ENTRE SOUS LE N' fi 0. 309
FACULTÉ
DEMÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 1900-1901 N" 69
CONTRIBUTION
L'ÉTUDE DE L'EXOSPLÉN
THÈSE
POUR LE DOCTORAT DE MED
Présentée et soutenuepubliquement le 24 Juillet 1901
Jacques-Léon-Marie-Guillaume DUBOURG
Néà Linxe [Landes), le 15Septembre 1876
i MM. BOURSIER, professeur. Président.
Examinateurs de la Thèse : -
duBREUiLH!Sa^égé.".'.'j
Juges.VILLA.R, agrégé J
Le Candidat répondraaux questions quilui serontfaitessur
les diverses
parties del'Enseignementmédical.
—-®—
BORDEAUX
IMPRIMERIE A. SAUGNAC
3, Place d'Aquitaine & 27, Rue de Candale
1901
FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
M.deNABIAS Doyen. | M. PITRES.
PROFESSEURS
Doyenhonoraire.
MM. MICE DUPUY MOUSSOUS.
Professeurs honoraires.
Cliniqueinterne.
Pathologieetthérapeutique
Médecine opératoire Clinique d'accouchemen Anatomiepathologique.
Anatomiegénéraleet histo¬
logie Physiologie
MM. MM.
PICOT. Médecinelégale MORACHE.
PITRES. Physique BERGONIÉ.
DEMONS. Chimie BLAREZ.
LANELONGUE. Histoire naturelle G'UILLAUD.
Pharmacie FIGUIER.
VERGE L Y. Matière médicale deNABIAS.
ARNOZAN. Médecineexpérimentale.... FERRÉ.
MASSE. Clinique ophtalmologique.. BADAL.
LEFOUR. Clinique dus maladies chi¬
COYNE. rurgicales des enfants.... PIÉCHAUD.
CANNIEU. Clinique gynécologique. BOURSIER.
Cliniquemédicale des mala¬
VIAULT. dies des enfants A.MOUSSOUS
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sectionde médecine (Pathologie interne et Médecine légale)
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COURS CO MPUÉME NTAIRES
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LeSecrétairede laFaculté :LEMAIRE.
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DUPOUY.
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PRINCETEAU.
LAGRANGE.
CAltLES.
Par délibération du 5 août 1879, la Faculté aarrêté que les opinionsémises
dans
les Thèses qui lui sont présentées doivent être considérées comme propres
à leurs
auteurs elqu'ellen'entend leurdonnerniapprobation ni
improbation.
A MES PARENTS
A MES AMIS
,1 mon Président de Thèse
Monsieur le Professeur BOUPiSIER
professeur de gynécologie
la faculté de médecine de bordeaux
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_____
INTRODUCTION
Nous allons essayer d'étudier dans ee travail un mode de traitement applicable à certaines hypertrophies chroniques
de In rate : c'est
l'exospléuoplexie.
Mais avant tout il est bon de s'entendre sur le sens à attribuer à l'expression de splénomégalie chronique. Beau¬
coup de causes peuvent amener une augmentation notable
du volume de la rate. Laissant de côté les abcès, les kystes
et les
hypertrophies
spléniques qui accompagnent lesmaladies du coeur ou du l'oie, nous ne voulons parler que des splénomégalîes simples cl
d'origine
malarienne, ainsique des tumeurs de la rate. Nous rappelons toutefois qu'il
est difficile, dans certains cas presque impossible, de
différencier cliniquemenl les tumeurs de la rate des hyper¬
trophies chroniques do eel organe. Le terme de splénomé¬
gaIle chronique, nous semble, par ce fait même, le plus
commode pour désigner d'une façon à la fois juste et générale toutes ces affections.
Cela dit, nous ne voulons pas aller plus loin sans adresser
nos remerciements à tous ceux qui dans le cours de nos études médicales nous ont prodigué leurs encouragements
et leurs soins.
M. le Professeur Pitres, nous a témoigné depuis le début
de nos études une bienveillance qui ne s'est jamais démen¬
tie ; nous sommes heureux de lui dire combien nous en avons été touché, et quel souvenir reconnaissant nous lui
en conserverons
toujours.
— 18 —
M. le Professeur Bergonié, M. le Professeur Lanelongue,
M. le Professeur Piéchaud, M. le D'' Moure, M. le Professeur Lefour ont tour à tour été nos chefs de service : nous savons tout ce que nous devons à leur enseignement, et
et nous les prions de croire à notre entière gratitude.
M. le Professeur agrégé Yillar. a bien voulu nous donner
à traiter notre sujet de thèse. Nous avons fait de notre mieux pour profiter des conseils si autorisés qu'il nous a prodigués durant ce travail ; tous les efforts dont nous sommes capable nous les avons tentés pour tâcher de le satisfaire; tout en le remerciant infiniment, de nous avoir donné la voie à suivre avec sa compétence habituelle, nous le prions de croire à notre reconnaissance entière.
M. le Professeur Boursier, nous fait le grand honneur d'accepter la Présidence de notre thèse; lors de notre deuxième année de médecine nous fûmes son élève; à la même époque, nous fûmes malade, il nous prodigua ses soins. Comment exprimer notre gratitude ? Il peut se trouver des termes pour rendre les sentiments de recon¬
naissance (pie nous avons pour lui, aucun n'égalera cette
recoi111aissance cilc-mème.
Voici la marche que nous nous sommes proposé de suivre
dans le cours de notre travail : après avoir indiqué les
divers traitements employés dans les splénomégalies, nous
nous efforcerons de faire le plus complètement possible
l'histoire de la question : nous relaterons ensuite les obser¬
vations que nous avons pu recueillir; enfin nous décrirons
la. technique opératoire de
l'exosplénoplexie,
ses résultats etses indications.
CHAPITRE PREMIER.
Divers modes de traitement de la
Splénomégalie
chronique.En présence <lTme
splénoiïiégalie chronique,
le chirur¬gien peut s'adressersuivant les cas à l'une des interventions suivantes :
1° Splénectomie. — 2° Ligature des vaisseaux
spléniques.
—3° Laparotomie exploratrice. — i°
Exosplénopexie.
1" SPLÉNECTOMIE.
La Splénectomie ou ablation totale de la rate, n'a pas toujours donné des résultats très encourageants. Nous dirons même que c'est une opération très meurtrière dans
les cas de leucémie.
Elle est moins grave dans la splénomégalie non leucémi¬
que mais il est des cas où, même en l'ahsence de leucémie,
la splénectomie u'est pas applicable.
Au point de vue opératoire, il y a lieu d'établir les dis¬
tinctions suivantes :
a) Splénectomie dans les splénomégalies
leucémiques.
h)
Splénectomie dans les splénomégalies nonleucémiques;
et ces dernières nous pouvons les grouper sous deux formes: 1°
Splénomégalies paludiques;
2°Splénomégalies
non
leucémiques
et non paludiques.A)
Splénectomie dam
lasplénoméc/cdie leucémique.
—*C'est, nous avons dit, une opération très meurtrière. En effet, les premières observations de
splénectomie
pourhymphadénie splénique,
furent publiées
parTh. Bryant (1866-1867). Il
nousfaut attendre près de 11
ans,jusqu'en
1881, pour enregistrer un succès : ce
fut Franzolini qui
l'obtint. Dix ans plus tard seulement Burckhardt peut publier un cas de guérison
chez
unmalade
opéré parlui.
Mais il faut dire que le malade de Burckhardt, quoique
atteint de leucémie ne l'était pas de leucémie avancée.
Pour celui de Franzolini, d'aucuns ni virent qu'une hyper¬
trophie simple de la rate; la question
de leucémie
a étéici
très discutée.
Si nous consultons les statistiques: de
Gilson
(en1885),
nous trouvons : 19 cas de splénectomie, 1 guérison (Franzolini).
Wright, 22 cas : 22 morts.
Spanton, 25 cas: 1 seule guérison.
Yanverts, 29 cas : 3 guérisons; soit 89,7 0 0
de mortalité.
Et encore, le malade de Burckhardt compté parmi les gué¬
risons, mourut-il huit mois après; après avoir vu son état
s'améliorer de très légère façon, il succomba aux
progrès
incessants de la leucocytose. Celui de
Franzolini guérit défi¬
nitivement. Mais le troisième, qui appartenait à Hartmann,
mourut trois ansaprès l'intervention; on constata
chez lui
un amaigrissement considérable et des
hémorragies gingi¬
vales. La leucocytose ne disparut
jamais complètement.
Dans les 26 cas suivis de mort, l'issue fatale a été due le plus souvent à des hémorragies. Elles furent causées, soit
par la libération des adhérences, soit par la rupture des
vaisseaux du pédicule, soit par la
déchirure de la
rate.Même elles siégèrent au niveau des
lèvres de la plaie
; ce fut même une hémorragie semblable qui entraînala
mortdu malade opéré par M. le Dr Yillar en
1894,
ainsi que nous le dirons plus loin dans l'observation relatée par nous.Dans les leucémies indéniables et avancées, la mortalité
— 21 -
atteint donc pouvons nous dire le taux de 100 pour 100. En pareil cas, il faut rejeter résolument la splénectomie.
B) Splénectomie (/ans la
splénomégalie
nonleucémique
:a) Dans la
splénomégalie paludique.
— Ici heureusementles succès sont
beaucoup
plus nombreux. Dans une statis¬tique de Vanverts, sur 70 cas de splénomégalie malarienne
vraie dans lesquels on fit la splénectomie, nous relevons : 20 morts — 50 guérisons. Dans les 20 cas malheureux, on
pouvait incriminer le mauvais état général des malades, des adhérences ayant augmenté de
beaucoup
les difficultés del'opération;
de plus dans des interventions semblables, ondoit toujours compter avec le l'acteur: septicémie.
La mortalité serait donc de 28 pour 100; et nous sommes
autorisé à dire que si la splénectomie dans la
splénomégalie
palustre est une opération grave, elle offre auchirurgien
etaux malades assez de chances de succès pour qu'on puisse
la pratiquercouramment.
Cependant, quoique Laverai) estime que la rate
malarique
« ce repaire du paludisme » est, plus nuisible
qu'utile
à l'or¬ganisme, malgré toutes les indications de l'intervention fournies par l'état du malade, malgré les progrès de
la
chirurgie
et del'antisepsie,
nous devons nous incliner devant cette phrase de Vanverts : «On ne devra jamais» entreprendre une intervention de ce genre sans avoir
» exposé au malade ou à son entourage, les avantages et
» les
dangers
que présentent l'abstention et l'opération. Le» malade doit avoir sa part de responsabilité dans le parti
« a prendre ».
I») Splénectomie dans la
splénomégalie
non paludique etnon
leucémique.
— Bien différent des autres, ce groupe esttrès complexe. On peut y ranger en effet, les rates hyper¬
trophiées et ectopiées; puis à côté viennent se ranger les splénites
chroniques simples,
le fibrome l'épithélioma pri¬mitif, le
lymphosarcome
de la rate.Toujours d'après
les statistiques de Vanverts, dans le casactuel, sur 40 malades opérés ou
constata 11 guérisons, 28
morts. La mortalité serait donc de
72
pour100.
Souvent
l'opération fut très difficile dans les
cassuivis de
mort; et ce furent
quelquefois des adhérences qui s'interpo¬
sèrent, mais les
hémorragies surtout provoquèrent l'issue
fatale.
Les cas terminés par
la guérison n'avaient offert
quepeu
de difficultés opératoires.
On put suivre quelques malades
pendant toute la durée de leur cure; au bout de quelques
mois ils étaient fortbien portants,
guéris même
;chez
aucun d'eux, on n'avait eude complications, d'accidents à signa¬
ler, entre
l'intervention et l'époque du rétablissement
définitif.
Donc la
splénectomie est. dans la splénomégalie non paludique
et nonleucémique, plus meurtrière que dans la
splénomégalie paludique. Mais celle-ci est une forme bien
délimitée, unique des
affections de la rate; l'autre
aucon¬
traire comprend
plusieurs affections différentes qui toutes
causent
l'hypertrophie de l'organe; le pronostic, partant les
chances opératoires
de succès, varient chez elle avec le
diagnostic.
Dansla
splénomégalie
nonpaludique et
nonleucémique
nous avons deux facteurs :
a) Si la
rate est fixe il faudra
:après la laparotomie se
bien rendre compte de
l'étendue des adhérences, n'opérer
l'ablation totale de l'organe, que
si l'état du malade le
permet.
h) Si la rate
est mobile l'opération est fort moins grave,
que
lorsque la rate est ectopiée.
L'est donc au chirurgien
de juger.
2° Ligature des vaisseaux
splèniques.
La ligature des
vaisseaux splèniques
aété tentée par
Clément Lucas en 1882; or cette
opération faite dans le
but d'amener l'atrophie
de la rate malade donna des résul-
— 23 —
tats
déplorables
: sur quatresujets
chez lesquels on inter¬vint de cette façon, quatre moururent : l'un sitôtl'opération terminée; le second de péritonite infectieuse; le troisième
de péritonite; chez le quatrième, la rate envahie par la gangrène tomba en lambeaux, et détermina des accidents d'infection putride qui l'emportèrent.
D'ailleurs les mécomptes opératoires donnés par la liga¬
ture des vaisseaux
spléniques
ne doivent pas nous étonner.En premier lieu ces vaisseaux sont difficiles à atteindre sur la profondeur où se trouve le pédicule; ensuite la spléno- mégalie entraînant le plus souvent des adhérences, ces adhérences gênent l'opérateur.; elles sont parfois en effet
fort considérables; et s'il en est ainsi l'opérateur ne pouvant
faire la spléneetomie, court le risque en voulant lier les
vaisseaux du pédicule, de produire en détachant ces adhé¬
rences mêmes, des
hémorragies
qu'il ne pourra arrêter.A notre avis, la ligature desvaisseaux de la rate peut-être
considérée comme un palliatif, plutôt
qu'érigée
en méthode opératoire.3° Laparotomie exploratrice.
Le chirurgien et le malade ayant opté pour l'intervention
il peut arriver ceci : à la première incision, l'opérateur se trouve en présence d'adhérences telles qu'il se voit obligé
de refermer la plaie. Quelquefois il a pu détacher quelques adhérences; mais que cette laparotomie ait été purement exploratrice, ou ait été le premier stade d'une spénectomie
lorcément
interrompue,
on l'a vu amener des améliora¬tions considérables, sinon la guérison. Les cas apportés
par Raymond et Vincent doivent être cités :
1° Cas du Rai/mond. — Une femme d'une quarantaine d'années se
présente à lui; depuis quelques années elle soutire du côté gauche qui surtout depuis six mois a augmenté beaucoup. Raymond constate
une énormehypertrophie de la rate. L'opération estdécidée : elle est urgente même, la malade présentant de l'ascite avec œdème des membres inférieurs, ettic la paroi abdominale.
— 24 —
Ayant pratiqué la laparotomie, ilsetrouvaenprésence d'adhérences diaphragmatiques tellement résistantes et étendues qu'il referma
laplaie.
Or deux mois après l'opération il revit la malade. Plus d'ascite, plus d'œdème au niveau de l'abdomen; mais, fait extraordinaire, la
rate avait diminué de telle façon qu'elle se trouvait tout entière dans l'hypochondre gauche; si elle était encore hypertrophiée, il n'y avait
pas de comparaison entre son volume actuel et celui qu'elle pré¬
sentait deux moisauparavant; les membres inférieursne présentaient plus d'œdème, enfin l'état cachectique dans lequel se trouvait la
malade lors de l'intervention, avait presque disparu.
2° Cas de Vincent. — La malade, âgée de 28 ans, est atteinte d'une
énorme hypertrophie de la rate; on avait diagnostiqué un kyste
multiloculaire de l'ovaire; Vincent tente la splénectomie, mais la
rate se déchire pendant l'opération. Il tamponne alors le foyer trau- matiqueà lagaze iodoformée.
Six mois après il revoit sa malade; les troubles digestifs qu'elle
accusait au moment et avant l'intervention ont disparu; la rate n'occupe plus larégion abdominale; l'hypertrophie n'existe plus.
Evidemment voilà deux beaux résultats. Mais ici la lapa¬
rotomie exploratrice fut la seule intervention parce que toute autre aurait été impossible. Et nous ne pensons pas
qu'on puisse en faire une méthode
opératoire
àlaquelle
ons'arrêtera délibérément dans les splénomégalies.
4° Exosplênopexie.
C'est ce mode de traitement de la splénomégalie qui doit
nous occuper le plus particulièrement ;
c'est le seul
quenous ayons envue dans ce travail. Certes on n'est pasencore fixé sur sa valeur, mais il est intéressant de savoir où en est cette question. Les chapitres suivants
rouleront donc
sur son histoire et les observations que nous en avons recueillies ; sur la technique
opératoireles indications
etles
résultats de l'exosplénopexie.
CHAPITRE II
Historique de l'Exosplénopexie.
L'historique
de cette question peut se résumer en quel¬ques mots :
En 1897. M. Thevenot alors interne des hôpitaux de Lyon, fait paraître dans le Lyon Médical un article inti-
tulé : « L'attraction et la fixation des organes malades à l'extérieur».
L'auteur établit une division importante. Dans certains
cas, l'opération a été employée comme représentant un
temps d'arrêt dans le courant d'une opération qui, faite d'une seule haleine, aurait eu un pronostic très sombre.
Mais d'autres fois elle a été pratiquée comme une méthode générale de traitement.
Dans l'articlede M. Thévenot, nous relevons les premiè¬
resObservations d'exosplénopexie.
En effet, en 1893, Jaboulay ayant un malade atteint de
splénomégalie
avancée, voulut tenter sur lui une exospléno- pexie. Ce fut eu vain, car, en coursd'opération,
la rate naturellement friable était si ramollie qu'elle se rompit. Il fallut faire une splénectomie d'urgence.En 1894, nouvelle tentative de
Jaboulay.
Cette fois l'opé¬ration fut menée à bonne fin; mais au bout de 17 jours, le
malade fut emporté par un
phlegmon
gangréneux du cou.La même année
(1894),
presque en même temps, M. le Pr— 26 —
agrégé
Yillar, de Bordeaux, fut appelé
àopérer un* malade
atteint d'une énorme splénomégalie leucémique. Jugeant
l'ablation totale de la rate ou splénectomie absolument
contre indiquée, il résolut et cela sans avoir eu connaissance
des tentatives de Jaboulciy, de faire une exosplénoplexic.
L'opération
fut de courte durée, quelques minutes
àpeine.
Malgré cela,
le malade mourait trois jours
etdemi après;
des hémorragies produites au niveau des lèvres de la
plaie
abdominale avaient entraîné cette issue fatale.
En 1897, Houzel, de Boulogne-sur-Mer, croyant opérer un
kyste
de l'ovaire, pratiqua
sur unemalade la laparotomie.
Mais il se trouva en présence d'une énorme
hypertrophie
de la rate. Ne pouvant, vu les
adhérences
entrela
tumeur etles autres viscères, pratiquer une
splénectomie,
il se décidaà l'exosplénopexie.
Quelques mois après,
samalade était
parfaitementguérie.
En 1897 également. Baudrimont. de Bordeaux, tenta l'exosplénopexie sur une
femme
nonleucoeythémique.
Deux jours après la
malade mourait.
Il est intéressant de rapprocher de ces exosplénopexies,
l'observation de Quénu et Baudet relative à un cas de
tuberculose de larate.
Ne pouvant extirper
l'organe
à causedes adhérences
par trop fortes etétendues trouvées
encertains points, Quénu
le fixa au péritoine pariétal près
de la plaie
pardes points
de suture. Il ouvrit ensuite le foyer
pariétal,
etassujettit les
lèvres de l'incision splénique, aux
lèvres de
laplaie abdo¬
minale. La rate s'éliminatotalement ou presque
totalement
; la malade fut complètement guérie.Les traités classiques ne font pas
mention de l'exospléno¬
pexie. Cette
opération
aété signalée et décrite
aupoint de
vue didactique pour la première
Ibis
parM. Yillar dans
Le traité de Chirurgie clinique et
opératoire, de MM. Le
Dentu et Delbet.
CHAPITRE III
Observation l
Enorme Hypertrophie de la rate.—Exosplénopexie.— Par M. Je Doet.
F.Vili.ar,Professeur agrégé à la Faculté de Médecine
Observationprise dans leJournal de Médecine de Bordeauxdu 17 Octobre 1897
M. X...âgé de 40 ans, cultivateur, ne présente aucun antécédent pathologique héréditaire. Ses parents sont morts accidentellement, sans avoir jamais gardé le lit. Il ne se rappelle pas avoir fait lui-même quelque maladie.
A relever seulement quelques saignements de nez assez fréquentsde
12 à 26 ans et des varices à la jambe droite qui le firent exempter du
service militaire. Le malade a toujours habité le département de la Gironde, près de Bordeaux, du côté de Gérons. Il a un enfant qui est pâle, faible, et tousse depuis longtemps. Vers l'âge de 34 ans, X...., l'ut prisde douleurs auniveau de l'estomac avec ballonnement épigastrique
et inappétence. On le soigna pour une gastrite. Le traitement qu'il
suivit le soulagea momentanément. Mais les mêmes phénomènes patho¬
logiques ne tardèrentpas àrevenir etcontinuèrent à se reproduirepar alternatives sous forme de crises. Cet état dura jusqu'au mois de Février 1894. A cette époque le malade se sentit plus fatigué, se plai¬
gnitde violents maux de tête, et éprouva une sensation de poids dans l'abdomen. Il s'aperçut alors qu'il avait une tumeur dure, occupant presque tout le coté gauche de l'abdomen; pas de nausées, pas de vomissements. La tumeurcontinua à évoluer lentement sans provoquer de douleur. Vers le mois de mai, apparition d'oedème aux fesses et aux
pieds. Cet œdème disparaissait pendant quelques jours pour revenir ensuite, véritable œdèmetemporaire.
— 28 —
Le 9 Octobre 1894, le malade m'est adressé par mon excellent col¬
lègue et ami le Dr Mougour, à l'Hôpital St-André, dans le service de clinique chirurgicale de M. le P1' Démons que j'avais l'honneur de suppléer. Lorsquej'examine lepatient, je constatece qui suit : la peau esttrès pâle, le visage fatigué fait paraître le malade plus âgé qu'ilne l'esten réalité. L'inspection du ventre révèle une augmentation consi¬
dérable de volume.
Par le palper,jetrouve une masse dure à peu près immobile, à bord
interne tranchant, non douloureuse à la pression, occupant toute la partiegauche de l'abdomen. Transversalement, elle dépasse en avant la ligne blanche et s'étend en arrière jusqu'à 4 centimètres de la colonne
vertébrale.
Dans le sens vertical, la tumeur est cachée à sa partie supérieure
sous lerebord costal gauche, descend vers l'arcade crurale dont elleest séparée par une zone sonore et dépressible de 4 centimètres. Dans ce point se détache un prolongement qui se dirige vers la fosse iliaque
droite. La tumeur n'est pas mate dans toute son étendue. 11 y a par
place des points sonores; pas d'adénopathie, ni axillaire, ni inguinale.
Le malade est fort gêné parle poids desa tumeur. Le cœur est bon,
la respiration normale. M. le Professeur agrégé Sabrazès qui voulut
bien pratiquer l'examen du sang, trouva une augmentation considérable
du nombre des globules blancs. Je confirmai le diagnostic « Enorme hypertrophie de la Rate » porté par M. le Dr Mougour, et je fis
remarquer auxélèves du service qu'il n'y avait paslieu de pratiquer la splénectomie, cette opération étant d'une gravité excessive dans lescas
d'hypertrophie de la rate accompagnée de leucocythémie. Mais comme le malade se disait très incommodé par le poids de la tumeur,j'ajoutai
que j'allais essayer de la faire diminuer en appliquant à la rate ce qui
avait été proposé par MM. Poncet et Jaboulay (de Lyon), pour les hypertrophies du corps thyroïde. Je m'arrêtai donc de parti pris à
l'idée d'une exosplénopexie et je lis part de ce projet au médecin qui
m'avait adressé le malade.
Je pratiquai l'opération le 15 Octobre 1894. Après avoir sectionné les
divers plans de la paroi abdominale dans une étendue de 15centimètres environ, je fis écarter les deux lèvres de la plaie et je mecontentai de placer des compressesstérilisées entre la surface de la rate, et la partie profonde de la paroi tout autour de l'incision. Avant de placer ces compresses j'avais eu soin de faire repousser la rate de dedans en dehors, pourtâcher si possible d'avoir uneplus grande étendue de rate
— 20 —
exposée, c'est-à-di:e cxcsplénopexiée. L'opérationon le devine, ne dura que quelques minutes.
A cinq heures de l'après-midi, M. le Dr Chavannaz alors interne du service, fut appelé auprès du malade parce que le pansement était
souillé de sang. M. Chavannaz le défit trouva les pièces remplies
de sang et de nombreux caillots remontant jusqu'à l'aisselle. L'état général était d'ailleurs très bon. Iln'y apas eu de vomissements. Une
petite artère donnant du sang à droite de l'incision près de l'angle supérieur est liée. Une pince de Richelot est appliquée sur la lèvre droitequi saigne en nappe. Il n'y a pas d'écoulement à gauche.
Le lendemain matin dimanche, le pansement est encore souillé; le sangvient surtoutde la lèvre gauche de l'incision. On y applique une
pince. L'état général est encore très bon; dans la soirée le malade a
quelques envies de vomir.
Le lundi matin, le pansement est encore souillé. Le lundi.soir, le faciès est changé, cependant l'état général est bon. Le malade parle bien, et remue facilement.
Le mardi matin le pansement est toujours souillé. Enfin le malade s'éteint dans la soirée.
Observation II
Enorme Hypertrophiede la rate prise pour une tumeur solidede l'ovaire. —Exosplénopexie. —Guérison.
Lecture faite à l'Académie deMédecine par M. le Docteur Houzul (de Boulogne-sur-Mer).
Le 2 Août 1890 nous fûmes appelé auprès de Mme M fermière des environs de Calais par le D1' Letailleur son médecin ordinaire.
Depuisquelques jours elle avait de la péritonite, fièvre, vomissements verdâtres, ballonnement au ventre qui était extrêmement douloureux.
Depuis dix anselle avait subi plusieurs assauts du même mal, notam¬
ment en mai 1890 mais jamais aussi violent qu'aujourd'hui. Après chaque crise son ventre augmentait de volume et restait douloureux.
11 y a0 ans un confrère du voisinage l'avait traitée pour un kyste de l'ovaire, diagnostic qui aurait été confirmé par un médecin de Lille.
Bien qu'habitant un pays coupé de canaux et de fossés de dessè¬
chement, elle n'avait jamais eu de fièvre intermittente. Son père était
— 30 —
mort d'un mal dont elle ignorait le nom. C'était une grande, forte
femme de 42 ans, n'ayant jamais été malade jusqu'à ces
dernières
années. Réglée à 16 ans elle s'était mariée à 18 et
avait
eu quatreenfantsencore vivants, dont le dernier avait9 ans.
Depuis deux jours elle avait des
vomissements verdàtres incessants,
le pouls à 120, la températureà38°;
elle n'avait
pasuriné 100
grammeset son ventre, ballonné, dur, était le siège de telles douleurs, que malgré une piqûre de morphine, elle
n'avait cessé de s'agiter et de
geindre.
A cause de la douleur, nous fûmes obligé de nous contenter d'un
examen assezsuperficiel qui nous lit trouverune énorme tumeur,
dure,
mate, emplissant tout le ventre qui
n'était
un peu sonore que surle
trajetdes côlons.
Par le toucher vaginal, on trouvait l'utérus un peu gros,
repoussé
en arrière; le cul de sac latéral gauche empâté, les culs de sacs anté¬
rieur et latéral droitcomplètement effacés et remplis par une tumeur
dure, indépendante del'utérus, paraissant
faire suite
àcelle du ventre.
Parle palperbimanuel, pratiquéavec beaucoup
de douceur,
onconsta¬
tait que latumeur résistante partoutne
présentait nulle part ni de fluc¬
tuation ni de flot.
Cet examen n'avaitpu êtrequesommaire àcausedes
douleurs
;aussi
influencé par l'étiquette « Kyste de
l'ovaire
»mise
parles médecins
quil'avaient soignée au début, nous conclûmes à une tumeur
solide de
l'ovaire. Un traitement deglace « intus et extra » fut institué et
il fut
convenuque la malade viendrait à notre
clinique dès
quele transport
à Bouiogne-sur-Merserait possible.
Elle nous arriva le 5 Août, et après deux jours consacrés à l'asep¬
tiser, elle fut opérée le 7 avec l'aide des Drs Deseille et
Lauriot,
en présence des DrsLetailleur etThiénot.Le ventre ouvert, nous tombâmes sur une vaste tumeur solide lie de
vin, de la couleur et de la consistance de la rate,
remplissant
toutl'abdomen et le petit bassin. Elleadhérait en avant au
péritoine pariétal
etaux côlons, en arrière à toutl'intestin grêle.
Aprèsavoir libéré cette énorme rate des
adhérences antérieures,
nousreconnûmes que la splénectomie eut été trop dangereuse, à cause
des
adhérences postérieures. Songeant al>rs au
traitement des goitres,
a l'exothyropexie préconisée par M. Poncet, nousrésolûmes de l'imiter.
Le péritoine pariétal fut fixé de chaque côté, à
la capsule splénique
par un surget au catgut de façon àfermer
la cavité péritonéale tout
en— 31 —
laissant entre les deux surjets un espace d'environ Adoigts où larate était exposée; les deux tiers supérieurs de la plaie cutanée furent rapprochés par quelques points de suture, et la rate fut pansée à plat
avec de la gazeiodoforrnée.
Le premier effet constaté fut la disparition de la péritonite et des douleurs; dès le deuxième jour, des gaz furent expulsés par l'anus
et des lavements provoquèrent des selles.
Le troisième jour, le pansement souillé d'un écoulement poisseux,
lie de vin, d'odeur fade fut renouvelé; on voyait la rate tombant en
déliquescence.
Achaque pansement, tous les deux jours, on enlevait de la bouillie
splénique, et, l'union du péritoine avec la capsule étant assurée, on désunissait laplaie, afin d'exposer uneplus grande partie de larate.
L'étatgénéral s'étant relevé, la malade allait si bien, que le 30 Août elle voulutquitter laclinique et retourner chez elle.
Le D1' Letailleur qui acheva lacure, voulut bien nous donner la suite de l'obse: vation. La plaie désunieétait aussigrande quele jourde l'opé¬
ration; la bouillie splénique coula de plus en plus abondante jusqu'au
8 Septembre, époque où il enleva la rate sphacélée qui venait pour ainsi dire au devant de la main. Elle était encore plus grosse qu'une tête d'adulte. La plaie se cicatrisa rapidement; au 1er Octobre il ne
restait qu'un petit cratèreau sommet de la plaie, et en quelques jours
il fut fermé. Pour le 1er Novembre, Mme M.... complètement guérie
avait repris toutes ses occupations. Le ventre était souple, sans éven- trationet sans la moindre trace de tumeur.
Observation III
Tuberculose primitive de la Rate parMM. Quénu et Baudet.
D... P. ..., sans profession,salleRichet, pavillon Pasteur, àl'Hôpital Cachin, 2i ans.
Antécédents héréditaires ou collatéraux. — Son père a eu une
adénite cervicale chronique opérée par M. Péan. Sa mère est morte d'infection puerpérale. Elle a une sœur bien portante mais anémique
dansson adolescence. Un de sesoncles est mort de phtisie pulmonaire.
Antécédents personnels. — Elle a eu deux fois la rougeole; une
— 32 —
Ibis en bas âge; la deuxième
ibis
à15
ans.Vers cette époque elle a eu
une conjonctivite qui a
duré plusieurs mois. A l'âge de 7 ans elle est
devenue sourde. La surdité a présenté une
marche oscillante
avantde
devenir définitive, c'est-à-dire qu'elle a été
guérie
parles
eauxd'Aix
à l'âge de 7 ans, puis est
redevenue sourde à il ans. A cette époque
elle a eu une grosseur dans la
région mastoïdienne droite, grosseur
qui adisparu spontanément,
et
acoïncidé
avecla surdité de la malade.
A 12 ans opération de
l'amygdalotomie.
Réglée à 15 ans ;
cessation des règles de 19 à 21 ans. Dans sa pre¬
mière enfance, elle eut des adénopathies
cervicales qui ont disparu
spontanément. A 14ans,
nouvelle adénites à marche froide, dont deux
ont étéincisées etcautérisées au nitrated'argent.
Depuis trois ans, elle est
sujette à des bronchites tous les hivers.
Elle a craché quelques filets de sang,
dus
sansdoute
auxefforts de la
toux.
En Mars 1895 la malade constata pour la première
fois l'apparition
d'une tumeur dans l'hypochondre gauche. En même temps
elle éprouva
des douleurs très vives qui l'obligeaient à
marcher pliée
endeux et
l'empêchaient derespirer librement. Ces douleurs diminuèrent d'in¬
tensité, maiselle observa unegêne
dans le côté gauche, principalement
lorsqu'elle mettait son corset.
En Septembre 1896, elle éprouva
quelques troubles bizarres consis¬
tant en maux de tête et sensations nauséeuses, et
celà pendant plu¬
sieurs mois. Les troubles revenaient périodiquement une
fois
par semaine, duraient un ou deuxjours,
et ne sereproduisaient
quehuit
jours plus tard. Au
mois de Novembre, la tumeur abdominale jusque là
à peu près
stationnaire, s'accrut brusquement, et de Janvier à Avril
1897, les douleursrevinrent avec une
telle intensité
quela malade
sedécida à entrerà l'Hôpital.
Elle localisait ses douleurs dans l'hypochondre gauche;
elles s'irra¬
diaient dansle sein et lajambe du mêmecôté. Elle ne
pouvait marcher
que courbée en
deux,
etla gêne causée
parles souffrances était telle
qu'elle montait très
difficilement les escaliers.
L'haleine était mauvaise, la langue sale, l'appétit nul, la
constipation
et les coliquesintestinales fréquentes.
A l'inspection il existait un
soulèvement très marqué de la moitié
gauchede l'abdomen et
des fausses côtes du même côté. La palpation
faisait reconnaître une tumeur siégeant principalement
dans l'hypo¬
chondregauche, descendant un peu