FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNEE 1902-1903 N° 41
CONTRIBUTION A
L'ÉTUDE
3DXJ
CYSTICERQUE
SOUS-CONJONCTIVAL
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentés et soutenuepubliquementle 12
Décembre 1902
PAR
TLéodore-Adolplie URERT
jhl
Né àToulon (Var), le 14janvier
1880
Élève du Service de Santé de la Marine
MM. MOUSSOUS professeur.... Président
„ , , BADAL professeur—1
Examinateurs de laThese:< ,LAGRANGE agrège ) Jtiges.
CABANNES agrégé.
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront
laites
surles
diverses parties de l'Enseignement
médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE RU MIDI, P. CASSIGNOL
91 — RUE PORTE-DIJEAUX — 91 1902
Faculté de Médecine et_de Pharmacie de Bordeaux
M. DENABIAS,doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
PROFESSEURS
MM. M1GÉ )
DUPUY MOUSSOUS.
Clinique interne
MM.
) PICOT.
/ PITRES.
P1. . . t DEMONS.
Cliniqueexterne
j
LANELONGUEPathologie et théra¬
peutique générales. VERGELY.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecine opératoire. MASSE.
Clinique d'accouche¬
ments LEFOUR.
Anatomie pathologi¬
que COYNE.
Anatomie CANNIEU
Anatomie générale et
histologie V1AULT.
Physiologie JOLYET.
Hygiène LAYET.
Médecine légale MORACHE.
Physiquebiologique ot
électricité médicale BERGON1É. |
AeRÉGÉM BiA EXERCICE :
section de médecine (Pathologie interneet Médecine légale.)
MM. CASSAET. j MM. MONGOUR.
SABRAZÈS. 1 CABAN NES.
HOBBS. |
Professeurs honoraires.
MM.
Chimie BLAREZ.
Histoire naturelle ... GIJILLAUD.
Pharmacie FIGUIER.
Matièremédicale.... de NABIAS Médecine expérimen¬
tale FERRÉ.
Clinique ophtalmolo¬
gique BADAL.
Clinique des maladies chirurgicales des en¬
fants P1ÉCHAUD.
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maladiesdesenfants A. MOUSSOUS Chimie biologique...
DENIGÈS.
Physiquepharmaceu- SIGALAS.
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Pathologie exotique. LE DANTEC.
section de chirurgie 1£t accouchements
(MM.DENUCÉ.
Pathologie
externe) BRAQUEHAYE
Pathologie extei
nej
CHAVANNAZ.(
BÉGOUIN.Accouchements.IMM. FIEUX.
ANDERODIAS.
Anatomie.
section des sciencesa.natom1ques etphysiologiques
IMM. GENTES. | Physiologie MM.
PACHON
'
i CAYALIÉ. I Histoirenaturelle BEILLE-
section dessciencesphysiques Chimie MM. BENECH. | Pharmacie....
COURS COIIPEÉMENTA| K
Clinique desmaladiescutanées etsyphilitiques Clinique desmaladies des voiesurinaires
Maladies dularynx, des oreilles etdunez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologieexterne Accouchements Physiologie Embryologie Ophtalmologie
HydrologieetMinéralogie
Le Secrétaire dela Facilité:
M. DUPOUY.
ES :
MM. DUBREUILH.
POUSSON.
MOURE.
REGIS.
RONDOT.
DENUCÉ.
ANDERODIAS.
PACHON.
PRINCETEAU LAGRANGE.
CARLES.
LEMA1RE.
Pardélibération du 5 août 1879, laFaculté aarrêté que les opinions émises
dans
; Thèsesqui luisont présentées doiventêtre considérées comme propres à leursauteurs,qu'elle n'entendleurdonnerni approbation niimprobation.
A LA
MÉMOIRE
DE MONPÈRE
A MA
MÈRE
A MES SŒURS
ET
AMES FRÈRES
A MES PARENTS
El A MES AMIS
«
A MES CAMARADES DE LA MARINE
ET DES COLONIES
,1 MONSIEUR
DOCTEUR CABANNES LE
PROFESSEUR AGRÉGÉ A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE BORDEAUX
OCULISTE DES HOPITAUX
i MONSIEUR LE DOCTEUR TALA IRACil
DIRECTEUR DU SERVICE DE SANTÉ DE LA MARINE DIRECTEUR DE L'ÉCOLE PRINCIPALE DU SERVICE DE SANTÉ
COMMANDEUR DE LA LÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
A MONSIEUR LE DOCTEUR GIRARD
MÉDECIN PRINCIPAL DE LA MARINE
\
SOUS-DIRECTEUR A L'ÉCOLE PRINCIPALE DU SERVICE DE SANTÉ CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
/
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR MOUSSOUS
PROFESSEURDE CLINIQUE MÉDICALEINFANTILE A LAFACULTÉDEMÉDECINE
DE BORDEAUX
MÉDECIN DES HOPITAUX
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
INTRODUCTION
Cettethèsea pour but de traiter un
point de pathologie
spéciale quijusqu'icin'a été l'objet
quede très
rarestra¬
vaux. EnFrance, enAllemagne, en Angleterre, en
Italie,
en Belgique quelques observations ont vule jour
; nous avons voulu faire uneétude aussiconsciencieuse que possible deces observations, et nous en avons tiré la plupart des
docu¬
mentssurlesquels cette thèseest
établie.
Luréunion decesobservations n'a pas été la
partie la plus
facilede notre tâche; éparpillées sur une
longue période d'années,
quelques-unes très anciennes,publiées la plupart
à
l'étranger,
dans des revues peurépandues
en France,elles
nous ontdemandé pour nous les procurer, encore
plus
que pour lestraduire, un temps assez long.Le plan denotre sujet esttrès simple^
Après
avoirfait l'his¬
torique
de la question, nous parlons del'étiologie
etde la
pathogénie de cette curieuse maladie; à la fin de cedernier chapitre
nous insistonssur l'influence du traumatismedansl'apparition
du parasitesousla conjonctive.
Nous continuons par l'anatoinie
pathologique, où
nous reproduisons une plancheque nous aprocurée M. Cabannes,
professeur agrégé
â
laFaculté de médecine de Bordeaux.
Nous terminons notre sujet en parlant de
la symptomato- logie,
du pronostic, et du traitement du cysticerque sous- conjonctival.En terminant nos études, il nous est un
devoir bien agréa¬
ble de remercier tous ceuxqui nous ont
témoigné quelque
intérêt.
— 14 —
Notre reconnaissance va surtout à nos maîtres
de
la Faculté, quinousontdonné
unenseignement précieux dont
noustirerons certainementprofit.
Nous nous souviendrons toujours de
MM. les Prof.
Picot, Lanelongue,
Piéchaud, Moussous dans les services
desquelsnousavons
passé et qui
nousont initié à la prati¬
que
médicale.
C'est dans le service de M. le Prof, agrégé
Cabannes
quenous avonscommencénospremières
études cliniques, le
pre¬mieril nous a enseigné notre ligne de
conduite et notre
devoir
auprès
dumalade. Depuis plus de trois
ans quenous
le connaissons, il n'a cessé de nous témoigner
de l'intérêt et
de nous prodiguer
des conseils. C'est lui qui
nous adonné le
sujet de notre
thèse et
nous aguidé dans
nosrecherches ;
nous sommes heureux de le remercier aujourd'hui, car
il
a été pour nousà la fois
unprofesseur et
unami.
M. le Prof. Moussous nous fait aujourd'hui l'honneur
d'ac¬
cepterla
présidence de notre thèse, qu'il reçoive ici l'expres
sion de notre plus
sincère gratitude.
M.Mancini, professeur au
Lycée de Toulon, et M. Cerruti,
commerçant
à Bordeaux,
nousont traduit des auteurs
italiens ; nous les assurons
de
nosplus vifs remerciements.
Nous n'aurionsgarde
d'oublier ici MM. Baylon, du labora¬
toire d'histoire naturelle de laFaculté, et M. le Dr
Muratet à
qui nous sommes
redevable de
nosdessins, ainsi que
MM. Alquier,
Récamier et Jean Colomb, qui ont participé à
l'élaboration de notre thèse.
CHAPITRE PREMIER
HISTORIQUE
La question des cysticerques sous-conjonctivaux a étépeu
étudiée,etbien restreintssont les travauxqui ont été publiés
sur ce sujet, cequi tient sans doute à larareté de l'affection.
Les cysticerques sous-conjonctivaux sont, en effet, loin d'être
fréquents,
et on peut s'en convaincre bien vite en jetant un coup d'œil sur les statistiques que publientv.Graefeen 1866, Fuchs en 1877 et Werneren 1889.
Sur 80.000patients que von Graefe avait examinés, il avait trouvé 80 cas de cysticerques localisés dans l'œil, ou ses
dépendances,
et ils étaient ainsirépartis
:Chambre antérieure 3
Conjonctive
5Orbite 1
Cristallin 1
Corps vitré 10
Nous voyons que dans cette communication il n'y a que 5 observations de cysticerques sous-conjonctivaux, c'est-à- dire1 sur 16.000malades.
bans
l'espace
d'une quarantaine d'années, de 1838 à 1877, Fuchs n'a pu recueillir que 30 cas; en 1889, Werner avait réuni 15 observations nouvelles. Depuis lapublication
du travail de cedernier auteur une quinzainede cas ont encore été publiés, ce qui porte le total au nombre de60 environ.— 16 —
Cette affection, rare chez l'homme, l'est moins chez les animaux, et c'estpeut-être pourcette raison qu'ils ont servi
de sujet aux
premières
observations.Le porc a le
privilège
d'être inscrit en tête de la première.Cette localisation de l'entozoaire une fois connue, de nom¬
breux cas en furent publiés. Cunier, en 1840, rapportait un
cas de cysticerque sous-conjonctival du chien : « J'ai
enlevé,
dit-il, une tumeur renfermant un cysticerque celluleux,
qui
s'était développé sous la conjonctive, dans l'angleexterne
de
l'œil d'une chienne de chasse que j'avais élevée. Aucune
cause traumatique n'avait,à ma connaissance, agi sur
l'œil;
seulement,j'avais introduit entre les paupières, cinq
mois
auparavant, du pus d'une ophtalmie purulentedont était
affecté un militaire, et uneblennorrhée oculaire en avait été la suite. L'instillation d'une solution de nitrate d'argent l'avait
réprimée
en deux jours. »En 1838, Baum publiait dans la
Gazette de la Réunion mé¬
dicalede Prusse lepremier casdecysticerque
sous-conjonc¬
tival observé chez l'homme.
En 1839, deux nouvelles observations virent le jour.
Estlin
(de Bristol), dans laGazette médicale,
deLondres,
nous apprend qu'il a examiné chez unejeune fille
unepetite
tumeur grosse comme unpois, très
intéressante,
placéesous la.conjonctive oculaire de l'œil droit. Il l'incisa, et vitsortir
un cysticerque pourvu de quatre suçoirs et
d'une double
couronne de crochets.
Hôring, deLudwisbourg, htparaîtredans 1e
Correspondenz
blatt in
Wurtemberg
une observation d'une fillette âgéede
sept ans, qui portaitun cysticerque
à l'arigle
interne del'œil
droit.
Estlin, en 1840, décrivit un deuxième cas de cysticerque sous-conjonctival, dans la Gazette médicalede Londres.
En France, on n'avait pas encore eu l'occasion d'observer
cette singulière maladie, lorsque par l'effet du
hasard plu¬
sieurs cas se présentaient à Sichel père à des
intervalles
peu éloignés.
\
— 17 -
Le22
juin
1842, ilpublie
sapremière observation
:c'est un
cysticerquequi
sest développé
sousla conjonctive de l'œil
gauche chez une
fillette âgée de sept
ans.MaisSichel ne se contente pas de citercette
observation,
cette question l'intéresse
beaucoup, il l'étudié.
En 1843, dans la Revue de
chirurgie de Malgaigne, il fit
paraître une séried'articles intitulés
: «Mémoires pratiques
sur le Cysticerque »
où il relate tous les
cas connusd'en-
tozoaires sous-conjonctivaux, en y
ajoutant deux
cas nou¬veaux personnels : le
premier observé le 27 janvier 1843
sous la conjonctive de l'œilgauche, chez
unhomme de quarante-
six ans; le deuxième, le 3 octobre
de la même année,
sousla
conjonctive de l'œil droit, chez une
fille âgée de six
anset
demi.
De1844 à 1852, la fortune le favorisant,
il
eutl'occasion
d'en observer deux autres cas, qu'il
publia, l'un dans la
Gazettedes
Hôpitaux,
le 27décembre 1845, l'autre dans
sonIconographie ophtalmologique, le 23 avril 1852. Le nombre de
ses observations personnelles
fut de cinq.
Dansle journal The Lancet,
de Londres, du 20 juillet 1848,
nous trouvons un article d'Edwin Canton, ayant
trait à
un enfantâgé de deux ans, qui porteattaché
auglobe oculaire,
près de l'angle interne, sous
la paupière inférieure,
une tumeur du volume d'un haricot, et d'où il putextraire,après
avoir incisé la
conjonctive,
uncysticerque.
Hulsh en 1861, dans la Gazette
médicale d'Orient, Rhode
en 1865 et de Kimpe en
1866 firent chacun paraître
uneobser¬
vation.
Celui qui s'occupa le
plus de la question des cysticerques
oculairesaprès Sichel, fut A. von
Grœfe, En 1866, cet auteur
publiaitune statistique de
cysticerques oculaires qu'il avait
eu l'occasion d'observer : statistique dont nous avons
parlé
plus haut,etoù nousavons vu qu'il a
trouvé 5 fois le cysti¬
cerquesous-conjonctival.
Vernon en 1867, de
Wordworth
en1872 publièrent chacun
un casdecysticerque sous la
conjonctive.
E. 2
- 18 —
Il était écrit, sans doute, que les Sichel observeraient de père en fils des cas de cette curieuse maladie.
En 1873, Sichel fils, à l'aide des caractères cliniques indi¬
qués par son
père
dansVInocographie ophtalmologique,
reconnut dans le grand angle de l'œil droit d'une jeune fille dequatorze ans, entre la cornée et la caroncule, unetumeur ovale, cachée en partie par la paupière supérieure, qui avait les caractères du kyste à cysticerque. Il opère et sou diagnostic est confirmé.
En 1873 aussi, Poncet
(du
Yal-de-Gràce) faisait paraîtreune statistique de tous les cas de cysticerques oculaires, sans tenir compte cependant de ceux qui appartenaientà
de Grœfe. Sur 54observations, il note 13 fois le cysticerque sous-conjonctival.
La même année, de Iiasneren observeun casàsaclinique.
En Italie, on ne connaissait pas encore cette
maladie
lorsque, en 1874, Lainatifit
paraître dans les journauxde
médecine italiens un cas d'entozoaire sous-conjonctival.
En 1875, Talko publie dans les Klinische
Monatsblâtter,
t. XIII, une observation sur cette maladie.
En 1876, Ch. Ripp cite, dans le
Report oftlie fifth internai,
ophi.Congres,
un casde cysticerque sous-conjonctival qu'il
vient d'observer.
En 1879, Fieuzal, médecin en chef de l'Hospice des Quinze- Vingts. lit au
Congrès de l'Association
françaisepourl'avan¬
cement des sciences(séance du 7 octobre) un travail sur
le
sujet qui nousintéresse, et citedeux
observations.En 1883, dans une publication du docteur Lehender, on
trouve relatés troiscas de parasites sous la conjonctivepro¬
venant de la clinique du docteur Jany.
La littérature ophtalmologique italienne, qui d'abord
avait
été
privée d'observations
de cette maladie, s'enrichità cette
époque de quelques cas nouveaux.En 1884, Manfredi publie un article, dans les Atti di
med.
Torino,ayant trait au cysticerque sous-conjonctival, et
dans
lequel il fait l'analyse anatomique du kyste.- 19 -
En1885,Duci, clans la Gazetta di
Osped.,
de Milan, nousrap¬porte «qu'il aobservé chez unenfant, àl'angleinterne de l'œil gauche, une petite tumeur du volume environ d'un grain de blé, tumeur qui grossissait chaque jour. Elle est située
sous la conjonctive, qui est mobile sur elle...» Il opère et s'aperçoit que la tumeurcontenait un cysticerque.
En 1886, dans le Bulletin
clinique de VHospice des
Quinze-Vingts,
Fieuzal faitparaître
un autre cas de cysticerque sous-conjonctival.En 1887, deVincentiis, dans les Annali di ottal., de Pavie,
nousmontre un travail, avec observation clinique et ana- tomique sur 9 cysticerques oculaires, dont 4 sous-conjonc- tivaux.
Dans la même année, Tornatola décrit, dans le Giorn. in- lernaz. d. se. med., de Naples, deux cas de cysticerques placés sous la conjonctive.
En 1889, deVincentiis fait une autre communication sur
deuxnouveaux cas observés à la clinique de Naples; Denti publie,dans le Boll. di
poliambul.,
de Milan, une statistique de 9cysticerques
oculaires et dont 2 sous-conjonctivaux;Werner, dans le Tr
oplit. Societ. Un. of Kingdom,
fait paraître une observation d'entozoaire sous la conjonctive, et fait un examen microscopique de l'enveloppe de la tumeur.En 1890, Stattler, Blessig et Gunn contribuent chacun pour un cas à augmenter le nombre des observations.
En 1895, Werner publie son second cas.
En 1896, le docteur Rôhmer opérait à Nancy un kyste para¬
sitaire sous-conjonct iva1.
En 1897, Prassoud dans le Wiesfnik
opht.,
de Kiew, Vas etGallemaerts
donnent lejour à une nouvelle publication sur cette affection de l'œil.En 1899, Vercelli, dans les Clin, med., de Pise, nousciteun nouveau cas.
Anastosi,
en 1900, dans la Clinica oculist., septembre, et 8arti, en 1901, dans leRaccogli/ore med. Forli, font paraître
chacun une observation.- 20 -
Enfin cette année, M. le D1'
Gabannes, professeur agrégé à
la Faculté de médecine de
Bordeaux,
a eula bonne fortune
d'observer un cas de
cysticerque sous-conjonctival. Il a publié
uneobservation très complète dans la Gazette hebdo¬
madaire des Sciences
médicales de Bordeaux, 1er juin 1902,
etcette observation est suivie
de quelques réflexions très
nouvelles sur ce sujet.
L'observation est reproduite en
entierà la fin de notre modeste
travail.
CHAPITRE II
ÉTIOLOGIE
La présence clu
cysticerque
sousla conjonctive
ne cons¬titue qu'une ladrerie oculaire,
reconnaissant les mêmes
cau¬ses, évoluant de la même façon que
la ladrerie généralisée,
et n'en différant que par
la production de désordres particu¬
liersen rapportavec
la fonction de l'organe envahi.
11 est actuellement admis sans conteste que le
cysticer¬
que sous-conjonctival, et
d'ailleurs tous les cysticerques de
l'homme quels que soient
leur siège
ouleur nombre, appar¬
tiennent tous à une seule et même
espèce
etreprésentent
l'état larvaire du taenia solium.
La plupart des
helmintologistes basent leur opinion sur
les données suivantes :
1°
L'analogie
de forme etde constitution de la tête du taenia
solium avec celle du cysticerque
de l'homme.
2°
L'analogie
queprésentent dans leur forme et dans leur
organisation les cysticerques
ladriques de l'homme et du
porc.
3°Une série d'expériences
qui montrent
queles individus
auxquelson fait prendre
des cysticerques de la cellulosité
contractentle taenia, etqu'on donne
la ladrerie aux porcs en
leur faisant avaler des œufs du même ver.
4°La coexistence plusieurs
fois observée du ver solitaire
etducysticercus cellulosœ.
La pénétration d'un œuf de taenia dans
le tube digestif de
— 22 —
l'homme est donc la raison indiscutable de la production du cysticerque.
Mais
ne peut-on pasaussi invoquer
pour cause l'existence préalable d'un taenia dans l'intestin ? C'est ce que nous discuterons ensecond lieuaprès
avoir montréle
modede contamination de l'homme.
Le plus fréquent, c'est l'ingestion d'une eau contenant en suspension des œufs de taenia, de végétaux ayant
été
en contact avec du fumier ou avec des matières excrémenti- tiellesprovenant d'individus porteursdu parasite.
La malpropreté estévidemment une cause
prédisposante
; les malades dont nous rapportons les observations appar¬tiennent à peu près tous
à
la classe pauvre. Par lesmétiers
qu'ils sontobligés de faire ils ont uneplus
grandechance de
contamination.
C'est chez les marchands de bestiaux, les éleveurs, les domestiques des fermes que nous trouvons le plus
grand
nombre d'exemples de cette affection. Les bouchers y
sont
encore très prédisposés à cause de leur manipulation
quoti¬
dienne de viande de porc.
La nourriture est aussi très importante à considérer ;
il
est facile de remarquer en effet que l'Allemagne
fournit à
elle seule la majorité des observations de cysticerquesocu¬
laires. Or, l'Allemagne est certainement le pays d'Europe
où
l'on consommele plus de viande de porc.
L'usage de la viande crue ou presque crue, très
répandu
dans ce pays, a sans douteaussi son importance.
L'Allema¬
gne du Nord, surtout, fournit un grand nombre de cas
de
parasites; Berlin, la Saxe, la Thuringe jouissaientautrefois
du triste privilège de fournir la presque totalité des
ento-
zoaires de l'œil, tandis que dans le Wurtemberg, en l'espace
de vingt ans, on neconstate que G cas de cysticerques ocu¬
laires sur200.000 malades examinés.
Du jour où à Berlin un service d'inspection des
viandes
fonctionna régulièrement dans les abattoirs, on vit le-noin- bre d'entozoaires de l'œil baisser dans des proportions con¬
sidérables. C'est ainsi que la proportion de
cysticerques
— 23 —
oculaires qui étaitde 1 pour
400
en1877,
1 pour450
en1879,
tomba, de1883 à 1885, à une moyenne de1
pour800.
De 1886 à 1889,sur 30.000 malades, 1 s-eul cysticerque fut
observé.
Si l'Allemagnenous offre une proportion
notable de ladre¬
riesoculaires, les autres pays n'en sont pas
indemnes
:la
France. l'Angleterre, l'Italie, l'Espagne nous en
apportent de
temps à autrequelques observations.Il est un fait digne de remarque et qui n'a pas
échappé à
l'observation du professeur Hirschberg;
le cysticerque
sem¬ble avoir pour chaque pays un
territoire d'élection
: «Il est
difficile d'expliquer, dit
Hirschberg, cette préférence du
cys¬ticerque, enFrance pour la
conjonctive,
enAngleterre
pour la chambrepostérieure, dans leNord de l'Allemagne
pour lesparties profondes del'œil. »Hirschberg est d'accord avec un recensement, que
fit
Sichel, des cysticerquessous-conjonctivaux. En prenant
une moyenne, et en prenant 7 cas : 2appartenaient à l'Allema¬
gne,2 à l'Angleterre, 3 à la France.
Nous avons montré dans les quelques
lignes qui précé¬
dent les différents modes de contamination et nous avons fait quelques remarques
générales
surla répartition des
cysticerques oculaires dansdifférents pays.Nous nous sommesproposé, en
tête de
cechapitre, d'exa¬
miner si l'auto-infection est
possible, si l'homme peut deve¬
nir ladre par cela seul qu'il est porteur
d'un tœnia.
Nous verrons, lorsque nous traiterons
de la pathogénie de
cetteaffection, que pour que
l'œuf du tœnia
passe par ces différentes phases d'évolution,il
estindispensable qu'il
subisse l'action du liquide
stomacal;
nousverronsquec'est
par la muqueuse stomacale que
l'embryon
-commence sespérégrinations.
Il faut donc, pour quel'auto-infection soit
possible, queles œufs du tœnia passentde l'intestin dans
l'estomac.La chose est-elle possible? On
peut facilement
supposer due tantà cause des mouvements de reptationdont
cetœnia
— 24 —
est capable, que par
suite des contractions antipéristaltiques
de l'intestin unou plusieurs anneaux
puissent
passerdans
l'estomac.
Desvomissements pénibles, des
quintes de toux
ne pour¬raient-ils pas aussi
être capables d'amener dans la poche
stomacale un anneau de taenia arrivé à maturité.
Nous avonsjustement trouvé
des exemples.
J. Rodriguezparle d'une
femme qui rendit
parla bouche,
après une quintede toux,
un verdont la description
se rap¬porteau
taenia.
Shenk donne l'observation qui lui est personnelle «
d'une
femme qui
vomit,
augrand péril de suffoquer,
untaenia
ras¬semblé en boule et long de trois aunes. »
Nous avons donc desexemples de vers
solitaires rendus
parla
bouche, et il est très facile d'admettre qu'un
anneau puisses'arrêter dans l'estomac. Supposons
quecet anneau
soit arrivé à maturité, nous aurons dans l'estomac
des œufs
de taenia aussi bien que
s'ils provenaient de l'ingestion d'une
eau impureou
d'un légume contaminé.
Nous admettons donc que ce mode
de contamination est possible.
Nous avons tenu à parler de cette cause
d'infection,
car dans le sujetque noustraitons
oncite plusieurs observa¬
tions de coïncidence de cysticerque
sous-conjonctival et du
taenia solium chez le même individu.
Nous avons même à la fin de notre petit travail une
obser¬
vation de Gallemaerts(de
Bruxelles) où il
y achez
unmême
malade,enmême temps
qu'un entozoaire
sousla conjonctive,
un taenia dans l'intestin : « ... Les parents,interrogés sur
le
point de savoir
si leur enfant n'a
pasle
versolitaire, répon¬
dent négativement;
je fais administrer néanmoins
unpeu
d'huile dericin, etje recommande
de surveiller les selles;
le lendemain on me présente
deux proglottis de taenia solium
recueillis dans les selles de l'enfant. Je prescris de
l'extrait
de fougère mâle et,quelques jours
après,
on meprésente le
ver solitaire que l'enfant avait
évacué.
»— 25 —
Pour terminercette question
de l'étiologie du cysticerque sous-conjonctival,
nous nousposerons la question suivante :
Quel est
l'âge qui prédispose le plus à la ladrerie de la con¬
jonctive
?
Pour résoudre cette question, nous ne pouvons
faire
mieux que de nous
rapporter
auxobservations que nous
avons recueillies.
Voici ceque nous
constatons
:dans l'observation de Baurn,
le maladea 23 ans; dans
celle de Sichel (1843), le malade a
7ans; dans celle d'Edwin
Canton, 2
ans;dans celle d'Estlin,
6ans, et dans les autres
de Rhode, Jany, de Kimpe, Siebel,
Talko, Fuclis,
Fieuzal, Duci, Meyer, Sgrosso, Rhômer, Galle-
maerts, Sarti et Cabannes,
les malades ont 23 ans, 3 ans,
41 ans, 14 ans, 13 ans, 6 ans,
4
ans,3
ans,8 ans, 10 ans, 40
ans,9ans, 7ans, 7 ans,
42
ans.11 résulte de cette
énuméràtion d'âges
queles
personneslesplus prédisposées au
cysticerque sous-conjonctival sont
les enfants et les adolescents, mais que
les adultes n'en sont
cependant pas exempts.
Le
sexe neparaît avoir aucune
influencesur la
production de la maladie.
If^
, , J, «. !^
lr".'-
CHAPITRE III
PATHOGÉNIE
Dans les
premières observations
paruesde cysticerques
sous-conjonclivaux, dans celles de Baum 1838, d'Estlin 1838,d'Hôring
183'.), de Gunier 1840,quelques
lignes sont consa¬crées à
l'étiologie, à
lasymptomatologie,
ouà l'anatomie pathologique
de cettemaladie,
mais iln'est
pasdit
un mot de la pathogénie.C'estqu'à cette
époque
onexpliquait beaucoup de faits
par la genèse spontanée.Lnmark écrivait qu'il existe
chez les animaux
etchez
l'homme desvers qui s'yforment,
ynaissent,
yvivent
sans qu'on puisse les rencontrer ailleurs, et quià
ses yeux sontdus à des générations
spontanées.
Pour cesauteurs, qui
publièrent les premiers
casde cysti-
cerque
sous-conjonctival,
leparasite
se trouvait sousla
conjonctive parce qu'il était nélà, aussi bien qu'il aurait
pu naître dans le corpsvitré, la rétine, lachambre antérieure
de l'œil, ou ailleurs.
Mais, en 1845, Dujardin fil remarquer
l'analogie frappante
qui existe entre la tète des vers kystiques et celle des vers cestoïdes: « On pourrait supposer,dit-il, quecesontdes œufs
de taenia véritables,qui, portéspar la
circulation dans le tissu
mêmedes mammifères, n'ont pusuivre les
phases ordinaires
de leur existence et ont péri à l'état
d'embryon hyper¬
trophié.
»- 28 -
M
Puis, peu à peu
les expériences de Ivuclienmeister.de
Humbert (de
Genève), de Leuckart, de Van Beneden ont éta¬
bli la filiation du
cysticercus cellulosae et du taenia solium,
et les
possibilités de reproduire l'un
parl'autre. Le cysticer¬
cus cellulosae est une phase
d'évolution
dutaenia solium.
Dans notre chapitre intitulé Etiologie nous avons
montré
par quels
différents modes de contamination l'homme peut
s'infester d'œufs de taenia ; voyons par quelles
différentes
voies les embryons nés de ces
œufs peuvent venir
seloca¬
liser sous la conjonctive ?
L'itinéraire enapparence le
plus simple
estla voie centri¬
pète
;la pénétration directe du parasite à travers la conjonc¬
tive paraît
être le mode naturel d'introduction.
Mais
peut-être
quel'œuf du taenia avant de
passer parses
différentes phases
d'évolution
estobligé de subir certaines
modifications que la voie
directe
nepeut lui
procurer,et
alors il
prend
unchemin plus long
quenousappellerons voie
indirecte ou intestinale. Nous allons étudier quelle est
la
voie qu'il suit, et
s'il
ne peut pasprendre les deux ?
Dans la théorie de la pénétration directe,on peut supposer
que la contamination
s'est faite soit
parsimple contagion,
soit qu'il s'est
produit
unedéchirure de la conjonctive, soit
encore qu'il yaiteu
contusion de cette
muqueuse.a) Contagion. — Les
individus atteints de cysticerques
sous-conjonctivaux ontparfois été exposés
aucontact des
malades ayant le taenia, etpar suite
exposés à
sesouiller des
germesdu parasite. Ilirscliberg
cite
un casdans lequel un
cysticerque de lapaupière fut observé chez
unpetit enfant
dont le
père
avait untaenia.
Le transport des germes peut
s'effectuer dans des condi¬
tions plus
favorables
encoreà l'œil de l'individu porteur du
taenia. Nombreux sont les cas cités de personnes
ayant le
taenia etdontquelquesanneaux,
à la suite d'un effort, avaient
glissé dans leurs
pantalons
;le premier mouvement, le plus
instinctif, estde jeter au dehors ces anneaux avec
les mains.
On peut rencontrer des cas
où
cesfaits
sesont produits chez
— 29 —
des personnes
malpropres, qui,
unmoment après, sans s'être
lavées les mains, ont touché leurs yeux
et
yont déposé
ainsi desœufs du
parasite.
Différents modes de contagion et de
transport du
germedans l'œil sontencore possibles
chez les
personnes queleur
métier met en rapport
chaque jour
avecdes objets conta¬
minés(garçons
de ferme, éleveurs, bouchers, etcb
b) Déchirure de laconjonctive. —
On possède quelques
observations de
parasites développés
endes points du corps
où lestéguments
présentent
unesolution de continuité acci¬
dentelle. Pourle sujet qui nous concerne, nous
pourrions
nommer une observation de Siebel où le
cysticerque
se montra dans un œil qui troismois aupparavant avait pré¬
senté une ulcération de la cornée d'origine
blennorragique
;et paranalogie, une
de Cunier dons laquelle nous apprenons
qu'une hydatide
s'était développée
sous uneconjonctive à
la suite d'une lésion de cette muqueuse
produite
parla patte
d'un papillon.
c) Contusion destéguments. —
Les violences extérieures
produisent bien
rarement des solutions de continuité capa¬
bles d'ouvrirune porte
d'entrée
auparasite. On possède des
observations plus
nombreuses dans lesquelles la conjonctive
a été plus ou moins
endommagée à la suite d'un trauma¬
tisme au niveau même où l'on constate ensuite
la présence
descysticerques. Dansun cas
de cysticerque observé par le
professeur Rôhmer (de
Nancy) la tumeur avait débuté peu de
tempsaprès un coup
de coude
reçu surl'œil.
Qu'ily ait contagion,
qu'il
yait déchirure de la conjonctive
ou contusion de cette muqueuse, nous venons
de voir qu'il
existe des cas de développementde
cysticerque à la suite de
la production de l'un deces trois
phénomènes.
Mais en éloignant toute
idée de simple coïncidence, il faut
supposerencore qu'un
œuf de taenia
aété déposé sur la con¬
jonctive etqu'il a
subi les modifications qui sont nécessaires
à son développement.
On sait que l'œuf
de taenia
estentouré d'une coque très
— 30 —
résistante,
qui permet à l'embryon de résisterjusqu'au
momentoù des conditions indispensables à son évolution se trouvent réunies. Il est nécessaire pour cela qu'il soit intro¬
duit dans un milieu où sa coque puisse être
détruite,
et que, une fois misen liberté,l'embryon
trouve un terrain favora¬ble à son
développement.
On sait que le suc
gastrique
est capable-de dissoudrel'enveloppe
de cet œuf, maisl'organisme
ne possède-t-il que la sécrétion gastrique capabledejouer ce rôle ? La sécrétionlacrymale
ne pourrait-elle pas dans certaines circonstances, et à la suite d'un séjour prolongé dans un cul-de-soc con-jonctival, détruire la coque de
l'œuf
.et mettrel'embryon
enétat do traverser la muqueuse et de se
développer
dans lestissus environnants ?Hanus, dans une thèse parue en 1800,
nous dit : « Les larmes au point de vue
chimique
etphysio¬
logique
n'ont aucune ressemblanceavec le suc gastrique, mais elles peuventacquérir
sousl'inlluencedu traumatisme,ou dp
l'inflammation
despropriétés spéciales, capables de
dissoudre la coque
de l'œuf
du taenia ». Si les larmes nedis¬solvent pas sa coque,nous pouvonsdu moinssupposer
qu'un
traumatisme, si faible qu'il soit, sera capable dobroyer
oud'endommager
la coque suffisamment pour quel'embryon
puisse se livrer à sespérégrinations.
Cette théorie de la pénétration directe, si elle n'est pas prouvée, est du moins très engageante, et elle entraine facilement avec elle bon nombre d'adhérents.
La seconde théorie que nous ayons à examiner osl la théo¬
rie de la
pénétration
indirecte ou de In pénétrationintesti¬
nale.
Le chemin que les
cysticerques doivent
parcourir pour arrivernuvoisinage de, l'œil, après
avoir traversé la uni queuse digestive, est bienconipliqué;cependuntil
eslcertain qu'ils
peuvent effectuer ce longtrajet.
Lxa minousquelssont
les faits positifs
qui établissent le
passagedescyslicerques
de l'intestin vers la surface, vers les organes les
plus exter¬
nes, et par déduction vers l'œil.
— 31 -
Les auteurs qui ont
donné
à manger des anneauxde
taenia solium au cochon de lait, et
particulièrement
Leuc- kart, ont trouvésouvent descysticerques dans les muscles
superficiels, en assez grande abondance pourdevenir visi¬
bles à une simple incision de la peau.
D'autresauteurs ont suivi la trace de l'embryon hexaean-
the
depuis
sa sortie de la muqueusestomacale jusque dans
ses diverses pérégrinations. Des
expériences
ontété faites
pour le taenia serrata et son
cysticerque, le cysticercus pisi-
formis. Quelques
jours après l'ingestion des œufs,
on trouveà la surface et dans la profondeur du foie do petites
nodo¬
sités et de fines traînées distribuées dans tous les sens ; les premières
paraissent
êtredes kystes formés autour des embryons
morts ; quantauxtraînées, elles représentent des
galeries queLaulaniéa
reconnues pourêtre des vaisseaux
veineux
sus-hépatiques.
Dans cesgaleries
ontrouve de
petits organismes dérivantdel'embryon bexacantlie, mais
ne possédant déjà
plus
lessix
crochets.Pour le cysticercus
cellulosne,
onn'a
pusuivre
sestraces
aussi loin, maison a vu
qu'en traversantla paroi intestinale
il détermine
parfois
unevive inflammation, surtout lorsqu'il
est accompagné par un
grand nombre d'autres.
Gerlach a constatéque
l'ingestion d'un
tropgrand nombre
d'œui'sde taenia peutdéterminer chez le
porc uneirritation
intestinale, qui se termine par la mort etdont l'autopsie
constate des tracesévidentes.
Quelques
observations montrent encore la marche centri¬fugeévidente des
cysticerques.
Jany
et Solzmann ont pu suivre pasà
pas,chez
certainsmalades,
la marche et la croissance du parasite dansl'œil.
Hanse a vu une
perforation
aumilieu d'une portion décol¬
léede la rétine de l'œil droit : un
cysticerque passait à
travers l'orifice sa tête et son cou animés de vifs mouve¬ments; au bout de
quelques jours, l'entozoaire avait pénétré
dans le corps
vitré.
langer a vuégalement une rétine
perforée d'une
ouverture— 32 -
circulaire parlaquelle un cysticerque
passait
satête avant
de pénétrer
dans le
corpsvitré.
Germelmannvitdans le corps vitré un
cysticerque dont il
avait constaté trois ou quatre
semaines auparavant la pré¬
sence sous la rétine.
Nous avons donc de nombreux t'aits positifs
de
lamarche
centrifugedu cysticerque etde nombreux exemples
ou satrace a pu être suivie. Voyons
quelle est la voie qu'il prend
pour arriver
jusqu'à l'œil
:C'est évidemment lesang qui sert de
véhicule; c'est
parles
vaisseaux
sanguins
que sefait le transport. Cette théorie de
la propagation par
le courant sanguin est basée
surles
résultats d'une série d'expériences
dont les principales et les
plusintéressantes
ontété faites
parM. le Prof. Frenk (de
Brunswick).
Nousrésumons
sesexpériences
enquelques
lignes :
Ayant
délayé dans de l'eau tiède
unpaquet d'acéphalocys-
tes retirés du poumon d'un
homme, il injecta
celiquide
dans la veine crurale d'un chat qu'il
sacrifia seize semaines
plustard.
Lechat avait perdu
sonappétit, et
sagaieté et avait
présenté quelques symptômes cholériformes; à l'autopsie,
on trouva, surla moelle allongée et
l'hémisphère gauche du
cervelet, une tumeur formée de vésicules
remplies de liquide
et renfermant des échinocoques.
Dans une deuxième expérience, il
fit
uneinjection d'un
chapelet
de vésicules
grosses comme ungrain de sable dans
la veine crurale d'un jeune chevreau.
La plaie
secicatrisa
sans accidents. Six semaines après, on
sacrifia l'animal, et
on trouva une tumeur dans l'aine droite,
contenant des
cysticerques qu'on
employa à d'autres inoculations.
Ces expériences
peuvent
nousfaire
penserque l'envahis¬
sement de l'organismepar
le cysticerque ladrique, dans les
cas d'injection de
matières parasitaires dans les veines, se
fait parle
torrent circulatoire.
Cequi revientau
même
queles injections dans les veines,
c'est l'ingestion
stomacale. L'œuf du taenia, une fois arrivé
dansl'estomac,se
débarrasse de
sa coquequi est digérée par
— 33 -
lesuc gastrique; l'embryon traverse
la
muqueusestoma¬
cale et tombedans les vaisseaux portes qui
remmènent
vers le foie. Il traverse le réseau capillairede
cet organe et en sort parlaveinesus-liépatique qui le conduit dans la veine
caveinférieure. Il arrive ainsi au cœur droit; lancé à tra¬
vers un nouveau réseau capillaire,
celui des
poumons,il
revient aucœur par
l'artère pulmonaire. Grèce à la contrac¬
tionventriculaire, il pénètre dans
l'aorte, s'engage dans la
carotide primitive, puis dans
la carotide interne, et arrive
enfin dans l'artère ophtalmique
qui le distribuera à l'œil.
C'est probablement par
les
rameauxconjonctiveux des
artèresciliaires antérieures émanées des musculaires que
l'embryon
estamené
sousla conjonctive.
On a dit quele cysticerque se
loge de préférence du côté
gauche, c'est parce que
l'œuf du tœnia pénètre plus facile¬
ment, comme les embolies, dans la
carotide primitive
gau¬che quinaîtdirectement de la crosse
de l'aorte. La statistique
démontreen effet quele cysticerque
intra-oculaire est beau¬
coup plus fréquentà
gauche qu'à droite, mais il n'en est
pas de même pour lecysticerquesous-conjonctival qui, dans les
troisquarts des cas, est à droite.
Nous pensons que le
hasard seul préside à la localisation
du cysticerquesous la
conjonctive.
Des deux théories que nous venons
d'examiner, quelle est
celle qu'il faut admettre ?Faut-il en rejeter une ou
les admet¬
tre toutes les deux. Nous penchons
volontiers
verscette
dernière hypothèse, en disant
cependant
quela théorie de
lapénétration directe s'appuie beaucoup
plus
surdes raison¬
nements que sur des faits, tandis que
la théorie de la péné¬
tration par le tube digestif est
directement démontrée
par des faits.Nous ne saurions terminer cette question
de pathogénie
sansparler du traumatisme et de son rôle
dans la localisa-
lion du cysticerque sous
la conjonctive.
Dans un grand nombre
d'observations, les traumatismes
de l'œil ont été relevés assez souvent dans les
antécédents
E. 3
des individus atteints de la maladie qui nous occupe. «
Un ophtalmologiste d'un savoir et d'une expérience étendus,
en examinant attentivement, presque au
moment d'une
lésion traumatique
fort douloureuse, la conjonctive d'un œil
sain
jusqu'alors,
ytrouve
surla jonction de la sclérotique
et delàcornée un bourrelet de
conjonctive chémosée, d'en¬
viron 1 millimètre de diamètre, et
quelques minutes après
un fragment
de la patte d'un spliynx populi que l'opldal-
rnostat,
appliqué
pourrendre possible l'examen de l'œil,
avait sansdoute détaché de ce bourrelet
et chassé dans le
plipalpébrok)Culaire. Le papillon lui-même est retrouvé; il
lui manque une
aile et deux pattes.
»
L'ophtalmie traumatique
sedissipe
aubout de quelques
jours, par
l'emploi de fomentations glacées, etc. L'ecchy¬
mose qui entourait
le bourrelet s'efface. Au sommet de ce
bourrelet existe une légère
ulcération,
sansdoute uné
érosion produite par
le
corpsétranger. Elle est cautérisée
avec un pinceau
chargé de nitrate d'argent et guérit; cinq à
six mois après
l'introduction du
corpsétranger, le malade
ayant
contracté à Naples
uneconjonctivite catarrhale qui
s'est dissipée au
bout de huit jours, la tumeur avait tout
à coupaugmenté
de volume
etpris l'aspect d'une vésicule.
Ponctionnée avec une aiguille à cataracte,
elle s'aplatit, mais
resteentourée d'unevascularisation de la
conjonctive. Trois
mois plus tard, elle
prend
unaccroissement considérable,
sans cesser d'occuper
toujours le même endroit
surla jonc¬
tion des deux membranes oculaires, auquel avait
été primi¬
tivement limitéel'action du corps étranger. En
trente-jours,
cette vésicule était devenue grosse comme un
pois; elle
avaitempiété sur la cornée
et gênait la vision
».Ce passage
est tiré d'une observation de Cunier.
Nous pourrions
citer
encoreles quelques lignes provenant
d'uncas
publié
parSiebel
:«Aucune
causemécanique n'avait
agi sur l'œil, mais cet organe
avait été, trois mois aupara¬
vant le siège d'une
ophtalmie blennorragique, pendant
laquelle une