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Étude de l'enzyme UGT2B28 et son rôle dans le cancer de la prostate

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

Étude de l'enzyme UGT2B28 et son rôle dans le cancer

de la prostate.

Thèse

Anaïs Belledant

Doctorat en médecine moléculaire

Philosophiae Doctor (Ph.D.)

Québec, Canada

© Anaïs Belledant, 2016

(2)

Étude de l'enzyme UGT2B28 et son rôle dans le cancer

de la prostate.

Thèse

Anaïs Belledant

Sous la direction de :

Eric Lévesque, directeur de recherche

Chantal Guillemette, codirectrice de recherche

(3)

iii

Résumé

Contexte: L’inactivation des androgènes est majoritairement régulée par des enzymes du

métabolisme de la famille des UDP-glucuronosyltransferase (UGT). Ce procédé métabolique permet de contrôler la biodisponibilité des hormones stéroïdiennes systémiques et locales. Objectif : L’objectif était d’étudier la relation entre l’expression de l’enzyme UDP-glucuronosyltransferase 2B polypeptide 28 (UGT2B28), impliquée dans la biotransformation des hormones, avec les niveaux hormonaux circulants, et les caractéristiques clinico-pathologiques dans le cancer de la prostate (CaP). Conception et

participants : Nous avons utilisé dans cette étude la technique d’immunohostochimie à

grande échelle (tissue microarray) sur les tissus de 239 patients ayant un CaP localisé. L’étude des 51 patients additionnels ne possédant pas l’enzyme UGT2B28 dans leur génome, a été effectuée pour confirmer l’importance de cette enzyme sur les niveaux hormonaux circulants. Résultats : La surexpression de l’enzyme UGT2B28 a été associée à des niveaux d’antigène prostatique spécifique (APS) au diagnostic plus faibles, à un score de Gleason plus élevé, à des marges et statuts nodaux positifs, et fut associée de façon indépendante au risque de progression. La surexpression de l’enzyme fut également associée à des niveaux circulants de testostérone (T) et dihydrotestostérone (DHT) plus élevés. Les patients n’exprimant pas le gène UGT2B28 avaient des niveaux plus bas de T (19%), de DHT (17%), de métabolites glucuronidés (18-38%), et des niveaux plus élevés du précurseur surrénalien androsténédione (36%). Conclusion : L’enzyme UGT2B28 modifie les niveaux circulants de T et DHT, et sa surexpression est associée avec un CaP à plus haut grade. Notre étude a permis de découvrir un nouveau rôle d’UGT2B28, celui de régulateur de la stéroïdogenèse, et a souligné l’interconnexion entre les capacités de biotransformation hormonale des cellules cancéreuses, des niveaux hormonaux, des caractéristiques clinicopathologiques et du risque de progression.

(4)

iv

Abstract

Background : Androgen inactivation occurs mainly through the glucuronidation

conjugative reaction mediated by UDP-glucuronosyltransferases (UGTs). This metabolic process is involved in the control of systemic and local androgen bioavailability.

Objective : To examine the relationship among expression of the androgen-inactivating

UGT2B28 enzyme, circulating steroid hormone levels, and clinical phenotype in prostate cancer (PCa).

Design, setting, and participants : We conducted an analysis of a high-density prostate

tumor tissue microarray consisting of 239 localized PCa cases. The study of 51 additional PCa patients with no copies of UDP glucuronosyltransferase 2B subfamily, polypeptide B28 (UGT2B28) in their genomes was performed to confirm the importance of the enzyme on circulating hormone levels.

Outcome measurements and statistical analysis : Steroid hormones were measured by

mass spectrometry. Multivariate Cox proportional hazard models assessed the influence of UGT2B28 on progression, and general linear model regression evaluated variations in hormone levels.

Results and limitations : Tumor overexpression of UGT2B28 was associated with lower

prostate-specific antigen levels at diagnosis, higher Gleason scores, margin and nodal invasion status, and it was shown to be an independent prognostic factor associated with progression. Enzyme overexpression correlated with 30% higher circulating levels of testosterone (T) and dihydrotestosterone (DHT). Patients with no copies of UGT2B28 in their genomes have lower levels of T (19%), DHT (17%), its glucuronide metabolites (18– 38%), and enhanced levels of the adrenal precursor androstenedione (36%).

Conclusions : The UGT2B28 steroid-inactivating pathway modifies circulating T and DHT

levels, and UGT2B28 overexpression is associated with high-grade PCa. Our work has uncovered the role of UGT2B28 as a regulator of steroidogenesis and underscores the interconnectivity among the steroid-inactivation capacity of cancer cells, hormone levels, disease characteristics, and the risk of cancer progression.

(5)

v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... viii

Liste des figures ... ix

Liste des abréviations et des sigles ... xi

Liste des abréviations et des sigles (suite) ... xii

Remerciements………..xiv

Avant-Propos ... xv

Introduction ... 1

1. La glande prostatique ... 2

2. Les hormones sexuelles ... 3

2.1. La stéroïdogenèse ... 3

2.2. L’action des stéroïdes dans le tissu prostatique ... 8

3. Le cancer de la prostate CaP ... 12

3.1. Les facteurs de risque ... 12

3.2. Le diagnostic du CaP ... 16

3.3. Les approches thérapeutiques ... 17

4. La récidive biochimique (BCR) et la progression ... 19

4.1. La BCR ... 19

4.2. La progression ... 20

5. Les outils de prédiction ... 21

(6)

vi

5.2. Les biomarqueurs de la récidive ... 23

5.2.1. Les biomarqueurs de diverses natures ... 23

5.2.1. Les biomarqueurs génétiques germinaux ... 30

6. La dérégulation hormonale dans le CaP ... 33

6.1. Les androgènes ... 33

6.2. Les estrogènes ... 35

7. La biotransformation des androgènes ... 35

7.1. La réaction de glucuronidation et les uridines diphospho-glucuronosyltransférases (UGT) ... 37

7.2. L’inactivation des hormones sexuelles stéroïdiennes par les UGT ... 39

7.3. Les UGT dans le tissu prostatique ... 41

7.4. UGT et CaP ... 43

8. Problématique ... 47

9. Hypothèse de recherche, objectifs et méthodologies retenues ... 49

Hypothèses ... 49

Objectifs et méthodologies retenues. ... 49

CHAPITRE I ... 53

L’enzyme du métabolisme des androgènes, UGT2B28, est un régulateur de

la stéroïdogenèse et modifie le risque de progression du cancer de la

prostate (CaP). ... 53

Résumé ... 54

Discussion ... 92

10. Section 1 : Localisation d’UGT2B28 dans le tissu prostatique ... 93

10.1. Localisation nucléaire d’UGT2B28 ... 94

10.2. Mécanismes potentiels de la régulation différentielle d’UGT2B28 dans le CaP ... 96

(7)

vii

10.3. Expression cytoplasmique d’UGT2B28 ... 98

11. Section 2 : UGT2B28 associée à la progression et à un profil tumoral

agressif ... 100

11.1. Statut germinal et expression d’UGT2B28 ... 100

11.2. UGT2B28 associée aux caractéristiques clinico-pathologiques ... 101

11.3. UGT2B28 associée au risque de progression ... 101

11.4. Immunohistochimie et techniques d’analyses ... 103

12. Section 3 : UGT2B28 régulateur de la stéroïdogenèse ... 104

12.1. UGT2B28 associée à des variations hormonales en circulation ... 104

12.2. Mécanismes potentiels de régulation de la stéroïdogenèse par UGT2B28 ... 106

12.3. Variation hormonale, agressivité et progression ... 108

Conclusion... 112

(8)

viii

Liste des tableaux

Tableau 1 Liste de biomarqueurs tumoraux associés à la BCR après PR. ... 26 Tableau 2 Tests pronostiques basés sur la génomique et la protéomique, effectués à partir

de tissus prostatiques ... 29 Tableau 3 Polymorphismes germinaux des gènes de la stéroïdogenèse associés au

(9)

ix

Liste des figures

Figure 1 La glande prostatique. ... 3

Figure 2 La formation d’hormones actives produites par les tissus périphériques. ... 5

Figure 3 La synthèse des hormones sexuelles s’effectue à partir du cholestérol. ... 6

Figure 4 La synthèse et le métabolisme des estrogènes dans le tissu prostatiques. ... 8

Figure 5 La voie d’activation du récepteur des androgènes. ... 10

Figure 6 Paramètres cliniques et classification du risque du CaP. ... 17

Figure 7 Le processus de formation des métastases par les CTC. ... 21

Figure 8 Biotransformation des androgènes dans les cellules épithéliales basales et luminales prostatiques. ... 36

Figure 9 Les niveaux des métabolites glucuronidés en circulation comparativement à ceux des tissus périphériques. ... 37

Figure 10 Réaction de Glucuronidation. ... 38

Figure 11 Localisation et organisation génomique des loci UGT1A et UGT2 humains. ... 39

Figure 12 Les enzymes UGT impliquées dans la glucuronidation des hormones sexuelles stéroïdiennes dans le tissu prostatique. ... 40

Figure 13 Illustration schématique du gène UGT2B28 et de ses transcrits ARNm et protéiques chez l’humain. Adaptée de (Levesque, Turgeon et al. 2001) ... 42

Figure 14 Illustration schématique de la localisation différentielle de la protéine UGT2B28 entre le tissu sain et tumoral prostatique, à partir des observations immunohistochimiques. ... 94

Figure 15 Illustration schématique des associations observées entre l’expression protéique d’UGT2B28 et les paramètres clinico-pathologiques chez des patients ayant un CaP localisé après RP. ... 102

(10)

x

Figure 16 Illustration schématique des variations hormonales observées lors de la surexpression de la protéine UGT2B28 ou en absence du gène. ... 106 Figure 17 Illustration schématique des résultats obtenus concernant l’association entre

l’expression d’UGT2B28 avec le pronostic et les niveaux hormonaux. ... 110 Figure 18 Schéma récapitulatif des résultats de l’étude. ... 112

(11)

xi

Liste des abréviations et des sigles

 CaP : Cancer de la Prostate

 PAP : Prostatique acide phosphatase  APS : Antigène prostatique spécifique  PSA : Prostatic specific antigen

 EGF : Epidermal growth factor  AR : Androgen receptor

 LH : Luteneizing hormone

 FSH : Follicle stimulating hormone

 LHRH : Luteneizing hormone releasing hormone  GnRH : Gonadotropin releasing hormone

 DHT : Dihydrotestostérone,  DHEA : Déhydroépiandrostérone  ∆4-dione : 4-androstènedione  ∆5-diol : 5-androstènediol  E2 : Estradiol  E1 : Estrone  HSD : Hydroxydes déshydrogénase  CYP : Cytochrome p450

 COMT : Catechol-O-methyl transferase

 UGT : Uridine diphospho-glucuronosyltransferases  SULT : Sulfatase

 NQO1/2 : NAD(P)H dehydrogenase quinone  ARE : Androgen response element

 2-MeOHE2 : méthoxy-estrogènes  ERα-β : Estrogen receptor α and β  ERE : Estrogen element response  LBD : Ligand binding domain  DBD : DNA binding domain

 GPER : G protein-coupled estrogen receptor  AF : Activation function

(12)

xii

Liste des abréviations et des sigles (suite)

 3α-diol : androstane-3α-17α-diol

 ADTh : Androgen Deprivation Therapy  StAR : Steroidogenic acute regulatory protein  UDPGA : Uridine-5′-Diphosphoglucuronic acid  PR : Prostatectomie radicale

 TNM : Tumors, Nodes, Metastasis

 BCR : Biochemical recurrence / Récidive Biochimique  CAB : Combined Androgen Blocad

 CTC : Cellule tumorale circulante  CTD : Cellule tumorale disséminée

 CRPC : Castration resistant prostate cancer  HPLC : High pressure liquid chromatography  GC : Gaz chromoathography

 LC : Liquid chromatography  RE : Reticulum endoplasmique  NLS : Nuclear location sequence  PIN : Prostatic intraepitheal neoplasia  MS : Mass spectrometry

(13)

xiii

À Mr Pépé Maurice auprès de qui j’ai appris la persévérance et l’intégrité. À Manou, qui m’a montré que la vie est une fête.

(14)

xiv

Remerciements

Je souhaite tout d’abord remercier mes directeurs de thèse Éric Lévesque et Chantal Guillemette pour m’avoir accueillie dans leur équipe. Ces trois années ont été très formatrices tant sur le plan technique que méthodologique. J’ai beaucoup appris au sein de votre laboratoire. La diversité des projets m’a permis de développer un grand champ de connaissances. Merci pour votre grande disponibilité et votre encadrement.

Je tiens à remercier Lyne, Michèle et Andréa, votre disponibilité et vos précieux conseils techniques m’ont beaucoup aidé. Lyne, je te remercie sincèrement pour ton agréable compagnie aussi bien au lab qu’en dehors, ce fut un réel plaisir. Une mention spéciale à la Feldan team Jo et Mario, ces petits repas en votre compagnie auront été pour moi de très bons moments. Merci à mes collègues du laboratoire, anciens et nouveaux, les pauses café en groupe dans la petite cuisine, lieu de débats en tout genre, resteront de bons souvenirs. Je remercie également Mel pour son aide au début de mon doctorat, puis à la fin en dehors du labo. Une pensée spéciale pour mon acolyte Alan, nous aurons formé un binôme de choc, et quand je repenserai à ma thèse, je penserai forcément à toi.

Je remercie la gang de Vélo (Elsa, Andréa et Mabrouk), et plus généralement toute la bande (Arnaud, Vivien, Adèle, Alan, Charlotte et Helios) sans qui l’aventure québécoise aurait été bien moins le fun! Merci à vous tous. Merci à mes amis de toujours, ma bande Yemoleshka de Lyon. Recevoir vos messages sur le groupe Whatsapp était une joie quotidienne.

Un grand merci à mon père, ma mère et ma sœur qui m’ont toujours soutenue et encouragée dans cette étape, et plus généralement dans tous mes projets quels qu’ils soient. Vous êtes toujours venus me voir, ça compte énormément pour moi. Vous avez été d’un grand soutien, merci infiniment.

Enfin merci à mon Lu, sans qui tout cela n’aurait été possible. Merci pour ton soutien infaillible et constant tout au long de ces trois années. Ton aide au quotidien, aussi bien logistique que psychologique, m’a permis de vivre cette période beaucoup plus sereinement. Je n’y serai jamais arrivée sans toi.

(15)

xv

Avant-Propos

Cette thèse intitulée « Étude de l’enzyme UGT2B28 et son rôle dans le cancer de la prostate après prostatectomie » est présentée à la faculté des études supérieures de l’Université Laval pour l’obtention du grade de Ph.D. et est rédigée sous forme d’article. L’article présenté est intitulé : « The UGT2B28 Sex-steroid Inactivation Pathway Is a Regulator of Steroidogenesis and Modifies the Risk of Prostate Cancer Progression ». Il a été publié dans le journal scientifique Journal of European Urology en Juillet 2015 (facteur d’impact de 13.938).

Les Drs Louis Lacombe et Yves Fradet, de l’Hôtel-Dieu de Québec, ont constitué la cohorte de patients à l’étude. Le Dr Louis Lacombe et les membres de son équipe, Hélène Hovington et Hervé Brisson, ont effectué les marquages et les analyses d’immunohistochimie des coupes de tissus de patients. Le Dr Bernard Têtu pathologiste a également contribué à la collecte des échantillons de prostate et l’interprétation des marquages d’IHC. Patrick Caron a effectué les dosages hormonaux par spectrométrie de masse par des méthodes analytiques établies. Lyne Villeneuve a participé à la préparation des échantillons pour analyses biochimiques et aux analyses statistiques. Luciana Garcia a également participé à certaines analyses portant sur les patients double-délétants pour le gène UGT2B28. David Simonyan a réalisé et validé les analyses statistiques. Pour ma part, j’ai effectué les analyses statistiques portant sur les données d’immunohistochimie et les bases de données publiques (TCGA et Taylor). J’ai participé à la réalisation de tableaux et figures, à l’interprétation de résultats, à la rédaction de l’ébauche du manuscrit. Les Dr Éric Lévesque et Chantal Guillemette ont conceptualisé l'étude, effectué l'analyse et l'interprétation des résultats, la rédaction et la révision du manuscrit.

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1

Introduction

Au Canada, deux personnes sur cinq sont touchées par le cancer et un quart d’entre elles n’y survit pas. Avec 23600 nouveaux cas en 2014, le cancer de la prostate (ou CaP) est le cancer le plus fréquent chez l’homme (www.cancer.ca , Coleman, Quaresma et al. 2008). En effet, le CaP sera diagnostiqué positivement pour un homme sur sept, avec une plus forte prévalence pour les 70-79 ans (Gronberg (2003). L’hormonodépendance est la principale caractéristique de ce cancer (Heinlein and Chang 2004). Elle est impliquée de la formation de la maladie jusqu’à son stade terminal (Bosland 2000, Montgomery, Mostaghel et al. 2008, Mostaghel and Nelson 2008, Schaeffer, Marchionni et al. 2008). Les décès causés par ce cancer sont majoritairement liés à des stades avancés. La diminution du nombre de patients métastatiques de 20% entre 1990 et 2003, et un taux de survie en continuelle augmentation, témoignent de l’avancée des traitements (Crawford 2003, Ryan, Elkin et al. 2006). Cependant, 15 à 30% des patients récidivent, ce qui place ce cancer comme le deuxième plus mortel (www.cancer.ca 2015). D’autre part, le nombre de patients diagnostiqués positivement au CaP est de plus en plus important. Cela s’explique notamment par le vieillissement de la population, l’incidence croissante de ce cancer avec l’âge, ainsi que par l’amélioration des méthodes de détection à des stades de plus en plus précoces (Quon, Loblaw et al. 2011). Grâce aux outils de plus en plus développés, 95% des nouveaux cas détectés le sont à des stades localisés ou localement avancés (Cooperberg, Broering et al. 2004). Cependant, le surdiagnostic ainsi que la détection des cancers indolents, représentent plus de la moitié des cas (Etzioni, Penson et al. 2002, Loeb, Bjurlin et al. 2014). Pour ceux-là, des interventions médicales invasives ne sont pas indispensables. De ce fait, la détermination des cancers indolents par rapport aux cancers agressifs demeure un des défis les plus importants. En effet, à ce jour le manque de précision des outils compromet et limite le pronostic de la récidive et de la progression de ce cancer. La génétique du patient et celle de la tumeur se sont révélées être des facteurs affectant le risque de développer ce cancer et favorisant également sa progression (Cunningham, Hebbring et al. 2007, Grasso, Wu et al. 2012, Jin, Lu et al. 2012, Alvarez-Cubero, Saiz et al. 2013, Cybulski, Wokolorczyk et al. 2013, Schoenborn, Nelson et al. 2013, Eeles, Goh et al. 2014, Levesque, Laverdiere et al. 2014, Han, Hazelett et al. 2015). Mes travaux de doctorat s’inscrivent dans cette thématique et se concentrent sur l’étude de l’enzyme du métabolisme des hormones sexuelles stéroïdiennes, UGT2B28, dans la progression du cancer de la prostate.

(17)

2

1. La glande prostatique

La prostate est une glande de l‘appareil génital masculin dont la fonction principale est la production d’une partie du liquide séminal. Elle sécrète particulièrement un liquide composé d’enzymes (PAP ou Prostatique Acide Phosphatase, APS ou Antigène de la Prostate Spécifique, PSA en anglais) et de facteurs de croissance (ex. EGF epidermal growth factor). Selon le modèle anatomique décrit par Mc Neal, la prostate est composée de quatre zones différentes (Figure 1) : 1) une zone antérieure où le CaP ne se développe que très rarement, 2) une zone centrale, siège de 8% des cancers prostatiques, une zone de transition qui donne naissance à 25% des adénocarcinomes, et enfin 3) la zone périphérique, qui est la zone de prédilection de l'adénocarcinome, puisqu'il y prend naissance dans 67% des cas (McNeal 1988, Fine and Reuter 2012).

Au niveau cellulaire, la prostate est constituée d’un épithélium glandulaire et d’un stroma fibromusculaire. Le stroma est principalement composé de fibroblastes, de cellules musculaires lisses, endothéliales et dendritiques. L’épithélium quant à lui, forme les acini glandulaires et est composé de trois types cellulaires distincts. La première couche est composée de cellules épithéliales basales et la seconde de cellules épithéliales luminales ou sécrétrices, qui font face à la lumière des acini. Enfin, les cellules neuroendocrines peu nombreuses sont situées dans la couche basale (Figure 1). Les deux types de cellules épithéliales possèdent des caractéristiques distinctes. En effet, si les cellules luminales sont androgénodépendantes et expriment fortement le récepteur des androgènes (AR), les cellules basales ne le sont que très peu, exprimant moindrement AR (Litvinov, De Marzo et al. 2003, Marker, Donjacour et al. 2003). Ces deux types cellulaires possèdent la machinerie enzymatique nécessaire à la stéroïdogenèse, ainsi que des enzymes du catabolisme des stéroïdes, les UGT. Si la localisation cellulaire de la majorité de ces enzymes est bien décrite dans la littérature, la localisation d’une des enzymes UGT, en l’occurrence UGT2B28, demeure à ce jour inconnue dans le tissu prostatique. Concernant leur régulation, les cellules luminales très différenciées se renouvellent à partir des cellules basales qui sont prolifératrices (Wang, Hayward et al. 2001, Clubbs and Bomser 2009, Choi, Zhang et al. 2012). Enfin, les cellules stromales jouent un rôle essentiel dans la régulation de la prolifération cellulaire et la différenciation des cellules épithéliales (Cunha, Hayward et al. 2002). En effet, ces dernières possèdent le récepteur des androgènes ainsi que celui des estrogènes, qui lorsqu’ils sont activés, permettent de communiquer avec les

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3

cellules épithéliales par des interactions paracrines (Orlowski and Clark 1991, Hayward, Haughney et al. 1998, Planz, Aretz et al. 1999). Ces interactions paracrines des cellules basales et stromales avec les cellules luminales semblent d’autre part être impliquées dans le développement néoplasique des cellules épithéliales (Cunha, Hayward et al. 2002, Shen and Abate-Shen 2010, Wang, Mitrofanova et al. 2013).

Figure 1 La glande prostatique.

A)Représentation schématique des zones de la prostate B) Les différents types cellulaires composant l’épithélium prostatique. Adaptée de (Abate-Shen and Shen 2000, Wadhera 2013).

2. Les hormones sexuelles

2.1. La

stéroïdogenèse

La glande prostatique, comme les organes reproducteurs, est une glande androgénodépendante (Marker, Donjacour et al. 2003). Les hormones sont en effet indispensables à sa formation depuis le stade embryonnaire et cela jusqu’à son fonctionnement à l’âge adulte. D’ailleurs, en absence d’activation du récepteur AR, ou de l’enzyme réductase SRD5A qui forme la dihydrotestostérone (DHT), la prostate ne se développe pas, ou avec une taille réduite (Peterson, Imperato-McGinley et al. 1977,

(19)

4

Quigley, De Bellis et al. 1995, Zhu and Imperato-McGinley 2009). Chez l’homme, la stéroïdogenèse est finement régulée par l’axe gonado-hypophysaire. L’hypophyse sécrète des gonadotropines, la LH (Luteneizing hormone), et moindrement la FSH (Follicle stimulating hormone), qui induisent la stéroïdogenèse des hormones dans les tissus périphériques tels que les gonades (Miller 2009). La sécrétion de ces gonadotropines s’effectue de façon pulsatile, et est contrôlée par l’hormone LHRH ou GnRH (pour Luteneizing hormone releasing hormone et Gonadotropin releasing hormone) sécrétée par l’hypothalamus. La régulation de la sécrétion s’effectue par une boucle de rétrocontrôle positif ou négatif au niveau de l’hypophyse. Il existe deux sources de production hormonale : 1) les hormones surrénaliennes : la déhydroépiandrostérone (DHEA), le 4-androstènedione (∆4-dione) et le 5-androstènediol (∆5-diol), produites par les glandes surrénales et 2) les androgènes et estrogènes d’origines testiculaires (telles que la testostérone, la DHT et l’estradiol (E2)). La production hormonale chez l’homme augmente de l’âge fœtal à l’âge adulte pour atteindre des concentrations maximales vers 20 ans. Dès lors, les niveaux diminuent continuellement pour atteindre l’andropause à un âge avancé (Labrie, Belanger et al. 1997). Les hormones surrénaliennes, qui sont en proportion les plus concentrées en circulation, se diffusent dans les tissus en périphérie et participent ainsi à la stéroïdogenèse in situ (Labrie 1991). La testostérone est sécrétée majoritairement par les cellules de Leydig (90%), et sa diffusion dans les cellules prostatiques s’effectue sous sa forme libre, soit moins de 2% de la forme sérique (Hsing 2001). Quant à la DHT, 20% est formé dans les testicules, mais la majeure partie est formée par les tissus périphériques à partir de la testostérone et des précurseurs surrénaliens (Figure 2) (Labrie 1991, Hsing 2001).

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5

Figure 2 La formation d’hormones actives produites par les tissus périphériques.

Formation d’hormones actives à partir des précurseurs DHEA et 4-Dione sécrétés par les glandes surrénales dans les tissus périphériques. Les enzymes déshydrogénases 3HSD, 17HSD, et l’aromatase CYP19A1 permettent la conversion des précurseurs en Δ5-diol, testostérone, DHT et E2, dans ces tissus par le principe d’intracrinologie. Tirée de

(Barbier and Belanger 2008).

Dans le tissu prostatique des hommes de plus de 65 ans, il est estimé que 50 à 60% des hormones proviennent des tissus gonadiques et environ 40% des surrénales (Labrie 1991). En effet, les cellules prostatiques possèdent la machinerie enzymatique nécessaire à la formation d’hormones actives à partir des précurseurs androgéniques, processus défini comme l’intracrinologie (Labrie 1991). Via ce processus, la prostate synthétise les hormones telles que la DHT ou la testostérone, toutes deux capables d’activer AR, moindrement pour la testotérone (Grino, Griffin et al. 1990). Plus d’une trentaine de voies enzymatiques menant à la formation d’hormones sexuelles actives (progestatifs, estrogènes et androgènes) sont impliquées dans la stéroïdogenèse (Figure 3) (Labrie 1991, Mostaghel and Nelson 2008).

Le cholestérol est le premier acteur de la voie de synthèse des hormones et son entrée dans les mitochondries est régulée par les protéines de transport StAR (Steroidogenic acute regulatory protein) (Hauet, Liu et al. 2002). Une fois dans la mitochondrie, le cytochrome CYP11A1 convertit le cholestérol en prégnénolone. Les précurseurs androgéniques tels que la DHEA et le ∆5-diol sont ensuite produits par les réactions hydroxylases et lyases de l’enzyme CYP17A (Luu-The, Belanger et al. 2008, Petrunak,

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6

DeVore et al. 2014). Les enzymes 3-hydroxystéroïde déshydrogénases poursuivent les étapes de la synthèse en formant le 4-dione à partir de la DHEA, et la testostérone à partir du ∆5-diol. Enfin, les enzymes 17β-hydroxystéroïde déshydrogénases et les 5-réductase conduisent à la formation de l’hormone la plus active la DHT (Figure 4) (Andersson and Russell 1990, Labrie, Sugimoto et al. 1992, Luu-The 2001, Labrie, Luu-The et al. 2005, Luu-The, Belanger et al. 2008, Luu-The and Labrie 2010).

Figure 3 La synthèse des hormones sexuelles s’effectue à partir du cholestérol.

Les flèches bleue foncé représente la voie dite classique, la voie hachurée quant à elle représente la voie alternative ou « backdoor pathway ». Adaptée de (Mostaghel 2013).

Outre les androgènes, les estrogènes tels que l’estrone (E1) et l’estradiol (E2) sont également produits dans le tissu prostatique (Stone, Fair et al. 1986). Leur formation est régulée par l’action de l’enzyme aromatase CYP19A1 qui convertit le ∆4-dione et la testostérone respectivement en E1 et E2 (Yoshida and Osawa 1991, Ellem and Risbridger 2010, Mostaghel 2013). Les enzymes hydroxydéshydrogénases 17-HSD1, 7 et 12, par leur fonction réductrice, permettent la conversion de E1 en l’hormone dite active E2. À l’inverse, les enzymes 17-HSD 2 et 4 oxydent E2 en E1 (Peltoketo, Isomaa et al. 1988, Luu-The, Labrie et al. 1990, Luu-The 2001, Vihko, Herrala et al. 2006, Luu-The, Belanger

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et al. 2008, Luu-The and Labrie 2010). Plusieurs enzymes sont impliquées dans le métabolisme des estrogènes telles que CYP1B1, CYP1A1, COMT et SULT2B1. Ces enzymes induisent entre autres la formation des catéchols estrogènes, des méthoxy, ainsi que des sulfates estrogènes (Figure 4). Enfin, la formation d’E1 peut aussi s’effectuer à partir du sulfate d’estrone (E1-S), constituant le réservoir estrogénique, via l’action des enzymes sulfatases SULT. Ces enzymes permettent également d’effectuer la conversion du sulfate de la DHEA (DHEA-S) en DHEA (Yoshida and Osawa 1991, Dalla Valle, Toffolo et al. 2006, Nakamura, Suzuki et al. 2006, Purohit, Woo et al. 2011). Parmi les enzymes majeures du métabolisme des androgènes dans le tissu prostatique, seule l’enzyme UGT2B28 possède la capacité de glucuronider les estrogènes en plus des androgènes, spécifiquement E1 et E2 (Figure 12). Cette polyvalence pourrait dévoiler une fonction primordiale de cette enzyme dans la régulation du catabolisme des hormones sexuelles stéroïdiennes du tissu prostatique.

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8 .

Figure 4 La synthèse et le métabolisme des estrogènes dans le tissu prostatiques.

La synthèse des estrogènes C18 s’effectue à partir des androgènes, et notamment l’aromatase CYP19A1, qui permet la formation de l’E2 à partir de la testostérone. La métabolisation en catéchols estrogènes est possible grâce à certaines enzymes telles CYP1B1 et CYP1A1 qui forment les 2 et 4-hydroxy-E2 procarcinogènes. Par la suite, SULT2B1 permet la formation de catéchols sulfates tandis que COMT, forme par l’ajout d’un groupe méthyle, les méthoxy-estrogènes 2-MeOHE2, métabolites antioncogènes. Les enzymes NQO1/NQO2 permettent quant à elles de réduire les semi-quinones qui forment des adduits à l’ADN, en hydroxyquinones. Certaines enzymes sont impliquées dans les voies androgéniques et estrogéniques telles que les enzymes 17β-HSDs et CYP19A1. Figure adaptée de (Luu-The and Labrie 2010, Levesque, Laverdiere et al. 2014) Concernant les enzymes 17β-HSDs présentes dans la partie supérieure du schéma, ce sont les enzymes réductrices formant les hormones dites actives pour celles situées au-dessus des flèches, celles situées en dessous sont les enzymes oxydantes.

2.2. L’action des stéroïdes dans le tissu prostatique

L’action des hormones sexuelles stéroïdiennes s’opère par l’activation des récepteurs hormonaux. Pour les androgènes, l’activation s’effectue par une liaison au AR localisé dans le cytoplasme où il est maintenu inactif par des protéines chaperonnes HSP (Heat shock protein) (Nazareth and Weigel 1996, Marker, Donjacour et al. 2003). Lors de la

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liaison aux hormones, le récepteur est phosphorylé puis se dimérise avec un autre AR afin d’être transféré dans le compartiment nucléaire, où associé à des corégulateurs, il exerce une fonction de facteur de transcription (Brinkmann, Blok et al. 1999). En se fixant sur des éléments de réponses spécifiques (ARE Androgen response element) dans des régions génomiques régulatrices, AR induit la transcription de gènes impliqués dans la différenciation cellulaire, la prolifération, la stéroïdogenèse ou encore la transcription du gène de l’APS (Figure 5) (Feldman and Feldman 2001, Koochekpour 2010, Zhou, Bolton et al. 2015).

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Figure 5 La voie d’activation du récepteur des androgènes.La testostérone circule dans le sang liée à différentes protéines, notamment la SHBG. Une fois dans les cellules prostatiques, la testostérone est convertie en DHT par l’action des 5α-réductases, et se liera à l’AR. Il est à noter que la DHT intraprostatique peut être synthétisée à partir des précurseurs surrénaliens présents en circulation (non illustré). Une fois lié à la DHT, l’AR se libère de ses chaperonnes, notamment des protéines de choc thermique (HSP ou heat shock proteins), et subira différentes modifications post-traductionnelles. Sous forme d’homodimère, l’AR est relocalisé du cytoplasme au noyau et peut s’associer à des coactivateurs (ARA70) ou à des corépresseurs (non illustrés) afin de favoriser ou de bloquer la transcription génique. Cette activation (ou répression) génique entraîne une réponse biologique qui inclue la prolifération et la survie cellulaire, ainsi que la production de marqueurs spécifiques à la prostate comme l’APS (antigène prostatique spécifique ou PSA en anglais). Tirée de (Feldman and Feldman 2001).

Concernant les estrogènes, leur action génomique s’effectue tout comme celle des androgènes via la fixation des complexes ligands-récepteurs nucléaires. ERα et ERβ, une fois activés, se fixent sur les éléments de réponses estrogéniques (ERE) (Li, Briggs et al. 2001). Ces derniers sont impliqués dans la régulation de la croissance du tissu prostatique (Nomura, Kawashima et al. 2009). Ces récepteurs semblent avoir des fonctions opposées, ERα induit en effet la prolifération cellulaire et l’hyperplasie, tandis que l’activation d’ERβ est associée à des effets antiprolifératifs et anti-inflammatoires (Corey, Quinn et al. 2002, Helguero, Faulds et al. 2005, Ellem and Risbridger 2009, Thomas and Gustafsson 2011, Dey, Strom et al. 2013). Dans le tissu prostatique, ERα est localisé dans les cellules

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stromales sur lesquelles il exerce le contrôle de la croissance, également il agit sur la croissance des cellules épithéliales par voie paracrine. Quant à ERβ, il est exprimé dans les cellules épithéliales et stromales (Adams, Leav et al. 2002, Harkonen and Makela 2004, Prins, Huang et al. 2006, Heldring, Pike et al. 2007, Ho, Nanda et al. 2008). L’activation de la voie estrogénique régule différents gènes tels que les gènes impliqués dans la stéroïdogenèse, dans le métabolisme hormonal, ou encore dans la survie cellulaire (Kastner, Krust et al. 1990, Harrington, Sengupta et al. 2006, Stossi, Likhite et al. 2006, Hu and Mackenzie 2009, Dey, Strom et al. 2013).

Les récepteurs hormonaux exercent en outre des fonctions non génomiques. Notamment, l’activation du AR au cytoplasme conduit en stimulant le relargage calcique intracellulaire AMPc, à l’activation de protéines kinases, telle que la protéine AKT, ERK, PKA et PKC (Nazareth and Weigel 1996, Peterziel, Mink et al. 1999, Baron, Manin et al. 2004). Les estrogènes exercent également des actions non génomiques néanmoins, cette voie d’activation est mineure (Morley, Whitfield et al. 1992, Marino, Acconcia et al. 2002, Acconcia and Marino 2003, Marino, Acconcia et al. 2005, Levin 2009). Particulièrement, un récepteur des estrogènes couplé à une protéine G : GPER (G protein-coupled estrogen receptor) a été caractérisé et décrit comme effectuant des actions non génomiques des estrogènes (Cheung, Yu et al. 2005, Thomas, Pang et al. 2005). Ce dernier est localisé dans le réticulum et participe à l’activation de voies de phosphorylation intracellulaire, notamment celles de PI3K et de ERK1 connues pour leurs rôles dans la survie cellulaire (Revankar, Cimino et al. 2005, Park, Zhang et al. 2009).

Enfin, les complexes formés par les récepteurs hormonaux et leurs ligands nécessitent la présence de protéines régulatrices pour leur fonctionnement (McKenna, Lanz et al. 1999). Ces co-régulateurs, liés aux récepteurs, sont importants puisqu’ils permettent de moduler l’activité transcriptionnelle à travers leurs fonctions régulatrices négatives (co-répresseur) ou positives (co-activateur) (Lee, Lee et al. 2001). La liaison des corégulateurs à l’ADN leur permet d’influencer l’activité de la transcription notamment en contrôlant le recrutement de la machinerie transcriptionnelle. Ces protéines effectuent leurs régulations par divers mécanismes dont des modifications biochimiques, des remodelages de la chromatine, des modifications des histones et enfin les modulations des protéines chaperonnes liées aux récepteurs (McKenna, Lanz et al. 1999, Vrtacnik, Ostanek et al. 2014).

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Dans le CaP, l’expression des récepteurs hormonaux est dérégulée. Particulièrement, AR, dont l’augmentation de l’expression est observée dans 30% des cas de CRPC, est impliqué dans la progression et la résistance (Visakorpi, Hyytinen et al. 1995, Buchanan, Greenberg et al. 2001). Des mutations de ce récepteur sont décrites avec la progression et peuvent conduire à une hypersensibilité, à un gain de fonction, et/ou à la capacité d’être activable par de nouveaux ligands tels que la progestérone ou par des glucocorticoïdes (Koivisto, Kononen et al. 1997, Gregory, Johnson et al. 2001, Sharifi 2013, Mills 2014, Zhou, Bolton et al. 2015). L’expression des récepteurs estrogéniques est également altérée, tandis que l’expression de ERα augmente avec la progression, et celle d’ERβ diminue (Risbridger, Davis et al. 2010, Asgari and Morakabati 2011). Les protéines corégulatrices ont également été associées aussi bien par des études in vitro ou in vivo que dans des études cliniques, à la progression tumorale du CaP (Linja, Porkka et al. 2004, Agoulnik, Vaid et al. 2006, Chmelar, Buchanan et al. 2007, Wang, Li et al. 2009, Xu, Wu et al. 2009, Dasgupta, Putluri et al. 2015). Toutes ces études nous démontrent l’importance des différentes voies d’action des hormones et leur altération dans le CaP.

3. Le cancer de la prostate CaP

Le CaP est un cancer très hétérogène avec une forte variabilité de la progression entre les patients. C’est également un cancer multifocal présentant des variabilités intertumorales et intratumorales (Boyd, Mao et al. 2012). En fait, 80% des CaP présentent plusieurs foyers distincts au sein de la glande et des études génomiques ont démontré des origines mutliclonales du CaP (Villers, McNeal et al. 1992, Aihara, Wheeler et al. 1994, Bostwick, Shan et al. 1998, Macintosh, Stower et al. 1998, Lindberg, Klevebring et al. 2013, Boutros, Fraser et al. 2015). D’autre part, dans 99% des cas, le CaP est de type adénocarcineux (Marcus, Goodman et al. 2012, Scosyrev, Messing et al. 2012).

3.1. Les facteurs de risque

Plusieurs facteurs de risque du CaP ont été décrits. Notamment le mode de vie, l’origine ethnique, l’âge, ainsi que les facteurs génétiques héréditaires participeraient au risque de développer le CaP (Gronberg 2003, Patel and Klein 2009).

En effet, l’alimentation particulièrement la vitamine D, les phytoestrogènes, les omégas 3, le lycopène dans la tomate, le soja, le thé vert, ou encore certaines épices ont été

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corrélés au risque de développer le CaP, bien qu’aucun lien direct n’ait été démontré (Crawford 2003, Gupta, Lammersfeld et al. 2009, Wang, Heber et al. 2012, van Die, Bone et al. 2014, Banks and Holick 2015, Chen, Zhang et al. 2015). Quant au style de vie, c’est l’occidentalisation qui semblerait associée au risque de CaP, comme l’illustre une étude sur les asiatiques émigrés en Amérique du Nord (Shimizu, Ross et al. 1991). Aussi, l’obésité et les syndromes métaboliques, ainsi que la diminution de l’activité physique pourraient favoriser le risque de CaP (Hill, Garbaczewski et al. 1984, Friedenreich and Thune 2001, Gong, Neuhouser et al. 2006, Hsing, Sakoda et al. 2007, Hrafnkelsdottir, Torfadottir et al. 2015).

D’autre part, avec 70% des patients développant le CaP à plus de 65 ans, l’âge avancé est un facteur de risque important de ce cancer (Haas and Sakr 1997, Scosyrev, Messing et al. 2012). Bien que la cause du vieillissement dans le CaP ne soit pas connue, les altérations génétiques liées à l’âge pourraient être mise en cause (Villeponteau 1997, Oberdoerffer and Sinclair 2007). Également, avec le vieillissement, les niveaux hormonaux varient et une altération du ratio testostérone/E2, a été communiquée dans de nombreuses études (Srinivasan, Campbell et al. 1995, Ellem and Risbridger 2010, Salonia, Gallina et al. 2011, Yao, Till et al. 2011, Black, Pinsky et al. 2014). En effet, avec l’âge, les niveaux plasmatiques en androgènes diminuent graduellement alors que les niveaux d’estrogènes restent constants ou diminuent légèrement (Tenover 2003, Burton, Tilling et al. 2010). Ceci conduirait donc à une diminution du ratio du niveau d’androgènes sur les estrogènes plasmatiques (Gray, Feldman et al. 1991, Harman, Metter et al. 2001, Vermeulen, Kaufman et al. 2002). Ainsi, le déséquilibre de ce ratio pourrait être un mécanisme clé dans le développement tumoral de la prostate et potentiellement dans la progression de la maladie. Sachant que l’enzyme UGT2B28 possède la capacité de glucuronider aussi bien la testostérone que l’estradiol, la question de son rôle dans l’équilibre de ce ratio, dans le tissu prostatique pourrait être soulevée.

Étant donné l’implication des hormones dans le tissu prostatique, les niveaux hormonaux ont toujours été suspectés d’affecter le risque de développer le CaP. Beaucoup de données biologiques supportent en effet le rôle des hormones dans le CaP. L’induction de tumeur et la croissance cellulaire après traitement hormonal (Pollard, Luckert et al. 1989, Bosland, Ford et al. 1995, Nelles, Hu et al. 2011), l’efficacité des traitements anti-androgéniques (de Bono, Logothetis et al. 2011), ou encore le fait que les eunuques ne développent pas de CaP (Wu and Gu 1991) ont contribué à alimenter cette

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hypothèse. Mise à part l’espèce humaine, les rongeurs et les mammifères ne développent que très peu ce cancer. Cependant, l’administration d’hormones l’induit et favorise la progression chez ces animaux (Gold, Slone et al. 1991, Bosland, Ford et al. 1995). Des différences de concentrations hormonales sériques ont été observées entre plusieurs ethnies. Les ethnies plus affectées par ce cancer semblaient avoir des niveaux plus élevés, en l’occurrence les africains et les caucasiens comparativement aux asiatiques (de Jong, Oishi et al. 1991, Bosland 2000). En revanche, de nombreuses études épidémiologiques de cas-contrôle n’ont jamais démontré de réelle association entre les niveau hormonaux et le risque de CaP (Bosland 2000, Hsing 2001, Hsing, Reichardt et al. 2002, Platz and Giovannucci 2004). En fait, une étude a démontré que des niveaux élevés d’estrone pouvaient être associés au risque de développer le CaP (Daniels, Nielson et al. 2010). Deux autres études ont démontré que des niveaux hormonaux semblaient liés au risque mais de façon inverse. L’une a constaté un lien avec des faibles niveaux de testostérone (Severi, Morris et al. 2006), alors que la seconde a établi ce même lien avec des niveaux plus élevés (Gann, Hennekens et al. 1996). Le reste de la littérature n’a relaté aucun lien. L’absence d’association entre les niveaux hormonaux circulants et le risque de CaP pourrait être due aux méthodologies utilisées ainsi qu’à l’absence de corrélation entre le tissu prostatique et les niveaux hormonaux (Hsing 2001, Platz and Giovannucci 2004, Olsson, Ekstrom et al. 2011). D’autres ont évoqué le fait qu’une mesure à un instant donné ne reflète pas le risque, et que l’exposition serait à mettre en cause (Severi, Morris et al. 2006, Salonia, Abdollah et al. 2013). Enfin, le modèle de saturation semble également faire partie des explications sur l’absence d’association. Ce modèle stipule que seule une variation chez les patients ayant des niveaux bas est susceptible de provoquer des variations intraprostatiques comme l’augmentation de l’APS (Morgentaler and Traish 2009, Khera, Crawford et al. 2014).

Concernant l’origine ethnique, il a été démontré que les hommes d’origine africaine ont 1.5 à 2 fois plus de risques de développer ce cancer que les caucasiens, eux-mêmes plus à risque que les asiatiques (Brawley, Jani et al. 2007, Abd Elmageed, Moroz et al. 2013). Cette susceptibilité s’explique en partie par des variations génétiques spécifiques ou prédominantes pour ces groupes ethniques (Zeigler-Johnson, Walker et al. 2002, Park, Haiman et al. 2015). On notera, par exemple, la forte prévalence dans l’ethnie africaine de polymorphismes du gène SRD5A1 qui forme l’enzyme génèrant la DHT (Zeigler-Johnson, Walker et al. 2002).

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La composante génétique tout juste évoquée est un facteur de risque important, en effet, elle représente à elle seule 42% du risque total de développer ce cancer (Carter, Beaty et al. 1992, Lichtenstein, Holm et al. 2000, Cancel-Tassin and Cussenot 2005). Bien que tous les CaP soient affectés par le facteur génétique, on distingue deux groupes de CaP. Celui d’origine sporadique (85%), c’est à dire dont la formation est induite par des mutations, et celui d’origine familiale, où la contribution génétique héréditaire familiale est majeure et à l’origine de 10% à 15% des cas de ce cancer (Suzuki, Nakazato et al. 2003, Labbe, Nowak et al. 2014).En fait, le risque est doublé lorsqu’un parent du premier degré a été atteint du CaP (Hayes, Liff et al. 1995, Whittemore, Wu et al. 1995, Bratt 2002). On notera que les hommes dont les parentés ont été atteintes du cancer du sein ou de l’endomètre sont également exposés à un plus grand risque de développer un CaP (Kalish, McDougal et al. 2000). Pour les cas de CaP d’origine familiale, la cause s’expliquerait par la présence d’une ou plusieurs mutations héréditaires rares, mais ayant une forte pénétrance (Ponder 1997, Lindor, McMaster et al. 2008). À l’inverse, dans les cancers sporadiques, les altérations génétiques observées sont plus fréquentes dans la population, mais avec une plus faible pénétrance.

En fait, dans différentes régions chromosomiques comprenant plus d’une douzaine de chromosomes, des variations génétiques ont pu être associées à l’augmentation du risque de développer le CaP (Varghese and Easton 2010, Eeles, Olama et al. 2013, Hazelett, Rhie et al. 2014). Particulièrement, les régions 8q24 où se trouvent 5 loci de variations et les régions 17q12 et 17q21-24, 1q32, 14q24 et 20q13, ont été classifiées comme les plus critiques, augmentant pour certaines jusqu'à neuf fois le risque de développement du CaP.(Zheng, Sun et al. 2008, Simpson, Cropp et al. 2013, Labbe, Nowak et al. 2014) Il existe d’autres gènes de susceptibilité au CaP (RNASEL, ELAC2, MSR1, OGG1, CHEK2, BRCA2, PON1, GDF15, MDM4, MMP7, SPOP) dont les produits sont particulièrement impliqués dans des rôles de défense cellulaire comme l’inflammation, le stress oxydatif, la réparation à l’ADN, ou encore le contrôle du cycle cellulaire, le développement métastatique et la réponse aux androgènes (Patel and Klein 2009, Varghese and Easton 2010, Alvarez-Cubero, Saiz et al. 2013, Eeles, Goh et al. 2014). La génétique des patients est donc un facteur de risque majeur dans le CaP.

Outre les polymorphismes décrits ci-dessus, des polymorphismes des voies de synthèse mais aussi des voies du métabolisme des hormones sexuelles stéroïdiennes ont également été associés au risque de développer le CaP. Particulièrement, des SNP

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d’UGT2B15 et la délétion d’UGT2B17 semblent augmenter le risque de développer le CaP (MacLeod, Nowell et al. 2000, Cai, Huang et al. 2012). En revanche, concernant la délétion d’UGT2B28, aucun lien n’a été avéré (Setlur, Chen et al. 2010). Ainsi, si les niveaux hormonaux ne semblent pas associés au risque de développer le CaP, les gènes de la stéroïdogenèse et du métabolisme semblent quant à eux impliqués dans le processus tumoral. L’étude des enzymes du métabolisme hormonal semble de ce fait une cible d’intérêt dans le CaP et a donné matière à mon projet de recherche.

3.2. Le diagnostic du CaP

Le diagnostic clinique du CaP s’effectue par différents tests, dont le dosage sanguin de l’APS (Antigène Prostatique Spécifique) et le toucher rectal. Si l’APS représente un marqueur diagnostique, puisqu’il est sensible à la prostate et sécrété sous l’influence des androgènes, il n’est pas spécifique au cancer (Strope and Andriole 2010). Ainsi pour confirmer le diagnostic, une biopsie est indispensable (Lilja, Ulmert et al. 2008, Freedland 2011). Lors de la biopsie, les pathologistes recherchent, par immunohistochimie, la présence des biomarqueurs diagnostiques du CaP, tels que les gènes P63 et AMACR (Luo, Zha et al. 2002, Molinie, Fromont et al. 2004, Sanderson, Sebo et al. 2004, Chun, de la Taille et al. 2009, Ruffion, Devonec et al. 2013). Il existe également les marqueurs détectés par test urinaire notamment PCA3, un ARNm non codant uniquement exprimé dans le tissu prostatique (Ploussard and de la Taille 2010). Une fois la tumeur diagnostiquée positivement, les cliniciens utilisent des classifications établies, notamment celle du NCCN (National Comprehensive Cancer Network) pour catégoriser le risque du CaP par la combinaison des trois paramètres cliniques et pathologiques suivants (Figure 6) : 1) le score de Gleason, permettant d’établir le grade et d’évaluer l’état de différenciation et la croissance cellulaire. 2) la classification TNM, (Tumors, Nodes, Metastasis) qui établit le stade tumoral et 3) le dosage de l’APS (www.cancer.ca , Gleason 1992, D'Amico, McLeod et al. 2007). Les régions lymphatiques peuvent également être analysées dépendamment du stade diagnostiqué à l’aide d’une chirurgie ou d’une IRM. De même, la tomodensitométrie ou la scintigraphie permettent de déterminer la présence de métastases notamment osseuses, les os étant le site métastatique de prédilection de ce cancer (90%) (www.nccn.org , Gupta and Massague 2006, Msaouel, Pissimissis et al. 2008).

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17 Figure 6 Paramètres cliniques et classification du risque du CaP.

A) Le score de Gleason permet d’établir le grade par l’évaluation de l’état de différenciation et de la croissance cellulaire. Le score s’établit en effectuant la somme des deux grades (sur 5) les plus caractéristiques de la tumeur. B) La classification TNM (Tumors, Nodes, Metastases) permet d’établir le stade, qui consiste à définir la taille de la tumeur et à déterminer si elle s’est développée au-delà de la prostate. L’invasion tumorale est divisée en 4 stades de cancer (T1 à T4) où T1 et T2 sont considérés comme les stades localisés, T3 les stades localement avancés et T4 les stades métastatiques. C) Établissement du risque de Récidive Biochimique ou BCR à partir des paramètres clinicopathologiques établis. Figure adaptée à partir de UpToDate®. (www.nccn.org , Gleason 1992).

3.3. Les approches thérapeutiques

Pour le choix de la thérapie, le clinicien doit tout d’abord prendre en compte le choix du patient, son âge, ses facteurs de comorbidité et enfin il doit évaluer le ratio risque/bénéfice de toute intervention. Lorsque la tumeur est cliniquement localisée, plusieurs options thérapeutiques sont possibles. Pour les CaP à faible risque, la surveillance active peut être envisagée. Des analyses du niveau d’APS et des biopsies seront alors réalisées à

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chaque période de 6 mois. Cette option est une alternative aux prises en charge thérapeutiques trop invasives qui diminuent qualitativement la vie des patients, et dont la nécessité n’est parfois pas avérée (Ruutu and Rannikko 2009, Klotz, Zhang et al. 2010, Cooperberg, Cowan et al. 2011). Le manque de précision quant à la prédiction de la progression des CaP localisés place toutefois le clinicien dans un choix thérapeutique incertain. En effet, la principale problématique de la prise en charge des CaP localisés réside dans le risque de sous-traiter un CaP qui s’avèrerait agressif ou, à l’inverse, de traiter de façon trop invasive un CaP indolent (Bangma, Valdagni et al. 2015, Imnadze, Sjoberg et al. 2015).

La proportion de patients recevant une thérapie suite à la surveillance active se situe entre 14% et 40% (Cooperberg, Carroll et al. 2011). Majoritairement, pour les stades localisés, ce sont la radiothérapie (irradiation externe et/ou curiethérapie) et la chirurgie (prostatectomie radicale (PR)) qui sont effectuées. D’autres alternatives peuvent parfois être appliquées, c’est notamment le cas de la cryothérapie lorsque le patient refuse un traitement invasif (Cohen, Miller et al. 1996, Connolly, Shinohara et al. 1996, Babaian, Donnelly et al. 2008). Néanmoins, la prostatectomie radicale figure parmi les options thérapeutiques les plus pratiquées (Lubeck, Litwin et al. 1996, Cooperberg, Broering et al. 2010). Dans le cadre de mon projet de recherche, les patients étudiés avaient un tous CaP localisé ou localement avancé et avaient tous été traités par PR.

Pour certains cas de CaP localisés ou localement avancés, la thérapie hormonale peut être administrée en thérapie adjuvante, en combinaison avec la radiothérapie. En effet, l’utilisation d’anti-androgènes seuls, ou en combinaison (CAB Combined Androgen Blocade), retarde la progression de la maladie et augmente la survie (Leibowitz and Tucker 2001, McLeod, Iversen et al. 2006, Wirth, Tyrrell et al. 2007, Scholz, Lam et al. 2011). Notamment, dans une étude pilote de Mostaghlel et al, l’utilisation de CAB chez des patients localement avancés a notamment été associée à une meilleure réduction du volume tumoral et des niveaux hormonaux en circulation. Néanmoins, l’hétérogénéité des réponses aux traitements, ainsi que l’absence de variation des niveaux hormonaux intraprostatiques, pousse à la prudence face à cette option thérapeutique (Mostaghel, Nelson et al. 2014). En effet, en cas d’absence de réponse aux traitements ou de recrudescence de la maladie, peu d’alternatives thérapeutiques sont alors envisageables (Jonathan L. Silberstein , Roach 2014). Enfin, lorsque le CaP est détecté à un stade avancé (métastatique), le traitement privilégié sera l’hormonothérapie ou ADT (pour

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Androgen Deprivation Therapy), combinée ou non à la chimiothérapie (Ryan, Smith et al. 2013, Beer, Armstrong et al. 2014, Roach 2014). Des études ont d’autre part démontré que les traitements anti-androgènes administrés en combinaison sont plus efficaces, endiguant ainsi un plus grand nombre de voies de synthèse des androgènes nécessaires à la progression du cancer (Alva and Hussain 2014, Roach 2014). Pour les cas avancés, lorsque le CaP progresse malgré la déprivation en androgènes, il est catalogué comme résistant à la castration (CRPC castration resistant prostate cancer). Dès lors, divers traitements anti-androgéniques peuvent être administrés afin de trouver celui auquel le patient répondra le mieux, et ainsi augmenter sa survie.

4. La récidive biochimique (BCR) et la progression

4.1. La

BCR

La prostatectomie radicale est un traitement à visée curative qui consiste à retirer totalement la capsule prostatique et les tissus adjacents. L’ensemble du tissu prostatique, bénin ou malin, ayant été retiré, les taux d’APS doivent devenir nuls ou indétectables. Ainsi, lorsque les niveaux d’APS augmentent à nouveau, ceci est considéré comme une recrudescence de la prolifération des cellules tumorales. Malgré la chirurgie, environ 25-30% des patients auront une récidive dite biochimique (BCR) (Amling, Blute et al. 2000, Han, Partin et al. 2001, Hull, Rabbani et al. 2002, Roehl, Han et al. 2004). Dans 90% des cas, elle aura lieu durant les 5 années post-prostatectomie (Caire, Sun et al. 2009, Freedland 2011). La BCR après prostatectomie est définie par des niveaux sériques d’APS ≥0,2ng/ml, et ce sont deux dosages effectués dans un temps rapproché qui valident la récidive (Pound, Partin et al. 1999, Heidenreich, Aus et al. 2008).

Une BCR non traitée est inévitablement suivie d’une récidive clinique, qui se définit par la détection de nouveaux foyers tumoraux. Néanmoins, lorsque la BCR est décelée et traitée, la progression de la maladie est hétérogène selon les patients (Jhaveri, Zippe et al. 1999, Freedland 2005). Les limites prédictives du taux d’APS et l’absence d’outils détectant précocement les sites de progression, ne permettent pas aux cliniciens de déterminer parmi les patients avec une BCR ceux qui seront sujets à une récidive clinique dans des courts délais. La détection de nouveaux biomarqueurs permettrait de détecter les patients qui présentent un risque plus élevé de progression clinique pour adapter ainsi

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les traitements (Oon, Pennington et al. 2011). Cependant, pour les CaP localisés, la BCR constitue une phase charnière dans la progression de la maladie et permet déjà de cibler les patients à risque. L’idéal en clinique serait de pouvoir prédire les patients qui auront des métastases, ou même de pouvoir prédire leur survie. Pour cela, la connaissance des altérations dans les métastases présente un intérêt important. Néanmoins, les cohortes de patients aux stades avancés avec des échantillons de métastases sont très rares. Dans notre étude, on a utilisé une cohorte de patients CaP localisés et, de ce fait, la BCR et/ou la présence de métastases étaient de bons indicateurs de la progression. La récidive biochimique peut s’expliquer par une résection incomplète de la tumeur lors de la chirurgie (récidive locale), ou encore par la présence de cellules tumorales disséminées CTD dans la moelle osseuse appelées aussi micrométastases, de cellules tumorales circulantes CTC qui se retrouvent dans la circulation sanguine, ou de métastases n’ayant pas été détectées au diagnostic.

4.2. La

progression

Les cellules tumorales circulantes et disséminées CTC et CTD sont majoritairement présentes dès la détection de la maladie, indépendamment du stade, du grade ou de la taille de la tumeur (Morgan, Lange et al. 2009, Stott, Lee et al. 2010, Murray, Reyes et al. 2011, Kolostova, Broul et al. 2014). Notamment, Morgan et al ont démontré que les CTD sont présentes dans 72% des cas de cancers localisés (Morgan, Lange et al. 2009). De facon similaire, les CTC sont présentes dans la majorité des cas de CaP localisés, que ce soit avant ou après la chirurgie (Stott, Lee et al. 2010, Khurana, Grane et al. 2013, Murray, Reyes et al. 2013, Kolostova, Broul et al. 2014). L’analyse génétique de ces cellules cancéreuses a montré que plus de 70% d’entre elles possèdent de nombreuses mutations caractéristiques des métastases du CaP (Lohr, Adalsteinsson et al. 2014), dont notamment celles du récepteur AR (Robinson, Van Allen et al. 2015). Ainsi, même après la prostatectomie, les cellules résiduelles ou disséminées y compris celles présentes aux stades précoces de la maladie, sont hormonodépendantes et seront responsables de la récidive (Figure 7) (Ren, Han et al. 2011). De ce fait, chez ces patients, la progression de la maladie semble programmée dès les stades localisés. La découverte de marqueurs de cette progression est dès lors primordiale.

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21 Figure 7 Le processus de formation des métastases par les CTC.

L’invasion des cellules requiert que les cellules épithéliales (CÉ) se transforment en cellules mésenchyales (EMT), dont les propriétés sont la perte d’adhérence à la membrane basale (MB) et la capacité de migration. Ce processus permet l’extravasation de ces cellules et leur entrée dans la circulation, les cellules deviennent alors les Cellules Tumorales Circulantes (CTC). Certaines de ces cellules développeront des propriétés génétiques et biologiques leur conférant la possibilité de migrer dans des organes cibles et de former des métastases. Figure tirée de (Ren, Han et al. 2011)

D’autre part, l’augmentation d’enzymes de la stéroïdogenèse et du métabolisme dans les métastases a été décrite dans la littérature. Particulièrement, la plus forte expression de l’expression en ARNm d’UGT2B15 et d’UGT2B17 a été observée dans plusieurs études, celle d’UGT2B28 reportée dans une seule (Montgomery, Mostaghel et al. 2008, Pfeiffer, Smit et al. 2011, Mitsiades, Sung et al. 2012, Kaushik, Vareed et al. 2013). Ceci soulève néanmoins la question d’une potentielle implication de ces enzymes du métabolisme dans la progression de la maladie et dans les stades avancés, et donc à fortiori en tant que potentiel biomarqueur de métastases.

5. Les outils de prédiction

5.1. La prédiction du risque de récidive

Concernant les marqueurs, ils peuvent être d’origine somatique ou héréditaire. Leur nature est très variée, il existe en effet des marqueurs génétiques, épigénétiques, protéiques, cellulaires ou histologiques (Adamis and Varkarakis 2014, Costa-Pinheiro, Patel et al. 2014, Bostrom, Bjartell et al. 2015, Falzarano, Ferro et al. 2015). La détection

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des marqueurs s’effectue par des prélèvements plasmatiques, sériques, urinaires ou encore par des prélèvements tissulaires. Ils sont ensuite analysés par des techniques de génétique, de biologie moléculaire et immunologique (Bhatt, Mathur et al. 2010, Verma, Patel et al. 2011).

Il existe différents outils de prédiction dont font partie les biomarqueurs et les nomogrammes. L’évaluation des biomarqueurs s’effectue avec les niveaux de sensibilité et de spécificité de ces derniers. La sensibilité démontre la capacité du marqueur à être positif lorsque la caractéristique recherchée est présente. La spécificité, quant à elle, démontre l’aptitude du marqueur à ne pas détecter de faux positifs (McShane, Altman et al. 2005). Par exemple, le niveau d’APS est un marqueur sensible car sécrété uniquement par les cellules prostatiques. Mais il n’est pas spécifique au cancer puisqu’il varie avec d’autres pathologies telles que l’hypertrophie de la prostate ou encore des inflammations de la glande.

Les nomogrammes, quant à eux, se basent sur des combinaisons de paramètres clinico-pathologiques pour classifier le risque de récidive clinique des patients après PR. Pour les nomogrammes, on se réfère à l’indice de concordance pour l’évaluation. Ce dernier est représenté par une échelle de 0 à 1, où 1 exprime la prédiction absolue. Afin qu’un outil de prédiction soit valide, différents aspects doivent avoir été approuvés tels que la calibration (qui est la corrélation entre le paramètre prédit et celui observé), la précision de l’outil, sa facilité d’utilisation, et enfin son utilité pratique en clinique par rapport aux outils déjà existants (Ross, Scardino et al. 2001, Vergouwe, Steyerberg et al. 2002, Shariat, Karakiewicz et al. 2008, Vickers, Cronin et al. 2008). Parmi les outils, quelques tables ou nomogrammes sont communément utilisés pour prédire la BCR (D'Amico, Whittington et al. 1998, Kattan, Eastham et al. 1998, Freedland 2005, Stephenson, Scardino et al. 2005, Cooperberg, Hilton et al. 2011). Les plus populaires, celles de D’Amico, Kattan, ou encore CaPRA (Cancer of the Prostate Risk Assessment), incluent les taux sériques d’APS avant traitement, le stade et le grade pathologiques ainsi que la présence d’envahissement ganglionnaire, ou encore l’âge. Ces tables constituent des outils intéressant par la combinaison de paramètres dont ils sont composés, et servent de guides aux cliniciens dans le choix du traitement (Figure 2) (Miyake and Fujisawa 2013, Adamis and Varkarakis 2014). Toutefois, la moyenne des indices de concordance des nomogrammes est d’environ 0.75, ce qui indique que plus de 20% d’informations supplémentaires seraient nécessaires pour prédire à 100% le risque du patient (Bhojani,

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Ahyai et al. 2009, Yu, Makarov et al. 2010, Oon, Pennington et al. 2011). Cela nous révèle que la récidive n’est pas prédictible, car imprécise, surtout pour les patients aux risques faibles (Moreira, Presti et al. 2010, Miyake and Fujisawa 2013). Cette imprécision empêche particulièrement l’identification précoce des patients à haut risque, et place de ce fait les actions thérapeutiques dans une stratégie soignante plutôt que dans une stratégie préventive. Une meilleure classification des patients selon les risques, ainsi que la personnalisation des traitements, permettraient potentiellement d’avoir un meilleur pronostic de survie.

5.2. Les biomarqueurs de la récidive

5.2.1.

Les biomarqueurs de diverses natures

Parmi les biomarqueurs histologiques et biochimiques, la classification des patients selon le score de Gleason ou encore par le biais de différents taux d’APS permet notamment de les stratifier selon leur risque de récidive (Morgan, Meng et al. 2014). En fait, le temps de doublement et la vélocité du taux d’APS ainsi que la réponse aux traitements anti-androgéniques font partie de ces paramètres (Southwick, Catalona et al. 1999, Ashley 2003, D'Amico, McLeod et al. 2007, Freedland, Humphreys et al. 2007, Ozkanli, Zemher et al. 2014).

Il existe aussi les biomarqueurs circulants, les CTC et CTD sont notamment bien caractérisées dans le pronostic des stades avancés. La détection des cellules CTC par la méthode CellSearchTM est en effet un test pronostique approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) américaine dans les cas de cancers avancés (Danila, Fleisher et al. 2011, Lianidou, Strati et al. 2014, Ma, Xiao et al. 2014). En fait, chez les patients métastatiques, la présence de plus de 5 CTC/7,5 ml de sang prélevé est un indicateur de la diminution de plus de la moitié des chances de survie des patients (de Bono, Scher et al. 2008). Plusieurs études ont révélé que les CTC et CTD étaient présentes chez la moitié des patients ayant subi une prostatectomie (Morgan, Lange et al. 2009, Yates, Roupret et al. 2012, Murray, Reyes et al. 2013). Les CTD, présentes dans la majorité des CaP localisés, augmentent notamment d’environ 7 fois le risque de récidive après prostatectomie radicale (Morgan, Lange et al. 2009). Les CTC sont aussi présentes la majorité des cas de CaP localisés, que ce soit avant ou après la chirurgie et prédisent le risque de récidive (Yates, Roupret et al. 2012, Murray, Reyes et al. 2013). À ce titre, la détection de ces cellules cancéreuses en circulation représente un outil de prédiction du

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risque de récidive fort prometteur (Lilleby, Stensvold et al. 2013, Murray, Reyes et al. 2013). Les caractéristiques de cellules cancéreuses circulantes telles que la taille, les marqueurs de surface, la densité et la capacité d’invasion sont également sous étude afin de mieux prédire celles qui pourraient démontrer un caractère plus agressif (Pantel and Alix-Panabieres 2010, Doyen, Alix-Panabieres et al. 2012). D’ailleurs, les marqueurs de surface des CTC tels que CD133 et ED-1 sembleraient être de potentiels biomarqueurs pronostiques (Pal, He et al. 2015). De plus, des associations entre les niveaux en ARN de la PSA des cellules circulantes ou disséminées et la BCR ont été observées (Straub, Muller et al. 2001, Tombal, Van Cangh et al. 2003, Yates, Roupret et al. 2012).

En ce qui concerne les marqueurs épigénétiques, il est bien décrit que les altérations épigénétiques sont nombreuses aussi bien à l’initiation du CaP que lors de sa progression. L’épigénétique représente les mécanismes moléculaires altérant la régulation et la fonction des gènes sans altérer l’ADN. Parmi ces mécanismes se trouvent la méthylation de l’ADN, la modification des histones désacétylases, ainsi que les micro-ARN (miRNA) (Valdes-Mora and Clark 2015). Tous ces mécanismes figurent parmi les marqueurs associés au pronostic du CaP après RP (Schatz, Dietrich et al. 2010, Long, Johnson et al. 2011, Sun, Liu et al. 2013, Kristensen, Haldrup et al. 2014, Li, Wan et al. 2014, Lin, Xie et al. 2014, Stein, Majores et al. 2014). Un test génétique de marqueur de méthylation ConfirmMDx permet d’ores et déjà de confirmer les biopsies négatives à plus de 90% (Stewart, Van Neste et al. 2013).

Enfin le risque de récidive est également associé au profil d’expression tumorale. De nombreux biomarqueurs moléculaires ont été reportés dans la littérature (Table.1). Bien qu’il en existe un grand nombre, peu d’entre eux sont utilisés en clinique en plus des marqueurs clinicopathologiques existants. Ceci s’explique notamment par l’incapacité à valider les biomarqueurs dans des cohortes indépendantes, ainsi que la sensibilité, la spécificité, la précision et la stabilité (Murphy and Watson 2012). Ainsi le manque de biomarqueurs pronostics dans le CaP demeure aujourd’hui une des réelles problématiques en clinique. Une meilleure discrimination des patients via des sous-catégories s’est d’ores et déjà révélée bénéfique dans les options thérapeutiques notamment dans le cancer du sein (Onitilo, Engel et al. 2009, Badve, Dabbs et al. 2011, Yersal and Barutca 2014). Ainsi, l’identification de nouveaux biomarqueurs moléculaires et génétiques spécifiques en lien avec la récidive est de ce fait indispensable pour améliorer les prédictions actuelles (Bostrom, Bjartell et al. 2015).

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25

Si des polymorphismes des UGT figurent parmi les biomarqueurs pronostiques germinaux, leur expression dans le tissu prostatique n’a jamais été étudiée en lien avec la progression du CaP. Particulièrement, la délétion d’UGT2B28 est associée au risque de BCR et à des variations hormonales. Cependant, son expression dans le tissu tumoral et son lien potentiel avec la progression n’ont jamais été étudiés. Ainsi, cela a fait l’objet d’une des questions de recherche de mon projet de doctorat.

Figure

Figure 1 La glande prostatique.
Figure 2 La formation d’hormones actives produites par les tissus périphériques.
Figure 3 La synthèse des hormones sexuelles s’effectue à partir du cholestérol.
Figure 4 La synthèse et le métabolisme des estrogènes dans le tissu prostatiques.
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