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L'internationalisation des villes, entre action publique intégrée et nouvelle étape dans la production urbaine

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-01680704

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01680704

Submitted on 11 Jan 2018

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L’internationalisation des villes, entre action publique intégrée et nouvelle étape dans la production urbaine

Nicolas Maisetti

To cite this version:

Nicolas Maisetti. L’internationalisation des villes, entre action publique intégrée et nouvelle étape dans la production urbaine. Pour mémoire., La Défense: Ministère de l’écologie du développement durable et de l’énergie Direction de la communication Département Images et édition, 2017. �hal-01680704�

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L’internationalisation des villes, entre action publique intégrée et nouvelle étape dans

la production urbaine

Nicolas Maisetti,chercheur en science politique associé au Laboratoire Techniques, Territoires et Sociétés (LATTS, UMR 8134 CNRS)

Ce texte s’appuie sur une restitution partielle de mon travail de doctorat mené à l’université Paris I entre 2007 et 2012.

Cette enquête sociologique explorait la question de l’internationalisation de la ville de Marseille. Mon travail se situe au carrefour de plusieurs disciplines et en premier lieu de la science politique : je m’intéresse d’abord à la question des pouvoirs dans la fabrication de l’action publique locale. Toutefois, en raison de son objet, cette recherche s’est appuyée sur d’autres traditions disciplinaires, à savoir les relations internationales et les études urbaines.

C’est à partir des résultats de l’enquête que je propose d’exposer ici une carte des politiques internationales conçues et mises en œuvre par les collectivités territoriales. Pour chaque catégorie d’action publique, je préciserai le dispositif, son histoire et ses enjeux en termes d’exercice des pouvoirs locaux.

La cartographie des actions publiques internationales des gouvernements urbains

actes

© Nicolas Maisetti

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Le schéma que je vous propose repré- sente certaines des formes possibles de l’internationalisation d’une ville ou d’une région et les dispositifs d’action publique mis en place à cette fin.

En abscisse, j’ai représenté un conti- nuum entre une « internationalisation extravertie » et une « internationalisa- tion réceptive ». Par « internationali- sation extravertie », j’entends des poli- tiques publiques caractérisées par une projection internationale des ressources locales et régionales. Par « interna- tionalisation réceptive », je décris le contraire, c’est-à-dire l’accueil des dyna- miques internationales et l’ensemble des mobilisations locales destinées à obtenir des ressources trouvant leur origine en dehors de l’espace local.

En effet, l’internationalisation des col- lectivités territoriales ne désigne pas uniquement une projection à l’extérieur, mais doit pouvoir également rendre compte de l’accueil des dynamiques internationales : hébergement de sièges d’organisations internationales, accueil d’événements politiques, culturels, sportifs à dimension internationale, etc.

Bien entendu, la pertinence de ces axes du graphique peut être soumise à discus- sion dans la mesure où certaines poli- tiques publiques internationales sont à la fois extraverties et réceptives. Il faut surtout concevoir ce schéma comme un guide de compréhension et non comme un instrument de classification rigide.

En ordonnée, je décris un continuum entre une internationalisation de « haute intensité » et une internationalisation de

« basse intensité ». Ce vocabulaire fait référence à la sociologie des relations internationales. L’internationalisation de basse intensité renvoie aux actions internationales qui revêtent une dimen- sion symbolique et se traduisent par la mise en scène du pouvoir ou la mise en œuvre d’instruments de communication politique. L’internationalisation de haute intensité évoque les actions internatio- nales menées pour leurs retombées éco- nomiques directes et leurs effets atten- dus sur la croissance économique locale.

Les actions publiques internationales des gouvernements urbains

Les coopérations décentralisées

Les « coopérations décentralisées » for- ment la première de ces catégories d’ac- tion publique internationale menées par les gouvernements urbains. Ce sont, his- toriquement et dans l’imaginaire, les pre- miers dispositifs d’internationalisation des villes. Elles trouvent leur origine dans les jumelages initiés dans les années 1950.

Elles ont beaucoup évolué pour faire aujourd’hui l’objet de coopérations tech- niques ancrées dans des logiques de projets.

Toutefois, plutôt que d’envisager l’évo- lution de la coopération décentralisée comme une succession d’opérations de solidarité, puis d’opérations d’appui ins- titutionnel, puis de coopérations écono- miques et ainsi de suite, j’y vois plutôt une

évolution par strates laissant une place importante à la simultanéité des pratiques.

Je me rappelle d’un entretien avec Bertrand Gallet, directeur général de Cités unies France, qui me disait en substance qu’en matière de coopéra- tion décentralisée, tout coexiste avec tout. Il ne sert à rien de dessiner un jar- din à la française, où tout serait bien ordonné. Et en effet, au sein d’un même projet peuvent se retrouver à la fois : la démonstration de l’amitié interna- tionale, apparemment propre aux opé- rations humanitaires et de solidarité ; la formation et l’accompagnement à la maîtrise de certaines compétences (qui n’est donc pas l’apanage des projets d’appui institutionnel) ; des échanges de bonnes pratiques (qui ne se limitent pas à l’inscription dans les réseaux inter- nationaux) ; des projets de coopération économique qui ne concernent plus seu- lement les échanges nord-nord, mais de plus en plus nord-sud. C’est pourquoi il est vain de conclure à la disparition de formes supposées traditionnelles de la coopération (l’amitié et la solidarité internationale) au profit de formes sup- posées modernes (le développement économique, les dynamiques partena- riales et la quête de la réciprocité).

Trois tendances caractérisent l’histoire récente des coopérations décentrali- sées. Premièrement, nous observons une véritable professionnalisation des pra- tiques, qui semble aujourd’hui évidente et sur laquelle il n’est pas utile de revenir.

Deuxièmement, il faut noter la consolida- tion du cadre juridique qui a balayé depuis une décennie les dernières incertitudes

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progressif des pratiques européennes.

Les principales villes et les régions ont reçu des financements dans le cadre des politiques régionales. À mesure des élar- gissements successifs de l’UE, ces fonds destinés au rattrapage des territoires en difficulté se sont raréfiés pour les villes françaises. Pour autant, leurs agents ont acquis une expertise dans le montage des demandes de subventions et des réponses aux appels à projets. Dès lors, elles sont parvenues à financer par l’UE leur politique internationale, en particulier leurs coopé- rations décentralisées, alors même que les conditions de co-financement du Ministère des affaires étrangères se durcissaient.

Autrefois instrument du développement local et régional, l’Europe est ainsi deve- nue, par professionnalisation des agents, un guichet de financement de l’action internationale des collectivités locales.

Cependant, le fait européen s’est peu à peu inscrit dans des routines bureaucra- tiques et sous la forme d’un savoir-faire local, si bien que l’Europe n’est pas seule- ment un bailleur, mais constitue un espace d’action locale à part entière. Depuis le milieu des années 2000, avec l’élargisse- ment de l’Union européenne et l’échec du traité constitutionnel, le rapport des col- lectivités à l’Europe a changé. Les auto- rités locales et régionales, encouragées par l’État, ont peu à peu pris la mesure que l’UE ne se résumait pas à des finance- ments et que ceux-ci allaient être de plus en plus réduits. Elle est un producteur de normes d’actions publiques et de règle- ments à appliquer. Pour éviter le conten- tieux communautaire et les sanctions qui ne manquent de tomber en cas d’entorses à la bonne application, il convient donc

d’être présent en amont du calendrier européen, d’avoir une connaissance pré- cise de la complexité des procédures et du circuit des institutions communautaires.

Ces transformations institutionnelles ont ainsi invité les collectivités locales à développer un véritable lobbying à Bruxelles mené par des représentants dédiés à ces tâches. Ils passent par des bureaux de représentation, par des associations ou des réseaux, de type AFCCRE (Association française du conseil des communes et régions d’Europe) ou Eurocities, voire par des contacts directs entre les élus et les hauts fonctionnaires européens. L’enjeu est d’identifier et de dialoguer avec des interlocuteurs capables de les orienter vers les opportunités de financement ou les espaces pertinents de la prise de décision. L’enjeu est également de bénéficier d’une reconnaissance de la part des institutions européennes, quitte à court-circuiter (et à agacer) les personnels diplomatiques de l’État, regroupés au sein de la Représentation permanente de la France auprès de l’UE.

La diplomatie décentralisée

La diplomatie décentralisée est une forme de coopération décentralisée, également évoquée dans la littérature par l’expression de « diplomatie des villes » ou de « paradiplomatie », qui désigne les engagements des gouver- nements locaux sur des initiatives inter- nationales telles que la résolution des conflits, les négociations climatiques internationales, etc. Mes recherches montrent que la diplomatie décentra- juridiques qui pesaient, en particulier sur

la question de « l’intérêt local » des pro- jets internationaux. Troisièmement, nous pouvons constater l’élargissement consi- dérable du système d’acteurs : sur le plan vertical, les collectivités locales ne sont plus seules face à l’État, mais peuvent compter sur l’Union européenne et les organisations internationales non plus seulement comme guichets ou co-finan- ceurs, mais aussi comme espaces d’ac- tions dont elles peuvent contribuer à façonner les orientations politiques. Sur le plan horizontal, les élus et les fonction- naires ne s’appuient plus seulement sur les experts en développement internatio- nal, sur des associations qui représentent par exemple des « communautés » issues des migrations, mais de plus en plus sur les entreprises, les milieux d’affaires, voire les chambres de notaires, qui sont enrôlés dans les coopérations décen- tralisées et invités par les édiles lors de leurs voyages à l’étranger qui déclinent les injonctions de « diplomatie écono- mique » et les transforment en « VRP internationaux » de leur territoire.

Les politiques européennes

Je voudrais ici évoquer les modalités par lesquelles les collectivités locales se sai- sissent du système politique européen. Il ne s’agit pas de regarder uniquement les politiques européennes destinées aux col- lectivités, mais bien d’interroger égale- ment la manière dont se traduit la mobi- lisation des acteurs locaux et régionaux auprès des institutions européennes.

Dans les années 1980, les collectivités locales françaises ont fait l’apprentissage

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lisée n’a pas balayé les logiques d’État, bien au contraire. Certes, elle a fait évo- luer les règles du jeu, en favorisant la reconnaissance internationale des villes et des régions. Cette contribution diplo- matique pourrait illustrer à première vue un thème, bien connu de la socio- logie des Relations internationales, celui de la « souveraineté perforée » des Etats qui ne sont plus des acteurs unitaires et ne sont plus les seuls protagonistes des échanges mondiaux. Ils sont des acteurs dotés de plusieurs « voix ». Reste à savoir si nous assistons à une cacopho- nie, à une succession de solos ou à un partage harmonieux des tâches.

Mon hypothèse est que sur ce point, la diplomatie décentralisée témoigne d’une recomposition et non d’un retrait des gouvernements centraux. Certes, l’irruption des villes et des régions dans les relations internationales représente un défi dans des activités traditionnellement accaparées par les Etats. Mais au regard de l’articulation de la diplomatie décentralisée avec la politique étrangère d’État, la première apparaît comme partie intégrante de la seconde.

À ce titre, la diplomatie décentralisée est saisie par les administrations centrales et locales comme une « enceinte déléguée » de la politique étrangère. Cette situation n’évacue ni les résistances de certains fonctionnaires du Quai d’Orsay, ni le fait que le desserrement de l’État a ouvert un espace juridique et politique pour l’expression potentielle d’une politique étrangère autonome à l’échelle des villes et des régions. La diplomatie décentralisée est un champ de tension propre aux rapports de pouvoir plutôt qu’un facteur « en soi » de situations conflictuelles.

Les politiques protocolaires

Les politiques protocolaires occupent une place importante dans les agen- das des personnels politico-administra- tifs des collectivités territoriales. Elles illustrent bien l’interpénétration entre les aspects réceptifs et extravertis des politiques internationales ainsi qu’entre les rétributions symboliques et écono- miques de ces échanges.

Parmi les politiques protocolaires, citons d’abord les visites des maires, qui en constituent les manifestations les plus visibles. Sur le modèle de la diplomatie économique du Quai d’Orsay, les maires et présidents de régions emmènent dans leurs déplacements internationaux des acteurs économiques locaux pour pro- mouvoir leurs territoires. Nous retrou- vons ici le tournant économique de l’in- ternationalisation des villes et leur coexistence avec des enjeux symboliques puisqu’il s’agit tout autant, au cours de ces voyages, de dynamiser des partenariats techniques, de promouvoir leurs entre- prises et de réaffirmer des liens d’ami- tié tout en apprenant éventuellement des bonnes pratiques.

Le deuxième type de politique protoco- laire s’incarne dans les « trophées inter- nationaux de la gouvernance urbaine », dont l’expression est empruntée au socio- logue Renaud Epstein. Cette démarche de distinction des collectivités est très ancienne et remonte aux années 1950, avec la création du concours des « Villes et villages fleuris ». Aujourd’hui, ces dis- positifs se sont multipliés et ont beau- coup évolué. Longtemps cantonnés à la

question du tourisme et du patrimoine, ils viennent désormais récompenser la qualité de la gestion territoriale et sont devenus un instrument privilégié de dis- tinction des pouvoirs locaux dans la com- pétition internationale des territoires.

Les politiques d’attractivité

La dernière catégorie d’action publique est celle des politiques d’attractivité.

Elles soulèvent la question de l’interna- tionalisation des territoires comme une ressource capable de stimuler la crois- sance économique locale. Cette problé- matique s’intègre dans la compétition des espaces urbains, en particulier des espaces métropolitains. Sur le plan des politiques publiques, cela se traduit par la multiplication des initiatives de mar- keting territorial et de city branding et par une mobilisation destinée à favori- ser l’implantation des entreprises inter- nationales ou de leurs sièges régionaux.

Sur un plan institutionnel, ces ambitions visent à attirer des organismes publics internationaux, comme par exemple des bailleurs de fonds multilatéraux.

En conclusion, ce panorama très des- criptif de l’internationalisation des villes, considéré sous l’angle d’une sociologie de l’action publique, permet d’envisa- ger une série de dispositifs disparates.

Il contribue à la compréhension de la manière dont les pouvoirs s’exercent aujourd’hui et dont le fait internatio- nal n’est plus un simple contexte, mais un objet et un enjeu de la production urbaine.

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