VALEURS PROPRES, VECTEURS PROPRES (2) Cours professé par le professeur Awono Onana Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé
Définition 3 : Soit i ; i 1,2,....n;les valeurs propres de la matrice A. Le nombre complexe tr
A =
n
i i 1
est appelé trace de la matriceA. Définition : le réel
A i
A i
max
est appelé rayon spectral de la matriceA. Théorème : Pour toute matrice A et toute norme matricielle on a :
A APreuve : Par définition de la valeur propre, on a : Axx. Il en découle que :
x
Ax . D’où, en prenant en considération le fait que est quelconque, on obtient :
A AThéorème 4 : Soit Aune matrice carrée d’ordre n à coefficients réels. Soit une valeur propre complexe de la matrice A. Alors :
A
A .Théorème. Soit Aune matrice carrée symétrique et définie positive. Alors, toutes les valeurs propres de Asont positives.
Preuve. Puisque Aest définie positive, alors
Au,u
u,u 0. étant une valeur propre quelconque de la matrice Aest donc positive.Exemple. La méthode itérative
Au f
u
uk k1k k1
oùkest une suite de paramètres réels, est appelée méthode de Richardson. Soit à choisir le jeu de paramètres optimaux qui permet de minimiser la norme euclidienne de l’erreur xnx* à l’itération n. Pour résoudre ce problème, nous partons du résultat suivant :
Théorème. Soient A une matrice symétrique et définie positive et min , max et n
respectivement ses plus petite et plus grande valeurs propres et le nombre d’itérations. Alors, la norme sera minimisée xnx* pour le jeu de paramètres suivants :
0 0
; 1, 2,...,
k 1
k
k n
t
Où
min
0 0
min max max
2 1
2 1
, , , cos ; 1, 2,...,
1 k 2
t k k n
n
Ce choix de paramètres permet d’assurer l’estimation suivante :
* 0 *
min 2
max
1
2 , ,
1 1
n n
n
n n
x x x x
Preuve. Le vecteur erreur à l’itération k est donné par la relation zk xk x. Il vérifie par conséquent l’équation :
1 1
0; 0,1, 2,..., 1;
k k
k
k n
k 0 0
z z
Az z = x - x
Cette dernière relation produit :
n n n
z T z
1
... 1
n n n
T I A I A I A
Puisque la matrice Tnest symétrique, sa norme est égale à son rayon spectral . On a donc :
0
n
z z
Comment donc choisir le jeu de paramètres 0
0
; 1, 2,...,
k 1
k
k n
t
qui minimise
le rayon spectral de la matrice Tn. Soient k;k1, 2,...m les valeurs propres de la matrice A telles que :
min 1 2 max
0 m
Alors,
1
2
1
max 1 k 1 k 1 n k
k m
Et par conséquent
min max
1 2
max 1 1 1 n
On est donc ramené au problème d’optimisation suivant :
min max
1
1 2
min max 1 1 1
k n k k
f t n
Puisque f
0 1, le problème ci-dessous peut donc être résolu en utilisant le polynôme de Tchebycheff définis par la relation :
2
1 n cos arccos
n n
x b a
P x n
b a
Où
min
min max
2
max
1
2 , , , ,
1 1
n
n n a b
Les racines de ce polynôme sont :
2 1
cos ; 1, 2,...,
2 2 2
k
a b b a k
x k n
n
Par conséquent, le jeu de paramètres optimaux est donné par la relation :
1 1 2 1 2 2 1
cos ; 1, 2,...,
2 2 2
k
k k n
n
Dans ces conditions, la déviation de zéro est minimale et vérifie l’estimation :
1, 2
max fn n
Théorème 6 : Pour toute matrice triangulaire, les éléments diagonaux sont aussi les valeurs propres.
Preuve. Considérons la matrice triangulaire supérieure :
11 12 1
22 2
n n
nn
u u u
u u
u
U
On a
1
det
n ii i
u
U . La matrice
λI - U
qui est aussi triangulaire supérieure.Dès lors, son équation caractéristique est
1
det 0
n
ii i
u
λI - U . Les
racines de cette équation caractéristique sont de toute évidence les
; 1, 2,..., u iii
n.Théorème. Soit
U
une matrice carrée en blocs :11 12 1
22 2
n n
nn
U U U
U U
U
U
Alors, le spectre de la matrice
U
est égal à l’union des spectres des sous – matrices Uij, sous réserve de la prise en compte de la multiplicité algébrique.Preuve. Il est évident que la matrice
λI - U
est triangulaire par blocs. Dès lors,
1
det det
n
i ii
i
U I U
Il devient donc clair que l’ensemble des racines de l’équation caractéristique detU
0 est l’union des ensembles des racines des équations caractéristiques des blocs diagonaux, sans préjudice de la multiplicité algébrique.Théorème 8 : Deux matrices semblables ont des valeurs propres identiques.
Preuve. Soit B = P AP-1 . Alors, B - λI = P AP - P P = P-1 -1 -1
AP - P = P A - I P
-1
Dès lors,
1 det BI det P det AI det P det AI .
Corollaire. Il découle de ce théorème que deux matrices semblables ont même trace et donc même déterminant.
Théorème 10 : Soient i1, i2,....,is des valeurs propres d’une matrice carrée d’ordre ntelles que :
ij ik si j k.
Les vecteurs propres 1, 2,....,
i i is
x x x associés respectivement à ces valeurs propres forment un système linéairement indépendant.
Preuve. Supposons en effet que le système de vecteurs propres 1, 2,....,
i i is
x x x est linéairement dépendant. Soit ik
i i1, ,...,2 is
le plus grand indice telle que les vecteurs1, 2,....,
i i ik
x x x sont linéairement indépendants. Il existe des scalaires
1, 2,....,
i i ik
tels que :
1 1 ....
k i k k
i i i i i
x x x
1 1 ....
k i k k
i i i i i
Ax Ax Ax
ce qui s’écrit aussi
1 1 1 1 ....
k k i k k k
i xi i ixi i i xi
Multiplions la première équation par i1et soustrayons là de la troisième équation. On obtient :
2 2 1 2 1
0 ...
s s
i i i xi i i i
Les vecteurs
1, 2,....,
i i is
x x x étant linéairement indépendants, il découle de *** que :
1 2 ....
i i is
Ce qui est absurde, car l’hypothèse de départ est que les valeurs propres de A
sont distinctes.
Définition 6 : La matrice A est irréductible si elle admet n vecteurs propres linéairement indépendants.
Théorème. Considérons l’espace vectoriel E de dimension n et A une matrice irréductible. Alors, les sous-espaces propres Ei de la matrice A forment une somme directe de E.
1 2 q
EE E E
De plus, le spectre de A,
A est fini et au plus dimE éléments.Preuve. Soient 1,2,,...,qles valeurs propres distinctes de la matrice A. Les polynômes de base de Lagrange associés sont définis par les relations :
1
1 q
i i
i j
j q
j i
i i j
x L x
Par ailleurs, si
0 1 2 2n
p x x x nx est un polynôme de degré n et A une matrice carrée, alors, le polynôme matriciel associé est donné par la relation :
0 1 2 2n
p A IA A nA
Soit ; 1, 2,...,
jEj j q
x . On suppose que x1x2 ... xq 0 et on veut montrer que xj 0; j. On sait déjà que :
Et pour tout polynôme matriciel p
A , on a : j
j jp A x p x
Par conséquent :
1 2 ... q
1
2 ...
qp p x x x p p p
0 A 0 A A x A x A x
En particulier si p est le polynôme de base de Lagrange Lj, on obtient de l’égalité ci-dessus que xj 0. Ce qui signifie que les sous-espaces propres
Ej
forment une somme directe.
Soit maintenant :
1 2 q
FE E E
Puisque tous les espaces propres sont de dimension positive, on a :
1 2
dim dim dim dim dim
E F E E Eq
Ce qui prouve bien que le spectre est fini et de taille inférieure ou égale à la dimension de E.
Définition 7 : Soit A une matrice inversible et 1, 2,,...,n ses valeurs propres.
Alors la matrice A1 admet pour valeurs propres 11, 21,...,n1.
Théorème 11 : Soit x un vecteur propre de la matriceA, correspondant à la valeur propre, et y le vecteur propre de la matriceA*, correspondant à la valeur propre. Si , alors les vecteurs x et y sont orthogonaux.
Théorème 12 : Soit x un vecteur propre de la matriceA, correspondant à la valeur propre. Il existe un vecteur propre yde la matriceA*, correspondant à la valeur propre tel que :
( , )x y 1 (10)
Théorème 13 : Pour tout système libre(x , x ,..., x1 2 s) de vecteurs propres d’une matriceA, il existe un système libre (y , y ,..., y1 2 s), correspondant aux vecteurs propres de la matriceA*, et tel que :
x yi, i
0;i1, 2,...,nThéorème 14 : Soit A une matrice simple de dimension n. Il existe des bases biorthogonales x , x ,..., x1 2 n et y , y ,..., y1 2 n correspondant respectivement aux valeurs propres 1, 2,...,n et 1, 2,...,n.
Définition 8 : La matrice Gi x yi i* est appelé matrice compagne correspondant à la valeur proprei.
Théorème spectral (pour les matrices diagonalisables). Soit A une matrice carrée d’ordre nde spectre( )A
1,...,r
. Supposons que A est diagonalisable et que les valeurs propres 1, 2,...,rsont de multiplicité algébrique et géométrique ri respectivement. Alors, il existe des matrices carrées d’ordre n,1 2 r
G , G , ..., G telles que :
1
, ,
n
i
i
i k i k
ii k
G I G G 0
G
(11)
1 n
i i
i
A G (12)
La représentation (12) est appelée décomposition spectrale de la matrice A. Exemple 11. Considérons la matrice
1 2 1
2 3 0
2 2 0
A
dont les valeurs propres sont 11;2 1;3 2et les vecteurs propres correspondants sont
1 2 3
1 2 1
1 ; 1 ; 2
0 2 1
u u u
Il y a par conséquent trois opérateurs spectraux. On a en effet :
1
1
1 2 3 2
3
1 0 1
1 2 1
1 1 1
P 1 1 2 ; P
3 3 3
0 2 1
2 2 1
3 3 3
T
T
T
Y
X X X Y
Y
Dès lors,
1 1 1 2 2 2
3 3 3
2 2 2
3 3 3
1 0 1
1 1 1
1 0 1 ;
3 3 3
0 0 0
2 2 2
3 3 3
2 2 1
3 3 3
4 4 2
3 3 3
2 2 1
3 3 3
T T
T
G X Y G X Y
G X Y
On vérifie bien que
1 2 3
G + G + G = I
Preuve. Soit Xi une matrice de dimension n r* i dont les colonnes forment une base de l’espace propreN
AiI
. SoitP
P : P :...: P1 2 r
. Alors P-1est non singulière. Pour la matrice P-1 adoptons la représentation suivante :1
2
r
Y
… Y P
Y
où Yiest une matrice de dimension ri*n. Alors, les matrices
i i
G = X Y ;i i1, 2,...rsatisfont à toutes les propriétés énoncées ci-dessus. On a en effet :
2
2
-1 -1
1 -1 2
1 2 r
PP = P P = I
0 0
A = PDP = X X X 0
k k
r r
r r
I I
I
1
2
3
r
Y
… Y
Y
Y
où Iriest la matrice unité d’ordre r ii; 1, 2,...,n. La décomposition (12) est appelée décomposition spectrale de la matriceA, et les matrices G ii; 1, 2,...rsont appelées les projecteurs spectraux associés à la matriceA.
Exemple. La matrice
1 3 3
3 5 3
3 3 1
A admet pour valeurs propres
1 1, 2 2
qui sont de multiplicité algébrique 1 et 2 respectivement. A la valeur propre 1 1correspond le vecteur propre 1
1 1 1 y
et à la valeur propre
2 2
correspondent les vecteurs propres 2 3
1 1
y 1 ; y 0
0 1
. On a donc par conséquent :
1 2
1 0 1 1 0 1
X 0 1 ; X 1 ; P= 0 1 -1
1 1 1 -1 -1 1
On obtient de suite que
1
0 1 1
P 1 2 1
1 1 1
; 1
0 1 1
Y 1 2 1
; Y2
1 1 1
Les deux projecteurs spectraux associés à A sont les suivants :
1 1 1 2 2 2
0 1 1 1 1 1
G X Y 1 2 1 ; G = X Y 1 1 1
1 1 0 1 1 1
On vérifie bien que :
G G I; G - 2G A
Théorème. A étant une matrice inversible, le calcul des projecteurs spectraux s’appuie sur la formule d’interpolation est la suivante :
1
; 1, 2,...
n
i j
j i i
i j
i
A IG
Théorème 17 : Soit un nombre qui n’est pas valeur propre de la matrice irréductibleA. Alors,
1 1
( ) 1
n
i
i i
ρI - A G (13)
Théorème 18 : Soit Aune matrice simple qui admet comme vecteurs propres
x x1, 2,...,xn auxquels correspondent respectivement les valeurs propres 1, 2,...,n.
Pour 1 s n ,
i
s ii=1
A - G (14)
admet pour valeurs propres 0,..., ,0s1,...,n
Les Gisont les matrices correspondant aux vecteurs propresxi, 1 i s.
Applications aux équations différentielles.
Théorème. Soient u t , u1
2 t ,..., un
t n fonctions différentiables de la variable t dont les dérivées sont notées u'i
t i; 1, 2,...,nrespectivement. Nous supposons que ces fonctions sont telles que :
'
1 1
u ( ) u ( ) ... u ; 1, 2,..., u 0 ; 1, 2,...,
i i in n
i i
t a t a t i n
i n
La matrice A
aij est une matrice carrée d’ordre n et le vecteur
1
α ,...,n Test le vecteur des valeurs initiales des fonctions uià l’instant t=0.
Le problème ainsi posé est celui d’un système d’équations différentielles de premier ordre à coefficients constants. Soient :
'
11 1 1 1
'
'
1 n n
u t u t
A ; u(t) = ; u t =
u t u t
n
n nn
a a
a a
Le problème dans sa forme matricielle devient :
u' t A u t ; u(0)
Supposons que la matrice A est diagonalisable et soient
A 1, ,k
etG ;i i1, 2,..,k respectivement le spectre de la matrice A et les projecteurs spectraux de A. alors, on démontre que la solution unique du système est
1 1u t etv ektvk; vi Gi:i1, 2,..,k
Exemple. Le circuit électrique de la figure 1 est décrit par le système d’équations différentielles :
R1 C1 R2 C2
'
1 2 1 2 1 1
1 '
2 2 2 2 2
2
1/ 1/ / 1/
1/ 1/
R R C R C t
t
R C R C t
t
Ici, 1
t et 2
t sont les valeurs de la tension à travers les capacités c1 et c2respectivement à l’instant t. On admet que :
1 1 ; 2 2 ; C1 1 ; 2 .5
R R farad C farad . On suppose également que la tension initiale sur la capacité c1 est de 5 volts et sur la capacité c2 de 4 volts. Le problème est de calculer les valeurs 1
t et 2
t .Solution. Le problème posé se met sous la forme :
1 '
0 2
5 1.5 .5
; ; ;
4 1 1
A A
Les valeurs propres de A sont : 1 .5;2 2 et les vecteurs propres associés sont :
1 2
1 1
( ) ;
2 1
u t u t
Les fonctions propres y t1( )u e1 1t; ( )y t2 u e2 2t (et toutes leurs combinaisons linéaires) satisfont l’équation ' A. Soit :
1 2 .5 2
1 1 2 2 1 2
1 1 2 2
1 1
2 1
0
t t t t
t u e u e e e
u u
Les constantes c1et c2 peuvent être calculées en posant
0 0 . Ce qui donnec1= 3 et c2= -2. Dès lors, la solution au problème posé s’écrit :
Exemple. Le circuit électrique de la figure 2 est décrit par le système d’équations différentielles :
'
2 '
1
/ 1/
1/ 1/
L L
c c
R L L i t
i t
C R C t
t
ici, iL est l’intensité du courant qui traverse l’inductance L et c est la chute de tension le long de la capacité C. On suppose que R1=5 ohms, R2=.8 ohms, C=.1 farad et L=.4 henry. Sachant par ailleurs que l’intensité du courant initial est de 3 ampères et que la tension initiale à travers la capacité est de 3 volts, calculez iL
et C.
Solution. Le problème se ramène à la solution du système d’équations différentielles :
'
0
2 2.5 3
x Ax; A ; x
10 2 3
Les valeurs propres de la matrice A sont complexes : 1 2 5 ;i 2 2 5i. Les vecteurs propres correspondantes sont v1 ; v2
2 2
i i
; dès lors, les solutions du système considéré sont des combinaisons linéaires des solutions particulières
( 2 5 ) ( 2 5 )
1( ) ; 2( )
2 2
i t i t
i i
x t e x t e
3 1 .5 2 1 22 1
t t
t e e