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Audience publique du 26 mars 2015

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GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE

Numéro 34658C du rôle Inscrit le 11 juin 2014

___________________________________________________________________________

Audience publique du 26 mars 2015 Appel formé par

Monsieur … ..., …,

contre un jugement du tribunal administratif du 7 mai 2014 (n° 33027 du rôle)

ayant statué sur son recours dirigé contre une décision du directeur général de la Police grand-ducale

en matière de discipline

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 34658C du rôle, déposée au greffe de la Cour administrative le 11 juin 2014 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur ... ..., demeurant à L-

…, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 7 mai 2014 (n° 33027 du rôle) l’ayant débouté de son recours en réformation, sinon en annulation formé contre une décision du directeur général de la Police du 16 avril 2013 ayant confirmé sur appel la peine disciplinaire de la réprimande prononcée à son encontre par le directeur de la circonscription régionale ... en date du 29 mars 2013 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 10 juillet 2014 par Madame le délégué du gouvernement Caroline PEFFER ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 3 octobre 2014 par Maître Jean-Marie BAULER au nom de Monsieur ... ... ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan HOLLER, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries à l’audience publique du 13 novembre 2014 ;

Vu l’avis de la Cour administrative du 19 décembre 2014 prononçant la rupture du délibéré suite à l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 12 décembre 2014 (n° 00115 du registre) ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe de la Cour administrative le 2 février 2015 par Maître Jean-Marie BAULER au nom de l’appelant ;

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Le rapporteur entendu en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Jean-Marie BAULER et Madame le délégué du gouvernement Linda MANIEWSKI en leurs plaidoiries à l’audience publique du 10 février 2015.

Par une note brevi manu du 6 février 2013, le premier commissaire divisionnaire ... ..., directeur de la circonscription régionale ... de la Police grand-ducale, ci-après désigné par « le directeur régional », notifia au commissaire en chef … ..., chef-adjoint au commissariat de proximité de ... , l’ouverture d’une enquête disciplinaire à son encontre, en se basant sur l’article 29 de la loi modifiée du 16 avril 1979 concernant la discipline dans la Force publique, ci-après désignée par « la loi du 16 avril 1979 ».

Le 14 mars 2013, le commissaire en chef ... ..., contrôleur régional ..., adressa au directeur régional un rapport en se référant à la procédure prévue par l’article 29 de la loi du 16 avril 1979.

Par un arrêté du 29 mars 2013, le directeur régional prononça à l’encontre de Monsieur ... la peine disciplinaire de la réprimande.

Contre cet arrêté, Monsieur ... interjeta appel le 4 avril 2013 auprès du directeur général de la Police grand-ducale, ci-après désigné par « le directeur général ».

Par une décision du 16 avril 2013, le directeur général confirma la décision du directeur régional du 29 mars 2013 en s’appuyant sur les considérations suivantes :

« Vu l'arrêté de peine disciplinaire n° 2013/4223/316-MJ du 29 mars 2013 du Directeur de la circonscription régionale ... , le premier commissaire divisionnaire ... ..., notifié le 3 avril 2013 au commissaire en chef ... …, chef adjoint du commissariat de proximité de ... ;

Vu l'appel n° 2013/4223/ du 4 avril 2013 du commissaire en chef ... … contre la peine disciplinaire du Directeur de la circonscription régionale ... ;

Vu son grade de commissaire en chef ;

Vu son emploi de chef adjoint au commissariat de proximité de ... ; Vu son dossier disciplinaire ;

Vu qu'il n'y a pas de prescriptions des faits ;

Vu la loi du 16 avril 1979 ayant pour objet la discipline dans la force publique.

Le Directeur Général de la Police Grand-Ducale déclare l'appel comme recevable mais non fondé

retient que le commissaire en chef ... ...

ne s'est pas subordonné à la hiérarchie (art 2) ;

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n'a pas exécuté promptement et complètement les prescriptions et ordres de service (art. 2)

n'a pas soumis son intérêt personnel à l'intérêt du service, la solidarité, le respect et la confiance mutuels (art. 2)

ne s'est pas comporté d'une façon irréprochable dans le service (art. 2)

n'a pas obéi promptement, loyalement et consciencieusement (art. 7§1)

n'a pas tenu compte de l'intérêt du service et ne s'est pas abstenu de tout ce qui pourrait nuire à la bonne renommée de la force publique en général et du corps dont il fait partie (art. 9§1);

n'a pas évité tout ce qui pourrait blesser les convenances et compromis les intérêts du service dans l'exercice de ses fonctions (art 12§1)

par les faits suivants :

Le 5 février 2013, lors des chutes de neige importantes sur tout le pays, tous les commissariats de proximité avaient reçu l'ordre de continuer à travailler au-delà de 18.00 heures afin de pouvoir prendre en compte une éventuelle recrudescence de demandes d'intervention, et ceci jusqu'à ordre contraire, ainsi que de prévoir une patrouille pour le lendemain à partir de 06.00 heures du matin. Plus tard dans la soirée, il fut constaté que le commissariat de proximité de ... n'avait pas donné suite à cet ordre. Le commissaire en chef ... ..., responsable de l'unité ce jour, prétend ne pas avoir entendu le 1er message par radio de la Direction des Opérations demandant aux commissariats de proximité de prévoir une patrouille au-delà de 18.00 heures. Ce n'était que le deuxième message pour prévoir une patrouille le lendemain à partir de 06.00 heures qu'il aurait entendu et auquel il aurait réagi immédiatement. Néanmoins, les deux messages étaient répercutés une deuxième fois, par le biais du centre d'intervention principal ... , il reste établi que le commissaire en chef ... ... du commissariat de proximité de ... était au téléphone pour le deuxième appel concernant la patrouille du lendemain matin et que lors de cet appel, le commissaire en chef ... ... du centre d'intervention principal ... avait également rappelé au commissaire en chef ... ... que les commissariats de proximité devaient continuer à travailler le soir même au-delà de 18.00 heures et ce jusqu'à ordre contraire.

Vers 17.45 heures, le premier inspecteur ... ..., qui s'était attendu à devoir travailler au-delà de 18.00 heures, suite aux chutes de neige devenues entretemps massives, entendait que les autres commissariats de proximité annonçaient leur patrouille au centre d'intervention principal ... via radio. En présence du commissaire en chef ... ... et du commissaire ... ..., il demandait alors si eux ne devaient pas faire de patrouille. Le commissaire en chef ... n'a pas répondu. Le commissaire ... lui répondait dans le sens que le chef adjoint du commissariat de proximité s'en était occupé.

Peu avant la fin de service, le commissaire en chef ... ..., posait également la question pourquoi l'unité ne devait pas travailler au-delà de 18.00 heures. A ce moment, les membres présents du commissariat de proximité étaient rassemblés dans le grand bureau du commissariat. Aucune des personnes présentes, dont le commissaire en chef ..., ne réagissait.

Il est donc établi que le commissaire en chef ... ... avait été informé de la décision de devoir organiser une patrouille de son unité au-delà de 18.00 heures en date du 5 février 2013 et ceci par le commissaire en chef ... .... Même s'il n'avait pas entendu consciemment ce message, deux membres du commissariat lui avaient fait part de leur étonnement que, vu les conditions météorologiques, ils ne devraient pas travailler au-delà de 18.00 heures et l'ont

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interpelé à ce sujet. Non seulement il feignait donc au total à 3 reprises ne rien avoir entendu de ce qui lui fut rapporté, mais qu'en plus c'était apparemment lui le seul à ne pas se poser la bonne question. Or, en absence du chef du commissariat, c'était au chef adjoint de se poser cette question en premier et de veiller à l'intérêt du service (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 juillet 2013, Monsieur ... fit introduire un recours en réformation sinon en annulation contre la décision confirmative du directeur général du 16 avril 2013.

Par jugement du 7 mai 2014, le tribunal se déclara incompétent pour connaître du recours principal en réformation, déclara le recours subsidiaire en annulation recevable mais non fondé, partant en débouta Monsieur ..., rejeta la demande en obtention d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.000 euros formulée par Monsieur ..., tout en le condamnant aux frais de l’instance.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 11 juin 2014, Monsieur ... a régulièrement relevé appel du jugement du 7 mai 2014 dont il sollicite la réformation sinon l’annulation dans le sens de voir réformer, sinon annuler la décision du directeur général du 16 avril 2013 confirmant sur appel la décision prise par le directeur régional le 29 mars 2013.

A l’appui de son appel, l’appelant réitère les moyens invoqués en première instance et, en premier lieu, le moyen tiré d’une violation de l’article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ci-après « la CEDH », et de l’article 14 de la Constitution, en soutenant que le caractère vague des incriminations ainsi que le vaste éventail des peines disciplinaires susceptibles d’être prononcées dans la force publique violeraient le principe de la légalité des peines et offriraient à l’administration un pouvoir discrétionnaire, voire arbitraire, ce qui serait de nature à créer une insécurité juridique inconciliable avec le principe de la légalité.

Il fait valoir que les peines infligées dans un grand nombre d’affaires disciplinaires au sein de la police varieraient du simple au double pour des faits sensiblement les mêmes. Pour souligner le risque d’arbitraire, l’appelant s’empare d’une réponse à une question parlementaire n° 2833 du 2 août 2013 posée par le député de l’époque … … au ministre de l’Intérieur et à la Grande Région de l’époque, ayant fait état de ce que depuis 2008, 251 sanctions disciplinaires ont été prononcées par le Directeur Général de la Police, dont 9 sanctions prononcées à l’égard de cadres supérieurs de la Police, 194 sanctions à l’égard de personnels de la carrière de l’inspecteur et 48 sanctions à l’égard de membres de la carrière du brigadier.

Il se réfère également aux critiques formulées par le Conseil d’Etat dans son avis relativement au projet de loi n° 6379 ayant pour objet la discipline dans l’armée, la police grand-ducale et l’inspection générale de la police. D’après l’appelant, les commentaires du Conseil d’Etat confirmeraient que l’imprécision dans la définition des actes entraînant des sanctions disciplinaires créerait une insécurité juridique inconciliable avec le principe de légalité.

Aux termes de l’article 7, paragraphe 1er, de la CEDH : « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. De même il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’infraction a été commise ». Cet article

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consacre le principe de la légalité des peines tel qu’énoncé également à l’article 14 de la Constitution, en vertu duquel « nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu’en vertu de la loi ».

La Cour se rallie sur ce point entièrement à la conclusion du tribunal que la loi du 16 avril 1979, qui prévoit un certain nombre de devoirs et d’obligations incombant aux militaires et aux membres de la Police grand-ducale et qui, par ailleurs, prévoit un catalogue de sanctions disciplinaires, n’est pas contraire au principe de la légalité des peines, dans la mesure où les devoirs sont décrits avec suffisamment d’objectivité et que l’arbitraire des sanctions à appliquer est évité par le biais de l’article 22 de la loi du 16 avril 1979, qui impose que l’application des sanctions disciplinaires doit se régler notamment d’après la gravité de la faute commise, le grade, la nature de l’emploi et les antécédents respectivement du militaire de l’armée et du personnel policier du corps de la Police et de l’Inspection générale de la Police concernés. Dans ce contexte, c’est encore à bon droit que les premiers juges, par référence à deux arrêts de la Cour Constitutionnelle des 3 décembre 2004 (n° 00023/04 du registre) et 14 décembre 2007 (n° 00041/07 du registre), ont rappelé, d’une part, que le droit disciplinaire tolère dans la formulation des comportements illicites et dans l’établissement des peines à encourir une marge d’indétermination sans que le principe de la spécification de l’incrimination et de la peine n’en soit affecté, si des critères logiques, techniques et d’expérience professionnelle permettent de prévoir avec une sûreté suffisante la conduite à sanctionner et la sévérité de la peine à appliquer et, d’autre part, que le principe de la légalité des peines ne fait pas obstacle à ce qu’en matière disciplinaire les infractions soient définies par référence aux obligations légales et réglementaires auxquelles est soumise une personne en raison des fonctions qu’elle exerce, de la profession à laquelle elle appartient ou de l’institution dont elle relève.

Cette conclusion a encore été récemment confirmée par un arrêt de la Cour constitutionnelle du 12 décembre 2014 (n° 00115 du registre), ayant dit pour droit que « les dispositions des articles 8, 9, alinéas 1er et 2, 10, alinéa 1er, 12, alinéa 1er, et 19 de la loi modifiée du 16 avril 1979 ayant pour objet la discipline dans la Force Publique, tant considérées isolément que de manière combinée, ensemble les articles 18 et 22 de la même loi, ne sont pas contraires à l’article 14 de la Constitution ».

Sur ce point, la Cour ne peut que rejeter l’argumentation de l’appelant contenue dans son mémoire supplémentaire du 2 février 2015 reprochant à la Cour constitutionnelle une double contradiction au niveau de la motivation de son arrêt, celle-ci ayant clairement retenu, d’une part, que les articles visés par la question préjudicielle, concernant les éléments d’incrimination en la matière, ont un contenu suffisamment déterminé et sont assez précis pour dicter sa conduite à l’agent de la Force publique concerné, et, d’autre part, que l’article 22 de la loi du 16 avril 1979 permet de moduler la peine en fonction de critères préétablis tout en laissant à l’autorité qui prononce la sanction une marge d’appréciation dans toute poursuite pénale ou disciplinaire.

Le moyen afférent de Monsieur ... est partant à rejeter, sans qu’il soit nécessaire que la partie étatique communique un relevé de toutes les décisions disciplinaires, prononcées entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014 à l’égard des fonctionnaires de police.

En deuxième lieu, l’appelant reproche aux premiers juges d’avoir rejeté son moyen tiré d’une violation de l’article 10bis de la Constitution. Il soutient que les dispositions de la loi du 16 avril 1979 établiraient une différence de traitement entre les fonctionnaires de la

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Force publique et les autres fonctionnaires de l’Etat en ce que ladite loi confierait l’instruction disciplinaire au supérieur hiérarchique du fonctionnaire concerné, tandis que les autres fonctionnaires de l’Etat bénéficieraient d’une procédure instaurée par la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désignée par « le statut général », qui serait plus protectrice des droits de la défense et qui garantirait a priori une plus grande impartialité.

Il reproche plus particulièrement aux premiers juges de s’être fondés à cet égard sur un arrêt de la Cour constitutionnelle du 15 novembre 2013 (n° 00102 du registre), ayant statué par rapport à un moyen similaire fondé sur une violation de l’article 10bis de la Constitution au regard des différences entre la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relevant de la Force publique et celle applicable aux fonctionnaires relevant du statut général, qui a retenu que la loi du 16 avril 1979, en ce qu’elle instaure une procédure disciplinaire spécifique à l’égard des membres de la Police grand-ducale, et plus particulièrement son article 31, en ce qu’il confie l’instruction disciplinaire au supérieur hiérarchique du fonctionnaire en cause, et son article 33, en ce qu’il prévoit l’avis consultatif du conseil de discipline, n’est pas contraire à l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution. Il estime que cet arrêt n’est pas applicable à la présente affaire, alors que les garanties d’ordre structurel accordées aux membres de la Force publique, telles que retenues par la Cour constitutionnelle dans l’arrêt en question, ne joueraient pas dans le cadre des procédures sommaires concernant les peines mineures. Il insiste pour dire que le fonctionnaire de police serait traité de manière différente et moins favorable que les autres fonctionnaires de l'Etat en matière d’instruction disciplinaire, dès lors qu’un commissaire du gouvernement a priori indépendant, chargé spécifiquement et exclusivement de l’instruction disciplinaire serait prévu pour les fonctionnaires de l'Etat, tandis que pour les membres de la Force publique l’instruction serait menée par le supérieur hiérarchique. Or, cette différence de traitement ne serait pas justifiée au regard des critères dégagés par la jurisprudence de la Cour constitutionnelle. Il estime que les fonctionnaires de la Force publique et les autres fonctionnaires de l’Etat seraient soumis aux mêmes devoirs et exposés à des sanctions disciplinaires quasi identiques, tout en relevant que cette similitude serait mise en exergue par le projet de loi n° 6379, précité, ayant pour objet de réformer la discipline dans la police grand-ducale, le législateur voulant rapprocher le statut disciplinaire de la police de celui des fonctionnaires de l’Etat relevant du statut général.

S’il est certes vrai que les circonstances de fait à la base de l’arrêt précité de la Cour constitutionnelle du 15 novembre 2013 ne sont pas les mêmes que celles actuellement soumises aux juridictions administratives en ce que, pour l’arrêt précité, la procédure disciplinaire en cause était celle de l’instruction pour les peines passibles du conseil de discipline selon les articles 31 et 33 de la loi du 16 avril 1979, alors que dans l’espèce actuellement discutée, il s’agit de la procédure disciplinaire sommaire de l’enquête pour les peines mineures telle que régie par l’article 29 de la même loi, il n’en demeure pas moins que la Cour constitutionnelle a dit dans cet arrêt que la différence de traitement au niveau du régime disciplinaire entre les fonctionnaires de la Force publique et les autres fonctionnaires de l’Etat est rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but pour en conclure que la loi du 16 avril 1979, en ce qu’elle instaure une procédure disciplinaire spécifique à l’égard des membres de la Police grand-ducale, n’est pas contraire à l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution.

C’est partant à bon droit que les premiers juges ont rejeté le moyen comme non fondé.

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En troisième lieu, l’appelant réitère son moyen tiré d’une violation de l’article 6 de la CEDH en réaffirmant d’abord son applicabilité en matière disciplinaire, en se référant à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et à un arrêt du 15 décembre 2011 de la Cour administrative (n° 28984C du rôle). Il estime que le directeur régional n’aurait pas fait preuve d’une impartialité objective à son égard dans la mesure où il aurait initié l’enquête disciplinaire et qu’il aurait prononcé la peine disciplinaire. En soulignant qu’en l’espèce, le directeur régional serait à l’initiative des poursuites et de la note brevi manu de notification de l’ouverture de l’enquête, il se serait prononcé sur la sanction susceptible de résulter de la procédure par la référence à l’article 29 de la loi du 16 avril 1979 et que ce serait le même directeur régional qui aurait pris la sanction disciplinaire de la réprimande, l’appelant en tire deux conclusions à savoir, d’une part, que l’objectivité de l’instruction disciplinaire n’aurait pas été assurée puisque le contrôleur régional aurait été orienté dans son instruction, étant donné que le directeur régional se serait d’ores et déjà prononcé sur la sanction disciplinaire susceptible de résulter de l’instruction, et, d’autre part, que le directeur régional se serait prononcé avant le début de l’instruction sur la sanction à intervenir, de sorte qu’il n’aurait plus été impartial au moment du prononcé de la sanction finale. A cet égard, l’appelant se réfère encore au projet de loi n° 6379, précité, en soutenant en substance que ce serait pour éliminer ce genre de partialité objective que le législateur aurait souhaité réformer la loi sur la discipline dans la police.

L’Etat conclut au rejet de ce moyen en soulignant que ce serait à bon droit que les premiers juges ont rejeté ce moyen au motif que l’intéressé aurait en tout état de cause la possibilité d’interjeter un recours précontentieux à travers l’appel prévu par l’article 29, alinéa 2, de la loi du 16 avril 1979. Il estime que la conclusion tirée par la Cour administrative dans son arrêt précité du 15 décembre 2011 au sujet de l’impartialité de l’organe chargé de mener l’enquête disciplinaire ne serait pas transposable à l’espèce, étant donné que dans la présente affaire, la procédure disciplinaire ne se serait pas déroulée en circuit interne, mais aurait fait intervenir le directeur régional ainsi que le contrôleur régional et que les faits reprochés n’auraient pas impliqué le directeur régional.

L’appelant réfute cette argumentation de l’Etat en faisant valoir que la possibilité de l’appel hiérarchique n’aurait jamais été un gage d’impartialité alors que dans la majeure partie des cas, le directeur général ne ferait que confirmer les peines initialement prononcées. Il précise que le projet de loi n° 6379, précité, aurait signalé ce problème en retenant que la dualité des procédures prévues, l’enquête pour les peines mineures et l’instruction pour les peines passibles du conseil de discipline, présenterait l’inconvénient d’obliger le supérieur à se prononcer dès le déclenchement de la procédure sur la sanction susceptible d’en résulter et, par conséquent à préjuger de l’issue de l’instruction. En outre, alors même que le directeur régional a fait intervenir dans l’instruction le contrôleur régional, qui, contrairement aux prescriptions légales, n’aurait pas le grade de capitaine, il serait difficile de soutenir que cette seule intervention préserverait de la sanction du vice de partialité.

C’est tout d’abord à bon droit que les premiers juges ont relevé que si l’autorité administrative n’est pas formellement soumise au respect de l’article 6 de la CEDH, lorsqu’elle statue en matière disciplinaire, elle est néanmoins tenue d’observer les principes généraux du droit qui s’imposent en la matière, dont plus particulièrement le principe d’équitable procédure, comprenant celui de l’impartialité de l’autorité et ce même en l’absence d’un texte exprès consacrant ces principes pour la matière précise en question.

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Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que d’un point de vue subjectif, l’impartialité consiste en ce que l’organe enquêteur, chargé de l’instruction de l’affaire disciplinaire, n’ait pas procédé à des prises de position antérieures de nature à préjuger du résultat de la procédure disciplinaire par lui menée, tandis que d’un point de vue objectif, il ne faut pas que ledit enquêteur puisse être soupçonné d’une partialité découlant de conditions structurelles ou organisationnelles.

La Cour est amenée à retenir, à la suite des premiers juges, que la procédure disciplinaire suivie en l’espèce est celle plus sommaire de l’article 29 de la loi du 16 avril 1979 qui dispose que : « Les peines prévues à l´article 25 sous I. A 1 à 3, B 1 et C 1 à 3, ainsi que sous II. 1 à 3, sont prononcées par décision motivée, après que le militaire inculpé a été entendu. », tandis que l’article 30 de cette même loi retient que : « Les peines dépassant la compétence du chef de corps sont prononcées par décision motivée et après instruction préalable, dans laquelle le militaire inculpé est entendu sur les faits mis à sa charge. »

Les premiers juges ont ainsi correctement dégagé des dispositions des articles 29 et 30 de la loi du 16 avril 1979 que cette loi fait dépendre le choix de la procédure disciplinaire diligentée de la gravité de la peine a priori envisagée pour sanctionner les faits reprochés.

Ainsi, deux types de procédures disciplinaires sont prévus par la loi du 16 avril 1979, à savoir la procédure prévue à l’article 29 pour les peines mineures et la procédure prévue aux articles 30 et 31 pour les peines dépassant a priori la compétence du chef de corps, après déroulement de l’instruction disciplinaire telle que réglementée à l’article 31 de la même loi.

L’article 29 de la loi du 16 avril 1979 dispose que les peines prévues à l’article 25, notamment sous I. A 1 à 3, sont prononcées, après que le militaire inculpé a été entendu, par décision motivée susceptible d’appel.

La Cour rejoint encore les premiers juges dans leur analyse suivant laquelle les différents actes ayant précédé la peine disciplinaire litigieuse ne permettent pas de retenir que l’appelant aurait fait l’objet de la procédure disciplinaire prévue par les articles 30 et suivants de la loi du 16 avril 1979 plutôt que de la procédure plus légère de l’article 29 de la même loi.

S’il est vrai qu’en l’espèce, le directeur régional a procédé à des démarches allant au- delà de la seule audition de l’appelant, telle que requise par l’article 29 de la loi du 16 avril 1979, en ce sens qu’il a chargé le contrôleur régional de lui faire rapport, lequel a procédé à l’audition non seulement de Monsieur ..., mais encore d’un certain nombre de témoins, la procédure ne saurait cependant de ce fait être requalifiée en une procédure suivant les articles 30 et 31 de la loi du 16 avril 1979, ni les dispositions afférentes de la même loi trouver ipso facto application.

En effet, les droits de l’intéressé ne sont pas pour autant lésés, puisqu’en toute hypothèse dans le cadre d’une procédure suivant l’article 29, précité, il ne peut être sanctionné que par l’une des peines mineures y mentionnées et que s’il s’avère qu’une sanction plus sévère est, le cas échéant, plus appropriée, la procédure de l’article 31 devra être lancée.

D’autre part, dans la mesure où les démarches entreprises dans le cadre de la procédure sommaire doivent être effectuées dans le respect des principes généraux du droit, et plus particulièrement du principe d’équitable procédure, du respect des droits de la défense ou encore du principe général d’impartialité, il convient de vérifier au cas par cas si, compte tenu de la situation particulière de l’espèce, les mesures d’instruction supplémentaires entreprises ont respecté ces exigences. A priori ces mesures sont dans l’intérêt de l’agent auquel des faits

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fautifs sont reprochés, puisque le supérieur hiérarchique, au lieu de se limiter à entendre l’intéressé en ses explications et de prononcer immédiatement une peine disciplinaire, entreprend des démarches supplémentaires afin de clarifier la situation.

En ce qui concerne le reproche d’une partialité objective dans le chef du directeur régional dans la mesure où il a notifié à Monsieur ... le début d’une enquête disciplinaire conformément à l’article 29 de la loi du 16 avril 1979 et qu’il a prononcé la peine disciplinaire, les premiers juges sont également à confirmer en ce qu’ils ont retenu que l’intervention, dans une première phase, du seul supérieur hiérarchique dans le cadre d’une procédure sommaire sous l’angle de l’article 29 de la loi du 16 avril 1979, est telle quelle prévue par la loi, en ce sens que l’article 29 dispose que les peines y prévues, à savoir les peines moins sévères, « sont prononcées par décision motivée, après que le militaire a été entendu », impliquant ainsi que c’est le supérieur hiérarchique direct qui, en vertu de l’article 26 de la même loi, exerce le pouvoir disciplinaire, sans l’intervention nécessaire d’autres personnes ou le déploiement d’autres actes que l’audition de l’intéressé, qui déclenche l’instruction, qui la mène et qui prononce la sanction. Néanmoins, ce constat de l’intervention du seul supérieur hiérarchique au début et à la fin de la procédure menée ne signifie pas que la procédure prévue par l’article 29 de la loi du 16 avril 1979 pose un problème au niveau de l’impartialité, puisque l’intéressé a en toute hypothèse la possibilité d’interjeter un recours précontentieux à travers l’appel prévu à l’alinéa 2 de l’article 29 de la loi du 16 avril 1979.

S’y ajoute qu’en l’espèce, d’une part, le directeur régional n’est pas intervenu seul, mais il a chargé le contrôleur régional de lui faire un rapport après que celui-ci a entendu l’appelant et des témoins et, d’autre part, que les faits reprochés ne concernent pas le directeur régional. Il s’ensuit que le reproche mettant en doute l’impartialité du supérieur hiérarchique, tel qu’il avait été retenu par la Cour, dans l’arrêt précité du 15 décembre 2011, qui avait à connaître d’une sanction disciplinaire prise en vertu des articles 30 et 31 de la loi du 16 avril 1979 à raison de faits qui se trouvaient en « circuit fermé » pour s’être produits pour l’essentiel face au chef hiérarchique concerné, qui lui-même avait, en application de l’article 31 précité, procédé à l’instruction disciplinaire et avait transmis le dossier avec ses conclusions au chef de corps, ne saurait dès lors valoir en l’espèce.

Partant, à l’instar des juges de première instance, la Cour arrive à la conclusion que le dossier ne renferme pas d’éléments suffisants permettant de retenir un manque d’impartialité objective dans le chef du directeur régional.

En quatrième lieu, l’appelant reprend son moyen tiré d’une violation de l’article 31, point 1, de la loi du 16 avril 1979. Il critique les premiers juges pour avoir retenu que les dispositions dudit article 31, et notamment son point 2, ne sont pas applicables à l’instruction disciplinaire diligentée selon l’article 29 de la même loi. A cet égard, il soutient qu’en vertu des dispositions combinées des articles 31, point 1, et 26 de la loi du 16 avril 1979, le chef hiérarchique compétent pour procéder à l’instruction disciplinaire aurait été le directeur régional, en l’occurrence Monsieur ... .... Tel ne pourrait cependant pas être le cas puisque les principes du respect des droits de la défense et du droit à un procès équitable s’opposeraient à ce que le fonctionnaire qui prononce la sanction soit également chargé de l’instruction disciplinaire. Or, le contrôleur régional, Monsieur ... ..., n’aurait pas le grade de capitaine. Il s’ensuivrait que le rapport d’instruction rédigé par le contrôleur régional aurait été rédigé par un fonctionnaire incompétent conformément à l’article 31 de la loi du 16 avril 1979, aux termes duquel l’instruction disciplinaire appartient au chef hiérarchique compétent qui doit avoir au moins le grade de capitaine. Il souligne encore que contrairement à ce qui a

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été retenu par les premiers juges, ce ne serait pas parce que le supérieur hiérarchique a qualifié la procédure disciplinaire de sommaire qu’il l’a aussi fait dans les faits. Au contraire, il se serait livré à une véritable instruction disciplinaire, tout en s’affranchissant des garanties de l’instruction prévues aux articles 30 et 31 de la loi du 16 avril 1979. Ce serait au juge qu’il appartiendrait de donner une qualification juridique des faits. Il conclut que la procédure disciplinaire diligentée à son encontre, au vu des démarches accomplies, à savoir son audition, mais également celle de témoins et le rapport rédigé par le contrôleur régional au directeur régional, n’aurait pas été une simple enquête, mais une instruction disciplinaire.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen en soulignant que la procédure suivie serait celle de l’article 29 de la loi du 16 avril 1979. Il insiste encore pour dire que le fait que le contrôleur régional n’ait pas le grade de capitaine ne permettrait pas de retenir que les principes d’équitable procédure, d’impartialité ou encore du respect des droits de la défense aient été violés.

Au vu des conclusions ci-avant dégagées par la Cour au sujet du type de procédure disciplinaire suivie en l’espèce, la Cour ayant conclu que l’appelant a fait l’objet de la procédure disciplinaire plus légère de l’article 29 de la loi du 16 avril 1979, l’argumentation de l’appelant basée sur une violation de l’article 31 de la même loi est à rejeter, dès lors que cette disposition ne trouve pas application en l’espèce.

Enfin, quant au fond, l’appelant conteste la matérialité des faits reprochés et conteste par ailleurs que ces faits puissent constituer une violation des devoirs du fonctionnaire tels que libellés dans la décision litigieuse. En renvoyant au commentaire précité du Conseil d’Etat relatif au projet de loi n° 6379/1, il soutient que les cinq premiers motifs de la décision critiquée, fondés sur les articles 2 et 7 de la loi du 16 avril 1979, devraient être écartés en raison de l’imprécision des manquements invoqués. D’autre part, il donne à considérer que le tribunal même aurait retenu qu’il n’aurait pas de façon délibérée omis d’exécuter un ordre, mais que le défaut d’exécuter l’ordre reçu résulterait d’une simple inadvertance. L’élément moral de la faute disciplinaire ferait ainsi défaut dans son chef, de sorte que son manquement ne pourrait pas entraîner de sanction disciplinaire. Il fait encore plaider que l’article 22 de la loi du 16 avril 1979 qui est censé s’appliquer au profit des policiers inculpés aurait été appliqué contre lui, les premiers juges n’ayant pas tenu compte de son ancienneté, ni de l’absence d’antécédents disciplinaires, ni encore de l’absence de conséquence dommageable en sa faveur. Subsidiairement, il soutient qu’il ne ressortirait pas du dossier d’enquête qu’il ait commis une faute susceptible d’entraîner une sanction disciplinaire et renvoie pour le surplus à ses explications données lors de son audition le 21 février 2013.

En ce qui concerne tout d’abord le moyen de l’appelant fondé sur une imprécision des manquements reprochés à la base de la décision litigieuse, lequel se recoupe avec ses contestations fondées sur les articles 7 de la CEDH et 14 de la Constitution, il est à rejeter au regard de la conclusion ci-avant retenue par la Cour par rapport à ces dispositions.

Concernant les faits libellés à l’encontre de Monsieur ..., il se dégage des éléments du dossier qu’il lui est reproché de ne pas avoir donné suite à des ordres en ce sens adressés à tous les commissariats de proximité le 5 février 2013, d’organiser, en raison des chutes de neige importantes dans tout le pays, des patrouilles au-delà de 18.00 heures le jour en question, alors que pour ce jour-là il était le commissaire le plus ancien en rang en service au commissariat de proximité de ... , et cela malgré le fait que deux membres du commissariat lui avaient fait part de leur étonnement qu’ils ne devaient pas travailler au-delà de 18.00 heures.

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Il ressort des explications fournies par le témoin ... ..., affecté au centre d’intervention principal ..., que peu après 17.00 heures le jour litigieux, il avait reçu instruction que les trois commissariats de proximité de la région devraient, en raison des conditions météorologiques, effectuer immédiatement et jusqu’à ordre contraire des patrouilles. Le même témoin a déclaré avoir transmis cet ordre aux commissariats de proximité respectifs, dont plus particulièrement le commissariat de proximité de ... . Il a confirmé avoir contacté le même jour une deuxième fois lesdits commissariats de proximité et, à cette occasion, avoir plus particulièrement parlé avec Monsieur ... en personne, qui lui aurait cependant à ce moment-là indiqué ne pas avoir reçu le premier ordre.

Si l’appelant a déclaré lors de son audition ne pas avoir été conscient d’avoir reçu le premier ordre, il a toutefois dû admettre lors de son audition, après avoir entendu l’enregistrement téléphonique afférent, que lors du deuxième appel du centre d’intervention principal ... qu’il avait réceptionné lui-même et qui avait pour objet l’ordre de prévoir également des patrouilles pour le lendemain, il avait aussi été fait référence au premier ordre d’effectuer des patrouilles au-delà de 18.00 heures jusqu’à contrordre. La Cour partage ainsi la conclusion des premiers juges que Monsieur ... avait été informé, avant qu’il n’ait quitté son service le jour en question, de l’ordre litigieux. Il se dégage encore des déclarations des témoins … et … qu’avant la fin du service, ils avaient posé la question quant à la nécessité de patrouiller le soir même, sans que Monsieur ... réagisse d’une quelconque manière.

La Cour est dès lors amenée à retenir pour établi que le commissariat de proximité de ... , et plus particulièrement l’appelant lui-même, avaient été informés de la nécessité de prévoir des patrouilles pour le 5 février 2013 après 18.00 heures, mais qu’il n’a pas été donné suite à ces instructions.

Si l’appelant persiste à soutenir qu’il n’aurait pas sciemment omis d’exécuter l’ordre reçu, dès lors qu’il n’aurait eu connaissance que du deuxième ordre relatif aux patrouilles pour le lendemain, la Cour, à l’instar des premiers juges, estime que l’appelant, en tant que responsable adjoint du commissariat et plus ancien en rang en service ce jour-là, aurait dû prendre les mesures nécessaires au lieu de quitter son service à 18.00 heures. Non seulement il n’a pas porté aux appels téléphoniques reçus l’attention nécessaire afin de saisir les instructions données, mais en plus il n’a pas eu le même réflexe que celui que deux au moins de ses subordonnés avaient, de se poser la question s’il fallait prévoir des patrouilles le soir même, sachant qu’il avait planifié des patrouilles supplémentaires pour le lendemain en raison des neiges abondantes et sachant qu’il n’était pas inhabituel qu’en cas de neiges aussi abondantes des patrouilles allaient être prévues au-delà des heures de service normales. Au plus tard lorsque d’autres agents du commissariat, pour lesquels il était pourtant clair qu’au vu des conditions météorologiques, des patrouilles supplémentaires étaient requises et cela indépendamment de toute instruction en ce sens, l’ont questionné sur la nécessité de prévoir des patrouilles le soir litigieux, il aurait dû réagir, au lieu de quitter le commissariat à 18.00 heures sans autres mesures prises ou instructions laissées.

Dans ce contexte, l’argument de l’appelant selon lequel l’élément moral de l’infraction ferait défaut en l’espèce, dans la mesure où il n’aurait pas eu conscience de l’ordre litigieux, rendant ainsi illégale la peine disciplinaire prononcée à son égard, ne saurait valoir, non seulement au regard des conclusions ci-avant tirées que l’appelant, au plus tard lors du second appel du centre d’intervention principal ..., avait été informé de l’existence du premier ordre, mais encore eu égard au fait qu’il n’y a pas lieu d’apprécier en l’occurrence s’il y a eu une

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infraction disciplinaire, mais s’il y a eu un manquement objectif à l’un des devoirs imposés aux fonctionnaires de la Force publique.

Aux termes de l’article 2 de la loi du 16 avril 1979 : « La discipline militaire exige l'observation des lois et règlements fixant les droits et devoirs des militaires, la subordination hiérarchique, l'exécution prompte et complète des prescriptions et ordres de service, la soumission de l'intérêt personnel à l'intérêt du service, la solidarité, le respect et la confiance mutuels ainsi que le comportement irréprochable tant dans le service qu'en dehors du service », l’article 7, alinéa 1er, de la même loi disposant que : « L'obéissance doit être prompte, loyale et consciencieuse. Lorsque des circonstances imprévues s'opposent à l'exécution régulière d'un ordre, l'exécutant doit en informer incessamment l'auteur de l'ordre. Lorsque cette information est impossible et en cas de nécessité urgente, il doit prendre de sa propre initiative les mesures appropriées en s'inspirant des intentions de l'auteur de l'ordre ».

Finalement, l’article 9, alinéa 1er, de la loi du 16 avril 1979 énonce que : « Les militaires doivent tenir compte de l'intérêt du service et s'abstenir de tout ce qui pourrait nuire à la bonne renommée de la force publique en général et du corps dont ils font partie », tandis que l’article 12, alinéa 1er, de la même loi dispose que : « Le militaire doit, dans l'exercice comme en dehors de l'exercice de ses fonctions, éviter tout ce qui pourrait compromettre le caractère officiel dont il est revêtu, donner lieu à scandale, blesser les convenances ou compromettre les intérêts du service ».

Tel que relevé à juste titre par les premiers juges, il découle de ces dispositions une obligation, d’une part, d’exécuter les ordres reçus de la hiérarchie en général ainsi que les prescriptions et ordres de service, et, d’autre part, celle d’agir dans l’intérêt du service qui doit prédominer à l’intérêt personnel et, enfin, une obligation de ne pas nuire à la bonne renommée de la force publique en général et du corps dont l’intéressé fait partie en particulier et de se comporter de façon irréprochable.

La Cour partage ainsi l’analyse et la conclusion des premiers juges suivant laquelle, même à admettre que l’appelant n’ait pas de façon délibérée omis d’exécuter un ordre, il ne s’est toutefois pas comporté de façon irréprochable et a compromis les intérêts du service. La circonstance qu’aucune conséquence dommageable n’ait résulté de cette omission est sans incidence à ce niveau de l’analyse. De même, en ne réagissant pas aux questions posées par au moins deux de ses subordonnés sur la nécessité éventuelle de prévoir des patrouilles le soir même, il n’a pas soumis son intérêt personnel, à savoir celui de quitter son service tel qu’initialement prévu vers 18.00 heures, à l’intérêt du service, impliquant la nécessité d’organiser des patrouilles encore le soir même.

C’est partant à tort que l’appelant soutient que les faits lui reprochés ne constitueraient pas une violation de ses devoirs.

De même, la Cour ne saurait suivre l’appelant dans son raisonnement, plus précisément développé dans son mémoire supplémentaire, selon lequel les décisions disciplinaires litigieuses seraient motivées de manière insuffisante ou de manière obscure, dans la mesure où elles ne feraient pas la corrélation entre les faits lui reprochés et les devoirs du fonctionnaire de police, de sorte que ses droits de la défense n’auraient pas été respectés.

En effet, non seulement il ressort clairement tant de la notification du début d’une enquête disciplinaire que de la décision du directeur régional et de la décision sur appel du directeur

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général quels sont les faits reprochés à l’appelant, mais en plus les devoirs auxquels l’appelant est supposé avoir manqué sont énumérés avec précision, de sorte que la seule circonstance que l’autorité disciplinaire n’ait pas précisé en détail dans quelle mesure l’appelant avait manqué à ses différents devoirs en tant que policier est sans incidence sur la légalité de la peine prononcée, dès lors que celui-ci n’a pas pu se méprendre sur les motifs de la décision disciplinaire et qu’il a pu assurer la défense de ses intérêts en connaissance de cause. Le moyen de l’appelant tiré d’un défaut de motivation suffisante ne peut partant qu’être écarté.

Concernant l’application de la peine disciplinaire appropriée, l’appelant reproche encore à l’autorité disciplinaire et aux premiers juges d’avoir fait une mauvaise application de l’article 22, alinéa 1er, de la loi du 16 avril 1979 qui prévoit que « l’application des sanctions disciplinaires se règle notamment d’après la gravité de la faute commise, le grade, la nature de l’emploi et les antécédents du policier inculpé ». Il estime que cette disposition n’aurait pas été appliquée en sa faveur, mais au contraire les premiers juges en auraient dégagé une circonstance aggravante.

S’il est exact qu’en vue de la détermination de la peine disciplinaire à infliger, l’article 22, alinéa 1er, précité, fournit les éléments à prendre en considération, cette disposition ne saurait cependant tenir uniquement lieu de circonstance atténuante, mais pourra également servir de circonstance aggravante si les faits de l’espèce le permettent ainsi. Ainsi, dans certains cas, le caractère fautif des faits reprochés doit être apprécié en tenant compte notamment du rang revêtu par l’agent et de son expérience. Or, c’est précisément ce qui a été fait en l’espèce, puisque les premiers juges, par confirmation de l’autorité disciplinaire, ont relevé qu’en raison de son ancienneté de service de plus de 38 ans et de l’expérience acquise au cours de cette période, l’appelant aurait dû savoir, au vu des conditions météorologiques exceptionnelles, que les commissariats de proximité étaient nécessairement sollicités pour faire face à une hausse des demandes d’intervention et agir partant en conséquence.

Quant à la demande formulée dans ce contexte par l’appelant tendant à obtenir communication de toutes les peines disciplinaires prononcées entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014 à l’encontre de policiers, celle-ci est à rejeter comme non pertinente, étant donné que les juridictions administratives sont appelées à juger par rapport à un acte déterminé, de sorte que les peines disciplinaires prononcées dans d’autres affaires sont sans incidence au regard de la légalité de la peine prononcée à l’encontre de Monsieur ....

Au vu de tous ces éléments, la Cour estime que la peine disciplinaire de la réprimande infligée à l’appelant n’est pas excessive et constitue une sanction appropriée compte tenu de l’ensemble des faits établis en l’espèce.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel n’est pas fondé, de sorte que l’appelant est à en débouter et le jugement dont appel à confirmer.

Au vu de l’issue du litige, Monsieur ... est encore à débouter de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure de 1.500 euros pour la première instance et de 1.500 euros pour l’instance d’appel.

Par ces motifs,

la Cour administrative, statuant à l'égard de toutes les parties en cause ;

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déclare l’appel du 11 juin 2014 recevable ; au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

partant, confirme le jugement entrepris du 7 mai 2014 ;

rejette les demandes en obtention d’une indemnité de procédure formulées par Monsieur ... pour les deux instances ;

condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par:

Francis DELAPORTE, vice-président, Lynn SPIELMANN, conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller,

et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny MAY.

s. MAY s.DELAPORTE

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