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Adaptation culturelle et validation d'un outil en français du Québec pour mesurer l'intensité de la dyspnée chez les patients atteints de maladies pulmonaires

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Academic year: 2021

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Adaptation culturelle et validation d'un outil en français

du Québec pour mesurer l'intensité de la dyspnée chez

les patients atteints de maladies pulmonaires

Mémoire

Michel Doré

Maîtrise en sciences infirmières

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

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Adaptation culturelle et validation d'un outil en français

du Québec pour mesurer l'intensité de la dyspnée chez

les patients atteints de maladies pulmonaires

Mémoire

Michel Doré

Sous la direction de :

Maria-Cécilia Gallani, directrice de recherche

Camille Gagné, codirectrice de recherche

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iii

Résumé

Le Modified Dyspnea Index (MDI) est un outil multidimensionnel développé pour améliorer le degré d’objectivité dans l’évaluation de la dyspnée. Cette étude avait pour but de faire l’adaptation transculturelle du MDI pour la population franco-canadienne et à en tester la fidélité et la validité auprès de patients atteints d’hypertension artérielle pulmonaire (HTP) ou de maladies interstitielles pulmonaires (MIP). La fidélité a été évaluée selon le critère de l’équivalence interjuges. La validité a été évaluée selon le critère de validité convergente en ayant comme base la théorie des symptômes déplaisants et en utilisant les mesures de la condition clinique (classe fonctionnelle et fonction pulmonaire), de la capacité physique, de la pratique d’activités physiques et de la qualité de vie. La proportion d’agrément entre les juges a été satisfaisante, renforçant l’évidence de fidélité. Les corrélations observées entre le MDI et les autres variables suggèrent fortement la validité du MDI auprès d’une population atteinte d’HTP ou de MIP dans le contexte franco-canadien.

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iv

Abstract

The Modified Dyspnea Index (MDI) is a multidimensional tool developed to improve the level of objectivity in the assessment of dyspnea. This study was aimed at proceeding to the cross-cultural adaptation of the MDI for the French-Canadian population and testing its reliability and validity among patients with pulmonary arterial hypertension (PAH) or interstitial lung disease (ILD). The criterion of interrater equivalence was used to evaluate the reliability. Validity was assessed according to the criterion of convergent validity using the Theory of Unpleasant Symptoms as conceptual model to guide the hypothesis. Then the MDI was tested against the measures of clinical status (functional class and lung function), physical capacity, physical activity and quality of life. The proportion of agreement between judges was satisfactory, reinforcing the evidence of reliability. Observed correlations between MDI and other variables strongly suggest the validity of the MDI with a population of HTP or MIP patients in the French-Canadian context.

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v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Remerciements ... ix

Avant-Propos ... x

Chapitre 1 : Introduction ... 1

1.1 Problématique ... 1

1.2 Recension des écrits ... 3

1.2.1 La respiration ... 3

1.2.2 La dyspnée ... 5

1.2.3 La dyspnée dans le contexte de maladies cardiopulmonaires chroniques ... 6

1.2.4 La mesure de la dyspnée ... 7

1.2.5 Les propriétés de mesure et le processus d’adaptation transculturelle d’un outil ... 10

1.2.6 Les propriétés de mesure du BDI et du MDI ... 16

Chapitre 2 : Cadre théorique ... 18

Chapitre 3 : Objectifs ... 24

Chapitre 4 : Méthodologie ... 25

4.1 Processus d’adaptation transculturelle du MDI ... 25

4.1.1 Consentement de l’auteur de l’outil original ... 25

4.1.2 Traduction vers le français ... 25

4.1.3 Synthèse des traductions ... 26

4.1.4 Rétrotraduction vers la langue d’origine ... 26

4.1.5 Validité de contenu ... 26

4.2 Adaptation du guide d’application du MDI et prétest ... 27

4.3 Les étapes de vérification de la fidélité et de la validité ... 28

4.3.1 Vérification de la fidélité de l’outil selon le critère d’équivalence interjuges... 28

4.3.2 Vérification de la validité convergente de l’outil ... 29

Chapitre 5 : Résultats de l’adaptation transculturelle et de l’évaluation de la fidélité ... 35

5.1 Évaluation par le comité d’experts ... 35

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vi

5.3 Fidélité selon le critère de l’équivalence ... 37

Chapitre 6 : Résultats de la validité ... 39

Chapitre 7 : Discussion ... 60

Conclusion ... 64

Bibliographie ... 65

Annexes... 70

Annexe 1. Modified Dyspnea Index (version originale) ... 70

Annexe 2. Instrument pour l’évaluation des équivalences ... 76

Annexe 3. Guide d’application du Modified Dyspnea Index (version brésilienne) ... 101

Annexe 4. Guide d’application du Modified Dyspnea Index (version franco-canadienne) ... 108

Annexe 5. Modified Dyspnea Index (version franco-canadienne) ... 118

Annexe 6. Veterans Specific Activity Questionnaire – VSAQ (version franco-canadienne) ... 124

Annexe 7. Godin-Shephard Leisure-Time Physical Activity Questionnaire – GSLTPAQ (version française) ... 125

Annexe 8. SF-12 (version 2 française du Canada) ... 127

Annexe 9. Formulaire d’information et de consentement ... 130

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vii

Liste des tableaux

Tableau 1. Scénarios possibles pour lesquels l’adaptation est requise ou non…………...13 Tableau 2. Résumé des hypothèses proposées pour tester la validité de la version

franco-canadienne du MDI………….………...34 Tableau 3. Résultats des IVC moyens pour chacune des équivalences évaluées….……36 Tableau 4. Résultats des principales modifications du guide d’application de l’indice

modifié de dyspnée (MDI version française du Québec)………...37 Tableau 5. Caractéristique des participants à l’étape de la fidélité (n = 31)……….38 Tableau 6. Résultat des coefficients de corrélation intraclasse lors de l’équivalence

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Liste des figures

Figure 1. Théorie de niveau intermédiaire des symptômes déplaisants………20 Figure 2. Version mise à jour de la théorie de niveau intermédiaire des symptômes

déplaisants………21 Figure 3. Schéma des étapes du processus d’adaptation culturelle……….25 Figure 4. Schéma représentatif de la procédure pour évaluer la fidélité et la validité du MDI (version franco-canadienne)……….33

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Remerciements

Je remercie premièrement ma directrice de recherche, Maria-Cécilia Gallani, qui a su me transmettre sa passion pour la recherche en sciences infirmières et m’a poussé à aller toujours plus loin dans la production et la diffusion de connaissances. Je tiens à la remercier, tout spécialement, pour le temps qu’elle m’a consacré ainsi que pour les connaissances scientifiques qu’elle a su me transmettre. Merci également à sa formidable équipe de recherche, sans qui ce travail n’aurait pas été réalisé avec un tel plaisir.

Un grand merci au Dr Steeve Provencher et à son équipe à la Clinique spécialisée pulmonaire qui m’a si bien accueilli et qui a facilité ma collecte de données. Un merci spécial à Jacinthe Poirier, infirmière responsable du programme d’hypertension artérielle pulmonaire et des maladies interstitielles de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (IUCPQ). Merci également aux nombreuses personnes, dont Céline Gélinas, Camille Gagné, Johanne Houde et Pierre Verret, qui ont travaillé sur les divers comités d’experts et ont accepté de partager leur expertise lors des diverses étapes de ce projet. Merci également à la Faculté des sciences infirmières d’avoir eu confiance en moi et particulièrement à Clémence Dallaire pour son soutien. Merci à la Direction de la recherche universitaire de l’IUCPQ, au ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport, au RRISIQ et à l’ORIIQ pour leur soutien financier ainsi qu’au Centre de recherche de l’IUCPQ qui a mis en place toutes les conditions nécessaires à la réussite du projet.

Merci à Steve Amireault pour le professionnalisme et l’attention dont il a fait preuve pour la réalisation des analyses statistiques.

En terminant, je ne pourrais passer sous silence le soutien indéfectible de ma famille et de mes amis. Sans votre appui, ce projet n’aurait jamais pu voir le jour. Merci particulièrement à mes parents, à mes frères et à Philippe, qui m’ont soutenu et encouragé à terminer ce projet.

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Avant-Propos

Ce projet découle de mon intérêt pour l’évaluation de la condition de santé des patients atteints de maladies chroniques. Ce projet fut pour moi une formidable expérience où j’ai appris le rigoureux processus de la recherche. Le présent document est un mémoire avec insertion d’article.

L’article inséré dans ce mémoire a été soumis pour publication le 17 mai 2016 à l’éditrice du European Journal of Cardiovascular Nursing. En date du 1er juillet 2016, il est toujours à l’étude avec l’éditrice. Aucune modification

n’a été faite entre l’article inséré dans ce mémoire et celui soumis pour publication.

J’ai contribué de façon substantielle à la conception et au devis du projet de recherche. J’ai réalisé la collecte des données. J’ai également participé à l’analyse et à l’interprétation des données. J’ai rédigé, en collaboration avec ma directrice, l’article inséré dans ce mémoire. Je suis le premier auteur de cet article.

Voici les renseignements sur les coauteurs de l’article :

 Dr Steeve Provencher, pneumologue, directeur du programme d’hypertension pulmonaire à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (IUCPQ) et chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (CRIUCPQ) au sein du groupe de recherche en hypertension pulmonaire. Il a participé à la conception et au devis du projet de recherche. Il a également contribué à l’interprétation des données, révisé celles-ci de façon critique et approuvé la version soumise de l’article.

 Dr Paul Poirier, cardiologue, professeur titulaire à la Faculté de pharmacie de l’Université Laval et chercheur au CRIUCPQ. Il a participé à la conception et au devis du projet de recherche. Il a également contribué à l’interprétation des données, révisé celles-ci de façon critique et approuvé la version soumise de l’article.

 Dre Céline Gélinas, professeure associée à l’École des sciences infirmières de l’Université McGill et infirmière chercheure au centre de recherche en sciences infirmières de l’Hôpital général juif de Montréal. Elle a participé à la conception et au devis du projet de recherche. Elle a également contribué à l’interprétation des données, révisé celles-ci de façon critique et approuvé la version soumise de l’article.

 Dr James K. Stoller, médecin en soins intensifs respiratoires, président de la direction de l’enseignement à la Cleveland Clinic en Ohio et auteur de l’outil original (MDI). Il a participé à l’interprétation des données, révisé celles-ci de façon critique et approuvé la version soumise de l’article.

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 Dre Maria-Cécilia Gallani, professeure titulaire à la Faculté des sciences infirmières de l’Université Laval et chercheure au CRIUCPQ. Elle a participé de façon substantielle à la conception et au devis du projet de recherche. Elle a également contribué à l’analyse et à l’interprétation des données. Elle a corédigé l’article.

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Chapitre 1 : Introduction

1.1 Problématique

Les maladies cardiovasculaires et pulmonaires font partie des causes importantes de décès et d’invalidité au Canada liées à des problèmes de santé chroniques (Statistiques Canada, 2012). Les maladies cardiovasculaires étaient la première cause de mortalité dans le monde et les maladies pulmonaires se classaient au troisième rang en 2012 (Organisation mondiale de la Santé, 2014). La prévalence des maladies cardiovasculaires au sein de la population canadienne âgée de 20 ans ou plus était de 6,2% en 2014 et de 9,7% pour les maladies pulmonaires obstructives chroniques chez la population âgée de 35 ans et plus en 2011-2012 (Agence de la santé publique du Canada, 2015).

De ce fait, ces maladies représentent un défi pour le système de santé et l’infirmière a un rôle fondamental dans l’optimisation de la qualité des soins et services dans ce contexte. Comme les infirmières représentent la plus forte proportion des intervenants en santé et que celles-ci sont en contact direct avec le patient-famille-communauté, elles sont les professionnelles par excellence pour assurer le continuum des soins entre tous les secteurs de la santé - du secteur primaire au quaternaire et vice versa. De plus, elles ont les compétences nécessaires pour gérer toutes les sphères qui composent le bien-être humain dans ce continuum, tant au niveau des aspects physiques, cliniques, émotionnels, sociaux, cognitifs que spirituels, en tenant compte de l'unicité de l'expérience de l'individu dans le processus santé-maladie (Gallani, 2015).

La dyspnée est un des symptômes les plus importants de la plupart des maladies chroniques. Au-delà de l’impact sur la qualité de vie de l’individu, ce symptôme est également un prédicteur important d’hospitalisation (Ong, Earnest, & Lu, 2005) et de mortalité chez les patients atteints de maladies pulmonaires comme les maladies pulmonaires obstructives chroniques (MPOC) (Celli et al., 2004). Ainsi, l’évaluation de la dyspnée devient un incontournable dans le suivi clinique de patients atteints de ces maladies. En considérant le rôle de l’infirmière dans le suivi à long terme de ces patients, l’utilisation d’un outil de mesure valide, permettant d’évaluer la dyspnée en profondeur, serait un atout pour sa pratique clinique.

La dyspnée peut être définie comme une expérience subjective d’inconfort respiratoire, laquelle consiste en des sensations distinctes qui varient en intensité (Parshall et al., 2012). Aucune mesure étalon n'existe pour en déterminer l’intensité. La subjectivité du symptôme le rend également difficile à quantifier. Des instruments de mesure ont ainsi été développés afin d’améliorer le niveau d’objectivité dans l’estimation de l’intensité de la dyspnée (Borg, 1982; Fletcher, Elmes, Fairbairn, & Wood, 1959). En 2007, une équipe de chercheurs a fait une revue systématique des échelles de mesure de la dyspnée en soins palliatifs (Dorman, Byrne, & Edwards, 2007). Ces chercheurs ont catégorisé les instruments selon l’aspect de la dyspnée évalué par ceux-ci. Ainsi, certains

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instruments évaluaient la sévérité de l’essoufflement alors que d’autres cherchaient à décrire le symptôme ressenti ou la limitation fonctionnelle associée à celui-ci. La sélection de l’outil d’évaluation approprié à la situation doit être faite en fonction de l’objectif à atteindre lors de l’évaluation et des ressources disponibles. Certaines échelles, comme l’échelle de Borg modifiée, ont démontré une fidélité et une validité intéressante pour l’évaluation de la dyspnée, notamment dans un contexte aigu avec les patients atteints de MPOC et d’asthme (Kendrick, Baxi, & Smith, 2000). Cependant, lorsque la condition sous-jacente devient chronique, il devient plus difficile d’utiliser de telles échelles. Le processus d’adaptation du patient à sa condition de santé peut faire en sorte que celui-ci modifie ses habitudes de vie pour éviter de ressentir une exacerbation de ses symptômes malgré une détérioration de son état de santé (Mahler, Weinberg, Wells, & Feinstein, 1984). Au lieu d’avoir une augmentation de la dyspnée liée à l’aggravation de la maladie, le patient pourra modifier ses habitudes de vie et de travail, par une diminution de la fréquence et de l’intensité des activités ou le ralentissement de la vitesse d’exécution de certaines tâches par exemple, afin de pallier la manifestation du symptôme. Lors de l’évaluation unique de l’intensité perçue de la dyspnée, celle-ci pourra ainsi se situer à un niveau habituel pour le patient, car celui-ci aura réduit l’intensité de ses activités au travail ou à domicile afin d’éviter une augmentation de l’intensité du symptôme (Mahler et al., 1984). En fait, il est fréquent que le patient vivant avec un état dyspnéique cherche à éviter les activités qui déclenchent cet état. Ces patients peuvent devenir de plus en plus sédentaires et cela peut avoir des impacts sur leur forme physique (Sassi-Dambron, Eakin, Ries, & Kaplan, 1995). Il devient alors très pertinent d’évaluer l’impact fonctionnel de la dyspnée afin de déceler ces changements sur la condition de santé du patient et ainsi pouvoir intervenir de façon appropriée. La plupart des outils de mesure considèrent la dyspnée comme un concept unidimensionnel. Habituellement, ces outils n’évaluent que l’ampleur de la tâche qui déclenche l’essoufflement (Mahler et al., 1984). Cependant, des données probantes, dont des concepts théoriques, soutiennent l’hypothèse que la dyspnée comprenne plusieurs dimensions ou composantes pouvant être mesurées comme différents concepts (Lenz, Pugh, Milligan, Gift, & Suppe, 1997; Stoller, Ferranti, & Feinstein, 1986).

Le Modified Dyspnea Index (MDI), outil de mesure autorapporté dérivé du Baseline Dyspnea Index (BDI), permet d'évaluer globalement ce symptôme, car son score final reflète non seulement l'intensité perçue de la dyspnée, mais également son impact sur la capacité fonctionnelle du patient, en tenant compte à la fois de son environnement domestique et de son environnement de travail (Stoller et al., 1986). Au cours du suivi clinique, l'utilisation d’un tel instrument dans l'évaluation des patients peut fournir des renseignements importants afin de cibler la meilleure approche thérapeutique par les différents professionnels de santé et d’évaluer les résultats des interventions mises en œuvre. L’adaptation culturelle du MDI a déjà été effectuée pour la culture brésilienne avec succès (Miura, Gallani, de Barros Leite Domingues, Rodrigues, & Stoller, 2010). Cependant, à ce jour,

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aucun instrument similaire n'a été développé ou adapté à la culture canadienne en français pour mesurer objectivement la dyspnée.

Ainsi, le but de cette étude a été d’effectuer l’adaptation transculturelle du MDI pour la population canadienne de langue française et de tester ses propriétés de mesure, c’est-à-dire les propriétés de fidélité et de validité. Pour les tests de validation de la version franco-canadienne du MDI, la théorie de symptômes déplaisants (Lenz et al., 1997; Lenz, Suppe, Gift, Pugh, & Milligan, 1995) a été utilisée pour guider l’élaboration des hypothèses. Cette étude a ciblé les patients atteints de maladies pulmonaires, car ceux-ci présentaient les caractéristiques nécessaires dans un processus de validation d’un outil de mesure de la dyspnée. Ces patients présentent une dyspnée à différents niveaux d’intensité, une variabilité appréciable de caractéristiques sociodémographiques (âge, insertion dans le marché de travail) et par conséquent différents niveaux d’impact du symptôme sur leur qualité de vie. En plus, il était important de s’assurer de l’obtention de données cliniques essentielles à l’évaluation de la sévérité de la maladie pulmonaire, telles que le test de marche et les tests de la fonction respiratoire. Ainsi, la population choisie était constituée de patients atteints d’hypertension artérielle pulmonaire ou de maladies interstitielles pulmonaires en suivi ambulatoire à la clinique des maladies vasculaires pulmonaires ou interstitielles pulmonaires de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (IUCPQ).

Dans les prochaines sections, nous aborderons le concept complexe qu’est la dyspnée dans les maladies chroniques telles que l’hypertension pulmonaire et les maladies interstitielles pulmonaires. Par la suite, nous élaborerons les étapes de l’adaptation transculturelle et de la validation d’un outil de mesure et nous terminerons avec la théorie des symptômes déplaisants.

1.2 Recension des écrits

1.2.1 La respiration

La respiration est le mouvement de l'appareil pulmonaire dans son ensemble, permettant de faire entrer et sortir l’air des poumons et ainsi d’apporter de l’oxygène aux tissus et d’éliminer le dioxyde de carbone (Guyton & Hall, 2003). La respiration suit un rythme qui se décompose en une phase d’inspiration et une phase d’expiration caractérisées par l’amplitude des mouvements respiratoires et la fréquence respiratoire (Sherwood, 2006). Selon Killian et Campbel (1997), la respiration adéquate avait comme résultat, pour l’ancienne médecine chinoise d’il y a 4000 ans, le transfert de l’essence vitale de l’air vers l’âme – lien chi. Elle est ainsi reconnue depuis longtemps comme étant indispensable à la vie. Plus tard, les Grecs anciens reconnaissaient que la respiration était dépendante de l’activité des muscles respiratoires qui, à son tour, dépendait des connexions neuronales.

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À ce jour, il est bien reconnu que la respiration atteint son but en quatre étapes : (1) ventilation pulmonaire (entrée et sortie de l’air de l’atmosphère aux alvéoles et inversement); (2) diffusion de l’oxygène et du dioxyde de carbone entre les alvéoles et le sang (hématose); (3) transport de l’oxygène et du dioxyde de carbone dans le sang vers les cellules et inversement; (4) la respiration cellulaire (utilisation de l’oxygène par la cellule). Pour réaliser cela, la respiration repose sur l'activité neuronale (Sherwood, 2006) de sorte que le système nerveux ajuste la ventilation alvéolaire, à la quasi-perfection, à la demande de l’organisme (Guyton & Hall, 2003). Les centres respiratoires donnent naissance au rythme respiratoire et sont composés de plusieurs groupes de neurones disposés de façon bilatérale dans le bulbe et la protubérance du tronc cérébral. Ce sont le groupe respiratoire dorsal, responsable de l’inspiration ; le groupe respiratoire ventral qui compte à la fois des neurones inspiratoires et expiratoires et le centre pneumotaxique qui participe au contrôle de la fréquence et du profil respiratoires (Guyton & Hall, 2003).

Les muscles respiratoires, quant à eux, renvoient l’information aux centres respiratoires situés dans le tronc cérébral et au cortex via les mécanorécepteurs et chémorécepteurs (Sherwood, 2006). Lorsque les poumons sont surdistendus, les influx envoyés provoquent l’arrêt de la pente inspiratoire et empêchent donc les poumons de continuer à se remplir. C’est le réflexe de distension pulmonaire de Hering-Breuer destiné à protéger l'appareil pulmonaire (Guyton & Hall, 2003). Il est également à l'origine de l'expiration (Sherwood, 2006). D’un point de vue chimique, des variations de pH et de pressions partielles en dioxyde de carbone et en oxygène déclencheront une augmentation ou une diminution de la respiration (Guyton & Hall, 2003; Sherwood, 2006). Le système nerveux central est pourvu de récepteurs sensibles aux changements du pH ainsi que des niveaux d’oxygène et de dioxyde de carbone (Guyton & Hall, 2003). L’augmentation du pH provoque, par action réflexe, une augmentation de la fréquence et de l'amplitude des mouvements respiratoires afin de rétablir l’équilibre acido-basique. L’augmentation du taux de gaz carbonique dans le sang entraîne une augmentation du rythme respiratoire. À l’inverse, une augmentation de la quantité d'oxygène dans le sang diminue le rythme respiratoire (Guyton & Hall, 2003; Sherwood, 2006).

Plusieurs facteurs physiologiques, psychiques et situationnels peuvent influencer positivement ou négativement la fréquence et l'amplitude des mouvements respiratoires. Par exemple, la poussière et les polluants représentent des agents irritants susceptibles de déclencher des réflexes pulmonaires dans leur ensemble (toux, accélération de la respiration, fabrication de mucus, etc.). Les maladies cardiopulmonaires peuvent, elles aussi, affecter différentes étapes de la respiration. Parmi les facteurs psychiques influençant le rythme respiratoire, il y a la douleur physique, les émotions et le stress. La volonté, les expériences personnelles ou encore le style de vie et autres facteurs situationnels ont également une influence sur ce rythme (Guyton & Hall, 2003; Sherwood, 2006). La respiration est donc un mécanisme involontaire sujet à un certain contrôle volontaire

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puisque plusieurs stimuli agissent par voie réflexe et/ou par voie directe pour moduler le rythme respiratoire (Sherwood, 2006).

1.2.2 La dyspnée

La dyspnée désigne un état d’angoisse associé à une difficulté à respirer suffisamment pour répondre aux besoins de l’individu (Guyton & Hall, 2003; Sherwood, 2006). Le symptôme peut être associé par un mouvement ventilatoire pénible, conscient et parfois volontaire, représentant un obstacle à la ventilation et par conséquent une augmentation anormale du travail ventilatoire (Sherwood, 2006). Par contre, en étant une expérience subjective, la dyspnée ne doit jamais être inférée à partir de l’observation du rythme respiratoire du patient (Kacmarek, Stoller, & Heuer, 2017), mais plutôt de ce que le patient ressent. En fait, la perception de la dyspnée, tout comme celle de la douleur, est de nature complexe et qualitativement différente, variant également en intensité. En étant issu de multiples facteurs (physiologiques, psychologiques, sociaux et environnementaux), ce phénomène a le potentiel d'induire des réponses physiologiques et comportementales différentes (American Thoracic Society, 1999). De plus, la dyspnée, tout comme la douleur, peut causer de la souffrance. Comme la respiration est une fonction primordiale à la vie, la dyspnée est toujours perçue comme une menace à la vie et peut déclencher un sentiment profond de terreur (Kacmarek et al., 2017).

De façon résumée, la dyspnée survient lorsque l’effort pour respirer est disproportionnellement plus grand que le volume courant atteint. La perception de respirer est un équilibre complexe entre : 1. la stimulation neuronale pour respirer provenant du centre respiratoire dans le tronc cérébral ; 2. la tension développée par les muscles respiratoires ; 3. le mouvement des poumons et de la paroi thoracique (Guyton & Hall, 2003). Quand les signaux neuronaux gouvernant ces sensations ne sont plus en équilibre, c’est-à-dire lorsqu’il y a une dissociation neuromécanique, la respiration est perçue comme anormale et désagréable.

La dyspnée diffère des autres sensations par le fait que la voie neuronale sous-jacente à celle-ci n’est pas encore bien comprise. En effet, les régions cérébrales traitant l’information liée aux sensations olfactives, visuelles, auditives ou somesthésiques sont très bien identifiées. La sensation de dyspnée ne semble pas stimuler de régions corticales précises (Manning & Schwartzstein, 1995). De plus, l’étude de cette sensation est complexe par la difficulté de définir précisément le stimulus en cause lors de l’apparition de celle-ci.

Les poumons recèlent une multitude de récepteurs qui transmettent des informations au système nerveux central. Les récepteurs d'étirement pulmonaire présents dans les voies respiratoires réagissent au gonflement du poumon et participent à l’arrêt de l’inspiration. D’autres récepteurs présents dans l’épithélium des voies aériennes pulmonaires réagissent à une multitude de stimuli chimiques et mécaniques régulant ainsi la bronchoconstriction. Les fibres C situées dans la paroi alvéolaire et dans les vaisseaux sanguins s’activent en

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présence de congestion interstitielle. Les informations fournies par ces récepteurs peuvent ainsi prendre part à la sensation de la dyspnée (Manning & Schwartzstein, 1995).

La dyspnée est donc le résultat d’une interaction complexe de divers signaux provenant du système nerveux central et d’un éventail important de récepteurs situés dans les voies aériennes supérieures, dans les poumons et dans la paroi thoracique. La majorité des conditions causant de l'essoufflement le ferait en activant plus d'un mécanisme. De plus, les conditions différentes déclenchant une dyspnée utilisent des mécanismes communs entre elles (Manning & Schwartzstein, 1995).

1.2.3 La dyspnée dans le contexte de maladies cardiopulmonaires chroniques La dyspnée est fréquemment ressentie à divers degrés lors de maladies chroniques, notamment dans les maladies pulmonaires chroniques ou les maladies cardiovasculaires. La dyspnée est le symptôme le plus fréquent chez les patients atteints d’une maladie cardio-respiratoire (Mahler et al., 1996). Chez les patients atteints de maladies pulmonaires de type restrictive ou obstructive, la dyspnée causée par les activités est le symptôme le plus commun et participe de façon importante à la perception d’un mauvais état de santé (Faisal et al., 2016). Le symptôme peut également être présent dans d’autres conditions, non nécessairement pathologiques, telles que la grossesse et le vieillissement primaire (Ambrosino & Serradori, 2006; American Thoracic Society, 1999).

L’hypertension pulmonaire (HTP) est une maladie dégénérative chronique caractérisée par une augmentation progressive de la résistance vasculaire pulmonaire. Les critères diagnostiques incluent une pression artérielle pulmonaire moyenne de plus de 25 mmHg au repos ou plus de 30 mmHg à l’exercice sans maladie valvulaire du cœur gauche, myocardique ou cardiaque congénitale ainsi que toute autre maladie respiratoire, thromboembolique chronique ou des tissus conjonctifs avec une répercussion clinique importante (Rubin, 1997). L’incidence de l’hypertension pulmonaire primaire serait d’un à deux cas par million de personnes dans la population générale. Les trois éléments associés à l’hypertension pulmonaire primaire sont la vasoconstriction, le remodelage de la paroi vasculaire et la thrombose in situ. La dyspnée est la raison de consultation principale chez 60 % des patients, mais ce symptôme est rapporté chez presque tous les patients lors de la progression de la maladie. Il y a une corrélation entre la distance atteinte au test de marche de six minutes et la sévérité de l’HTP (Rubin, 1997). Ce test peut donc être utile pour surveiller la réponse thérapeutique. L’objectif thérapeutique de l’HTP vise notamment à diminuer l’intensité des symptômes, à améliorer la qualité de vie et à prévenir la progression de la maladie (Provencher et al., 2015).

Les maladies interstitielles pulmonaires (MIP) regroupent plusieurs maladies affectant le parenchyme pulmonaire. Ces maladies peuvent être secondaires à une condition de santé comme dans le cas de l’amiantose ou de la sarcoïdose, mais peuvent être sans cause évidente connue comme la fibrose pulmonaire idiopathique.

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Cette dernière est associée à une dyspnée progressive à l’effort ainsi qu’à des résultats anormaux aux tests de fonctions respiratoires (Prasad, Holland, Glaspole, & Westall, 2016). La présentation clinique typique inclut une toux non productive, de la dyspnée, des infiltrats interstitiels bilatéraux à la radiographie thoracique ainsi d’une présentation clinique de problème ventilatoire restrictif lors des tests de fonctions respiratoires. Une telle présentation sera révélée à la spirométrie par une diminution de la capacité vitale forcée (CVF) et du volume expiratoire maximal en une seconde (VEMs). Le ratio VEMs/CVF peut être normal ou élevé en raison de la réduction de la compliance pulmonaire. Les échanges gazeux sont également altérés et cette altération est mise en évidence par une capacité de diffusion de l’oxyde de carbone (DLCO) diminuée (Prasad et al., 2016). L’incidence de la fibrose pulmonaire idiopathique serait entre 6,8 et 16,3 cas par 100 000 personnes aux États-Unis (Lynch et al., 2016). La pathogenèse de la fibrose pulmonaire est complexe et implique de nombreux éléments dont des lésions pulmonaires répétées, une destruction des membranes sous-épithéliale, la présence d’inflammation et d’un processus de cicatrisation inappropriés. Les symptômes initiaux sont la toux non productive et la dyspnée, mais lors de la progression de la maladie, la toux devient paroxystique et il y a aggravation de la dyspnée et de la limitation à l’exercice (Lynch et al., 2016).

L’évaluation de la dyspnée et de ses répercussions sur la vie du patient est alors primordiale pour le professionnel de la santé, et notamment pour l’infirmière, désirant faire un suivi adéquat de l’évolution de ces maladies, car une exacerbation aiguë de celles-ci peut être détectée, entre autres, par une augmentation de la dyspnée dans les 30 derniers jours précédant l’exacerbation. L’incidence annuelle des exacerbations aiguës de la fibrose pulmonaire idiopathique est estimée de 5 à 10% et est associée à un haut taux de mortalité (Prasad et al., 2016).

1.2.4 La mesure de la dyspnée

L’évaluation clinique de la dyspnée est importante, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, ce symptôme est souvent la plainte la plus fréquemment rapportée, particulièrement à l’activité physique. Deuxièmement, la dyspnée représente la somme de plusieurs facteurs physiologiques et psychologiques et cela incite le patient à consulter un professionnel de la santé (Mahler & Wells, 1988). Afin de quantifier la dyspnée, celui-ci doit évaluer sa sévérité ainsi que son impact sur l’état de santé fonctionnel du patient. Finalement, l’évaluation de la dyspnée est un facteur important afin de déterminer l’efficacité du traitement (Mahler & Wells, 1988). L’amélioration de la capacité d’évaluation de la dyspnée contribue à ce que l’infirmière puisse évaluer de façon plus poussée la condition clinique du patient et la répercussion de ce symptôme sur la qualité de vie du patient. Une meilleure évaluation permet à son tour la dispense de soins plus ciblés. Une mesure objective facilite le transfert d’informations entre les membres de l’équipe multidisciplinaire sur l’évaluation du patient ainsi que sur l’efficacité des traitements.

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Aucune épreuve diagnostique ni biomarqueur n’est corrélé étroitement avec un changement du niveau de dyspnée dans toutes les conditions (Parshall et al., 2012). Malgré le fait que plusieurs instruments ont été développés afin de quantifier la dyspnée, aucune mesure étalon (Gold Standard) n’existe pour ce symptôme. Ainsi, chaque outil a ses avantages et inconvénients.

On peut regrouper les outils d’évaluation de la dyspnée selon ce qu’ils évaluent. Il y a ceux qui évaluent la perception sensorielle (intensité perçue ou qualité subjective), la dimension affective (détresse affective), les impacts de la dyspnée (l’impact sur la fréquence, l’impact sur la performance fonctionnelle ou sur les activités ainsi que l’impact sur l’état de santé ou la qualité de vie) ou une multitude de combinaisons de ces domaines (Parshall et al., 2012).

Lorsqu’un outil n’évalue le symptôme que sur une seule dimension, il est dit unidimensionnel. Un des outils unidimensionnels fréquemment utilisés est l’échelle de Borg. Il évalue l’intensité perçue d’un effort physique (Borg, 1982). Celui-ci varie de 6 à 20 dans la version originale et de 0 à 10 dans sa version modifiée (où 0 signifie rien du tout et 10, très, très difficile).

L’échelle de dyspnée du Medical Research Council (MRC) est un outil unidimensionnel évaluant l’impact de l’essoufflement sur les activités physiques du patient. Ainsi, il varie de 1 à 5 allant de « 1-Aucune dyspnée : Est essoufflé seulement lors d’un effort vigoureux » à « 5-Dyspnée très sévère : Est trop essoufflé pour sortir de chez lui ou est essoufflé lorsqu’il s’habille ou se déshabille » (American Thoracic Society, 1982; Ferris, 1978; Fletcher et al., 1959).

Au début des années 1980, de nouveaux outils ont été développés dans le but de saisir les multiples dimensions de la dyspnée (Mahler & O'Donnell, 2014). Ainsi, en plus de l’intensité, des outils tels que le questionnaire respiratoire de Saint-Georges (Jones, Quirk, & Baveystock, 1991), le BDI/TDI (Mahler et al., 1984) et le MDI (Stoller et al., 1986) ont évalué simultanément l’impact de la dyspnée sur la qualité de vie ou sur les performances fonctionnelles.

En 1999, l’American Thoracic Society (ATS) a recensé plusieurs outils valides pour évaluer la dyspnée. Cependant, comme peu d’attention a été apportée aux domaines ou aux dimensions du symptôme pour un instrument donné, aucune recommandation n'a été faite sur l'utilisation et l'indication pour chaque instrument, en fonction des dimensions évaluées (Parshall et al., 2012).

Jusqu’aux années 1980, l’évaluation de la dyspnée a été souvent réduite à l’identification de l’ampleur de la tâche la plus exténuante déclenchant la sensation de l’essoufflement. Peu d’attention a été accordée à la quantité d’efforts que le patient pouvait fournir pour accomplir cette tâche ni l’impact fonctionnel du symptôme

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(Stoller et al., 1986). Afin de pallier cette limite présente dans les mesures unidimensionnelles de la dyspnée, Mahler et al. (1984), ont proposé un nouvel index pour évaluer le symptôme. Ce nouvel outil a été nommé le Baseline Dyspnea Index (BDI).

Dans cet outil, les auteurs proposent non seulement l’évaluation de la tâche la plus ardue que le patient peut effectuer, mais également l’effort que le patient peut fournir pendant cette tâche (Stoller et al., 1986). Ceci est un fait intéressant, car la capacité d’activité physique du patient peut être considérablement augmentée ou réduite selon l’effort du patient lorsqu’il effectue cette même tâche. Le BDI permet également l’évaluation de l’impact fonctionnel de la dyspnée dans le quotidien du patient. L’impact fonctionnel est important à considérer, car une réduction modérée dans la capacité à réaliser une activité en raison de la dyspnée peut avoir peu ou pas d’impact chez les patients sédentaires, mais pourrait avoir une répercussion importante chez les patients ayant une vie active avec des activités exigeantes physiquement (Stoller et al., 1986).

Des études ultérieures ont montré que cet outil était facile à opérationnaliser, que l’attribution des scores dépendait de l’utilisation d’une approche systématique pour obtenir une histoire complète de l’état respiratoire du patient, que l’outil a démontré une équivalence interjuges acceptable et que les résultats du BDI ont été significativement corrélés, sans l’être trop fortement, avec les résultats des tests de fonction respiratoire et de capacité physique (Stoller et al., 1986).

Deux ans plus tard, Stoller et al., (1986) ont suggéré plusieurs modifications au BDI afin d’améliorer sa précision. Ainsi, ils ont augmenté la précision des critères d’évaluation et ont renommé ce nouvel outil le Modified Dyspnea Index (MDI) (Annexe 1).

Tout comme le BDI, ce nouvel outil évalue les dimensions de l’impact fonctionnel de la dyspnée, de la magnitude de la tâche ainsi que la magnitude de l’effort. Cependant, considérant le fait que les niveaux des activités faites au travail et à la maison peuvent être différents, l’impact fonctionnel de la dyspnée a été séparé en deux parties. Chaque impact fonctionnel a son propre score variant de 1 à 4. Ces deux scores sont par la suite fusionnés afin de donner le score de l’impact fonctionnel composé.

Une autre modification apportée par Stoller et al. (1986) fut relative aux définitions de la magnitude de la tâche et de l’effort. Leur équipe a fait une distinction entre la tâche qui déclenche une dyspnée et la tâche la plus exigeante physiquement que le patient peut effectuer malgré l’apparition de cette dyspnée. En effet, certains patients continueront de faire l’activité malgré la présence d’un essoufflement. Par conséquent, comparée à celle qui déclenche l’essoufflement, la tâche la plus exigeante physiquement est une meilleure mesure pour évaluer l’ampleur de l’effort que le patient peut fournir. Chez certains patients, une dyspnée pourrait être déclenchée avec une activité légère alors que pour d’autres l’activité déclenchant la dyspnée serait plus intense.

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Indépendamment de ce seuil, le patient dyspnéique pourrait être très peu dérangé par cette dyspnée et pourrait donc effectuer la tâche rapidement sans pause ni ralentissement alors qu’un autre devra faire la tâche plus lentement par le biais de plusieurs pauses. D’un autre côté, le niveau d’intensité de l’activité qui déclenche une dyspnée est préconisé pour l’évaluation de l’ampleur de la tâche, car les patients sous-estiment les tâches difficiles à moins qu’ils ne se poussent régulièrement à la limite de leur tolérance à l’exercice. L’identification du niveau des tâches déclenchant la dyspnée vise ainsi à éviter la sous-estimation de la capacité du patient. Encore aujourd’hui, on constate une utilisation plus accrue du BDI dans les études sur la dyspnée (Justine, Tahirah, & Mohan, 2013; Lumetti et al., 2015; Mahler et al., 2015; Perez et al., 2015; Polat & Ergüney, 2016; Tabberer, Brooks, & Wilcox, 2015), malgré les avantages du MDI apportant plus de précisions dans la mesure de la dyspnée et surtout en ce qui concerne l’impact du symptôme sur la capacité fonctionnelle de l’individu dyspnéique. Le MDI a été utilisé dans l’étude originale de Stoler et al. (1986), et par la suite, dans le contexte brésilien, avec l’étude d’adaptation culturelle et de validation de l’outil auprès d’une population atteinte de maladies cardiovasculaires (Miura, 2010; Miura et al., 2010) et de validation de cette même version auprès d’une population atteinte de MPOC. Tant dans les études originales du développement du BDI et du MDI que dans les études d’adaptation culturelle et de validation pour la population brésilienne, ces deux outils ont démontré des preuves satisfaisantes de propriétés de mesure, ce qui est fondamental pour des outils qui font la mesure des concepts abstraits tels que la dyspnée.

1.2.5 Les propriétés de mesure et le processus d’adaptation transculturelle d’un outil

Lors du développement ou de l’adaptation d’un nouvel instrument de mesure, on doit être capable de prouver que cet instrument est fidèle et valide pour mesurer ce qu’il prétend mesurer. Ces critères sont les propriétés de mesure d’un outil. Les tests de propriétés de mesure peuvent donc être regroupés en deux grandes classes d’évaluation : la fidélité et la validité.

La fidélité

La fidélité est le degré de constance avec lequel celui-ci mesure ce qu’il prétend mesurer (Loiselle, Profetto-McGrath, Polit, & Beck, 2007), ou encore la précision de l’outil mesurant le concept et produisant des résultats semblables lors d’applications répétées ou par des évaluateurs distincts. Cela permet de déduire que la mesure est stable dans le temps et que les erreurs de mesure sont absentes ou minimes (Alexandre & Ede, 2002; Bowling, 1997; Burns & Grove, 1997). Prenons l’exemple d’une balance. Lorsqu’un individu pèse à plusieurs reprises exactement le même objet, une balance fidèle devrait donner sensiblement le même résultat à chacune des mesures. Par contre, si le résultat varie grandement d’une mesure à l’autre, la fidélité de cet instrument sera alors remise en question.

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Il existe plusieurs façons d’évaluer la fidélité d’un instrument. Le choix d’une ou de plusieurs de ces méthodes dépendra de la nature même de l’outil ou de l’objet à mesurer. Le coefficient de la fidélité peut varier de 0 à 1. Une corrélation de 0 signifie qu’il n’a pas de relation alors qu’un résultat près du 1 signifie que l’instrument commet très peu d’erreurs de variance. Un résultat de 0,70 ou plus est généralement considéré comme acceptable pour l’évaluation de la fidélité d’un instrument de mesure (LoBiondo-Wood & Haber, 1984).

Premièrement, il y a la stabilité temporelle. Celle-ci fait référence à la capacité de l’instrument de donner le même résultat à la suite de mesures répétées (LoBiondo-Wood & Haber, 1984). La stabilité est généralement évaluée avec la méthode que l’on nomme test-retest. Ainsi, on évalue le même objet ou concept avec l’instrument lors de deux moments distincts, mais dans des conditions similaires. Il faut cependant s’assurer que la caractéristique évaluée ne changera pas entre les deux mesures. Un temps trop long ou trop court entre les deux mesures peut parfois influencer le résultat au retest.

Un autre critère de fidélité est l’homogénéité. L’homogénéité, du point de vue de la fidélité, signifie que tous les items évalués par l’instrument de mesure se rapportent au même concept ou à la même caractéristique. Le coefficient alpha de Cronbach sert à mesurer la cohérence interne d’un outil composé de plusieurs éléments ou sous-parties (Loiselle et al., 2007). Ce coefficient compare chaque item de l’outil entre eux simultanément. Le dernier critère d’évaluation de la fidélité d’un outil est celui de l’équivalence. Un instrument répond à l’exigence de l’équivalence quand celui-ci produit le même résultat lorsque des instruments ou procédures équivalents ou parallèles sont utilisés. Lorsque le concept est évalué par un individu, on peut utiliser l’équivalence interjuges (Burns & Grove, 1997). Cette technique demande que le concept ou l’objet soit évalué par deux observateurs ou plus utilisant le même instrument, et ce, de façon simultanée ou non. Les résultats obtenus par les observateurs sont alors comparés à l’aide d’un coefficient Kappa ou intraclasses (ICC).

La validité

La validité peut être définie comme le degré d’authenticité de la mesure, c’est-à-dire le degré de justesse d’un instrument à mesurer ce qu’il prétend mesurer (Blacker & Endicott, 2000; Burns & Grove, 1997; Carmines & Zeller, 1979). Lorsque l’outil de mesure est valide, le résultat reflète réellement le concept qu’il prétend mesurer. Reprenons ici l’exemple de la balance. Elle a été développée pour mesurer la masse d’un objet. Ainsi, lorsque l’on y dépose un objet, la balance détermine la masse de l’objet en fonction de la pression exercée par l’objet sur celle-ci en prenant en considération la gravité terrestre ainsi que d’autres facteurs. Une balance valide sera alors capable de déterminer, avec une précision variable, la masse d’un objet. Il serait peu probable que l’instrument de mesure, qui ici est une balance, soit un instrument de mesure valide pour évaluer un concept tel que la qualité de vie. Du moins, il faudrait tester cette propriété afin de confirmer ou infirmer cette affirmation.

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Il existe plusieurs types de validité, dont la nomenclature et la définition varient significativement dans la littérature.

Validité de contenu : La validité de contenu représente le domaine d’un construit donné. Ce type de validité fournit la base afin de formuler les items qui représenteront adéquatement le contenu (LoBiondo-Wood & Haber, 1984). La validité de contenu est une évaluation subjective, mais systématique, du contenu de l’instrument de mesure. Elle comprend les étapes de l’évaluation du contenu de l’outil par un comité composé d’experts dans le domaine concerné ainsi que d’un prétest réalisé auprès d’un échantillon de la population à l’étude. Pour quantifier la validité de contenu, plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour évaluer la concordance entre les experts sur les divers aspects de l’outil (LoBiondo-Wood & Haber, 1984). Le chercheur peut utiliser un indice de la validité de contenu (IVC) afin d’objectiver le degré d’accord entre les évaluateurs (Loiselle et al., 2007). Les critères de Lynn (1986) peuvent être utilisés pour interpréter la représentativité de l'accord entre les évaluateurs.

Validité de critère : La validité de critère évalue la manière dont les scores obtenus à l’aide d’un outil correspondent à des critères extérieurs (Loiselle et al., 2007). Il existe deux types de validité de critère, soit la validité concomitante et la validité prédictive. La première correspond au degré de corrélation entre deux mesures qui évaluent le même construit, et ce, au même moment : une est la mesure à valider et l’autre, la mesure étalon. La validité prédictive réfère à la capacité de l’outil à valider de prédire un critère externe mesuré ultérieurement (LoBiondo-Wood & Haber, 1984).

Validité de construit : Cette validité s’appuie sur la manière dont un instrument de mesure est lié à un ou plusieurs construits théoriques. Cette approche est complexe et implique la formulation d’hypothèses sur la manière dont ce qui est mesuré se comportera en relation avec d’autres construits (Loiselle et al., 2007). Il existe plusieurs façons de mesurer ce type de validité, dont la validité convergente, la validité divergente ou l’approche par groupes contrastés. Dans la validité convergente, on mesure des construits semblables, mais non identiques, qui devraient évoluer dans le même sens. Par exemple, une hypothèse pourrait être que plus le patient présente une dyspnée chronique de façon importante, pires devraient être les résultats au questionnaire de qualité de vie reliée à la santé. La validité divergente réfère quant à elle à la capacité de différencier le construit à l’étude d’autres construits similaires (LoBiondo-Wood & Haber, 1984). L’approche par groupes contrastés réfère à l’évaluation d’un construit chez deux groupes d’individus n’ayant pas la même caractéristique du construit à étudier. Idéalement, il devrait y avoir un groupe présentant la caractéristique à évaluer et un autre ne présentant pas cette caractéristique. En calculant les moyennes des résultats de cette caractéristique dans les deux groupes, on devrait obtenir une différence statistiquement significative si cette caractéristique est effectivement mesurée par l’instrument.

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L’adaptation transculturelle

Lorsqu’un outil est déjà disponible et validé dans une culture, il y a certains avantages à procéder au processus d’adaptation culturelle de cet outil plutôt que de procéder au développement d’un nouvel outil. Cela représente une économie de temps et d’argent, en plus de permettre la comparaison des données obtenues par cet outil issu de l’adaptation avec les données de ce même outil provenant de recherches internationales (Beaton, Bombardier, Guillemin, & Ferraz, 2000). Par contre, le processus d’adaptation ne consiste pas uniquement en la traduction de l’outil, mais il comprend également l’adaptation des items afin de bien représenter les concepts dans la culture où l’outil sera utilisé (Beaton et al., 2000). Un questionnaire développé et validé dans une culture et une langue ne garantit pas la validité de l’outil dans un autre contexte. Il doit donc y avoir un rigoureux processus d’adaptation transculturelle en plus de celui de la vérification des propriétés de mesure de l’outil une fois adapté à la nouvelle culture (Briancon et al., 1997). Pour ce faire, Guillemin, Bombardier, et Beaton (1993) ont proposé des conditions dans lesquelles une traduction ou une adaptation culturelle est requise (Tableau 1). Tableau 1. Scénarios possibles pour lesquels l’adaptation est requise ou non*

Besoin d’utiliser un questionnaire chez une nouvelle population avec les caractéristiques suivantes:

Résultant en un changement de : Adaptation requise C ul ture Langue Pay s Traducti on Adaptati on cul ture lle

A Utilisation dans la même population. Pas de

changement dans la culture, langue ou pays. -- -- -- -- -- B Utilisation chez des immigrants établis dans le pays

source.  -- -- -- 

C Utilisation dans un autre pays, mais même langue.  ---  --  D Utilisation chez de nouveaux immigrants, ne parlant pas

la langue source, mais dans le même pays source.    

E Utilisation dans un autre pays et dans une nouvelle

langue.     

*Adapté de Guillemin et al. (1993)

Après avoir obtenu le consentement de l’auteur original de l’outil, une première traduction de l’outil doit être faite par des traducteurs bilingues ayant la langue cible (langue dans laquelle l’outil sera utilisé) comme langue maternelle. Il est recommandé d’avoir au moins deux traducteurs à cette étape, dont un est spécialisé dans le domaine relatif à l’outil en plus d’être informé des objectifs et du contexte d’utilisation du questionnaire à traduire et l’autre, naïf, c’est-à-dire qu’il n’est pas informé des objectifs ni du contexte d’utilisation de l’outil (Beaton et al., 2000; Wild et al., 2005). Cette diversité de traducteurs permet d’assurer une variété des termes obtenus à la

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traduction augmentant la richesse de la sélection des mots lors de l’étape suivante. La connaissance des objectifs par l’un des traducteurs permet une sélection de mots parfois différents de l’autre traducteur. La connaissance préalable de ce traducteur permet en effet la sélection de mots plus spécifiques en raison du contexte particulier de l’utilisation de l’outil. Cependant, le traducteur naïf peut mettre en évidence des significations inattendues de l’outil original.

La deuxième étape est la synthèse ou la réconciliation des diverses traductions obtenues à l’étape précédente (Wild et al., 2005). Elle permet de détecter puis de résoudre les divergences entre les traductions obtenues afin d’en arriver à une version synthèse. Idéalement, cette étape devrait être effectuée en présence des traducteurs impliqués à la première étape ainsi qu’avec l’auteur original de l’outil afin d’éclaircir les ambiguïtés pouvant survenir lors de la fusion des traductions (Beaton, Bombardier, Guillemin, & Ferras, 2007).

L’étape de la rétrotraduction consiste à faire retraduire la version nouvellement obtenue dans la langue source (la langue originale de l’outil). À cette étape, les traducteurs doivent être bilingues, avoir la langue source comme langue maternelle et aucun ne doit être informé des objectifs et du contexte reliés à l’outil. Ils doivent donc tous être naïfs de l’outil original, c’est-à-dire qu’ils ne doivent pas connaître l’outil afin d’éviter l’influence que pourraient avoir ces connaissances sur cette rétrotraduction. Cette étape en est une de contrôle de la qualité des traductions et de la synthèse de ceux-ci. Elle permet de mettre en évidence les incohérences de traduction (Wild et al., 2005). Le nombre de traducteurs et de rétrotraducteurs varie selon les différentes études d’adaptation. Par exemple, Briançon et al. (1997), lors d’une étude visant l’adaptation transculturelle d’un questionnaire dans le domaine de l’insuffisance cardiaque, ont fait la traduction des outils par trois traducteurs puis une rétrotraduction par trois autres traducteurs de la langue source.

Par la suite vient l’étape de la révision par le comité d’experts. Ce comité multidisciplinaire est composé d’experts de contenu, d’experts linguistes, d’experts en méthodologie (notamment sur le processus d’adaptation culturelle et/ou sur le développement d’outils de mesure) de l’auteur de l’outil original ainsi que des traducteurs impliqués dans les étapes précédentes (Beaton et al., 2007; Briancon et al., 1997). La majorité des experts doivent être de langue et culture maternelle cibles, mais doivent bien maîtriser la langue et la culture locale de l’outil original. Ce comité devra analyser différentes équivalences entre les diverses versions de l’outil : version originale, version traduite (synthèse) ainsi que les versions rétrotraduites.

Selon Guillemin et al. (1997), il y a quatre équivalences à évaluer par le comité d’experts, soit l’équivalence sémantique, idiomatique, expérientielle et conceptuelle. L’équivalence sémantique est l’équivalence dans la signification des mots. Un tel changement peut mener en un problème tant pour ce qui est du vocabulaire que de la grammaire. L’équivalence idiomatique est l’évaluation et le remplacement de certaines expressions locales difficile à traduire. Il faut donc choisir de nouvelles expressions ou termes dans la langue cible équivalents à

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ceux utilisés dans la langue de l’outil original. L’évaluation de l’équivalence expérientielle fait référence à la concordance entre la situation évoquée ou dépeinte dans la version originale avec la nouvelle réalité culturelle dans laquelle l’outil sera utilisé. Finalement, l’équivalence conceptuelle se réfère à la validité du concept exploré et des événements vécus par la population dont l’outil fait l’objet du processus de l’adaptation. Ainsi, certains termes peuvent être équivalents au plan sémantique, mais ne pas l’être au plan conceptuel (Beaton et al., 2007; Guillemin et al., 1993). Une brève revue de la littérature démontre qu’il n’a pas consensus dans la dénomination des diverses équivalences. Selon les auteurs ou le contexte de recherche, les équivalences peuvent se nommer de façon différente ou visent à évaluer d’autres aspects de l’outil. Par exemple, Briançon et al. (1997) ont remplacé l’équivalence expérientielle par l’équivalence évènementielle, mais gardent la même définition que celle donnée par Guillemin. Dans l’étude d’adaptation culturelle du Veterans Specific Activity Questionnaire (VSAQ) pour la population brésilienne, Domingues et al. (2011) ont ajouté le concept d’équivalence métabolique, car ils ont dû assurer que les activités présentes dans la version brésilienne soient du même niveau d’intensité que celles présentées dans la version originale. Ce qui est important, c’est qu’à la fin de l’évaluation des équivalences, le comité puisse atteindre un consensus sur les divergences entre les versions (originale, traduite - synthèse et rétrotraduite), pour proposer une version préfinale de l’outil.

Cette version préfinale doit passer à la dernière étape, soit celle du prétest avec un certain nombre de patients semblables à la population ciblée par l’étude. Cette étape permet de déceler des problèmes d’application de l’outil qui, parfois, ne peuvent être mis en évidence qu’avec de réels patients. Cela permet de faire la preuve que les items sont compréhensibles par la population ciblée et permet de réajuster l’outil avant de commencer la validation de l’outil le cas échéant (Blair & Conrad, 2011; Wild et al., 2005). Pour ce faire, plusieurs techniques d’entrevue cognitive peuvent être utilisées. La méthode du raisonnement à voix haute (think-aloud technique) (Willis, 2005) consiste à demander au patient de dire à haute voix toutes les étapes ou pensées qui lui viennent en tête. L’évaluateur fait ainsi la lecture de chaque question puis note les étapes par lesquelles passe le patient afin de pouvoir répondre à la question posée. L’évaluateur peut donc observer la manière dont le patient répond aux questions afin de déceler les difficultés de compréhension de certains mots ou la difficulté à répondre au questionnaire. Une alternative à cette technique est l’utilisation de questions d’approfondissement (verbal probing technique). L’évaluateur commence par poser la question et attend la réponse du patient. Une fois celle-ci obtenue, il demande alors au patient des précelle-cisions sur la compréhension des questions qui lui ont été posées (Willis, 2005). Chaque méthode comporte ces avantages. La méthode du raisonnement à voix haute requiert moins de préparation pour l’évaluateur et diminue les biais possiblement imposés par celui-ci. La méthode par questions d’approfondissement permet, de son côté, à l’évaluateur de garder un contrôle plus important du déroulement et du contenu abordé pendant l’entrevue (Willis, 1999).

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1.2.6 Les propriétés de mesure du BDI et du MDI

La version originale du BDI a été validée aux États-Unis auprès de 38 patients atteints de maladies respiratoires (maladies pulmonaires obstructives chroniques (MPOC), asthme ou fibrose interstitielle). Les auteurs ont démontré les propriétés de mesure du BDI. Ils ont évalué la fidélité avec l’évaluation de l’équivalence interjuges avec un résultat d’agrément de 92 % aux scores finaux entre deux évaluateurs. Pour la validation, ils ont démontré une corrélation statistiquement significative entre le score final avec les paramètres suivants : (a) distance de marche lors du test de marche de 12 minutes (.60), (b) VEMs (.41), et (c) CVF (.56) (Mahler et al., 1984).

Une équipe américaine a, en 1995, publié les résultats d’une étude comparant la fidélité et la validité de six échelles de dyspnée, soit le BDI-TDI, un questionnaire nommé le Shortness of Breath Questionnaire (SOBQ), l’échelle de dyspnée de l’American Thoracic Society, le diagramme Coût-Oxygène, l’échelle visuelle analogue ainsi que l’échelle de Borg (Eakin, Sassi-Dambron, Ries, & Kaplan, 1995). Elle a évalué la stabilité temporelle avec le test-retest, la consistance interne, l’équivalence interjuges et la validité de construit. Le BDI fut l’un des deux outils de mesure ayant les plus hauts niveaux de fidélité et de validité.

Une version française du BDI a été validée auprès de 103 patients atteints de MPOC (Laurendeau et al., 2009). Le résultat de l’équivalence interjuges a été de 98,3%. Le résultat du BDI a également obtenu des corrélations statistiquement significatives avec tous les résultats de la spirométrie, dont le VEMs (.47) et CVF (.36), ainsi qu’avec le MRC modifié (p<0.001), le questionnaire respiratoire Saint-Georges (-.73) et l’échelle visuelle analogue de dyspnée (-.50).

La version originale du MDI a, quant à elle, été validée en 1986 auprès de 32 patients atteints de MPOC avec les paramètres suivants : (a) une autre échelle d’évaluation de la dyspnée soit le Pneumoconiosis Research Unit Score (-.62*), (b) la distance de marche atteinte au test de marche de 12 minutes effectuée à deux reprises (.18), (c) le VEMs (.71*), (d) le pourcentage du VEMs prédit (.65*), (e) la CVF (.69*), (f) le ratio VEMs/CVF (.22), (g) la PO2 du gaz artériel (.07), (h) la pression inspiratoire maximale transdiaphragmatique (.87*), (i) la pression inspiratoire (.72*), et (j) la pression expiratoire (.67 p= 0.05) (Stoller et al., 1986).

La version brésilienne du MDI a été produite par Miura et al. (2010) et sa fidélité a été démontrée chez une population de 31 patients atteints de maladies cardiovasculaires selon le critère d’équivalence interjuges avec un ICC pour le score total de 0,96 (Miura et al., 2010). Cette version de l’outil a été par la suite validée avec 151 patients souffrant de maladies cardiovasculaires. Le critère de validité convergente a été utilisé. Les chercheurs brésiliens ont effectué la corrélation entre les résultats du MDI et la perception de l’intensité de l’effort (échelle de Borg modifiée), l’évaluation de la force des muscles respiratoires (pressions maximales inspiratoires et expiratoires) et l’évaluation de la qualité de vie (Minnesota Living with Heart Failure). Les corrélations ont été

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faibles, mais statistiquement significatives avec l’échelle de Borg (r=-0.29), les pressions maximales inspiratoires (r=0.28) et expiratoires (r=0.26). Cependant, pour ce qui a trait à la mesure de qualité de vie, les correlations du MDI furent élevées en lien avec le domaine physique (-0.59) et le score total (-0.53) ainsi que modérées avec le domaine émotionnel (-0.30) (Miura, 2010).

Cette même version brésilienne a également été validée chez une population de patients atteints de MPOC en vérifiant la validité convergente entre le résultat du MDI et les données de la fonction respiratoire, de la capacité fonctionnelle, du questionnaire générique de qualité de vie reliée à la santé et d’autres mesures de la dyspnée (Miura, 2014). Des corrélations positives, de légères à modérées, ont été observées entre le score total du MDI et le VEMs (r=0.25), les pressions maximales inspiratoires (r=0.36) et la distance atteinte au test de marche de six minutes (r=0.34). De fortes corrélations ont été observées avec le VSAQ (r=0.63), l’échelle de Borg (r=-0.46) et les mesures de qualité de vie soit SF-36 (r=0.72) et questionnaire modifié de Saint-Georges (r=0.63). Ainsi, les données disponibles dans la littérature renforcent la démonstration de fidélité et de validité autant du BDI que du MDI, et ce, dans différentes cultures.

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Chapitre 2 : Cadre théorique

La Middle-Range Theory of Unpleasant symptoms (TOUS) (Lenz et al., 1997; Lenz et al., 1995) a servi d’assise pour établir les hypothèses de validité de la version franco-canadienne du MDI.

La TOUS est une théorie de niveau intermédiaire. Elle a donc été développée à partir de concepts simples comme résultat de la collaboration entre trois chercheurs travaillant sur les symptômes de fatigue et de dyspnée. Initialement, deux chercheurs qui étudiaient la fatigue à deux moments différents lors de la grossesse ont combiné leurs idées pour développer un modèle expliquant ce symptôme pendant cette période (Pugh & Milligan, 1993). Peu de temps après, deux chercheurs qui étudiaient les symptômes de fatigue et dyspnée, chacun de leur côté, ont réalisé qu’ils travaillaient sur des concepts similaires. Ils ont alors identifié des caractéristiques communes aux deux symptômes (Gift & Pugh, 1993) et ont pris la décision d’évaluer d’autres concepts semblables afin de former une nouvelle théorie à plus large spectre.

Afin de développer le concept de dyspnée dans la TOUS, les auteurs ont eu recours à des techniques permettant d’analyser un concept, c’est-à-dire de définir ses caractéristiques, ses dimensions, ses références empiriques, ses préalables et ses conséquences, tout en identifiant ses diverses utilisations (Walker & Avant, 1988). Une combinaison d’observations sur le terrain et d’analyse de la littérature sur le sujet a permis alors d’identifier la dyspnée comme un symptôme subjectif et non comme un signe objectif. Ainsi, il ne faut pas confondre la dyspnée avec les signes de détresse respiratoire comme une tachypnée ou la présence de tirage. La dyspnée peut être identifiée seulement lorsque le patient exprime une sensation de respiration difficile ou laborieuse. En fait, même les résultats de la fonction pulmonaire ne sont pas nécessairement corrélés avec la dyspnée (Wolkove, Dajczman, Colacone, & Kreisman, 1989), ce qui renforce la définition de la dyspnée à titre de sensation.

Dans leur recension des écrits, les auteurs ont constaté que la dyspnée était souvent décrite comme un phénomène semblable à la douleur (Lenz et al., 1995). Ce constat a mis en place la deuxième phase du développement du concept de dyspnée : la dérivation du concept. C’est lorsqu’une analogie ou une métaphore est utilisée pour redéfinir le concept. Ainsi, en analogie à la douleur, les auteurs ont conceptualisé la dyspnée comme ayant une composante physiologique et une autre psychologique (Lenz et al., 1995). La composante physiologique comprend la pathologie sous-jacente qui donne origine à l’influx sensoriel, comme l’activation des récepteurs sensoriels. La dyspnée se manifeste lorsque survient un déséquilibre entre les signaux efférents allant du cerveau vers les muscles respiratoires et les signaux afférents retournant du thorax vers le cerveau (Schwartzstein, Manning, Weiss, & Weinberger, 1990). La composante psychologique, à son tour, comme pour la douleur, est liée à la présence d’anxiété, de dépression et de somatisation (Lenz et al., 1995).

Figure

Tableau 1. Scénarios possibles pour lesquels l’adaptation est requise ou non*
Figure 1. Théorie de niveau intermédiaire des symptômes déplaisants. (Source:
Figure  2.  Version  mise  à  jour  de  la  théorie  de  niveau  intermédiaire  des  symptômes  déplaisants
Figure 3. Schéma des étapes du processus d’adaptation culturelle.
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