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Submitted on 1 Jan 1906
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P. Langevin
To cite this version:
P. Langevin. Recherches récentes sur le mécanisme de la décharge disruptive. Radium (Paris), 1906,
3 (4), pp.107-115. �10.1051/radium:0190600304010700�. �jpa-00242173�
Recherches récentes sur le mécanisme
de la décharge disruptive1
Par P. LANGEVIN,
Professeur suppléant
auCollège de France.
JE me propose de montrer comment les idées actuelle sur la nature de l’électricité, sur la structure des charges électriques, permettent,
pour la première fois, de représenter et de sui, rr dans le détail le mécanisme des phénomènes de décharge disruptivc.
Ce n’est pas que nous possédions encore une con-
naissance complète des lois qui régissent les appa-
rences complexes et var i6ps de l’étincelle électrique,
mais nous possédions en quelque sorte les lettrcs de
l’atphabet dans lequel est écrit le mystère de ces phr-
nomènes, connus depuis longtemps, mais restés, i
cause de leur complexité même, en marge du domaine théoriquement explore.
On sait comment les recherches sur la structure intime des charges électriques, constituées par un nombre immense, mais aujourd’hui connu, de parti-
cules électrisées, ions ou électrons, ont été facilitées par la conductibilité que communiquent aux gaz les radiations nouvellement décerner tes, rayons de Hontgen ou du radium. lu simplicité du milieu
gaxcux a permis de saisir individuellement ces centres
électrisés, de les dénombrer, de mesurer leur charge, identique a celle des atomes monovalents dans Felec-
trohse, de montrer (me le courant a travers lc gaz, c’t probablement toute espèce de courant, consiste en un
déplacement de semblables particules sous l’action
d’un champ électrique, les positives se mouvant dans
te sens du champ l’t les négatives en sens inverse.
On a pu, en outre, suivre les modifications que subissent les centres électrisés lorsque les conditions dans lesquelles lc gaz est placé viennent à changer. A
le température ordinaire, les ions dans les gaz semblent être formes d’une agglomération de molécules neutres, d’un essaim maintenu, par attraction électrostatique,
autour d’un tio-vati plus simple provenant de la disso-
ciation, par le rayonnement extérieur qui a créé la conductibilité, de certains atomes ou molécules du gaz
en portions électrisées positivement est négative-
ment. Les molécules neutres qui forment le cortège électriquement polarisables comme tout milieu dié-
ll’l’I riqu0, sont attirées en conséquence par le noyau 1. Communication présentée a la séance du G janvier 1906 à la Société internationale de; Electriciens.
charge, comme des pou usures ou des objets légers
sont attirés par un corps électrisé (quelconque.
Mais l’agitation · thermique tend i s’opposer à l’ag- glutinalion et, à températures élevée, les ions paraissent
se simplifier, sr débarrasser de leur enveloppe de mo-
lécules pour ne plus couserver que le no) an central,
fraction d’atome on de nlolécllle, ct il se manifeste alors, de manière plus llcttc et plus profonde qu’a la température ordinaire, une dissymétrie considérable entre les charges positives et négatives.
Cette dissymétrie entre les deux espèces d’électri-
cité s’était révélée au début de l’étude des phénomènes électriques dans l’aspect des aigrettes des deux signes,
dans les décompositions électrolytiques ct dans bien
d’alltres phénomènes, mais n’a pris toute son in1por-
tance que lors des recherches récentes.
Les noyaux négatifs, que nous appelons electrons négatifs, corpuscules OH particules cathodiques,
sont de beaucoup les plus mobiles dans le gaz sous l’action d’un champ électrique lorsqu’ils sont libres,
comme par exemple dans les flammes Oll dans les tubes a vide pendant la décharge, ct se présentent comme
étant dc petites fractions d’atome, de masse deux
mille fois plus petite que celle de l’atome d’lndro- gène.
Les centres positifs paraissent être, au contraire,
de l’ordre de grosseur des atomes, de sorte que la
conception que nous pouvons nous faire dc la conduc- tibilité provoquée dans un gaz par les rayon;,, du
llüntgen consistc dans la dissociation par le rayonne- ment de certaines molécules ou de certains atomes en un électron négatif qui en faisait partie et un résidu chargé positivement, de masse presque égale u celle
de l’atome primitif. Ce résidu dépend de la nature du
gaz dissocié, tandis que l’électron négatif en semble indépendant par toutes ses propriétés, tous les atomes
matériels paraissant renfermer les mêmes électrons.
Ces deux espèces de centres, dans un gaz soumis à
une température élevée, se déplacent sans rien agglo-
lnérer autour d’eux, les négatifs beaucoup plus rapi-
dement que les positifs, à cause de leur faible masse;
au contraire, a la température ordinaire, des cortèges
se constituent, d’importance a peu près égale de part
et d’autrc, et nous avons affaire aux ions..
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/radium:0190600304010700
corpusculaire pour la distinguer de la dissociatitln
électrolytique des molécules salines (1111 Sc fait de
manière toute différente, est instable dans les gaz ou
une cause extérieure est nécessaire pour la produire,
mais semble s’etfectuer spontanément dans certains milieux comme les métaux.
C’est là l’explication actuelle de la conductibilité
métallique, par dissociation corpusculaire spontanée
des atomes, t’ll un ou quelques électrons négatifs et un
résidu positif, généralement immobile, pour consti- tuer la charpente solide du métal, tandis que les cor-
puscules se déplacent à travers cette charpente comme
le ferait un gaz dans un tuBau ou mieux dans une
éponge, un champ électrique à l’intérieur du métal soufflant ce gaz cathodique poiir créer le courant
électrique comme une différence de pression souffle-
rait le gaz au travers de l’éponge.
L’identité des corpuscules produits par les divers atomes permet d expliquer F absence de toute modifié- cation du milieu métallique a la suite du passage d’un courant, puisqu’un métal en contact avec des milieux
différents reçoit d’un côté des électrons identiques à
ceux qu’il perd de l’antre.
L1 présence d’électrons négatifs libre3 (dc ce gaz
corpusculaire) à l’intérieur des métaux se trouve entièrement confirmée par divers phénomènes dans lesquels on oblige, sous certaines influences, les élec-
trons à sortir du métal. En particulier, la lumière ultra-violette provoque en frappant un métal une
semblable émission de charges négatives sous forme
de particules identifiées avec celles qui constituent les rayons cathodiques. C’est la le phénomène découvert
par Hertz.
tjnc semblable influence apparait en effet néces- saire pour provoquer la sortie du gaz cathodique
intérieur du métal, bien que, i première vue, on ne
voit pas pourquoi cette sortie ne se fait pas d’elle- même commc l’expansion d’un gaz, ni pourquoi l’électrostatique est possible, un conducteur ne dis-
persant pas inlmédiatement les charges électriques en
mouvement qu’il contient.
Mais l’existence dans le milieu métallique d’un
gaz cathodiques dont les particules se meuvent en tous
sens n’implique nullement l’absence d’un effort pour sortir une de ces particules dans le vide environnant.
La cause même qui produit la dissociation corpus- culaire du métal, le pouvoir inducteur spécifique
élevé du milieu, empêche la sortie des corpuscules dissociés, puisque, un travail fini, la différence des
énergies potentielles, inversement proportionnelles
au, pouvoirs inducteurs spécifiques, est nécessaire
pour passer d’un milieu dans un autre. Seuls les
.corpuscules qui se présentent à la surface de sépara-
tion avec une énergie cinétique supérieure au travail
à fournir peuvent gagner l’extérieur, quand ils ne
1ive qu’ils laissent derrière eux, et leur nombre est infime aux températures ordinaires.
Ce nombre augmente très vite avec la température:
par suite l’agitation intérieure croissante de charges négatives qui en résulte constitue le phénomène bien
connu sous le nom d’effet Edison, qui peut prendre
une intensité énorme ainsi du’il résulte d’expériences
de M. Richardson : a la température des filaments due
lampes à incandescence, le carbone, moins actif cepen- dant que les métaux, peut émettre sous forme d’élec-
trons jUSqU’¿l 2 ampères par centimètre carré de sa
surface, et beaucoup plus encore aux températures
élevées que présentent dans l’arc les extrémités des charbons. La théorie actuelle de l’arc invoque ce phé-
nOlnène dont je souligne ici l’importance.
Le but que je me propose aujourd’hui est de passer du milieu métallique spontanément dissocié, sponta-
nément conducteur, au milieu gazeux, d’ordinaire isolant, dans lequel peut se produire la décharge dis- ruptivc.
Le passage brutal du courant par décharge disrup-
tive à travers le gaz est lié à la préselce dans celui-ci
de centres électrisés libres dont nous allons voir à nous
expliquer l’origine et que l’on peut mettre en évidence dans toutes les formes de la décharge, aussi bien
lorsqu’il s’agit d’une aigrette qui envoie dans le gaz environnant des ions de son signe, identifiés par M. Chattock avec ceux que produisent les rayons de ttôntgcn, que lors d’une décharge dans un gaz raréfié,
oit une expérience déjà ancienne d’Hittorf a montré la possibilité de faire passer an courant parasite sous voltage très faible lorsque le gaz est illuminé par une
décharge principale.
Un tube de verre particllclnent vide (fig. 1) portant quatre fils de platine
soudés dans la paroi
ne laisse passer ri- gou1-euseiuent au-
cun courant sous
l’action d’un seul éléixient de pile entre
Fig. 1.
les deux fils C et D tant que l’on n’a pas, au moyen d’une différence de potentiel élevée, produit une dé- charge entre A et B. Cette dernière provoque une dis- sociation abondante du gaz et les ions libérés se dépla-
cent maintenant dans le lalhle champ entre C et D.
Cette hypothèse de la présence d’ions en nombre
considérable dans un gaz traversé par la décharge dis- ruptivc, qui consiste en une circulation de ces ions, a
été développée, dès 1884, par M. Schuster qui suppo- sait dans le gaz une dissociation analogue a celle qui se produit dans les électrolytes, en centres chargés, tous
de l’ordre de grosseur des atomes. Nous sommes plus renseignés aujourd’hui sur les propriétés des centres,
sur le caractère corpusculaire de la dissociation et
nous pouvons surtout expliquer la genèse de cette dis-
sociation.
C’est l’étude de cette genèse, de cette production de
centres électrisés dont lc déplacement constitue le
courant au travers du gaz, que je désire aborder main- tenant : toute la théorie actuelle de la décharge est
basée sur le phénomène de dissociation des l1lUlé- ciiles ou atonies par le choc d’un cetzfne éleclrisé en
11tOUVement.
Le point central, essentiel, est celui-ci : les mult- cules électriqlemlnt neutres d’un gaz peuvent subir la
dissociation corpusculaire, telle que la produisent les
rayons de Röntgen, en un électron négatIf et un résidll charge positivement, au moment du choc contre elles
d’un projectile, centre électrisé positif ou négatif, lancé
aBee une vitesse d’autant plus grande cluc le gaz est le
siège d un champ électrique plus intense et que le cen- tre parcourt librement un trajet plus long, c’est-à-
dire que le gai est plus raréfié.
La possibilité de cette dissociation, de cette ionisa-
tion par les chocs résulte immédiatement de notre connaissance des propriétés possédées par les radia- tions qu’émettent les substances radioactives, et du pouvoir ionisant élevé des rayons cathodiques, flux de corpuscules en nlouvcmcnt très rapide.
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