SÉGRÉGATIONS ANORMALES POUR LES ALLÈLES
« CRÊTE SIMPLE » ET « CRÊTE EN ROSE »
CHEZ LA POULE
II. —
CROISEMENT
♂ rr × ♀
RrPh. MÉRAT
Station de Recherches az,icoles,
Centre national de Recherches
zootechniques, Jouy-en-Josas, (Seine-et-Oise)
SOMMAIRE
Des
accouplements pedigree
et un certain nombred’accouplements semi-pedigree
(mère seuleidentifiée)
du type d Yr(crête simple)
X ltr(crête
en rose), comportant au total environ r500o des-cendants, manifestent une
hétérogénéité
entre familles,significative
au seuil i p. 100, pour la pro-portion
des crêtessimples
par rapport aux crêtes en rose chez les descendants, sexes groupés : cette proportion est normale et voisine de 1/1sur l’ensemble des données, mais il y adavantage
de familles à excès d’enfants à crêtesimple
ou à crête en rose que ne le laisseraitprévoir
uneségrégation
auhasard.
La fertilité et l’éclosion sont normales dans ces familles, et ne
présentent
pas de corrélation appa- rente avec le rapport deségrégation
pour le type de crête.Par ailleurs, la
comparaison
desproportions
mendéliennes pour les divers types de croisement relativement augène
R ne s’accorde pas avecl’hypothèse
degènes
modificateursprésents
danscertaines familles.
Ces résultats
suggèrent
l’existence de variations du rapport deségrégation
des deux allèles R et y lors de la méiose du sexe 9.INTRODUCTION
Nos observations sur le
croisenient e
Rrx Y
yy, où lepère
esthétérozygote
pour l’allèle cc crête en rose o et la mère
homozygote
pour l’allèle « crêtesimple
» r(ME
RAT
,
ig5g et19 6 2 )
faisaientapparaître,
dans ladescendance,
un défaut haute- mentsignificatif
de mâles à crête en rose,apparemment
non attribuable à desphé-
nomènes
postérieurs
à la fertilisation.I,es données
présentes
concernent, cettefois,
le croisementréciproque cf rr X Q
Rr.MATÉRIEL
ETMÉTHODES
De r954 à 1961, des
accouplements pedigree
du type r3’ yr X ! Rr ont été faits àJouy et au
Domaine du
Magneraud. Chaque
poule étaitaccouplée
à un seul coq. L’allèle R de tous ces croise- mentsprovenait
de la soucheWyandotte
« !i i i de l’élevage duMagneraud.
A ces données, nous avons
ajouté quelques
croisementspedigree
du même type faitspendant
la même
période
chez un sélectionneur.Le type de crête,
simple
ou rose, était déterminé sansambiguïté,
àl’âge
de 8 semaines avant I956,
puis
à la naissance, et,depuis
ig59 inclus, dès 18 jours d’incubation ; le sexe était déterminésur les mêmes animaux
(cf.
MERAT, 1962).Kn outre, des données relevées
depuis
i946 par le DrL. P. COCIIEZ à la Station S. A. R. G. :l . S.,puis
au domaine du Magneraud, etcommuniquées
par lui, apportaient des résultatscomplémentaires.
Il s’agissait de
l’analyse
depoules
à crête en rose, enmultiplication
avec des coqs à crêtesimple.
Parmi ces poules se trouvaient des hétérozygotes Rr, dont la descendance était classée suivant le t
Yf
1C de
crête.(’)
RESULTATS
Nous donnerons seulement les résultats
portant
sur le total des diversesannées,
en détaillant toutefois les résultats
pedigree
d’unepart, semi-pedigree
de l’autre.1 0
-
Ra!!oyt
deségrégation
sur l’ensembte des donnéesLes nombres de descendants sur l’ensemble des
données,
partype
de crête etpar sexe, sont donnés dans le tableau i.
Les
proportions,
soit surchaque
sexe, soit sur les deux sexesgroupés,
sontparfaitement
normales et conformes auxprévisions,
comme le confirment lesZ 2
calculés à
partir
de laproportion théorique 1/1 :
sur les
cf : y 2
=o, 9 6 7
pour i D. I,.sur
les 9 Z 2
= 0,000 pour i D. I,.sur les 2 sexes
groupés : X 2 = 0 , 00 8
pour 1 D.I,.( 2 )
(’) Vu les nombres d’enfants par mère (> 8), le risque était très faible d’écarter des données semi-JY5- digrce des mères Rr n’ayant eu que des enfauts à crête en rose. On peut négliger cette cause possible
de distorsion, tant pour le rapport de ségrégation global que pour l’hétérogénéité entre familles,
qui
ne pourrait d’ailleurs ainsi qu’être sous-estimée.(!) Le test des rapports F aux y2d’hétérogénéité entre familles divisés par leur nombre de D. L, donne évidemment les mêmes conclusions:
2
0 -
Analyse
del’hétérogénéité
entrefamilles
Sur les données
pedigree,
nous avonsanalysé l’hétérogénéité
desproportions,
sexes
groupés,
entregénérations,
entre familles d’enfants du mêmepère intra-géné- rations,
et entre familles de frère et sceurs(même père
et mêmemère) intra-père
par une
décomposition classique
dux 2 .
Les données
semi-pedigree permettaient
d’obtenir lesx 2 d’hétérogénéité
entregénérations,
et entre familles defrères-soeurs,
mais nonintra-père.
Le résultat est contenu dans le tableau 2.
Il
n’apparaît
pasd’hétérogénéité significative
entregénérations,
pour la propor- tion de crêtessimples
ou en rose(P = 0 , 10 - 0 , 20 ),
nonplus qu’entre pères
intra-générations
sur les donnéespedigree (P
=0 , 5 - 0 , 7 ).
Par contre,l’hétérogénéité
entre mères
intra-pères
sur les donnéespedigree
estsignificative
au seuil 5 p. 100(P ! 0,03),
etl’hétérogénéité
entre mèresintra-générations,
sur l’ensemble desdonnées, pedigree
etsemi-pedigree, approche
le seuil i p. 100 designification (P ! 0,016).
Sur ces
données, quelques
mères étaient mises enreproduction
à deuxépoques successives,
avec des coqsdifférents,
et lesproportions
de la descendance dans cesdeux
périodes
étaientcomptées séparément,
comme s’ils’agissait
de deux mères différentes.Étant
donné l’absenced’hétérogénéité
entregénérations
et entrepères,
on
peut
regrouper les totaux pour chacune de cesmères,
et recalculer sur ces nou-velles données
un Z 2 d’hétérogénéité globale
« entre mères ». Cex 2
estégal
à8 37 ,
279 pour 739 D.I,.,
et a uneprobabilité P ! 0 , 00 6
d’êtredépassé.
L’hétérogénéité
observéeprovient
aussi souvent d’un excès de crêtes en roseque d’un excès de crêtes
simples :
on trouve, dansl’ensemble,
25 familles dont lerapport
deségrégation
pour la crête s’écartesignificativement
de laproportion 1/1 ,
au seuil 5 p. 100, par excès de crêtes en rose, contre 27par excès de crêtes
simples ;
au seuil i p. 100, les nombres
correspondants
sontrespectivement 6et 4 ( 1 ).
3
° - Relation avec le
pourcentage
d’éclosionPour
expliquer l’hétérogénéité constatée,
il faudrait supposer une éclosion meil- leure pour leszygotes
à crête en rose ou une fertilité meilleure pour les ovules R chez certainesmères,
l’inverse étant vrai pour d’autres.Un test indirect de cette
hypothèse
consiste à comparer lepourcentage
d’éclo- sion(poussin nés/oeufs incubés)
des familles des mêmes annéesprésentant,
les unesun excès
appréciable
d’enfants à crête en rose ou d’enfants à crêtesimple (nous
avonschoisi arbitrairement celles donnant un
X 2 supérieur
à i parrapport
à laproportion 1/1
),
les autres uneproportion
des deux sortes de crêtes voisine del’égalité (x 2
<i).
Les résultats sont
consignés
dans le tableau 3. Seul est donné le total de toutes lesannées,
les familles des groupescomparés
étant apparuesréparties
defaçon
suffi-samment
égale
dans les différentesgénérations,
et les taux d’éclosion ne différant pas considérablement entre cesgénérations.
Le x
2
decontingence,
calculé sur ces 4 groupes, estégal
à :x
2
= 2,403 pour 3 D. L.(P
voisine deo,5)
Il
n’apparaît
donc pas de différences d’éclosion suivant lerapport
deségréga-
tion observé chez les
poussins
nés.Si l’on
détaille,
dans les 2catégories extrêmes,
lepourcentage
d’éclosion des familles dont lerapport
deségrégation
s’écartesignificativement
de1/1
au seuil5 p. 100, on trouve
respectivement 8 1 ,17
p. 100(sur 4 6 2
œufsincubés)
et7 8,8 2
p. 100(sur 3 8 7
œufsincubés)
pour les familles à excès de crêtes en rose et pour celles à excès de crêtessimples,
et, ici encore, la différence avec les autres familles n’est passignificative.
De
plus,
nous avons calculé lex 2 d’hétérogénéité
entre les familles de frères-soeurs, pour
lesquelles
le taux d’éclosion était de 100p. 100. Ces famillesétaient,
autotal,
au nombre de 51, et donnentun x 2 d’hétérogénéité égal
à6 3 ,6 71
pour 5o D. L.( 1
) Nous avons, en outre, vérifié pur le calcul du Z2d’hétérogénéité fait sur chaque sexe, que cette hété-
rogénéité ne concerne pas un sexe plutôt que l’autre.
(P / / 0 , 00 ).
Le seuil designification
n’estplus atteint,
cequi paraissait prévisible
vu le nombre restreint de
données,
mais le résultat obtenusuggère
néanmoins unehétérogénéité probable,
du même ordre que sur l’ensemble des familles.Ces résultats
suggèrent
nettement quel’hypothèse
de différences d’éclosion entretypes
de crêtes variant suivant la famille ne suffit pas àexpliquer
l’hétéro-généité
observée dans lerapport
deségrégation.
4
0
-Hy!othèse
degènes modiftcateurs
Pour
pouvoir interpréter
les résultatsprésents
par desgènes modificateurs,
il faudrait admettre laprésence
degènes
« suppresseurs » de la crête en rose dans certainesfamilles,
et celle degènes
autres que Rproduisant
cephénotype
dansd’autres familles.
Nous avons
déjà signalé (M ERAT , 19 6 2 ) qu’on
nepeut
admettre l’existence degènes
«supprimant
» la crête en rose, chezl’hétérozygote,
tant dans le croisementréciproque (!
RrX Ç rr)
que dans les nombreux croisements depremière généra-
tion de la souche
Wyandotte
M m, source de l’allèle R. Lecroisement cf
Rrx Ç Rr,
étudié
plus
loin(M ERAT ,
souspresse)
nedonne,
lui nonplus,
aucunappui
à cettehypothèse.
Quant
à la deuxièmehypothèse,
laprésence
dans certaines familles d’un oude
plusieurs gènes,
autres queR, produisant
la crête en rose, n’est pas nonplus
vrai-semblable. Le croisement
réciproque (’.VI!xaT, 19 6 2 )
ne contient pas de familles à excès de crêtes en roseplus
souvent queprévu,
dans l’un ou l’autre sexe, et les des- cendants de ces familles n’ont pas eux-mêmes d’enfants à crête en rose en excédent(données
nonpubliées).
Il en est de même du croisement Rr XRr,
sexesgroupés.
D’ailleurs,
l’existence d’un autregène
que Rproduisant
la crête en rose n’ajamais
été observée ni
suggérée
nullepart ;
un telgène,
sur nosdonnées,
n’aurait pu exister que dans la soucheWyandotte
« M il » et aurait dû entraîner desperturbations
dansla fixation de la crête en rose, ce
qui
n’a pas été observé.Enfin,
l’absenced’hétérogénéité significative
entrepères,
contrastant avec les différences entre mères, ne concorde pas bien avecl’hypothèse
degènes
modificateurs.CONCLUSIONS
L’interprétation
du fait essentielobservé, l’hétérogénéité
desproportions
destypes
decrêtes,
àl’éclosion,
entre familles defrères-soeurs,
nepeut
pour l’instant êtrepoussée
très loin. Du moins nos donnéessuggèrent-elles,
comme nous venonsde
l’indiquer,
que la cause neparaît résider,
ni dans desgènes modificateurs,
ni dans une différence de la mortalitéembryonnaire comparée
des deuxtypes
zygo-tiques (ou
de la fertilité des deuxtypes d’ovules)
suivant les familles.Ceci conduit donc à formuler
l’hypothèse
de certainesvariations,
entremères,
durapport
deségrégation
lors de laméiose,
cequi
ne sembleraitguère pouvoir
consister
qu’en
uneprobabilité plus grande,
chez certainesmères, d’expulsion
del’un ou l’autre des deux allèles R ou y dans un
globule polaire,
sans que l’onpuisse
expliciter plus
avant lephénomène.
Quoique
le résultatprésent n’atteigne
pas undegré
designification statistique
aussi extrême que les anomalies constatées pour le croisement
!’
Rrx Y rr (ME RA T, 19
6 2
)
et pour le croisementf
RrX Cf
Rr(ME RA T,
souspresse),
ilsuggère
uneparti-
cularité de
plus
concernant laségrégation
dugène
R chez lapoule.
Reçu pour
publication
en octobre i962.SUMMARY
A13NORMAL SEGREGATION FOR THE ALLELES « SINGLE COMI3 » AND « ROSE COMB » IN THE FOWL. II
Pedigree
matings,
and somesemi-pedigree matings (mother
aloneidentified)
of the type d’ yr(single comb)
X Y Ry(rosecomb),
with a total of about 15 ooo progeny, show, on the whole, asigni-
ficant
heterogeneity
between full-sib families (at the I per cent level) for thesegregation
ratio ofthe 2types of combs : The
proportion
is normal, near 1/1, for the total of the data(Table i),
butthere are more than
expected
of full-sib families with an excess, either ofsingle
comb, or of rose comb, hatched chicks. On the contrary, there is nosignificant heterogeneity
between half-sib fami- lies (cf. table2 ).
Fertility
andhatchability
are normal, and show no apparent correlation with thesegregation
ratio
(either
near or far fromequality)
forcomb-type (cf.
table3 ).
On the other hand, a
comparison
of mendelianproportions
for the varioustypes of matings
with respect to the gene R does not support the
hypothesis
ofmodifying
genes present in some fami- lies.These results suggest some variations of the
segregation
ratio of the alleles R and r at meiosis of the female sex.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
MEttnT P., 1959. Ségrégation anormale pour les allèles « crête simple » et « crête en rose ». Ann. Zoolech.
S, 17 8.
MERATP., r96z. Ségrégation anormale pour les allèles « crête simple » et « crête en rose chez la poule. I. - Croisement J Rr x ! rr. Ann. Biol. anim. Bioch. Biophys., 2 (2), io9-rr7.
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P. Ségrégation anormale pour les allèles !! crête simple » et !! crête en rose » chez la poule. III. - Croi- seiiient e Rr x ! Rr Ann. Biol. anim, Bioch. Biophys. (sous presse).