
dupoids
des ovulesqui
seserait normalement manifestée durant cette
période ;
- un abaissement
significatif
dupoids
moyen des ovules si l’on seréfère aux
derniers jours
de lapériode
de base.La réduction moyenne de
poids
ainsi obtenue est pour l’ensemble du lot de 5,4 p. 100 etprend
une valeursupérieure
à ce chiffre si l’onse réfère non
plus
à lapériode
de base mais à l’évolution normalequi
aurait eu lieu sans le traitement.
Reçu pour publication le
6 avril 1957.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
A
SMUNDSON
(V. S.).
- Effect of hormones on the formation of the hen’s egg.Poul. Sci., 10,
157 -165,
1931.AsIVIUNDSON
(V. S.)
and PINSKY(P.).
- The effect of thethyroid
on theformation of the hen’s
egg. Poul.
Sci., 14, 99-104, 1935.B AS T
IAN
(J. W.)
and ZARROW(M. X.).
- A newhypothesis
for theasynchronous ovulatory cycle
of the domestic hen(gallus domesticus).
Poul. Sci.,34,
77 6- 7 88,
1955.I3r~
RG
(I,. R.)
and BEARSE(G. E.).
- Effect of iodinated casein and thiouracilon the
performance
oflaying
birds. Poul. Sci., 30, 21-28, ig5i.CHARI,r~T-I,!RV
(G.), F RANÇOIS (A. C.)
et I,r;ROY(A. M.).
- Effet del’inges-
tion de
protéines
iodées sur la ponte et sur la teneur en vitamine A ’ des oeufs depoule.
Annales LN.R.A.,i 5 g-i6i,
1953.Dn I ,
PON
(Yves).
- Action desprotéines
iodées sur la croissance et sur laponte. Thèse vétérinaire,
I g 5 6.
G
ODFREY
(G. F.).
- The effect offeeding thyroprotein
on egg shellquality
and
hatchability.
Poul. Sci., 28,867-873,
1949.HuTT
(F. B.)
and Gow!(R. S.).
- On thesupposed
effect of iodocasein upon eggproduction.
Poul. Sci., 27,286-2 93 , 1948.
I, IL
I,IE
(R. J.),
SIZEMORE(J. R.),
MILLIGAN(J. I,.)
and BIRD(H. R.).
-Thyroprotein
and fat inlaying
diets. Poul. Sci., 31, 1037-1042, 1952.Or,ou!A
(M. M.).
- Influence ofthyroprotein
and darkness onegyptian
chicken
during
summer. Poul. Sci., 33,6 49 -65 2 ,
1954.SAVAGE
(J. E.),
TURNER(C. W.),
Kl~MPSTER(H. I,.)
and HOGAN(A. G.).
-The effects of vitamin B12 and
thyroprotein
on eggproduction,
eggweight,
shellquality
andhatchability.
Poul. Sci., 31, 22-31, 1952.T
URNER
(C. W.),
IRwIN(M. R.)
and REINEKE(E. P.).
- Effect of thethyroid
hormone on egg
production
of whiteLeghorn
hens. Poul. Sci., 24,171
- 1 8 0
,
1945 a.T
URNER
(C. W.),
KEMPSTER(H. I,.),
HALL(N. M.)
and R!rn-!xr;(E. P.).
- The effect of
thyroprotein
on eggproduction. Poul.
Sci., 24, 522- 533, 1945 b.T
URNER
(C. W.),
KEMPSTER(H. I,.)
and HALL(N. M.).
- Effect of conti-nued
thyroprotein feeding
on eggproduction.
Poul. Sci., 25,5 6 2 -56 9 , 1946.
T URN E
R
(C. W.)
and KEMPSTER(H. L.).
-Thyroprotein feeding
to 7 yearold hens. Poul. Sci., 28,