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Numération des particules α par leur action
photographique
F. Halbwachs
To cite this version:
NUMÉRATION
DES PARTICULES 03B1 PAR LEUR ACTIONPHOTOGRAPHIQUE
Par F. HALBWACHS.
Sommaire. - On a étudié les impressions laissées dans l’émulsion photographique par un faisceau de rayons 03B1. On a mis au point les conditions de développement permettant de compter individuellement tous les corpuscules. La méthode a été appliquée à la détermination du rapport des rayons x du thorium Cet
du thorium C’.
Introduction. - Les trois sortes de rayons que
peuvent
émettre les corps radioactifs sont toutes troissusceptibles d’impressionner
lesplaques
photogra-phiques.
(C’est
d’ailleurs à cette action fortuitement observée parBecquerel
en1896, qu’est
due ladécou-verte due la
radioactivité.)
Maislorsqu’on
étudie laplaque
aumicroscope,
sonaspect apparaît
très différentsuivant
qu’elle
a été soumise à l’action desrayons
ou y, ou à celle des rayons (1.. Pour les rayons y,
chaque
plloton
arrèléimpressionne
un seulgrain
debromure,
et il en est très
probablement
de même pour lesélec-trons
qui
constituent lesrayons ~ ;
si bienqu’après
développement,
lesgrains
noircis par ces deuxespèces
de rayons serépartissent complètement
au. hasard.Il en va tout autrement dans le cas des rayons a,
particules
d’uneénergie
considérable,
peupénétrantes
et très ionisantes. Cescorpuscules impressionnent
tousles
grains
rencontrés dans lagélatine,
aulong
d’un parcoursqui
esttoujours rectiligne
(sauf
des cas de chocsexceptionnels
dus à des collisions trèsproches).
Si donc on seplace
dans des conditions convenables(incidence
oblique),
uneplaque impressionnée
par lesrayons x se
présentera
comme striée par depetits
tra-jets
rectitigiies.
Cetaspect permettra
de discerner l’actionspécifique
des rayons a même dans le casgéné-ral o1a ils seront
mélangés
derayons ~
et y.
Enoutre,
cette action est individuelle et
chaque
corpuscule
pourra être ainsi décelé isolément.
Ce
phénomène,
observé dès avant la guerre parReinganum
etMichl,
a étédepuis étudié
soigneusement
par Nliihlestein(1) qui
a déterminé la structure des par-cours, leurlongueur,
leur nombre degrains,
etc ..Plus
récemment,
il a été utilisé par Mile Blau(2)
pourdéceler les rayons
H,
naturels,
ouprovenant
dedésin-tégrations
nucléaires,
par !YTl’e Chamié(3)
pour l’étude des radiocolloïdes etgroupements d’atomes,
et parTaylor (,)
pour la mesure du parcours des rayons x.M. Debierne m’a
proposé
de mettre aupoint
lescon-ditions
expérimentales
propres à utiliser l’actionpho-CI) E. MrnLESTEix. Arch. Sc. Phys. A’at., 1922, 4, p. 38. Cet article contient une bibliographie complète des travaux précé-dents.
(2) M. BLu. Akad. iviss. Wien, 1925, 134, p. !~07; 1921, 136,
p. 469; 1930, 139, p. 328; J.
Physique,
1934, 7, p. 61. - 31. BLA-L’ et H. WAMBACHER. lviss. ivien, 1932,141, p. 69 ï ; 1934,143,p. 285 et !04.
(’) C. CHAMiE. C. R. 1927, 184, p. 19-2 î, 185, p 170 et 1277 ;
1928, 136, p. 1838. - C. CHAMIE et L.-A. GOLDSTEIN. J. Physique;
1929, 10, p. 4-i; J. Chirn. Phys., 1931, 28, p. 228; 1932, 29, p. 242.
(4) H.-J. TAYlOR. Proc.roy.Soc., 1935, 150, p. et V.-D. DABHOIKAR. Pror. Phys. Soc., 1936, 48, p. 285.
tographique
des rayons a pour une méthode dedénom-brement
statistique
exact desparticules
x, et de fairel’application
de cette méthode àl’analyse
du ray onne-ment a émis par ledépôt
actif du thorium. Je me suis surtout attaché à la détermination des conditionspho-tographiques
trèsparticulières
qui
permettent
uneobservation correcte de l’effet
produit
parchaque
cor-puscule.
Choix de l’émulsion. -- Il
s’agit
d’obtenir uncliché où les parcours des rayons a s’inscrivent do
façon
nette,yigoureuse
etrégulière,
en évitant autant quepossible
tout autre noircissement. Commechaque
rayon x atoujours
une action très forte parrapport
àcelle des autres
rayonnements,
leproblème
revient à faireapparaître
lesimpressions
lesplus vigoureuses,
â l’exclusion de toutes lesautres,
donc à utiliser des émulsions peu sensibles.De
façon
générale,
une émulsion est d’autant moins-sensible que songrain
estplus fin,
et cette condition degrain
fin est d’autrepart
très favorable à l’obtention detrajets 2
réguliers,
comprenant
ungrand
nombre desgrains
bien serrés. J’ai donc eu à chercherparmi
les émulsions àgrain
fin. J’ai fait des essais avec lesplaques
suivantes :.
La
plaque
cc SansCcrccn
» utilisée avecsuccès par 3’I"e Chamié.
Le
film
dentaireAgfa,
souventemployé
par Blau.La
plaqzte spéciale
« R.~ »It furd,
queje
dois à Mme Joliot.La
plaque
~cHallloîie liford
»,qui
m’a été conseilléepar M"e Blau.
La plaque l(
( Diapositive
l’ons » etLa
plaque
«Spécial
contraste », Cozenaièrequi
m’ont étéindiquées
par M.Risson,
directeur des établisse-ments Crumière.Les essais étaient faits en
piquant
laplaque
enplu-sieurs
points
avec uneaiguille préalablement
frottée depolonium.
Des traces de matière active restent attachées à lagélatine
etrayonnent
dans toutes les directions. Ihen résulte un
aspect
en étoile souvent décrit par les chercheurs et dont l’observationmicroscopique
ren-seigne
sur lecomportement
de l’émulsion vis-à-visdes-rayons a.
Les émulsions
Agfa
Zahnfilm et Lumière S. E. n’ont pas donné de résultatsatisfaisant,
leurgrain
étant gros etirrégulier.
Lesplaques
Ilforcl R2 et Halftone ontune émulsion très
fine,
maistrop
sensible,
d’oùbeau--coup de
parasites.
Les deuxplaques
Crumière donnent126
de bons
clichés,
surtout laDiaposilive
Tons Noirs. C’est finalement sur cette dernière que mon choix s’est arrèté.Ajoutons
qu’il
est trèsimportant
de se servir d’émulsions fraîchementpréparées
etqu’on
aavantage
à les utiliser en couches
épaisses (20
microns)
pour quetout le parcours des rayons a se fasse dans la
gélatine.
De telles émulsions ont étépréparées
spécialement
pour moi par la maison Crumiére,Développements
:Notre but étant d’accentuer lesimpressions vigoureuses,
autrementdit,
d’obtenir ,des clichés « durs » ou « contrastés », latechnique
photographique
nousenseigne qu’il
faut utiliser unrévélateur
fort,
agissant
en peu detemps. Aprés
plu-sieurs
essais,
j’ai
choisi un révélateurconcentré,
à lapyrocatéchine,
composé
comme suit : Solution A : 250 g eaudistillée,
25 g
pyrocatéchine,
25 g sulfite de soude. Solution B :
~~4 g
eaudistillée,
25 g
potasse caustique,
45
g pliospate disodique.
Le révélateur est
préparé
au moment del’emploi
enmélangeant :
20 cm3 de solution
A,
10 cm3 de solution
B,
10
gouttes
d’une solution saturée de bromure depotassium.
L’observation
microscopique
desplaques après
desdéveloppements
de durée croissante montrequ’au
coursdes 35
premières
secondes,
lesgrains
fortementimpres-sionnés
(régions exposées
aux rayonsa)
subissent seuls un commencement dedéveloppement. Après
35 sec, leur réduction sepoursuit
et leur noircissement s’ac-cen tue ; mais en mêmetemps,
dans les autresrégions
de la
plaque,
lesgrains plus
faiblementimpressionnés
(parasites)
sontdéveloppés
à leur tour.J’ai été amené à arrêter le
développement
au bout de 35 sec et à l’achever par unséjour
de 2 min dans un révélateurcomplémentaire,
leV(r¡utol
Léona)’,
qui
renforce le noircissement des
grains déjà partiellement
réduits,
sans avoir d’action sur les autres. LeVigutol
estgénéralement
employé
pour lestirages
surpapier.
Je l’ai utilisé pour les
plaques
avec la mêmeconcen-tration.
Les
plaques
doivent être lavées à l’eaudistillée,
uneminute entre les deux
révélateurs,
et une minuteaprès
leVigutol.
Après quoi,
onopère
lefixage
dans un baincontenant de
l’hyposulfite
et du bisulfite enquaniités
égales,
avec un peu d’alun de chrome. Dans cescondi-tions,
les noircissementsparasites
sont très peunom-breux et l’action
spécifique
des rayons a s’observe trèsfacilement.
Impression
desplaques. - L’appareil
ci-contrepermet
de délimiter à l’aide de deux fentes un faisceaude rayons ?
qu*on
fait tomber sur laplaque
sous uneinclinaison convenable. Il esi constitué par une boîte
de laiton fermée par une
plaque
rodée sur le bord E. Onpeut
y faire le vide par le tube T et leplacer
dansun
champ magnétique
intenseparallèle
aux fentes.La source est insérée dans la rainure R. La
largeur
des fentes
F,
F’ est à délerminer suivant lepouvoir
séparateur
que l’on veut obtenir.Fig. t. - Oistance des fentes
F,F’ : 2 cm. Distance de la fente F’
au centre G du cercle ABCA’B’C’ : 2,25 cm. Dimensions inté-rieures de l’appareil : 3,5 crii/1 cm. Dimensions des
pla-ques : 3 cm/ 1 cm.
Une troisième fente P en
plomb
permet
d’arrêter autant quepossible
lesrayons ~.
Laplaque
photogra-phique
G est maintenue par un ressort D dans desrai-nures
l’A’, BB’,
qui permettent
de lui donnerdiverses inclinaisons.
J’ai fait des essais avec les inclinaisons :
20°,
45°,
636(angle
du faisceau avec la normale à laplaque).
Uneincidence presque normale donne pour
chaque
rayon xune tache
unique
de formeirrégulière,
que riend’esseu-tiel ne
distingue
des autres noircissements.Qnanl
l’incidence est t
rasante,
lesgrains
impressionnés
parun même rayon
apparaissent
trop
espacés
pour quel’mil püisse
les rattacher nettement à une mêmetrajec-toire : on
perçoit
la directiongénérale
du faisceau sanspouvoir compter
lestrajets
individuellement. Aucon-traire,
une incidence moyenne met bien en évidence la corrélation desgrains
d’un même parcours, et l’incli-nuaison destrajets
parrapport
auplan
de visèe dupoint,
~le sefigurer
ladisposition
du parcours dansl’espace
et dedistinguer
entre ellesplusieurs
trajectoires
qui,
enperspective,
paraîtraient
seprolonger.
C’est l’incidence de 251(représentée
sur lafigurel qui
m’a donné le meilleur résultat.La source utilisée était une lame d’or dont la tranche
avait été activée par une
exposition
(leplusieurs
heures à l’action d’undégagement
de thoron. Lecharnp
magnétique
étaitproduit
par un électro aimant dontles
pièces polaires
avaient unelargeur
suffisante pourque le
champ
fût uniforme sur tout letrajet
du faisceau. Le courant(de
fItampères)
était maintenu constant à 1 pour 100 à l’aide d’un rhéostat deL°églage pendant
les 15 min que duraitl’exposition.
Lechamp
magnétique
obtenu était de 8 000 gauss environ. Un vide dequelques
millièmes de millimètres était maintenu dansl’appareit
pendant
toute la durée del’expérience
par une pompeà huile et une pompe à vapeur de mercure
Séparation
des radiations du thorium C et C’.- On sait que les
corpuscules 2
émis par ledépôt
actif
du thorium sont de deux sortes : ceux du thorium Cet
ceux du thorium
C’,
dont les vitesses sontrespective-ment : 1,70 10~
cm/sec
et~,054.10~ cm/sec.
Voyons
dans
quelles
conditions les deux radiations donneront deux raiesséparées
et,
pourcela,
reprenons le calculindiqué
par NI. Rosenblum dans sathèse,
en lemodi-fiant pour tenir
compte
de ladisposition
particulière
de laplaque.
Fig. 2.
L’expression analytique
des rayonsOJ,
0F’
nousdonne :
Comme nous ne faisons
qu’un
calculapproché,
nousnégligerons
lepremier
terme du second membre devant le second et nousnégliceroiis Il devante
cequi
nousdonne : -.
Dans un
champ
de 8 000 gauss, le rayon de courburedu faisceau de rayons a est : 443 mm pour Th
C,
534 mmpour Th C’. Comme d’autre
part :
on trouve :
Fig. 3.
La distance des centres des raies sera donc :
Pour calculer la
largeur g
desraie~,
formonsl’expres-sion
analytique
des rayons01 II, 02E :
ou, en faisant les
approximations légitimes :
D’autre
part :
128
D’où on tire :
En
prenant
pour R une valeur moyenne, on trouve : «Pour que les raies soient
séparées,
il faut due : Il suffirait donc d’avoir des fentes de mm delargeur.
Les fentes ont étéréglées
à0,03
mm defaçon
à avoir des raieslargement
séparées.
Dénombrement des
particules. -
Lesplaques
étaient observées aumicroscope.
J’ai utilisé un fortgrossissenlent (600)
pour avoir une trèspetite
latitudede mise au
point.
Lestrajectoires
desparticules x
appa-raissent comme depetits
traits constitués chacun par six à huitpoints alignés.
Ils ont à peuprès
la même direction et s’enfoncentobliquement
dans lagélatine,
ce
qu’on
constate en faisant varier la mise aupoint.
Fig. 4.
Dans une
première
séried’observations,
j’ai exploré
systématiquement
larégion impressionnée
endessi-nant et
comptant
les traits au moyen d’une chambre claire. Lechamp permettait
d1étudier un carré de0,15
mm de côté. Tous les traits contenus dans cecarré étaient
représentés
à l’aide de la chambre clairesur un carré de
papier
de 9 cm de côté.Après
quoi
laplaque
étaitdéplacée
de 15 centièmesexactement,
d’abord
perpendiculairement
à la direction desraies,
puis
parallèlement.
En divisant le dessin en bandes
d’égale
largeur
(2,7 centièmes), parallèlement
à la direction desraies,
j’ai
établi la structurequantitative
duspectre
oc. Lacourbe ci-dessus montre
bien,
avec leurs intensitésrespectives,
les deux raies ThC et ThC’ très nettementséparées,
comme le calcul l’avait faitprévoir.
La
largeur
efficace des raies étant de 12 centièmesenviron,
onpeut explorer
chacune d’elles en l’amenant entièrement à l’intérieur d’un carré de 15centièmes,
et en
déplaçant
simplement
le carréparallèlement
à la raie. C’est ce quej’ai
fait dans une seconde séried’obser-vations, beaucoup plus considérable,
etportant
surenviron 16 000
particules
a. J’aicompté,
dans 100car-rés contenant la raie la moins
déviée
(ThC’)
10466 traitaet dans 100 carrés contenant t la raie la
plus
déviée(Th(,) : 5
582traits;
cequi donne,
pour lerapport
ThC’/ThC
la valeur :soit 65 pour 100 pour
ThC’,
et 35 pour 100 pour ThC. Le calcul desprobabilités
montre que laprécision
sur cette mesure, ensupposant
que tous lescorpuscules
ont été effectivementcomptés,
est de2,5
pour 100. La méthodephotographique
donnedonc,
si l’on se borne à 15 000traits,
une détermination moinsprécise
que la méthode de lacharge électrique
utilisée parGré-goire,
etqui
donnait à0,5
pour 100près
unrapport
de
1,90
soit65,5
pour 100et34,~
pour 100.Elle fournit néanmoins une bonne vérification de ce dernierrésultat.Conclusion. - Je crois avoir montré l’intérêt que
présente
la méthodephotographique
pour l’étude durayonnement
a. Elle pourra sans doute êtreemployée’
avec succès àl’analyse
desspectres 2
par la méthode de focalisation. Il me semblequ’elle
offre cetavantage
par
rapport
à la méthode ducompteur, qu’elle permet
d’enregistrer
simultanément toutes les raies oc; tandisque la méthode du
compteur
nepeut
que lesenregistr r
successivement,
à mesure que l’ondéplace
la fente (lucompteur
dans lespectre,
et donne ainsi les intensités des diverses raies à des moments différents de l’évolu-tion du corps radioactif.D’un autre
côté,
le dénombrement aumicroscope
estbeaucoup
plus long
etpénible
que le dénombrementautomatique
ducompteur.
Ce travail a été exécuté au laboratoire de l’Institut
du Radium. Je remercie NI. Debierne