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ARTheque - STEF - ENS Cachan | La mise en place de l'expérimentation scientifique dans l'enseignement technique et professionnel

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Academic year: 2021

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LA MISE EN PLACE DE L’EXPÉRIMENTATION SCIENTIFIQUE

DANS L’ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL

Christian HAMON

Master 2 Recherche – UMR STEF – ENS Cachan/INRP UniverSud, Paris

MOTS-CLES : ENSEIGNEMENT EXPÉRIMENTAL, ENSEIGNEMENT TECHNIQUE,

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL, SCIENCES INDUSTRIELLES, SCIENCES EXPÉRIMENTALES, HISTOIRE, CURRICULUM

RÉSUMÉ : au travers de la lecture de la revue pédagogique Technique - Art - Science reconnue

pour sa valeur de témoin des pratiques dans l’enseignement technique et professionnel, ce travail de recherche à mi-chemin entre histoire de l’enseignement technique et analyse curriculaire lève un voile sur la mise en place dans l’enseignement technique, entre 1946 et 1960 en France, du recours à la méthode active d’enseignement expérimental de la physique-chimie, de la technologie et de la géométrie.

ABSTRACT :

through studying the pedagogical review, Technique - Art - Science, considered as a witness of practices and debates in Technical Education, this research work, between history of technical teaching and curriculum analysis, enlighten about setting up of experimental teaching active method of physics-chemistry, technology and geometry in France from 1946 to 1960.

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1. INTRODUCTION

La recherche, à travers la lecture de la revue pédagogique Technique-Art-Science (TAS), cerne les causes des échecs et des réussites de la mise en place dans l’enseignement technique et professionnel d’un enseignement expérimental, méthode active d’enseignement ayant recours à des expériences à caractère scientifique. Cette mise en place est le fruit d’une volonté sociale et politique forte, incarnée par le rapport Langevin-Wallon (remis en 1947 et issu du plan d’Alger). Il s’agit à l’époque pour les partisans d’un nouvel humanisme technique, dans un contexte où la France est en ruine, de former la main-d’œuvre qualifiée (ouvriers, techniciens, ingénieurs, cadres) et les formateurs dont le pays a besoin pour se reconstruire et pour relancer l’économie. Comme le proclame le directeur de l’enseignement technique (Le Rolland 1947), la France compte sur l’enseignement technique pour assurer la formation pratique et culturelle de près de 80 % de la jeunesse.

2. CORPUS

Le corpus étudié (figure 1) est constitué d’articles de la revue TAS (parution de 1946 à 1977), longtemps revue officielle de la Direction de l’Enseignement Technique, qui relaie les documents et les discours officiels. Elle est, au sein de l’enseignement technique et professionnel, un témoin privilégié des discussions des textes officiels, des recommandations des corps d’inspection et des professeurs des Écoles normales nationales professionnelles (ENNA) et des enseignants à qui elle donne la parole.

Figure 1 : Détail et distribution chronologique des 80 articles du corpus

Cette enquête s’appuie sur les recherches effectuées autour des réformes de l’enseignement des sciences au lycée et de la mise en place de l’enseignement expérimental dans les établissements scolaires du second degré (Belhoste, Gispert, et Hulin 1996). Après-guerre, le développement de

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l’enseignement expérimental dans l’enseignement technique se fera conjointement au renouveau des méthodes pédagogiques actives (Lamoure, 2007).

Une recherche par mot-clé dans une base de données recensant les rubriques, les titres, les sous-titres, les auteurs (figure 2) et leur qualité des 3 500 articles parus dans la revue T.A.S., a permis de constituer un corpus de 80 articles parus entre 1946 et 1960, constitué pour un tiers d’articles généraux et deux tiers d’articles à caractère disciplinaire. Les articles généraux sont soit du genre « discours » et renseignent principalement sur les orientations données à l’enseignement technique et y sont décrits des objectifs, des recommandations dont leurs

auteurs sont des cadres du ministère : ministre, Figure 2 : Nomenclature des auteurs

directeur de l’Enseignement Technique, conseiller pédagogique auprès du ministère, inspecteur général et des professeurs d’ENNA, soit du genre « conseils généraux » et se situent alors entre pédagogie et méthodes ; ils sont signés par des inspecteurs généraux et des professeurs d’ENNA. Les articles à caractère disciplinaire sont du genre « conseil, leçon et étude », ils renseignent principalement sur les contenus, les matériels, les méthodes et sont signés par les différents acteurs de terrains, des inspecteurs de l’enseignement technique, des professeurs des différents types d’établissement et des professeurs d’ENNA. Les différentes disciplines susceptibles d’avoir recours à l’enseignement expérimental (figure 3) sont l’enseignement professionnel, les mathématiques, la chimie, l’électricité et la mécanique.

3. RÉSULTATS

3.1. Trois objectifs majeurs attribués à l’enseignement expérimental

L’enseignement expérimental est présenté comme source de progrès, participant à la formation de l’esprit et au développement de la culture des individus. Méthode concrète, par la compréhension du monde qu’il permet, l’enseignement expérimental contribue à l’apprentissage de la vie mais aussi au progrès social, il constitue à ce titre un objectif social. L’enseignement expérimental est un moyen de formation qui doit rendre aptes les élèves, futurs travailleurs, à accomplir des tâches

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indispensable à l’industrie : il constitue à ce titre un objectif utilitariste. Enfin un ensemble d’objectifs pédagogiques assignés à l’enseignement expérimental est mis en place, car, dans ce qu’il a de concret, de visuel et de palpable, il permet de « voir », ou mieux, d’apprendre à observer ; il aide ainsi l’élève à comprendre et à interpréter les phénomènes physiques, à mémoriser les notions essentielles des leçons. L’enseignement expérimental, par la méthode expérimentale et inductive qu’il utilise, contribue à la formation de l’esprit scientifique. Claude Bernard (Bernard 1865), la réforme de 1902 et à la conférence du recteur Liard de 1904 (Belhoste 1995) font figure de référence.

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Suivant le niveau d’enseignement les exigences ne sont pas les mêmes. Ainsi pour ceux qui préparent un CAP, à raison de deux heures par semaine la méthode se résume à « Observer », « Analyser » et « Conclure ». Dans les collèges techniques et les Écoles Nationales Professionnelles (ENP), l’observation de l’expérience s’accompagne de constatations qui permettent de définir des relations de cause à effet et l’analyse des résultats de mesures amène les élèves à la formulation d’une loi et à la définition des unités ; le raisonnement est privilégié. Dans les Écoles Nationales d’Ingénieurs des Arts et Métiers (ENIAM), vient s’ajouter la dimension critique de l’expérience. L’enseignement expérimental doit enfin permettre à l’élève de faire le lien entre la science en général et le métier particulier qu’il apprend. Ce dernier objectif, pédagogique, bien que distinct, est à rapprocher de l’objectif utilitariste.

3.2. Des contraintes de mise en œuvre liées à la période historique

Le recours à l’enseignement expérimental dans l’ensemble de l’enseignement technique se heurte à des contraintes multiples mais les problèmes se posent différemment selon l’histoire des établissements. Dans les ENP qui sont équipées depuis des décennies de salles de travaux pratiques et les ENIAM qui pratiquent des expériences depuis de nombreuses années, les modes de fonctionnement ne changent pas de manière significative. À l’opposé, les 850 Centres d’apprentissage, créés dans l’immédiat après-guerre, sont totalement dépourvus de matériel expérimental et ne disposent pas de locaux adaptés (paillasse, eau, gaz et électricité)

Les besoins nécessaires à l’enseignement expérimental dépendent également des spécificités disciplinaires : de la simple paire de ciseaux en mathématiques à la maquette didactique pour l’étude de la chute des corps en mécanique. Mais par-delà ces différences, c’est tout le poids des contraintes économiques de la période : le matériel nécessaire à l’expérimentation est soit récupéré, soit acheté – mais les crédits sont maigres et peu de maisons spécialisées dans la construction de matériel expérimental scolaire existent ; il est donc le plus souvent fabriqué dans les établissements par les professeurs et les élèves, parfois au mépris des règles de sécurité. Cette pratique, attestée par de nombreux articles détaillant des maquettes « à réaliser » accompagnées de plans, de conseils d’utilisation, de résultats de mesures, est vivement recommandée par les inspecteurs et les professeurs d’ENNA qui y voient de nombreux avantages. Car, au-delà des aspects économiques, cette démarche est une invitation à l’invention et à l’innovation : réalisation de matériel « sur mesure », donc parfaitement adapté à l’enseignement, exercices pédagogiques pratiques pour les élèves qui les réalisent, implication des professeurs, collaboration entre professeurs de différentes disciplines, émulation entre collègues et établissements et enfin, mutualisation des expériences par le biais de la revue.

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Il existe par ailleurs des problèmes liés à l’hétérogénéité du recrutement et de la formation des enseignants ; ils peuvent aussi bien être d’anciens maîtres de l’enseignement primaire que des ouvriers de l’industrie recrutés comme professeurs d’atelier ou, pour les professeurs de physique chimie, avoir reçu une formation scientifique. Ils sont peu nombreux à avoir bénéficié d’une formation en ENNA. La pratique de l’enseignement expérimental conduit à une remise en question des méthodes pédagogiques et à la mise en œuvre de nouveaux supports d’apprentissage.

3.3. Le cas particulier des sciences industrielles

Avec la naissance des Centres d’apprentissages, en 1945, existe la volonté affichée de mettre en place un nouvel enseignement, fondé sur l’expérimentation, et situé entre la science pure, faite d’abstraction et qui ne provoque qu’un seul changement de la matière à la fois, et la technologie, par trop descriptive, et toujours en retard sur les derniers progrès de la technique industrielle : la technologie expérimentale ou sciences industrielles à l’image des travaux d’Henri Le Chatelier (Le Chatelier 1925). Mais si les sciences industrielles, discipline de l'esprit rattachée aux sciences expérimentales sont ardemment défendues par la revue car forme « noble » d’une technologie élevée au rang de science, sa mise en place, contrairement aux sciences expérimentales et comme le résume le tableau 1 (tableau 1), se heurtera à des contingences trop nombreuses.

CONCLUSION

Dix ans après sa naissance, l’arrêt de la publication dans la revue d’articles relatifs à l’enseignement expérimental est concomitant à la mise en place de la réforme Bertoin en 1959, point de départ de profonds bouleversements dans l’Enseignement Technique qui aboutiront à l’intégration de celui-ci dans un système éducatif cohérent depuis la maternelle jusqu'à l’enseignement supérieur, mais dans lequel l’enseignement professionnel deviendra une filière de relégation (Figeat 2007).

La pratique effective de la méthode active d’enseignement expérimental a, semble-t-il, bien été introduite, après la Libération, en une dizaine d’années, mais uniquement dans les disciplines scientifiques. Elle a fini par s’imposer et, bien que critiquée, elle perdure encore aujourd’hui (Goffard 2007). Vraisemblablement la revue TAS aura joué un rôle moteur dans la mise en place des pratiques expérimentales. Elle a été aussi un lieu où s’affrontent, de manière courtoise mais ferme, des idées, des tendances, des points de vue ou des méthodes parfois contradictoires (inductive – déductive) portées par des inspecteurs et des professeurs d’ENNA.

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Si la lecture de la revue laisse l’impression générale que peu d’années, finalement, auront été nécessaires pour faire entrer dans les mœurs des professeurs de sciences le recours à l’enseignement expérimental, il n'y a cependant pas eu d'études ou de recherches menées à l'époque sur sa pratique effective dans les établissements. Cette impression reflète-t-elle une réalité ? La revue « Technique-Art-Science » reste la revue officielle de l’enseignement technique, elle ne dit que ce qu’elle veut

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de recherche pourrait être utilement complété par l’étude d’autres traces. Les cahiers des élèves de l’époque seraient certainement d’un grand enseignement, mais comment les retrouver sur une telle période ? Les examens ne comprenaient pas d’épreuves de travaux pratiques, il semble donc que seul le recours à des archives d’établissements serait susceptible de nous renseigner sur la réalité de la mise en œuvre de la méthode active d’enseignement expérimental dans l’enseignement technique.

BIBLIOGRAPHIE

BASQUIN, R. (1947). MÉCANIQUE EXPÉRIMENTALE. À l’usage des Collèges techniques, Sections techniques des Collèges moderne, Cours complémentaire, et des candidats au Baccalauréat technique. Paris : Delagrave.

BASQUIN, R., MÉTRAL, A. (1941). MÉCANIQUE. À l’usage des Écoles Nationales Professionnelles. Paris : Delagrave.

BELHOSTE, B. (1995). Les sciences dans l’enseignement secondaire français, textes officiels, tome 1 : 1789-1914. Paris : INRP et Economia.

BELHOSTE, B., GISPERT, H., HULIN, N. (1996). Les sciences au lycée. Un siècle de réformes des mathématiques et de la physique en France et à l’étranger. Paris : INRP.

BERNARD, C. (1865), Introduction à l'étude de la médecine expérimentale. [réédition] 1966, Collection Texte intégral, Paris : Garnier-Flammarion.

FIGEAT, M. (2007). L’enseignement professionnel pour les enfants des autres. Argos, 42, 45-48. GOFFARD, M. (2007). Pratiques et démarches expérimentales, Bulletin de l’Union des Physiciens,

898, 37-39.

HAMON, C. (2008). La méthode active d’enseignement expérimental dans l’enseignement technique, la revue « Technique – Art – Science » comme témoin. Mémoire de Master 2, Communication et recherche en didactiques des sciences expérimentales et technologiques, 31 janvier 2008, UMR STEF, ENS Cachan : France.

LAMOURE, J. (2007). Technique-Art-Science, 1944-1955 : entre pédagogie et disciplines. Communication à la Journée d’étude du séminaire d’histoire de l’enseignement scientifique, 23 mars 2007, Paris : ENS.

LE CHATELIER, H. (1925). Science et industrie, les débuts du taylorisme en France. [réédition] 2001, Paris : CTHS.

LE ROLLAND, P. (1947). L'Enseignement technique et la Réforme de l'Enseignement. Technique - Art - Science, 9, 1-7.

Figure

Figure 1 : Détail et distribution chronologique  des 80 articles du corpus
Figure 3 : Répartition des 80 articles du corpus

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