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Article pp.124-125 du Vol.3 n°2 (2013)

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CAS CLINIQUE /CASE REPORT

Dissection aortique révélée par une paraplégie brutale isolée

Sudden isolated paraplegia revealing acute aortic dissection

M. Vial · P. Cavalli · T. Guerin

Reçu le 1ermai 2012 ; accepté le 28 juin 2012

© SFMU et Springer-Verlag France 2012

Introduction

Les syndromes aortiques aigus sont des pathologies assez rares, représentant 2,6 à 3,5 cas pour 100000 habitants par an, 2/3 d’hommes, et dont l’âge moyen est de 65 ans [1,2], soit une incidence dans un service d’urgence estimée à 3 dis- sections pour 1000 patients consultant pour une douleur tho- racique et/ou dorsale [3]. Les syndromes aortiques aigus sont une urgence cardiovasculaire à la fois diagnostique et théra- peutique. En l’absence de traitement la mortalité est redou- table : 1 % par heure soit 50 % en 48h [4]. Une douleur brutale est présente dans 85 % des cas, les symptômes neuro- logiques ne sont pas le mode de révélation le plus fréquent (17 % des cas), majoritairement des manifestations hémiplé- giques expliquées par les dissections carotidiennes. Les paraplégies isolées sans douleur restent un mode de révéla- tion assez rare d’une dissection de l’aorte [5], il existe quel- ques cas rapportés dans la littérature [6-12]. Nous rapportons un cas de dissection aortique chez un patient ayant un anté- cédent de paraplégie secondaire à une malformation artério- veineuse (MAV) rendant le diagnostic difficile.

Observation

Ce patient de 61 ans appelle le centre 15 pour une paraparé- sie brutale. Il présente des antécédents de douleurs neuropa- thiques séquellaires d’une compression médullaire dorsale haute causée par un hématome sur une MAV en 1978, une chirurgie d’hernie discale en 1994 opérée, une cholecystec-

tomie, une chirurgie du genou droit, une hypertension arté- rielle. L’interrogatoire téléphonique ne retrouve pas de dou- leur thoracique, ni de dyspnée. Il fut pris en charge par une ambulance à domicile qui retrouve une hypotension arté- rielle sur le membre supérieur gauche (70/40 mmHg). Une équipe Smur est donc déclenchée.

À la prise en charge Smur, la fréquence cardiaque est à 60 c/min, il existe une anisotension avec 113/45 mmHg sur le bras droit et 77/31 mmHg sur le bras gauche, la SpO2 à 100 % en air ambiant, la glycémie capillaire à 0,82 g/l, le patient est apyrétique. Le traitement habituel comprend : noc- tamide 10 mg, pantoprazole 20mg, lamaline/baclofène 10 mg, prégabaline 75 mg, clonazépam 2mg, carbamazépine LP 400 mg, diclofénac LP 75mg. Le patient a un teint gris, présente des sueurs profuses, le score de Glasgow est à 15, il n’y a pas de désorientation temporospatiale. À l’examen neu- rologique, on constate une paraparésie avec une force muscu- laire à 2-3/5 des dysesthésies sur les deux membres inférieurs semblable à l’épisode de 1978, le reste de l’examen neurolo- gique ne retrouve aucune autre anomalie. L’examen cardiovas- culaire note des bruits du cœur réguliers, l’absence de souffle vasculaire, l’absence de signes d’insuffisance cardiaque, les pouls périphériques sont asymétriques avec une abolition au membre supérieur gauche du pouls radial, les autres pouls péri- phériques sont symétriques, et présence d’une anisotension avec le membre supérieur gauche. L’examen pulmonaire est normal, ainsi que l’examen abdominal. Malgré l’absence de douleur thoracique le cortège de symptômes (paraparésie, ani- sotension et anisosphygmie) évoque une dissection aortique.

Après pose d’une voie d’abord, monitorage cardiovascu- laire et tensionnel, le patient a bénéficié d’un transport médi- calisé au centre hospitalier, sans administration d’une théra- peutique spécifique. L’électrocardiogramme est normal. Le scanner thoraco-abdominal, réalisé en urgence avec et sans injection, visualise une dissection de l’aorte de type 1, avec dilatation aorte ascendante. Il n’a pas été réalisé de radio- graphie pulmonaire, et un bilan pré-opératoire a été prélevé, sans anomalie notable. Secondairement le patient présentait une élévation tensionnelle à 150/90 mmHg, nécessitant le recours à l’administration de nicardipine au pousse seringue

M. Vial (*) · P. Cavalli

Service urgence/Samu/Smur/UHCD, Centre hospitalier de Roanne, 28, rue de Charlieu, F-42300 Roanne, France

e-mail : michael.vial@laposte.net T. Guerin

Service des urgences-Samu-Smur-médecine pénitentiaire, Pôle urgence-réanimation, Centre hospitalier de Roanne, 28, rue de Charlieu, F-42300 Roanne, France

Ann. Fr. Med. Urgence (2013) 3:124-125 DOI 10.1007/s13341-012-0233-6

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-afmu.revuesonline.com

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à une vitesse de 2 mg/h qui permet de maintenir la tension artérielle systolique à 120 mmHg. Le patient est donc trans- féré en urgence dans le centre de chirurgie cardiovasculaire de référence, directement au bloc, pour la réalisation d’une opération de Tirone David. La chirurgie se déroule sans complications notables avec succès. Le patient bénéficie d’une rééducation devant la persistance de la paraparésie et de troubles vésicosphinctériens probablement en rapport avec une atteinte de l’artère médullaire moyenne. Après rééducation, le patient récupère un périmètre de marche tout à fait correct semblable à ses capacités antérieures, sans séquelles vésicosphinctériennes.

Discussion

Cette observation d’une dissection aortique révélée par une paraparésie brutale est un mode de révélation peu fréquent, puisque retrouvé dans 3,3 % des cas [13,14]. L’absence de douleur thoracique ou dorsale est retrouvée dans 5 à 15 % des cas [4,5]. L’association d’une paraplégie et de l’absence de douleur est rare, l’analyse de la littérature ne retrouve que quelques cas [6-12]. Par ailleurs le diagnostic de dissection n’est pas évoqué lors de la prise en charge initiale chez 38 % des patients qui présentent une dissection et quel que soit la forme clinique [4]. Dans cette observation, le diagnostic a été évoqué devant la présence d’une anisotension et d’une anisosphygmie qui finalement n’est présent que dans 31 % des cas de dissection aortique [2], cela permet de rappeler la nécessité d’une mesure systématique de la tension aux deux bras devant tout signe neurologique focalisé.

Les causes médicales (non traumatiques) de paraplégies brutales sont rares : en premier lieu les scléroses en plaque (SEP), les métastases épidurales, les tumeurs médullaires ou périmédullaires, et les causes ischémiques comme dans notre cas. Le tableau d’accident vasculaire médullaire est celui d’une douleur brutale. Les causes sont dominés par la patho- logie athéromateuse et disséquante de l’aorte et de ses bran- ches [15]. Dans notre cas l’absence de douleur peut être expliquée par l’antécédent de MAV avec hématome médul- laire opéré du patient. En l’absence d’anisotension la démar- che diagnostique aurait probablement été différente avec la recherche d’une lésion médullaire.

Concernant la prise en charge thérapeutique, l’utilisation des inhibiteurs calciques n’est pas un choix adéquat. Les bétabloquants par voie intraveineuse ont fait la preuve de leur supériorité par rapport aux inhibiteurs calciques pour le contrôle de la tension artérielle, ils diminuent la fréquence cardiaque, contrairement aux inhibiteurs calciques, ce qui contribue à diminuer le risque de rupture dans les dissections de type A [16]. En pratique, seulement 15 % des patients atteints d’une dissection reçoivent le traitement antihyper- tenseur adéquat [17].

Conclusion

Cette observation permet de rappeler qu’il faut penser à évo- quer le diagnostic de dissection de l’aorte devant une para- plégie brutale et ce malgré l’absence des signes classiques et notamment la douleur. Cette suspicion doit conduire à affir- mer ou infirmer le diagnostic avec la réalisation d’un scanner thoraco-abdominal avec injection en urgence. En effet le délai diagnostique retentit directement sur le pronostic.

Références

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Ann. Fr. Med. Urgence (2013) 3:124-125 125

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