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Exponentielles & logarithmes

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Academic year: 2022

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Texte intégral

(1)

Exponentielles & logarithmes

1. Exponentielle complexe.

2. Exponentielle et logarithme réels.

3. Exponentielle imaginaire.

4. Retour à l’exponentielle complexe.

5. Fonctions trigonométriques et hyperboliques.

6. Introduction au logarithme complexe.

7. Exponentielles de matrices.

Pierre-Jean Hormière _____________

« Mon père, je ne l'ai pas connu... Il a fait un livre de mathématiques sur les fonctions exponentielles, que j'ai perdu... »

Marguerite Duras.1

Introduction

L’idée de comparer la progression arithmétique 0, 1, 2, …, n, … et la progression géométrique 1, a, a2, … , an, … qui est à l’origine de la notion de logarithme, se rencontre dans le traité de l’Arénaire d’Archimède. Dans le Triparty en la science des nombres (1484), Nicolas Chuquet note que si l’on fait correspondre les termes de même rang, à la somme de deux nombres de la progression arithmétique correspond le produit des nombres de la progression géométrique. Cette corres- pondance fut étendue aux exposants négatifs par Michael Stifel (1544), mais les logarithmes ne se développèrent vraiment qu’au début du XVIIème siècle, lorsque l’écossais John Napier ou Neper (Mirifici logarithmorum canonis descriptio, Edimbourg, 1614), et le suisse Joost Bürgi (Aritmetische und geometrische Progresstabulen, Prague, 1620) eurent l’idée d’introduire des nombres intercalaires en quantité suffisante et construisirent des tables permettant de passer d’une progression à l’autre. Neper a rendu « continue » la correspondance entre les deux progressions en utilisant une image cinématique ; il les supposa engendrées l’une et l’autre par mouvement continu (« par fluxion ») : deux points mobiles se déplaçant le long d’une droite à partir d’une même position initiale, l’un M avec une vitesse uniforme, l’autre N avec une vitesse proportionnelle à son abscisse ; le logarithme de l’abscisse de N est alors par définition l’abscisse de M. Les premières tables de logarithmes décimaux sont dues à Henry Briggs (Arithmetica logarithmica, 1624) qui fait des logarithmes un outil de calcul numérique. Au cours du XVIIème, logarithmes, exponentielles et fonctions trigonométriques furent intimement liées à la création du calcul infinitésimal. Au XVIIIème siècle, grâce à une extension au champ complexe, Leonhard Euler mit en évidence les liens étroits unissant ces fonctions.

Benoît Rittaud a fait un exposé très vivant sur les Magnifiques logarithmes sur youtube, et dans l’Encyclopedia Universalis Jean-Luc Verley présente ces fonctions de manière claire et progressive.

Les contraintes de la taupe m’obligent ici à les aborder de manière très dogmatique, en commençant par l’exponentielle complexe.

1 Qui retrouvera jamais le livre perdu du professeur Henri Donnadieu (1872-1921), père de la grande Marguerite ? Marguerite, chère Marguerite, il ne fallait pas égarer le livre de mathématiques écrit par ton papa, car cela t’a condamné à écrire, écrire sans fin, écrire à perdre haleine, pour retrouver le livre perdu...

(2)

1. Exponentielle complexe. 2

Rappelons que le corps C des complexes, muni de la distance d(z, z’) = |z − z’|, est un espace métrique complet. Pour tout naturel n et tout complexe z, posons :

E0(z) = 1 et En(z) =

= n

k k

k z

0 ! si n 1.

En est une fonction polynomiale de degré n.

Proposition 1 : Pour tout réel x ≥ 0, la suite (En(x)) est croissante majorée.

Preuve : En+1(x) − En(x) = )!

1 (

1

+

+

n xn

≥ 0. Si x = 0, En(x) = 1. Fixons x > 0, et posons un(x) =

! n xn

. On a

) (

)

1( x u

x u

n

n+ =

+1 n

x → 0 , donc ∃n0

0+1 n

x 2

1. Alors ∀p ≥ 0 un0+punp 2

0 , et :

En(x) ≤ 1 +

! 1

x + … +

0!

0

n xn

(

1 + 2

1+…+ )

2 1

n0

n ≤ 1 +

! 1

x+ … + 2.

0!

0

n xn

.

Cette majoration reste vraie pour n < n0. Par suite (En(x)) est croissante majorée, donc convergente.

Proposition 2 : Pour tout complexe z, la suite (En(z)) est de Cauchy.

Preuve : Fixons z ∈ C. Soit q > p ; | Eq(z) − Ep(z) | =

| ∑

+

= q

p n

n

n z

1 !

|

+

= q

p n

n

n z

1 ! = Eq(|z|) − Ep(|z|) . Or, en vertu de la prop 1, (En(|z|)) est convergente, donc de Cauchy :

∀ε > 0 ∃ n0q > p > n0 Eq(|z|) − Ep(|z|) ≤ε.

Par suite, | Eq(z) − Ep(z) | ≤ ε. La suite (En(z)) est de Cauchy. C étant complet, elle est convergente : Définition : Pour tout complexe z, on pose exp z = ez = limn→∞ En(z) =

+∞

=0 !

n n

n z .

Proposition 3 : ∀(z, z’) ∈ C2 exp(z + z’) = exp(z).exp(z’).

Preuve : | En(z + z’) − En(z).En(z’) | =

| ∑

=

+

n

s

s

s z z

0 !

')

( −

= n

p p

p z

0 !.

= n

q q

q z

0 !

|

=

| ∑

+q n p

q p

q z p z

! . '

!

= n

p p

p z

0 !.

= n

q q

q z

0 !

|

par la formule du binôme

=

| ∑

+

pq np q n q p

q z p z

, ,

0 !

. '

!

|

+

pq np q n q p

q z p z

, ,

0 !

. '

! ≤

+

p q n n

q p

q z p z

2 !

'

!. =

=

+

n

n s

p

p z z

2

! ) '

( = E2n(|z| + |z’|) − En(|z| + |z’|).

Il reste à conclure par le lemme des gendarmes.

2 Les développements en série entière de l’exponentielle, du sinus et du cosinus, de l’arcsinus, du logarithme et du binôme furent exposés par Newton en 1665 (De analysi per aequationes numero terminorum infinitas).

L’idée de définir l’exponentielle comme somme de sa série entière est plus tardive. Cet exposé est dogma- tique, mais élémentaire. On peut l’enseigner juste après les espaces complets, et avant les séries numériques et entières, auxquels il sert alors d’introduction. Si on l’enseigne au cours du chapitre sur les séries numériques, alors les prop. 1, 2 et 3 découlent de l’absolue convergence et des produits de Cauchy. Il me paraît en revanche peu pédagogique d’enseigner ces choses après les séries entières.

(3)

Corollaire : ∀z ∈ C exp z 0. L’exponentielle est un homomorphisme de groupes de (C, +) dans (C*, +). En particulier ( exp z )1 = exp(−z).

Preuve : (exp z).exp(−z) = exp 0 = 1. D’où exp z ≠ 0 et ( exp z )−1 = exp(−z).

Proposition 4 : n N ∀z ∈ C

|

exp z − En(z)

|

z n

zn exp )!. 1 (

1

+

+

.

Preuve :

|

exp z − En(z)

|

=

| ∑

+∞

+

=n1 !

k k

k

z

|

+

+

=n 1 !

k k

k z

)!

1 (

1

+

+

n zn

[

1 +

+2 n

z +

) 3 )(

2 (

² + + n n

z + …

]

≤ . )!

1 (

1

+

+

n zn

[

1 +

1 z +

! 2

²

z + …

]

= nz z

n

exp )!. 1 (

1

+

+

. Corollaire 1 : La convergence de En(z) vers exp z est rapide.

Preuve : Posons un(z) =

! n zn

. On a ) (

)

1( z u

z u

n n+

= n+1

z → 0 , donc ∃n0

0+1 n

z ≤ 2 1.

Alors ∀p ≥ 0 un0+punp 2

0 , et | exp z − En0+p(z) | ≤ unp 2

0 exp |z| .

Remarque : En vérité, la convergence est rapide à partir d’un certain rang, qui dépend de z. Sur cette rapidité nous reviendrons dans le § suivant, dans le cadre réel.

Corollaire 2 : La convergence de En(z) vers exp z est uniforme sur tout disque DA = { z ; |z| ≤ A }, en ce sens que : ∀A ≥ 0 ∀ε > 0 ∃n0n ≥ n0 ∀z ∈ DA | exp z − En(z) |ε.

Preuve : Fixons A > 0. ∀z ∈ DA | exp z − En(z) | ≤ z n

zn exp )!. 1 (

1

+

+

n eA n

A . )!

1 (

1

+

+

. Or limn

)!

1 (

1

+

+

n An

= 0. Il reste à choisir ∃n0 tel que ∀n ≥ n0 A

n

n e A .

)!

1 (

1

+

+ ≤ε.

Corollaire 3 : L’exponentielle complexe est une fonction continue dans C.

Preuve : Montrons d’abord qu’elle est continue en 0. Pour |z| ≤ 1, on a (prop. 4) : | exp z − 1 | = | exp z − E0(z) | ≤ |z|.expz ≤ |z|.e. D’où limz→0 exp z = 1.

Comme exp(z + h) = exp(z).exp(h) , limh→0 exp(z + h) = exp z. cqfd.

Corollaire 4 : L’exponentielle complexe est C-dérivable, et égale à sa dérivée : lim zz0, zz0

0 0) exp(

) exp(

z z

z z

−−

= exp(z0) .

Preuve : Montrons d’abord le résultat pour z0 = 0. Pour 0 < |z| ≤ 1, on a (prop. 4):

| exp z − 1 − z | = | exp z − E1(z) | ≤ z z exp

!. 2

2

≤ 2! z2

.e , d’où

|

z z 1)

exp( − − 1

|

≤ |z|.e.

et lim z→0,z≠0 z

z 1) exp( −

= 1. Le cas général s’en déduit en posant z = z0 + h.

Corollaire 5 : L’exponentielle a un d.l. à tous ordres au V(0) : exp z =

= n

k k

k z

0 ! + O(z

n+1) .

Du coup, elle a un dl à tous ordres en z0, donné par : exp z = (exp z0).

=

n

k

k

k z z

0 0

! )

( + O((z − z0)n+1) .

(4)

Preuve : Pour |z| ≤ 1, on a (prop. 4) : | exp z − En(z) | ≤ e n

zn )!. 1 (

1

+

+

; d’où le dl fort en 0.

Exercice 1 : Propriétés des polynômes En(z).

1) Montrer que les polynômes En(z) ont toutes leurs racines simples dans C.

2) Montrer que ces racines tendent vers l’infini en module, en ce sens que la suite rn = inf{ |z| ; En(z) = 0 } tend vers +∞.

3) Etude du zéro négatif.

a) Montrer que, si n est pair, En est sans racine réelle, et, si n est impair, En a une seule racine réelle, xn, qui est négative.

b) Montrer, en appliquant la formule de Taylor-Lagrange à ex sur [xn , 0] que |xn| < n + 1.

c) Vérifier que exp(xn) =

+∞

= + 1( + )!

k k nn

k n

x . En déduire )!

1 (

1

+

+

n xnn +

)!

2 (

2

+

+

n

xnn < exp(xn) <

)!

1 (

1

+

+

n xnn . d) On pose xn = − ( n + 1 ).βn. Déduire de c) que la suite (βn) converge vers l’unique racine ξ de l’équation x.exp(x + 1) = 1. Conclusion 3 ?

Exercice 2 : Montrer que la suite (En(z)) ne converge uniformément que sur les parties bornées de C.

Exercice 3 : Montrer que les polynômes Pn(z) = ( 1 + n

z )n tendent simplement vers ez, la conver- gence étant uniforme sur toutes les parties bornées.

Remarques culturelles :

1) Un théorème de I. Schur (1930) et R. Coleman (1987) affirme que En(z) est irréductible dans Q[X] et a pour groupe de Galois :

Gal(En : Q) ≈ AAAAn si n ≡ 0 ( mod 4 ) , Gal(En : Q) ≈ SSSSn sinon.

2) L’exercice 1 montre que les zéros de En se trouvent d’autant plus éloignés de l’origine que n est grand. Pour avoir une idée de l’endroit où ils se trouvent, on peut réduire le plan d’un facteur 1/n.

Comme cela, les zéros se trouvent dans le disque unité. Gabor Szegö (1895-1985) a démontré en 1924 qu’ils se rassemblent le long de la courbe d’équation

| z.exp(1 – z) | = 1.

Sur l’image ci-dessous, empruntée au beau livre de Georg Glaeser et Konrad Polthier,

« Surprenantes images des mathématiques » (Belin, 2013), p. 294, on a reporté les zéros de En(z) pour n = 10, 20 et 50 en rouge, vert et bleu (en réduisant chaque fois le plan d’un facteur 1/10, 1/20, 1/50 resp.). Le « collier de perles » pour les grandes valeurs de n est représenté en jaune.

Ce résultat est établi dans le beau et difficile problème de Centrale 2001.

Courbe de Szegö

3Pour un équivalent de (xn) par méthode de Laplace, cf. RMS mai-juin 2001 n° 239, p. 1071, et mes notes.

(5)

2. Exponentielle et logarithmes réels.

2.1. L’exponentielle réelle.

Proposition 1 : Si x ∈ R, exp x ∈ R. L’exponentielle réelle est un isomorphisme strictement croissant, continu et de classe C, du groupe additif (R, +) sur le groupe multiplicatif (R, ×).

On a : (ex)’ = ex , limx0 x

x 1) exp( −

= 1, (∀n N) limx+ n x

x)

exp( = +∞ , limx→−∞ xn.exp(x) = 0 . Proposition 2 : L’exponentielle est l’unique fonction dérivable f : R → R telle que :

f(0) = 1 et (∀x) f’(x) = f(x).

Plus généralement la solution de l’équation différentielle f(0) = c, f’(x) = a.f(x) est f(x) = c.exp(ax).

Preuve : par variation des constantes.

Si f(0) = c et f’(x) = a.f(x) , f est de classe C. Posons f(x) = C(x).exp(ax).

La fonction C(x) est de classe C, telle que C(0) = c.

On a, d’une part f’(x) = a.f(x), d’autre part f’(x) = C’(x).exp(ax) + a.f(x).

Donc C’(x) = 0 et C(x) = c. Réciproque facile.

Proposition 3 : L’exponentielle est l’unique fonction continue f : R → R telle que : (∀x) f(x) = 1 +

0xf(t).dt.

Ainsi, la fonction exponentielle est un point fixe de l’opérateur D de dérivation, mais aussi de l’opérateur intégral qui à f associe la fonction g = T(f) définie par g(x) = 1 +

0xf(t).dt.

Proposition 4 : Soient x1, ..., xndes réels > 0, An = n

x x1+...+ n

et Gn = n x ...1 xn et leurs moyennes arithmétique et géométrique respectives. On a Gn ≤ An , avec égalité ssi tous les xi sont égaux.

Plus généralement, si λ1, …, λn sont des réels > 0 de somme 1, on a :

i=n1xiλi

= n

i i i x

1

λ. , avec égalité ssi tous les xi sont égaux.

Preuve : Cela découle de la stricte convexité de l’exponentielle, ou de la stricte concavité du log.

D’autres preuves peuvent être trouvées dans le chapitre sur les inégalités.

La formule de Taylor avec reste intégral (Taylor-Laplace) donne diverses formes intégrales du reste de la série exponentielle :

ex− En(x) =

0x(xnt!)n.et.dt =

0xunn!.exu.du = enx!.

0xeu.un.du = ex. xnn+!1.

01sn.exs.ds .

Cette formule a plusieurs conséquences :

Pour x 0, on a ex− En(x) ≥ 0 , et En(x) ex. A vrai dire, cela découle de ex− En(x) =

+∞

+

=n 1 !

k k

k x .

• Pour x ≤ 0, on a E2m+1(x) ≤ ex ≤ E2m(x) pour tout m.

Cet encadrement n’est pas évident : certes, la série

+∞

=0 !

k k

k

x est alternée, mais elle n’obéit au critère des séries alternées qu’à partir d’un certain rang.

Avec Maple :

> with(plots):

> g:=plot(exp(x),x=-10..3,-4..4,thickness=2,color=black):

(6)

> P:=(n,x)->sum(x^k/k!,k=0..n):p:=n->plot(P(n,x),x=-10..3,-4..4,

thickness=2,color=COLOR(RGB, rand()/10^12, rand()/10^12, rand()/10^12)):

> display({g,seq(p(n),n=0..20)});

Revenons sur la rapidité de convergence de la suite (En(x)).

Nous avons dit que, pour tout x, la suite (En(x)) convergeait « rapidement » vers ex. Précisons cela : la convergence est rapide, mais à partir d’un certain rang seulement. Pour x ≤ 0, la suite (En(x)) oscille autour de ex (on vient de le montrer), mais elle commence par s’en éloigner, avant de s’en rapprocher à partir de n = [x]. C’est ce que montre le graphique suivant :

> listplot([seq([n,P(n,-15)],n=1..27)],color=blue,thickness=2);

Pour x ≥ 0, la suite (En(x)) tend en croissant vers ex, mais, là encore, la convergence n’est rapide qu’à partir de la valeur n = [x] :

> L:=listplot([seq([n,P(n,10)],n=1..25)],color=blue,thickness=2):

p:=plot(exp(10),x=0..25,color=black):display({L,p});;

(7)

L’exponentielle est un bel exemple de série que Laplace nommait « d’abord divergente, puis convergente ». La convergence est rapide du point de vue du calcul asymptotique, non du point de vue du calcul numérique. Cela dit, si l’on se place de ce point de vue, et si l’on cherche à réaliser une table de valeurs de l’exponentielle, on peut se borner à calculer exp(x) pour 0 ≤ x ≤ 1.

Exercice 1 : Pour x successivement égal à −5, −10 et −100, représenter sur un même graphe les fonctions n → En(x), et affines sur les segments [n , n+1].

Exercice 2 : On fixe x R. Trouver un équivalent de la suite (ex− En(x)) lorsque n → +∞. Exercice 3 : Montrer que ∀n ∈N* (1 +

n

1)n < e < (1 + n

1)n+1, ces suites encadrant e étant adjacentes.

Exercice 4 : Limite de la suite an = ( 1 + n

1)n ( 1 + n

a) ? Montrer que cette suite décroît ssi a ≥ 2 1. Exercice 5 : Montrer que ∀n ∈ N* (1 +

n

1)n.(1 + n 4

1 ) < e < (1 + n 1)n.(1 +

n 2

1 ) , ces deux suites encadrant e étant adjacentes.

Exercice 6 : Quelles sont les bijections affines du plan qui conservent l’exponentielle, c’est-à-dire la courbe C = { (x, ex) ; x ∈ R } ?

2.2. Logarithme népérien.

Cornichon !… Pirate !… Espèce de logarithme !… Ectoplasme !… Sapajou !…

Tintin, Objectif lune, p. 5 Définition 1 : On appelle logarithme népérien, ou naturel, la bijection réciproque de la fonction exponentielle réelle. On le note ln ou Log.

Proposition 4 : Le logarithme est un isomorphisme de groupes strictement croissant de (R*+, ×) dans (R, +). C’est une fonction de classe C, concave, et telle que x

dxd ln = x 1. Corollaire : Pour tout x > 0, ln x =

1xdtt .

Encadrements du logarithme : (1) ∀x ≥ 0 x −

2

²

x ≤ ln( 1 + x ) ≤ x

(2) Plus généralement, sur R+, ln( 1 + x ) est compris entre deux polynômes de Taylor consécutifs Pn(x) =

=

n

k

k k

k x

1 1

) . 1

( , autrement dit entre deux sommes partielles de la série

+∞

=

1

1

) . 1 (

n

n n

n x . (3) ∀x ∈ ]−1, 0] ln( 1 + x ) x

2 x2

.

Plus généralement, sur]−1, 0], ln(1 + x) est inférieur à tous ses polynômes de Taylor.

(8)

> with(plots):

> g:=plot(ln(1+x),x=-2..4,-4..4,thickness=2,color=black):

as:=plot([-1,y,y=-4..4],color=blue):

> P:=(n,x)->sum((-1)^(k-1)*x^k/k,k=1..n):

p:=n->plot(P(n,x),x=-2..4,-4..4,thickness=2,color=COLOR(RGB, rand()/10^12, rand()/10^12, rand()/10^12)):

> display({g,as,seq(p(n),n=0..10)});

Enfin, voici une minoration homographique : (4) ∀x > −1

+1 x

x ≤ ln( 1+ x ) ≤ x . Développement en série du logarithme.

Proposition 5 : ∀x ∈ ]−1, 1] ln(1 + x) =

+∞

=

1

) 1

1 (

n n

n xn

= x − 2

² x +

3 x3

− 4 x4

+ ...

Preuve : ln(1 + x) =

0x1dt+t =

0x[1t+ t2 ... + (1)n−1tn−1+ (1) n.1t+nt]. dt

= x − 2

² x +

3 x3

− ... + (−1)n−1 n xn

+ (−1) n.Rn(x) , où Rn(x) =

0x1t+nt.dt.

• Pour 0 ≤ x ≤ 1, on a : 0 ≤ Rn(x) =

0x1t+nt.dt

0xtn.dt = nxn++11 n1+1 .

• Pour −1 < x < 0, | Rn(x) | =

x0(1+t)tn.dt x1+1

x0(t)n.dt = (x+(1x)()nn++11) .

Dans les deux cas, limn→∞Rn(x) = 0. cqfd.

Corollaire : ln 2 =

+∞

=

1

) 1

1 (

n n

n .

(9)

Exercice 7 : Obtenir un autre développement en série de ln 2 = − ln(1/2). Pourquoi est-il meilleur que le précédent ? En déduire une valeur approchée de ln 2 à 105 près. Concevoir une table de logarithmes reposant sur le calcul de ln(1 + x) pour x ∈ [0,

2 1].

Exercice 8 : Développer en série ln x

x + 1

1 pour 0 < x < 1. En déduire une nouvelle expression de ln 2, et une valeur approchée à 10−7 près.

Exercice 9 : Si l’on définit le logarithme sur x > 0 par la formule ln x =

1xdtt , montrer que cette fonction vérifie toutes les propriétés de la proposition précédente

Exercice 10 : Construction de Briggs du logarithme.

1) Soit f une fonction R*+ R dérivable et telle que (x, y) f(x.y) = f(x) + f(y).

Montrer que f(x) = limn→∞ n (n x 1)

2) Soit x ≥ 1. Montrer que la suite (un(x)) = (n (n x− 1)) est décroissante minorée.

Soit g(x) sa limite. Calculer un(x.y) − un(x) − un(y) ; en déduire ∀x, y ≥ 1 g(x.y) = g(x) + g(y).

3) Prolonger g en un morphisme de groupe f : R*+ → R . Montrer que f est croissant.

Soit 0 < x < y. Montrer que n y y n

x y

.

n

yn xn x x n

x y

.

− .

En déduire que y

y−x ≤ f(y) − f(x) ≤ x y−x

, puis que f est dérivable.

Exercice 11 : Quelles sont les bijections affines du plan qui conservent le logarithme, c’est-à-dire la courbe C = { (x, ln x) ; x > 0 } ?

2.3. Puissances.

Certaines fonctions puissances ont été étudiées dans les petites classes : x → x2, x → x3, x → x1/2, x x2/3, x x3/2, x x−1/2, etc. Leurs domaines de définition varient selon l’exposant rationnel, mais toutes sont définies sur R*+, domaine sur lequel elles vérifient xp/q = exp(

q pln x ).

Si l’on veut définir ces fonctions avec un exposant réel, il faut se limiter à R*+ .

Définition 2 : Fonctions puissances. Soit a un réel. Pour tout x > 0, on pose : xa = ea.ln x . Proposition 5 : La fonction puissance est définie et C sur R*+ . ∀x, y > 0 (x.y)a = xa.ya . De plus (xa)

dx

d = a.xa−1 .

Remarques : 1) Il serait ridicule d’écrire x2 = e2.ln x ; cela n’est vrai que pour x > 0.

2) Les fonctions u(x)v(x) = ev(x).ln u(x)

sont des fonctions composées et s’étudient comme telles.

2.4. Equation de Cauchy.

Cherchons les applications f : R → R telles que : ∀(x, y) ∈ R2 f(x + y) = f(x) + f(y) (C) autrement dit les endomorphismes du groupe additif (R , +).

L’équation fonctionnelle (C) s’appelle équation de Cauchy.

De telles applications vérifient : ∀(λ, x) ∈ Q×R f(λ.x) = λ.f(x) .

Cela se montre par étapes : pour λ ∈ N par récurrence, Z par imparité, Q en prenant λ = q p.

(10)

Sans hypothèse additionnelle sur f, il n’est pas possible de l’exprimer simplement. Désormais nous la supposerons continue ou monotone.

La méthode de Cauchy consiste à raisonner par densité.

Si f est continue, la formule ∀λ∈ Q f(λ) = λ.f(1) implique, par densité de Q et continuité de f, que ∀r ∈ R f(r) = r.f(1). Si l’on pose a = f(1), il vient ∀x ∈ R f(x) = a.x.

Si f est continue en 0, f est continue en tout point. Le résultat subsiste.

Si f est monotone, tout réel x est limite de deux suites adjacentes (rn) et (sn) de rationnels. Ces suites vérifient f(rn) = a.rn et f(sn) = a.sn. Elles encadrent f(x) par monotonie de f, et elles tendent vers a.x. Donc f(x) = a.x.

Proposition 6 : Les fonctions f continues ou monotones vérifiant l’équation de Cauchy sont les fonctions f(x) = a.x.

Retrouvons ces résultats par la méthode d’Euler.

• Si f est continue, intégrons l’équation en y ∈ [0, 1], à x fixé.

Il vient, après changement de variable : (∀x)

xx+1f(t).dt= f(x) +

01f(y).dy.

Cela montre que f est C1. Par suite, en dérivant partiellement l’équation en x, f’(x + y) = f’(x), donc f’

est constante f’(x) = a. Comme f(0) = 0, f(x) est de la forme a.x.

Cette méthode reste valable si f est supposée réglée, ou intégrable-Riemann, sur [0, 1]. En parti- culier si f est monotone.

2.5. Exponentielles, logarithmes, puissances.

Proposition 7 : caractérisation axiomatique.

i) Les fonctions continues ou monotones f : R R*+ telles que ∀(x, y) ∈ R2 f(x + y) = f(x).f(y) sont les fonctions de la forme f(x) = exp(ax) , a réel ;

ii) Les fonctions continues ou monotones g : R*+ R telles que ∀ x, y > 0 g(x.y) = g(x) + g(y) sont les fonctions de la forme g(x) = a.ln x , a réel ;

iii) Les fonctions continues ou monotones h : R*+ R*+ telles que ∀ x, y > 0 h(x.y) = h(x).h(y) sont les fonctions de la forme g(x) = exp(a.ln x) , a réel.

Preuve : Considérer resp. les fonctions x → ln f(x), x → g(exp x) et x → ln f(exp x).

Remarque : On trouvera d’autres équations fonctionnelles liées à l’exponentielle dans le chapitre sur les équations fonctionnelles.

Proposition 8 : Logarithmes et exponentielles de base a.

Pour tout réel a ∈ ]0, 1[∪]1, +∞[, il existe une unique f continue ou monotone R → R*+ telle que

∀(x, y) ∈ R2 f(x + y) = f(x).f(y) et f(a) = 1 : c’est le logarithme de base a. On a : loga x = a x ln ln . La fonction réciproque est l’exponentielle en base a ; on la note expa x = ax = exp(x.ln a).

Les logarithmes les plus usités sont le logarithme népérien ou log en base e, le logarithme décimal, et le logarithme en base 2.

Proposition 9 : Croissance comparée. Notons fa,b,c(x) = exp(ax).xb.lnc x pour tout x > 1.

Lim x→+∞

) (

) (

, ,

' ,' ,'

x f

x f

c b a

c b

a = 0 ⇔

[

a’ < a ou (a’ = a et b’ < b) ou (a’ = a et b’ < b et c’< c)

]

Exercice 12 : Montrer que l’exponentielle et le logarithme sont des fonctions transcendantes, autrement dit qu’elles ne sont ni rationnelles, ni algébriques sur le corps R(X).

(11)

2.6. Echelles logarithmiques.

Une échelle linéaire est un système de graduation de la droite en progression arithmétique.

Une échelle logarithmique est un système de graduation en progression géométrique. Chaque pas multiplie la valeur par une constante positive. Cette échelle n’est définie que pour des valeurs strictement positives. La position sur l’axe d’une valeur est proportionnelle à son logarithme.

L'illustration ci-dessus montre les deux types d’échelles :

En ordonnée, l’échelle est linéaire : deux graduations dont la différence vaut 10 sont à distance constante.

− En abscisse, l’échelle est logarithmique : deux graduations dont le rapport vaut 10 sont à distance constante. Les nombres > 1 sont comprimés, rapprochés de 1 et facilement représentés, les nombres

< 1 sont dilatés et très vite renvoyés vers l’infini négatif.

L’échelle logarithmique est particulièrement adaptée pour rendre compte des ordres de grandeur dans les applications. Elle montre sur un petit espace une large gamme de valeurs, à condition qu’elles soient positives.

Les graphiques en repère semi-logarithmique servent à montrer l’évolution de grandeurs dont l’une a une évolution linéaire (en général, la variable sur l’axe des abscisses), et l’autre une évolution exponentielle. Ainsi, la suite (2n), difficile à représenter en repère linéaire, est beaucoup plus facile à représenter en repère semi-logarithmique.

Ci-dessous voici deux représentations de la suite (10n+1) pour n = 1, 2, 3, 4 :

(12)

Exercice : Que représente la courbe ci-dessous ?

Exercice : Représenter la suite de Fibonacci en repère semi-logarithmique.

> with(plots):

> phi:=(1+sqrt(5))/2;

> F:=proc(n) option remember;

if n=0 then 0 elif n=1 then 1 else F(n-1)+F(n-2);fi;end;

> f:=x->x- 0.5*ln(5)/ln(phi):as:=plot(f(x),x=0..8,thickness=2):

> G:=n->ln(F(n))/ln(phi);

L:=listplot([seq([k,G(k)],k=1..8)],thickness=2,color=black):

> v:=k->plot([k,y,y=0..G(k)],color=gold,thickness=2):

> h:=k->plot([x,k*ln(phi),x=0..8],color=blue):

> display({as,L,seq(v(k),k=3..8),seq(h(k),k=-2..13)},scaling=constrained);

Les graphiques en repère logarithmique sur les deux axes conviennent aux grandeurs dont tant la variable indépendante que la variable dépendante peuvent prendre des valeurs extrêmement différentes. Lorsque l’une est proportionnelle à l’élévation de l’autre à une puissance, le graphique dessine une droite dont la pente est proportionnelle à l’exposant.

Exercice : Représenter en repère logarithmique les fonctions y = x3 , y = x3 – x + 1.

(13)

2.7. Intermède musical… et guerrier.

Nombreuses sont les applications des logarithmes et des exponentielles : le vieux Que-sais-je de Delachet fait le point sur quelques-unes d’entre elles, en probabilités (lois de Poisson et de Laplace- Gauss comme limites de lois binomiales), physique-chimie (désintégration des substances radioactives, absorption des rayons X, décharge d’un condensateur dans une résistance, pression atmosphérique en fonction de l’altitude, thermodynamique, etc.), biologie et médecine. Citons-en d’autres.

« La musique est une science physico-mathématique », avait déjà noté Jean-Philippe Rameau en 1737. Dans son ouvrage sur Les fondements de la musique dans la conscience humaine (1961), le chef d’orchestre suisse Ernest Ansermet (1883-1969), qui enseigna les mathématiques avant de se tourner vers la musique, développa une théorie de la tonalité fondée sur les logarithmes : « Le fait que la conscience auditive perçoive les sons à venir en les rapportant à une position tonale acquise nous indique que l’établissement d’un système de logarithmes auxquels se rapporteraient toutes les positions tonales doit être possible, car un système de logarithmes doit avoir un commencement. » Et il écrit ailleurs : « Schönberg dit que les 12 sons n’ont de rapport que de l’un à l’autre. Or notre perception auditive étant logarithmique, la loi de la perception auditive, comme celle des séries logarithmiques, est de rapporter les positions tonales qui entrent en jeu dans la musique à la première position apparue. » Mais les théories mathématiques d’Ansermet le conduisirent à une conception normative de la musique. Aussi nous contenterons-nous de relever avec Novalis que

« Toute jouissance est musicale, et donc mathématique ».

Pertes humaines de la campagne de Russie (1812-1813) 4

La guerre aussi est une science physico-mathématique, de bien des points de vue. Lewis Fry Richardson (1881-1953) fut l’un des premiers à appliquer les mathématiques aux prédictions atmos- phériques, mais aussi à l’analyse statistique des guerres. Il classa les conflits en fonction de leur

« magnitude », c’est-à-dire du logarithme décimal du nombre total de morts, et étudia leur succession en tant que série temporelle d’événements, cherchant des régularités, se demandant si la magnitude moyenne augmente, etc. Un meurtre isolé a pour magnitude 0 5, le bûcher de Montségur

4 Ce graphe, dû à Charles Minard, montre les effectifs de la Grande Armée à l’aller et au retour de Moscou, par l’épaisseur de la ligne. En dessous, une fonction de la température en degré Réaumur (1° R = 1,25° C) se lisant de droite à gauche.

5 Il faut se méfier des meurtres isolés. Le 28 juin 1914, il y eut un meurtre isolé, à Sarajevo, et le 31 juillet, un autre, à Paris, rue du Croissant. Dans un autre registre, il y a un meurtre « isolé » de femme tous les trois jours dans notre beau pays. Le 21 octobre 2020, lors de la Matinale de France Inter, il s’est encore trouvé un auditeur pour juger que l’assassinat de Samuel Paty était un acte isolé. Isolé, vraiment ? Après les attentats de Charlie, du Bataclan, de Nice, de Londres, de Madrid, de New York de Syrie, d’Irak, d’Afghanistan, et j’en

(14)

(200 parfaits brûlés vifs), le massacre d’Oradour-sur-Glane (642 morts), les attentats depuis 2015 (240 morts) de magnitude 2, les attentats du 11 septembre 2001 (2977 morts) et le coup d’Etat du Chili du 11 septembre 1973 (3197 morts) de magnitude 3, la prise de Jérusalem lors de la Première croisade 6 (environ 10000 morts) et la Commune de Paris (entre 10000 et 20000 morts) de magnitude 4, la guerre d’Algérie de magnitude 5 7, les guerres napoléoniennes de magnitude 5 ou 6 selon les estimations 8, les deux grands génocides du 20ème siècle de magnitude 6 9, les deux guerres mondiales de magnitude 7 10. L’échelle logarithmique lisse l’incertitude sur les données : disparitions, morts ultérieures, épidémies, etc. (cf. B. Hayes, Les morts à la guerre, Pour la Science, août 2003).

En 2015, Benoît Rittaud a publié un stimulant essai sur La peur exponentielle : « C’est une nouvelle venue à ajouter à la liste de nos peurs collectives, et son objet est des plus inattendus : un concept mathématique abstrait. Déclinable à l’infini, la peur de l’exponentielle est une réalité contemporaine aussi répandue que méconnue. Scientifiquement construite bien que parfaitement irrationnelle, elle constitue la matrice originelle de quantité de discours alarmistes fondés sur la crainte que nous irions collectivement bientôt heurter de plein fouet les limites du monde : épuisement des ressources naturelles, démographie mondiale, réchauffement climatique... »

2.8. Trigonométrie hyperbolique réelle.

« J’avais fait, je m’en souviens, une faute de signe devant un cosinus hyperbolique. »

Raymond Abellio La trigonométrie hyperbolique a été étudiée par Vincenzo Riccati (1707-1775) et Johann-Heinrich Lambert (1728-1777). C’est au premier que l’on doit les noms de sinus et cosinus hyperboliques, ainsi que la formule ch2 x − sh2 x = 1. L’analogie de cette formule avec cos2 x + sin2 x = 1 fut élucidée par Euler.

Définition 3 : Les fonctions cosinus, sinus, tangente et cotangente hyperboliques sont définies par :

ch x = 2

x

x e

e +

, sh x = 2

x

x e

e

, th x = chx

shx , coth x = shx chx .

passe ? Isolé, vraiment, quand les élèves sont transformés par leurs parents et par certains prédicateurs en indicateurs des islamo-nazis ?

6 Selon les recherches récentes, ce massacre de la population musulmane et juive de la ville par les Croisés, les 15 et 16 juillet 1099, n’a pas été aussi systématique que l’on croyait. Belle occasion de rappeler que la Sixième croisade, dirigée par Frédéric II, a permis, elle, de reprendre Jérusalem sans combats.

7 Elle a fait environ 350.000 morts (entre 300.000 et 400.000 selon Guy Pervillé), en incluant les morts et disparus français et européens de souche (soldats et pieds-noirs) et algériens (tués par l’armée, l’OAS ou le FLN).

8 Les pertes humaines des guerres napoléoniennes (1803-1815) sont difficiles à chiffrer : morts au combat, suites de blessures, maladies, famines, hypothermie, tirs amis, victimes civiles… De 1799 à 1815, 2.432.335 Français ont été appelés au service militaire ; en enlevant 15 à 25 % de réfractaires ou d’insoumis, 2 millions ont été réellement incorporés. Les études menées à partir d’échantillons de population militaire donnent le chiffre de 600.000 morts français, auxquels il faut ajouter 200.000 soldats alliés. Selon Thierry Lentz, les pertes « oscillent entre 400 000 et 1 million de soldats. Le vrai chiffre doit effectivement se situer au milieu, vers 700 000 morts. A titre de comparaison, la guerre de Trente ans a fait plusieurs millions de victimes. » Les morts de l’armée napoléonienne sont très inférieures à celles de la Première Guerre mondiale, durant laquelle deux fois plus de Français sont morts sur une période deux fois et demie moins longue (source wikipedia).

9 Le génocide arménien de 1915-1923 a fait environ 1.200.000 victimes. Le nombre de victimes de la Shoah est d’environ 5.185.000 morts (source wikipédia). Le génocide rwandais de 1994 a fait 800000 morts en trois mois.

10 Les pertes humaines de la Première guerre mondiale sont évaluées à 18,6 millions de morts : 9,7 pour les militaires et 8,9 pour les civils. Celles de la Seconde guerre mondiale dépassent les 60 millions de morts, soit 2,5 % de la population mondiale (source wikipedia).

(15)

Graphes et variations.

Graphes de ch et sh Graphes de th et coth Propriétés :

• ch, sh et th sont définies et C sur R, coth est définie et C sur R*.

• ch est paire, sh , th et coth sont impaires.

• Les formules seront citées plus bas (§ 5).

La courbe d’équation y = ch x est appelée chaînette ou caténaire. Elle a, en son sommet, une forme moins pointue que la parabole. En mai 1690, Jacques Bernoulli posa la question de déterminer la forme prise par un fil ou une chaînette pendue à deux clous. Le problème fut résolu en 1691 simultanément par Huygens, Leibniz et Jean Bernoulli. Ils trouvèrent une courbe d’équation y = a.ch(x/a). Plusieurs voûtes de la Sagrada Familia et de la Casa Milà, conçues par l’architecte catalan Antoni Gaudi (1852-1926), ont la forme de caténaires renversées. Le Jefferson National Expansion Memorial, aussi nommé Gateway Arch (St. Louis, USA), conçu par l’architecte Eero Saarinen (1910-1961), a également cette forme. Cette gigantesque arche de 192 m. de haut sur une base de 192 m. de long, surplombant le Missouri, a été construite de 1947 à 1968 (voir ci-dessous). En revanche, les câbles des ponts suspendus et les arches des ponts ont un profil parabolique. La chaînette est aussi le profil d’une voile rectangulaire attachée à deux barres horizontales, enflée par un vent soufflant perpendiculairement à ces barres, en négligeant le poids propre de la voile par rapport à la force du vent. Signalons enfin les réalisations d’un autre grand nom de l’architecture, Santiago Calatrava (1951).

(16)

Triple hommage à Eero Saarinen, Antoni Gaudi et Santiago Calatrava Fonctions réciproques :

♣ sh est un C-difféomorphisme croissant de R sur R. Sa bijection réciproque est notée Argsh.

C’est également un C-difféomorphisme croissant de R sur R . On a : x = sh y ⇔ y = Argsh x = ln(x + x²+1) et

dx dy =

² 1

1 +x .

ch induit un homéomorphisme croissant de R+ sur [1, +∞[. Sa réciproque est notée Argch.

On a : x = ch y y = Argch x = ln(x + x²−1) et dx dy =

1

² 1− x .

♥ th est un C-difféomorphisme croissant de R sur ]−1, 1[. Sa réciproque est notée Argth.

On a : x = th y ⇔ y = Argth x = 2 1ln

x

x + 1

1 , et dx dy =

² 1

1

x .

♠ coth est un C-difféomorphisme décroissant de R* sur ]−∞, −1[∪]1, +[ sur R*. Sa bijection réciproque est notée Argcoth.

On a : x = coth y y = Argcoth x = 2 1 ln

1

−1 + x

x , et dx dy =

² 1

1

x .

En réalité, il n’y a aucun inconvénient à considérer Argth et Argcoth comme les restrictions à ]−1, 1[ et ]−∞, −1[∪]1, +∞[ resp. d’une même fonction, y =

2 1ln

|

1

−1 + x

x

|

, de dérivée dx dy =

² 1

1

x . Graphes et variations :

Graphes de Argsh et Argch Graphes de Argth et Argcoth

2.8. Distance de Lobatchevski dans le plan.

Si M(x, y) et M’(x’, y’) sont deux points de R2, définissons leur distance de Lobatchevski par :

(17)

d(M, M’) = Argch( ch(x – x’).ch y.ch y’ sh y.sh y’ ) Cette fonction d est bien définie, car

ch(x – x’).ch y.ch y’ sh y.sh y’ ch y.ch y’ sh y.sh y’ = ch(y – y’) ≥ 1.

Elle vérifie les trois axiomes des distances.

d(M, M’) = 0 ⇔ ch(x – x’).ch y.ch y’ sh y.sh y’ = 1 ch(y – y’) = 1 y = y’ . Reportant, ch(x – x’).ch2 y − sh2 y = 1, donc ch(x – x’).ch2 y = ch2 y , et x = x’.

Voilà pour (D 1) ; (D 2) est immédiat ; quant à l’inégalité triangulaire (D 3), nous l’admettrons.

On peut démontrer que les droites de ce plan (au sens défini dans le chapitre sur les espaces métriques, § 2) se partagent en quatre classes :

La première classe est formée de la droite euclidienne D1 = { (x, y) ; y = 0 }.

La seconde classe est formée des courbes D2(a, c) = { (x, y) ; c.th y = sh(x − a) } (a, c) ∈ R2. La troisième classe est formée des courbes D3(c, ε) = { (x, y) ; th y = c.exp(ε.x) } (c, ε) ∈ R*×{±1}.

La quatrième classe est formée des courbes D4(a, c) = { (x, y) ; th y = th c.th(x a) } (a, c) R×R*.

Exercice 13 : Démontrer (D 3). Démontrer que la distance d est topologiquement équivalente aux distances usuelles sur R2. Quelle distance induit-elle sur les axes ? sur les verticales ? sur les horizontales ? Etudier les cercles de centre O, de centre A(0, b). Représenter les cercles de centre O, ainsi que quelques cercles pour la distance d, et quelques « droites ».

3. Exponentielle imaginaire.

Proposition 1 : Soit U = { z ∈ C ; |z| = 1 }. L’application x ∈ R → eix ∈U est un homomorphisme continu du groupe additif (R, +) dans le groupe multiplicatif (U, ×). Ce morphisme est indéfiniment dérivable et ( eix )’ = i.eix .

Preuve : ∀z ∈ C En(z) = En(z). A la limite, il vient expz = expz. En particulier, si z = i.x (x réel), on a exp(ix) = exp i.z = exp(−ix) =

) exp(

1

ix , donc | exp ix | = 1 et exp(ix) U.

L’application x → exp(ix) vérifie exp i.(x + x’) = exp(ix).exp(ix’) : c’est un morphisme de groupes, continu et dérivable, comme composé de x → ix et de z → exp z.

Définition 1 : Les fonctions cosinus et sinus sont définies sur R par :

cos x = Re exp(ix) =

+∞

=

0

2

)!

2 .( ) 1 (

n

n n

n

x et sin x = Im exp(ix) =

+∞

=

+

− +

0

1 2

)!

1 2 .( ) 1 (

n

n n

n x

(18)

On a aussitôt les formules d’Euler 11 : cos x =

2

ix ix e e +

, sin x = i e eix ix

2

, cos2 x + sin2 x = 1 , dx

d cos x = − sin x , dx

d sin x = cos x, mais aussi les formules d’addition :

cos(a + b) = cos a.cos b − sin a.sin b sin(a + b) = sin a.cos b + sin b.cos a , etc.

De plus, les fonctions sin et cos sont de classe C.

Pour x = 0, on a cos x = 1. Par continuité, on a cos x > 0 dans un intervalle [−α, α]. Si la fonction cos ne s’annulait pas sur R+, on aurait ∀x > 0 cos x > 0 en vertu du théorème des valeurs intermédiaires.

La fonction sin serait alors strictement croissante sur R+ et ∀a > 0 x a 0 < sin a sin x, donc dx

d (cos x + x.sin a) = sin x + sin a 0. La fonction x cos x + x.sin a serait décroissante majorée par 1… Or elle tend vers +∞, car | cos x | ≤ 1 et x.sin a → +∞. La fonction cosinus admet donc des zéros sur R*+. Comme elle est strictement positive sur [−α, α], la borne inférieure de ses zéros > 0 est un réel m > 0.

Exercice 1 : Retrouver ce résultat en montrant directement que cos 2 < 0.

Définition 2 (Baltzer-Landau 12) : On note π le réel défini par π = 2m, où m est le plus petit zéro >

0 de la fonction cos x ≡

+∞

=

0

2

)!

2 ) ( 1 (

n

n n

n x .

La borne inférieure m est adhérente à l’ensemble Z des zéros > 0 du cosinus. Par continuité du cosinus, cos

π

2 = 0. On a ∀x ∈ [0,

π

2[ cos x > 0, donc sin est croissant sur [0,

π

2[ ; sin

π

2 = ±1 implique sin

π

2 = 1. Du coup, cos x = 1−sin²x décroît de 1 à 0 sur [0,

π

2].

Au surplus, le cosinus est concave et le sinus convexe sur [0,

π

2]. Lorsque θ varie de 0 à

π

2 , exp(iθ) décrit bijectivement le quart de cercle x2 + y2 = 1, x et y ≥ 0.

Car si x2 + y2 = 1, x et y ≥ 0, alors x ∈ [0, 1] et ∃!θ∈

[

0,

π

2

]

x = cos θ. Alors y = 1 x− ² = sin θ. Comme exp(i.(θ + π)) = −exp(i.θ) et exp(i.(π−θ)) = −exp(−i.θ), par symétrie par rapport à Ox et Oy, lorsque θ décrit [0, 2π[, exp(iθ) décrit le cercle trigonométrique.

Proposition : L’application x ∈ R → eix ∈ U est surjective. Son noyau est le groupe additif 2πZ.

Remarque : Les formules d’addition

cos(a + b) = cos(a).cos(b) − sin(a).sin(b) sin(a + b) = sin(a).cos(b) + sin(b).cos(a)

11 Ces formules ont été découvertes par Euler, qui fut le premier à considérer le sinus et le cosinus comme des fonctions de variable réelle ou complexe, et non plus comme des lignes dépendant d’un angle. Euler pouvait-il imaginer qu’un jour elles serviraient à définir le sinus et le cosinus ?

12 Cette définition du nombre π est due à Richard Baltzer (1818-1887). Ami de Kronecker, Baltzer fut professeur à Giessen à partir de 1869. Dans ses Elemente der Mathematik, il fut le premier à définir le nombre π/2 comme le plus petit zéro positif de la fonction cosinus définie à partir de sa série entière. Dans son Cours d’analyse, Edmund Landau (1877-1938), professeur à Göttingen où il succéda en 1909 à H. Minkowki, adopta et popularisa cette définition de π. Elle fit scandale, mais elle était l’aboutissement d’un long processus instaurant le primat de l’analyse sur la géométrie. Landau lui-même était un grand contempteur de la géométrie et des applications pratiques des mathématiques.

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