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Oncologie : Article pp.38-42 du Vol.3 n°1 (2009)

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DOI 10.1007/s11839-009-0121-5

REVUE GÉNÉRALE /GENERAL REVIEW DOSSIER

Représentations sociales et représentations intimes de la maladie.

Quelques réflexions d ’ un clinicien

Social and private representations of cancer. A clinician ’ s point of view

D. Stagno

© Springer-Verlag 2009

RésuméCet article aborde les représentations sociales dans le discours scientifique et les représentations intimes, liées à l’imaginaire individuel. Les représentations sociales, dans une acception restreinte, sont utiles pour le développement du message préventif, mais peu profitables pour le travail clinique. On discute certains aspects non explicites du discours scientifiques qui ont un impact sur le traitement : croyances et valeurs projetées et l’articulation entre les concepts de représentation, d’imaginaire, d’identité et de temporalité dans l’approche individuelle du patient aux prises avec son cancer.

Mots clésPrévention · Représentations · Imaginaire · Temporalité · Thérapie

Abstract This paper discusses social representations in scientific communications and private ones that are linked to the individual imagination. Social representations, in a limited sense, are useful for the development of preventive messages, but of little benefit to clinical work. We highlight some non-explicit aspects of scientific discourse that impact on treatment: projected beliefs and values. We tackle the relationship between the concepts of representation, imagi- nation, identity and temporality in the individual approach of the cancer patient.

KeywordsPrevention · Representations · Imagination · Temporality · Therapy

Représentations sociales et enquêtes épidémiologiques

Deux enquêtes françaises ont été réalisées à 7 ans d’intervalle sous l’égide de l’Institut national de prévention et d’éduca- tion pour la santé [1,2]. Elles nous apprennent que le nombre des français estimant que certains cancers sont curables passe de 47 % à 86 %. Cette progression témoigne certainement des progrès de la science et de l’efficacité de l’information scientifique rendant compte de ces progrès. Par progrès, on entend une conception de l’évolution de la science, telle qu’elle est comprise par les principaux acteurs de soins et documentée par les études épidémiologiques, entre autres.

Ces enquêtes font état d’une efficience indéniable du discours préventif. Ainsi, la population semble suffisamment consciente des effets délétères du tabac et de l’exposition au soleil sans protection. En revanche, elle minimise l’impor- tance de la consommation d’alcool dans l’apparition de la maladie, considérant que l’alcool est avant tout une source de violence et un facteur prédisposant aux accidents de la circulation. Ce résultat médiocre sur la prévention de l’alcoolisme est attribué en partie à un discours préventif mal ajusté et ambigu. Les médias associent davantage l’éthylisme et les accidents de la route plutôt que l’alcool et les cancers oto-rhino-laryngologiques, par exemple. Il existe donc une disproportion du volume d’information entre ces deux corrélations. D’autre part, certain discours préventif, notamment autour de la prévention des maladies cardiovas- culaires, défend l’idée d’une consommation bénéfique d’alcool. On en déduit logiquement qu’un message confus engendre des représentations biaisées, et l’on peut, à partir de là, ajuster le message préventif afin d’obtenir, dans une enquête ultérieure, des résultats encore meilleurs. Il est nécessaire de prendre en compte les croyances, les percep- tions et les attitudes du public dans les actions de prévention.

A titre d’exemple, environ un quart des personnes interrogées croient en la contagiosité de certains cancers, et cette croyance est susceptible de diminuer la perception du risque pour soi et de favoriser la stigmatisation et l’isolement du D. Stagno (*)

Médecin responsable de lunité de psychiatrie de liaison (UPL), Secteur Psychiatrique Nord-CHUV

Centre psychiatrique du nord vaudois (CPNVD), Av. des Sports 12b, 1400 Yverdon-les Bains

Service de psychiatrie de liaison, Rue du Bugnon 44, CH-1011 Lausanne-CHUV

e-mail: daniele.stagno@chuv.ch

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malade. Encore une fois, l’affinement du discours scientifi- que et des actions de prévention sont d’une utilité indéniable.

Les messages implicites du discours scientifique

Or, ces enquêtes et ces actions sont le plus souvent lues et comprises à un niveau manifeste et le système de valeurs et de croyances qu’elles défendent n’est pas explicite. Des confusions et une série d’illusions s’installent chez les soignants et dans la population générale. Frustration, culpabilité et exclusion sont autant d’effets indésirables du discours scientifique et il n’est pas inutile d’en dévoiler certains aspects, qui vont nécessiter de nombreux efforts de correction dans le travail psychothérapeutique.

Le droit à la santé

Le droit à la santé constitue la première illusion. La santé ne constitue plus une chance ou une opportunité mais un droit, ou pire, un devoir. Le discours scientifique est pétri d’ambiguïtés pour ce qui est de la responsabilité individuelle dans l’apparition de la maladie cancéreuse. Si une élite scientifique défend l’hypothèse d’étiologies multiples et circulaires échappant au contrôle individuel, ce message ne parvient pas aux oreilles du plus grand nombre [3,4]. Par ailleurs, le public, semble davantage appâté par des groupes d’entre-aide ou des individus, gourous et autres scribes opportunistes, qui font l’apologie d’une psychogenèse simpliste du cancer et qui proposent l’exaltation de la volonté, comme moyen ultime de traitement. La séduction opère. À l’enthousiasme initial fait suite un état de découragement et de dévalorisation confinant à la honte chez ceux qui ne « réussissent » pas. Ceux qui

« réussissent » en revanche peuvent tout à fait se lover dans un triomphalisme prosélyte, et il est difficile de dire ce qui est le plus délétère.

Une diminution de la stigmatisation

Le discours scientifique aurait favorisé une diminution de la stigmatisation du cancer et une levée de la censure qui l’a entouré pendant de nombreuses décennies. On en veut pour preuve la prolifération dans les médias de témoignages abondants, l’augmentation considérable de groupes de paroles qui s’exposent au devant de la scène sociale : le cancer doit la disparition de son caractère honteux moins à sa relative maîtrise par la science, qu’à l’apparition d’une maladie bien plus sale et plus honteuse dans les années quatre-vingt, à savoir le sida. Le cancer profite possiblement d’un glissement dans le palmarès de la honte et le développement de la psycho- oncologie et des soins de support est peut-être la conséquence de ce glissement plutôt que la cause d’une représentation plus humaine de cette maladie, favorisée par la virtuosité de la science. On doit certes se réjouir de l’appréhension moins

défavorable dans le public de la maladie cancéreuse, sans se cacher néanmoins qu’il existe un prix à payer, par d’autres malades avec d’autres maladies graves. La quantité de crainte et de rejet est invariable dans le tissu social. Seuls les objets auxquels ils s’attachent changent. On observe, dans le temps, des glissements similaires à l’intérieur même des maladies cancéreuses. Le cancer du sein en est l’exemple flagrant. Un certain activisme a permis à cette maladie de quitter son statut de mal indicible depuis bientôt trente ans. Ce mouvement a certainement favorisé l’accès à des traitements de soutien psychologique pour les femmes atteintes, sans pour autant, que je sache, diminuer l’épaisseur de leur tragédie intime.

La vérité pour tous

Dans l’imaginaire collectif actuel l’idée de science est intimement liée à l’idée de vérité. Le discours scientifique nourrit de plus en plus l’illusion d’une connaissance objective non contaminée par l’identité de l’observateur.

Une fois conquise, cette vérité peut être mise à disposition de tout un chacun. À la limite on tend vers une parfaite identité entre la connaissance scientifique et la connaissance profane, dans un déni de la fonction herméneutique du soignant.

Considérons la perte de « prestige » dont fait l’objet le médecin depuis les années quatre-vingt que l’on attribue un peu simplement à la disparition du paradigme paternaliste dans la relation médecin-malade. Dans cette conception de la vérité scientifique, le médecin est confiné (et se confine) dans un rôle de borne d’accès à l’information médicale, avec ce que cela implique comme sentiment de solitude pour le patient. On ne s’étonne donc pas que ce dernier se résolve à chercher de la relation, du lien véritable, dans un système de soins alternatif et complémentaire. La profusion actuelle de publications, de recherches et d’enseignements sur les approches holistiques et l’amélioration de la communication [5] trahit bien une inquiétude du monde médical face à la transformation de la relation médecin-malade. Il existe bel et bien la nécessité d’un renouveau dans la pratique clinique, sans que l’on puisse encore en délimiter précisément les modalités, si ce n’est qu’il doit faire intervenir le développe- ment de nouvelles stratégies relationnelles.

La cible « naturelle » du discours préventif

On apprend encore que le discours préventif atteint priori- tairement un public de personnes d’âge intermédiaire, professionnellement actif, plutôt diplômé, implicitement présenté comme un ensemble de bons élèves. On déplore le manque d’impact sur la masse improductive et stérile (qui n’est pas décrite comme telle) : les enfants, les personnes âgées, les sans emploi et les faiblement éduqués, tout en évitant d’admettre que rien dans le discours préventif n’est prévu pour eux. On perçoit aisément le caractère disqualifiant

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pour toute une frange de la population d’une information apparemment banale. Le système de valeurs sous-jacent et non explicite exalte une productivité libérale et une forme d’individualisme excluant de fait toute forme de solidarité.

Représentations sociales ou collectives ?

Pour le travail clinique, il est une confusion qu’il convient d’éviter. J’ai essayé de démontrer que le discours scientifique et la réponse donnée par le public à ce discours, au moyen notamment des enquêtes sus-mentionnées, constitue, en partie du moins, une sorte de dialectique séparée de tout vécu individuel et émotionnel. On aimerait croire que la modification des représentations sociales est reliée à une modification des représentations intimes, qu’un changement des représentations sociales favorise une meilleure accepta- tion de la maladie. Or, la tragédie intime existentielle est peu influencée par la modification des représentations sociales, telles qu’elles sont définies dans les enquêtes habituelles : dans celles-ci les représentations sociales sont des propriétés autonomes qui ne sont pas nécessairement identifiables dans les pensées d’individus particuliers [6]. Dans la discrimina- tion qu’il convient d’opérer entre le discours officiel et le vécu intime, il est utile de nous référer aux travaux de ceux qu’on a nommé les philosophes du soupçon : Nietzsche, Freud et Marx. Ces trois penseurs ont questionné nos convictions et nos croyances et en ont démontré les racines inconscientes, inconnues ou inavouées ainsi que l’influence du collectif sur leur édification. Ces philosophies du soupçon sont définies comme telles parce qu’elles soupçonnent en permanence la conscience d’être une fausse conscience. On pourrait dire que le discours social ou socialement acceptable est régi par d’autres règles que le discours intime ou intimiste délivré dans le huis clos du cabinet de consultation. On se rapportera aussi pour ce qui est de la production du discours (donc du discours scientifique et de la réponse du public à celui-ci), aux ouvrages de M. Foucault ou il développe sa conception du pouvoir et des micro-pouvoirs dont l’objectif est de normaliser les comportements [7,8]. On constate que le discours individuel, produit à des fins de diffusion, repose sur la nécessité d’asseoir une appartenance et peut ne pas être compris comme l’expression d’un sentiment intime.

Représentation sociale et thérapie

Enfin, on pourrait définir une forme de représentation sociale, à distinguer de la représentation collective, dans une perspective cliniquement utile: La représentation sociale pourrait être considérée comme une production subjective [9] : les représentations sociales et intimes ne seraient pas deux systèmes, l’un externe, l’autre interne indépendants, mais plutôt un système complexe où les événements sociaux et intimes s’influencent mutuellement. La repré- sentation sociale, entendue ainsi, est un processus

symbolique. Et il n’y a pas de processus symbolique sans la participation des émotions. On se départit donc de la définition de la représentation sociale telle que définie plus haut et qui est finalement confondue avec la représentation collective, la plupart du temps. Cette distinction étant faite, on peut articuler dans l’approche clinique les questions de représentation et d’imaginaire en introduisant la question de l’identité et de la temporalité.

Névrose traumatique ou trouble de l’adaptation

A l’annonce du diagnostic, l’ensemble des représentations sociales subjectives cèdent le pas à une représentation unique : celle de la mort annoncée (ou du risque de mort, ce qui revient au même pour l’appareil psychique). Cet état qui a été diversement décrit par les cliniciens, tantôt comme un équivalent de névrose traumatique [10] ou un trouble de l’adaptation [11] se caractérise essentiellement par un bouleversement de la perception du temps, une suspension de l’activité imaginaire et onirique et une atteinte plus ou moins durable et profonde de l’identité du sujet. Il est évident que les représentations sociales et l’imaginaire collectif vont influencer la gravité de l’état post-traumatique, mais probablement dans une mesure moindre que certains éléments de la biographie du sujet, comme par exemple, les antécédents familiaux de cancer.

Perturbation de la temporalité et suspension de l’imaginaire

Le choc post-traumatique produit une suspension de la trame narrative chez le sujet. Une désorganisation du moi s’installe, façonnant un état dominé par des angoisses diffuses et envahissantes. De véritables terreurs nocturnes se produisent où le réveil se fait brutalement dans l’effroi, mais sans ébauche figurative. Le rêve n’est pas totalement absent. Il s’agit de rêves répétitifs reproduisant les traces mnésiques du traumatisme et qui constituent peut-être les prémices de reprise d’une activité mentale interrompue. Curieusement la suppression de l’activité onirique, la suspension de l’imagi- naire, s’associent à une forme d’adaptation à la réalité. Si cet état perdure il aboutit à la constitution d’une subjectivité sans sujet [12]. Le destin de la névrose traumatique ou du trouble de l’adaptation se confond dès lors avec la dépression essentielle décrite par P. Marty ou le sujet fonctionne de façon automatique, parfois à l’insu des proches et des soignants, sur un mode opératoire [13]. La vie opératoire, pénétrée par une pensée factuelle, une forme d’aléxithymie (trait et non pas état) devient un état chronique précaire, interrompue par l’émergence de la douleur, de la somatisa- tion et de la mort, dans le pire des scénarios possibles. On pourrait postuler une forme de déshumanisation. P. Ricoeur nous apprend que le temps ne devient humain que lorsqu’il

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est articulé de manière narrative [14]. Pour reprendre sa définition de l’identité narrative, on pourrait décrire cet état comme relevant d’une suspension de la dialectique nécessaire entre l’identité idem et l’identité ipse, la mêmeté et l’ipséité.

Il définit l’identité idem comme un ensemble de caractéris- tiques invariantes pour le sujet qui sont à la base de son sentiment d’unicité. L’identité ipse introduit l’autre et le risque. Il s’agit de la capacité à reconnaître le soi comme soi, quels que soient les changements individuels et environne- mentaux, autrement dit quoi qu’il arrive. Une dialectique permanente entre ces deux aspects de l’identité est à la base d’un fonctionnement psychique normal. On assiste dans la maladie et la régression psychologique qui s’y associe parfois à une fixation dans la mêmeté. Le risque, le temps, la relation et l’imaginaire sont évacués dans une tentative inopérante de préservation du moi.

La thérapie

Le travail du thérapeute consiste à permettre au patient de renouer le fil de la trame narrative. S’il est indubitable que la psychothérapie constitue la voie naturelle de traitement des troubles de l’adaptation et de la dépression essentielle, peu d’ouvrages ont été consacrés à la technique à mettre en œuvre chez les patients souffrant de cancer. Il n’est pas impossible que les aspects non spécifiques des différentes formes de psychothérapie soient en eux-mêmes déjà opérants. Des études récentes ont du reste démontré que les psychothérapies traditionnelles (psychodynamique, comportementale et systémique) sont également efficaces, d’une manière générale [15,16]. Efficacité à mettre essentiellement sur le compte des aspects non spécifiques des approches et de l’adhérence du thérapeute à sa technique. Néanmoins aucune étude de ce type n’a été effectuée dans le domaine de la médecine psychosomatique.

Ces découvertes sont peu étonnantes si l’on considère que toutes les formes de « logothérapie » s’efforcent de favoriser l’expression narrative du sujet.

Si l’on veut néanmoins donner un exemple d’une technique spécifique, il est intéressant de se pencher sur le travail de Sami-Ali auprès des sujets cancéreux. [12]. Il reprend, de façon innovante, une technique chère à la tradition psychanalytique : le travail sur le rêve. Il considère que le refoulement de l’affect passe forcément par celui du rêve, et que par conséquent le rêve doit fournir l’axe principal du travail thérapeutique. Le rêve, d’une façon générale et dans le traitement, sert surtout de pont entre le présent et le passé. S’il constitue la voie royale d’accès à l’inconscient il représente pour cette même raison la meilleure opportunité de renouer avec la temporalité et la narration. Mais avant tout il doit retrouver sa place dans la relation thérapeutique avant de la retrouver dans le fonctionnement psychique de l’individu.

Dès lors, l’essentiel du travail thérapeutique consiste à établir

des liens simples entre les rêves, lorsqu’ils surgissent, et les événements de la vie.

Les conceptions de ce psychanalyste sur la perturbation de la perception du temps se départissent considérablement du modèle explicatif communément admis pour les troubles de l’adaptation. La perturbation de la temporalité n’est pas la conséquence du choc traumatique, engendré par l’annonce du diagnostic, mais la précède, est acquise chez le sujet, la plupart du temps précocement. L’altération de la temporalité est donc un facteur prédisposant à la maladie. Il esquisse quatre formes de perturbation de la temporalité, rencontrées de façon récurrente dans la pratique clinique (temporalité circulaire, linéaire, répétitive, discordante) toutes impliquées dans ce qu’il nomme l’impasse relation- nelle. Suivant la logique de cette pensée, ces patients ou ces subjectivités sans sujet disposent de moyens faibles pour établir des relations matures, tout au long de leur existence, mais de façon plus marquée durant la maladie. Dans le travail psychothérapeutique cette même impasse se rejoue avec le thérapeute selon le modèle traditionnel de la névrose actuelle mimant la névrose infantile, imposant une techni- que psychanalytique classique, mais néanmoins centrée sur l’exploration de l’imaginaire et des productions oniriques.

Ce complexe symptomatique, ou paucisymptomatique avant que le cancer ne fasse brèche, n’est pas sans rappeler la vie opératoire selon P. Marty [13] ou la notion d’alexithymie décrite par Sifneos en 1972 [17]. On renoue en quelque sorte avec la théorie d’une alexithymie comme facteur prédisposant à la maladie ou toute une littérature surtout anglo-saxonne sur les personnalités à risque (par exemple de type C). On résiste néanmoins à la tentation d’établir (une fois encore !) un lien de causalité linéaire entre certaines caractéristiques psychologiques et le cancer.

On constate en effet une multiplicité de structures mentales qui ne définissent pas en elles-mêmes une constellation psychosomatique stable. Les études épidémiologiques ont voulu mettre l’accent sur des traits de personnalité communs sans pouvoir établir de corrélations reproducti- bles. Nombreux sont cependant les patients confrontés à un conflit, en forme d’impasse, ancien le plus souvent et réactualisé par la maladie. Le fonctionnement mental de ces patients repose sur le refoulement de la fonction de l’imaginaire, avant que la maladie ne se déclare. L’intégra- tion de ces nouvelles données pourrait octroyer un nouveau souffle à la recherche sur les états dépressifs et en particulier sur la dépression essentielle, permettant peut-être une appréciation plus fine des facteurs prédisposants [18].

Représentation et « localisation » de la thérapie

À quel niveau de représentation se situe le traitement psychothérapeutique ? Quelle conception de la représenta- tion est utile au traitement ? On pourrait esquisser un

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parallèle entre les concepts d’espace public et de représen- tation collective et réciproquement d’espace privé et de représentation sociale. Si l’espace public est régi par la transparence de l’information, donc par les règles du discours officiel, l’espace privé se déploie sous la protection de la discrétion [19]. Comme espace éminemment relation- nel, il s’agit du seul lieu permettant la rencontre des imaginaires (du thérapeute et du patient) et la résurgence d’une vie fantasmatique, nécessaire à la guérison psycho- logique. Le troisième espace, l’espace intime est, lui, régi par le secret et probablement par l’inconscient, qui comme chacun le sait n’est pas directement accessible au thérapeute.

Déclaration de conflit d’intérêt :L’auteur déclare ne pas avoir de conflit d’intérêt.

Références

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9. Rey FLG (1997) Psicologia e Saúde: Desafios Atuais. Psicolo- gia: Reflexão e Crítica, 10, 275287

10. Thomé-Renault (1995) Le traumatisme de la mort annoncée, psychosomatique et sida, Dunod, Paris

11. Guex P (1989) Psychologie et cancer. Manuel de psycho- oncologie, Payot, Lausanne

12. Sami-Ali (2000) Limpasse relationnelle, temporalité et cancer.

Dunod, Paris

13. Marty P (1990) La psychosomatique de ladulte. PUF, Que sais-je ? no1850, Paris

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15. Despland JN (2006) Évaluation des psychothérapies. Encéphale.

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Références

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