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Théâtre à l’hôpital et politique de santé publique :
approches de sciences auxiliaires du droit
Hassani Mze Hamadi Ahamed Youssouf
To cite this version:
Hassani Mze Hamadi Ahamed Youssouf. Théâtre à l’hôpital et politique de santé publique : ap-proches de sciences auxiliaires du droit. Droit. Normandie Université, 2020. Français. �NNT : 2020NORMLH14�. �tel-03117449�
THÈSE
Pour obtenir le diplôme de doctorat
Spécialité : Droit privéPréparée au sein de l’Université Le Havre Normandie
Titre de la thèse :
THÉÂTRE À L’HÔPITAL ET POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE –
APPROCHES DE SCIENCES AUXILIAIRES DU DROIT
( 2 volumes )
Présentée et soutenue par :
Hassani Mzé Hamadi AHAMED YOUSSOUF
TOME ISous la co-direction de :
Mme le Professeur Béatrice BOURDELOIS Le Laboratoire d’accueil : CERMUD
Mme le Professeur Catherine PUIGELIER Le Laboratoire d’accueil : D.S.U.P.A (Paris II)
Thèse soutenue publiquement le 20 novembre 2020 devant le jury composé de
Madame Béatrice BOURDELOIS Professeur à l’Université Le Havre
Normandie Directeur de thèse
Monsieur Jacques FOYER Professeur émérite de l’Université
Panthéon-Assas (Paris II) Rapporteur
Monsieur Christian JUBAULT Professeur à l’Université du Littoral
Côte d’Opale (ULCO) Rapporteur
Madame Catherine PUIGELIER
Professeur à l’Université Paris VIII, Membre du Laboratoire de droit social de l’Université Panthéon-Assas
(Paris II)
PRINCIPALES ABRÉVIATIONS
A
ACC : Approche cognitive et comportementale
ACDI : Agence canadienne de développement international
ACTG : AIDS Clinical Trials Group ADN : Acide désoxyribonucléique
ADPIC : Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce AFRATAPEM : Association Française de Recherche & Applications des Techniques Artistiques en Pédagogie et Médecine AGEÉM : Association Générale des Enseignants des Écoles et classes Maternelles publiques
AMM : Association médicale mondiale AMP cyclique : Adénosine monophosphate cyclique
ANAES : Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé ANEPS : Agence nationale de prévention et d’éducation pour la santé
ANFE : Association nationale française des ergothérapeutes
ANRS : Agence nationale de recherche sur le sida
ANSES : Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation
AQOCI : Association québécoise des organismes de coopération internationale ARH : Agence Régionale d’Hospitalisation ARS : Agence régionale de la santé
Article D. : Article Décret Article L. : Article Loi
Article R. : Article Règlement ASBL : Association sans but lucratif ATD quart Monde : Aide à toute détresse quart Monde ou mouvement ATD : Agir tous pour la dignité Quart monde
ATEJ : Association du théâtre pour l’enfance et la jeunesse
Av. J.-C : Avant Jésus-Christ AVC : Accident vasculaire cérébral
AZT : Azidothymidine ou Zidovudine (ZDV)
B
BMC : BioMed Central Medical Education BNC : Bénéfices non commerciaux
Bull : bulletin
Bull. Acad. Natle Méd : Bulletin de l’académie nationale de médecine
C
CA : Cour d’appel
CAA Bordeaux : Cour administratif d’appel de Bordeaux
CAF : Caisses d’allocations familiales CASH : Centre d’Accueil et des Soins Hospitaliers
C. Cass : Cour de Cassation Cass. Civ : Cassation civile
C.H.U : Centre hospitalier universitaire CE du Parlement européen : Conseil Européen du parlement européen
CE : Conseil d’Etat
CEE du Conseil : Conseil de la Communauté économique européenne CESC : Comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté
Cf. : Confer
Ch. Civ : Chambre civile
Ch. des Abeilles : Chemin des Abeilles CHR : Centre Hospitalier Régional CHS : Centre Hospitalier Spécialisé
CHSCT : Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail
CHU : Centre hospitalier universitaire CIAPHS : Centre Interdisciplinaire d’Analyse des Processus Humains et Sociaux
CIDFF : Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles
CIPAV : Caisse interprofessionnelle de Prévoyance d’Assurance Vieillesse
Circulaire DHOS/SDO : Circulaire de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins/Sous-direction de l’organisationdu système de soins
Circulaire DHOS/P : Circulaire de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins/Sous-direction des professions paramédicales et des personnels hospitaliers
CISIH : Centres d’informations et de soins de l’immunodéficience humaine
CISS : Collectif Interassociatif Sur la
Santé
CLAC : Centre de lecture et d’animation culturelle
CMPP : Centre Médico-Psycho-Pédagogique
CMU : Couverture médical universelle CNCDH : Commission nationale consultative des droits de l’homme
CNR : Centre National de Référence CNRS : Centre national de la recherche
scientifique
CNRTL: Centre national de ressources
textuelles et lexicales
CNS : Conseil national du sida
Code APE-NAF : Activité principale exercée-Nationale d’activités française Code de Déontologie de l’AAC : Code de Déontologie de l’Association Art des Corps
Coll : Collection
COPE : Cognitively Oriented Psychotherapy for Early Psychosis
CP-FFP : Certification professionnelle-Fédération de la Formation professionnelle CRIPS : Centre régional d’information et de prévention du Sida
CRISP : Centre de recherche et d’information socio-politiques
CSG/CRDS : Contribution sociale généralisée/Contribution au remboursement de la dette sociale
D
DCEM2 : Deuxième cycle des études médicales 2
DDASS : Direction Départementale des Affaires sanitaires et Sociales
Déc : décembre
DGS : Direction Générale de la Santé DHOS : Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation de Soins
dir : direction Dlle : Demoiselle
DOI : Digital Object Identifier
DPC : Développement professionnel continu
DRAC : Direction Régionale des Affaires Culturelles
E
EAP : Etudiant apprenti professionnel éd : édition
EESP : École d’études sociale et pédagogiques
EHPA : Établissement d’Hébergement pour
Personnes Âgées
ÉNAM : École Nationale d’Apprentissage par la Marionnette
EPA : Établissement public administratif EPSM : Établissement Public de Santé Mentale
ESF : Éditions sociales françaises
F
FAO : Organisation pour l’alimentation et pour l’agriculture
FERME : Fondation pour l’Étude et la Recherche sur les Mémoires et l’Expression
FFAT : Fédération française des art-thérapeutes
FHF : Fédération Hospitalière de France FIAPMC : Fédération intersectorielle des ateliers de psychothérapie à médiation créatrice
FITA : Festival International de Théâtre Action
Fondation MACSF : Fondation Mutuelle d’assurances du corps de santé français FRA : France
FRAC : Fonds régionaux d’art contemporain
G
GCS : Groupement de coopération sanitaire
GF : Groupe Flammarion (édition) GIS : Groupement d’intérêt scientifique
H
HAS : Haute Autorité de Santé
HCSP : Haut Comité de la santé publique HEPHO : Haute Ecole Provinciale du Hainaut Occidentale Ecole d’ergothérapie
I
Ibid : Ibidem (une locution latine signifiant « même endroit » parfois abrégée ib.
ICASA : Independent communications Authority of South Africa
IFPEK : Institut de formation en Pédicurie-Podologie, Ergothérapie et Masso-Kinésithérapie de Rennes.
IFSI-CHU de Rennes : Institut de formation en soins infirmière – Centre hospitalier universitaire de Rennes
IMC : Infirmité motrice cérébrale in : Dans
INEP – Marly le Roi : Institut National d’Éducation Populaire – Marly le Roi INFIPP : Institut National pour la Formation des Infirmiers et du Personnel travaillant en Psychiatrie
INPES : Institut National de Prévention et d’Éducation pour la Santé
INSEE : Institut National de la Statistique et des Études Économiques
INSEM : Institut national de la santé et de la recherche médicale
InVS : Institut de veille sanitaire
Item : Adverbe latin qui signifie : Ainsi, également ou de même,
J-K
JF : Journal Officiel
JORF : Journal Officiel de la République Française
JOUE : Journal Officiel de l’Union européenne
L
LPAT : Ligue Professionnel d’Art-Thérapie
M
m : mètre
MAJ : Mise à jour
MDC Sociologie : Maître de conférences en Sociologie
MSA : Mutualité sociale agricole
MST ou IST : Maladies ou d’infections sexuellement transmissibles
N
n° : Numéro
NREPS : Agence régionale de prévention et d’éducation pour la santé
O
OIT : Organisation des Nations Unies OMS : Organisation Mondiale de la Santé ONG : Organisation non gouvernementale ONUSIDA : Programme Commun des Nations Unies sur le VIH/Sida
Op. cit : Abréviation de la locution latine opus citatum qui signifie « œuvre citée »
ou opere citato « dans l’œuvre citée »
P-Q
p. : Page
PDF : Portable Document Format PIB : Produit intérieur brut
PRACS : Programme de Renforcement de l’Autonomie et des Capacités Sociales
Programme IPT : Programme Integrated
Psychological treatement (Programme du Traitement d’Intégration Psychologique) Programme PACT : Programme Psychose : Aider, Comprendre, Traiter
PUF : Presse universitaire de France PUV : Presse universitaire de Vincennes
R
RC : Réponse conditionnelle
RDC : République démocratique du Congo RECOS : Remédiation cognitive pour la schizophrénie ou trouble associé
Règlement CE : Règlement Commission européenne
RÉUNICA Prévoyance : est un groupe de paritaire de protection sociale à but non lucratif.
RI : Réponse inconditionnelle RMI : Revenu minimum d’insertion
RN : Réponse neutre
RNSP : Réseau national de santé publique RSI : Régime sociale des indépendants S
s : Suivante
SACD : Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques
SC : Stimulus conditionnel
SFLGC : Société française de littérature générale et comparée
SI : Stimulus inconditionnel
Sida : Syndrome d’immunodéficience acquise
SN : Stimulus neutre
SPAD : Service psychiatrique d’aide à domicile
SROS : Schémas Régionaux d’Organisation des Soins
T
TVA : Taxe sur la valeur ajoutée
U
UC-UDF : Union centriste – Union pour la démocratie française
UE : Union européenne
UEB-Rennes 2 : Université européenne de Bretagne – Rennes 2
UMR-ADEF : Unité mixte de recherche-Apprentissage, Didactique, Evaluation, Formation
UNESCO : Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture UQÀM : Université du Québec à Montréal URCAM : Union nationale des caisses d’assurance maladie
URSSAF : Union des recouvrements des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales
US Chamber : United States Chamber of Commerce
V
Vol. : Volume
V.1 et V.2 : Volume 1 et volume 2
VIH : Virus de l’immunodéficience humaine
VIH/sida : Virus de l’immunodéficience humaine/Syndrome d’immunodéficience acquise
Virus HTLV-1 : Virus Human T-cell Lymphotropic Virus de type 1
W-X-Y-Z
SOMMAIRE
THÉÂTRE À L’HÔPITAL ET POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE – APPROCHES DE SCIENCES AUXILIAIRES __________________________________________________ 11 DU DROIT _______________________________________________________________ 11 INTRODUCTION : (Prologue) _______________________________________________ 13 PARTIE I - _______________________________________________________________ 49 LE THÉÂTRE, ACTEUR DE LA POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE ET PRIVÉE __ 49 TITRE I / (ACTE I) - _______________________________________________________ 51 LES ATELIERS DE SANTÉ DANS LE THÉÂTRE : _____________________________ 51 UN LANGAGE ARTISTIQUE ACCESSIBLE À TOUS ___________________________ 51 CHAPITRE I / SCÈNE I – __________________________________________________ 53 L’ENRACINEMENT DU THÉÂTRE DANS LA SANTÉ PUBLIQUE ET PRIVÉE ____ 53 CHAPITRE II / SCENE II – ________________________________________________ 137 L’INFORMATION ET L’ÉDUCATION DE SANTÉ ____________________________ 137 TITRE II / (ACTE II) – ____________________________________________________ 219 LE CORPS DANS LE THÉÂTRE MÉDICAL __________________________________ 219 CHAPITRE I / SCÈNE I – _________________________________________________ 221 LA MANIPULATION DU CORPS DU COMÉDIEN PAR LE MÉDECIN ___________ 221 CHAPITRE II / SCÈNE II – ________________________________________________ 337 LE CORPS S’EXPRIME DANS L’ART ET DANS LA MÉDECINE ________________ 337 PARTIE II - _____________________________________________________________ 433 JOUER AU SEIN DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ COMME DANS UN GRAND THÉÂTRE ______________________________________________________________ 433 TITRE I / (ACTE I) - ______________________________________________________ 435 DU THÉÂTRE À L’HÔPITAL PSYCHIATRIQUE ET EN ERGOTHÉRAPIE _______ 435 CHAPITRE I / SCÈNE I – _________________________________________________ 439 L’ART THÉÂTRAL POUR LES PATIENTS ATTEINTS D’UN PROBLÈME
PSYCHOLOGIQUE _______________________________________________________ 439 CHAPITRE II / SCÈNE II – ________________________________________________ 563 LA PRATIQUE DU THÉÂTRE CHEZ LE PROFESSIONNEL ERGOTHÉRAPEUTE 563 TITRE II / (ACTE II) - ____________________________________________________ 617 LE THÉÂTRE COMME PROJET DE SOCIALISATION DU PATIENT ____________ 617 CHAPITRE I / SCÈNE I – _________________________________________________ 619 JEU DE RÔLE : CRÉATION ET DÉVELOPPEMENT __________________________ 619 CHAPITRE II /SCÈNE II – ________________________________________________ 697 LA RÉALISATION DE L’ACTIVITÉ THÉÂTRALE DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ _________________________________________________________________ 697 CONCLUSION GÉNÉRALE _______________________________________________ 771
À ma femme Nassilati,
À mes filles Sitti-Yshat et Echata-Ahmed, À mes Parents, Frères et Sœurs,
REMERCIEMENT
Je souhaite remercier en premier lieu ma directrice de thèse, Béatrice BOURDELOIS, Agrégée des facultés de droit, Professeur à l’Université Le Havre Normandie, Ancienne Directrice du LexFEIM (Laboratoire d’études en droits fondamentaux, des échanges internationaux et de la mer) et membre du CERMUD (Centre de recherche sur les mutations sociales et les mutations du droit), pour m’avoir accueilli au sein de son équipe de recherche.
J’adresse encore avec cœur ouvert et plein d’énergie, de chaleureux remerciements à ma co-directrice de thèse, Catherine PUIGELIER, Professeur des Universités, Responsable pédagogique du Master 2 Recherche Droit médical et de la santé de l’Université Paris VIII-Paris-Lumière, Membre du Laboratoire de droit social de l’Université Panthéon-Assas (Paris II), pour son concours et son attention de tout instant sur l’ensemble de mes travaux, pour ses lumières et son génie pédagogique, pour son écoute, ses observations précises et détaillées mais aussi pour ses conseils avisés et qui ont été indispensables pour la bonne réussite de cette thèse. Sa disponibilité pour répondre aux mails et pour m’accorder des moments d’échanges, son énergie et sa confiance qu’elle m’a accordé, ont été tous des facteurs moteurs pour ma réussite. J’ai beaucoup appris à ses côtés et je lui adresse ma gratitude pour tout cela. C’est toujours un grand plaisir de travailler à ses côtés.
Être un doctorant, aux mains de ces deux grands Professeurs, est une chance à souhaiter aux miens et aux jeunes chercheurs souhaitant étudier un sujet très innovant comme celui-ci.
Je souhaite notamment remercier Odile TIMBART, bénévole du Centre d’Initiatives et de Services des Etudiants de Saint-Denis pour son soutien et son concours mais aussi parce qu’elle m’a beaucoup appris.
J’associe à ces remerciements les Laboratoires LexFEIM de l’Université du Havre, le CERMUD et le Laboratoire de droit social à l’Université Panthéon-Assas (Paris II).
Je tiens à remercier tous les membres des équipes hospitalières, les compagnies de théâtre ainsi qu’à leurs comédiens, les associations, les familles et les patients qui m’ont aidé et soutenu durant mes années d’études. J’avoue que nous avons partagé de bons moments tout au long de la thèse.
11
THÉÂTRE À L’HÔPITAL ET POLITIQUE DE SANTÉ
PUBLIQUE – APPROCHES DE SCIENCES AUXILIAIRES
13
INTRODUCTION : (Prologue)
À ce jour, aucune science et même le législateur n’ont établi de lien direct entre la santé, le droit et le théâtre ou précisé le rapport qui existe entre eux, bien que le théâtre reste convaincu qu’il y ait une collaboration possible. L’influence partagée entre ces trois disciplines pose question bien sûr, mais l’histoire témoignera de leur attachement.
Le monde littéraire prouve que le théâtre a souvent puisé aux sources de la santé et de la médecine pour partager ses informations. Par ailleurs, la santé à son tour n’a jamais cessé de faire appel au théâtre pour d’éventuelles progressions ou pour soutenir l’information, l’éducation et la communication en son propre domaine. La vie de la médecine elle-même est un théâtre où chaque acteur joue son propre personnage : ces deux disciplines – théâtre et médecine – restent de bons amis.
Le théâtre est un lieu de grande importance pour informer la population en matière de politique préventive, d’accompagnement et de resocialisation1
du patient. Il a à sa charge de communiquer directement avec les malades et les usagers de l’hôpital, mais il est aussi un acteur de grande importance en éducation sanitaire pour le malade et son entourage. La devise
« informer, éduquer et communiquer »2 est un atout du théâtre qu’il partage avec toutes les disciplines. Mais depuis longtemps la médecine profite de cette compétence chaque fois que le besoin se présente en collaboration avec les professionnels du théâtre.
Jadis, la santé était toujours un sujet noble et sensible. C’est pourquoi un bon nombre d’écrivains utilisent le jargon de la médecine pour intéresser le public dans son ensemble ou pour toucher une population particulière. Cela permet aussi aux différents auteurs et metteurs en scène de sélectionner leurs personnages en fonction d’un public bien précis pour véhiculer leur message.
Le théâtre s’intègre petit à petit dans les établissements de santé et sa place à l’hôpital évolue tout comme la médecine elle-même. Ainsi émerge la «Culture à l’Hôpital »3 et les patients en bénéficient sur des sujets qui touchent la culture et la santé. Mais, malheureusement, les manifestations de reconnaissance sont rares, comme l’a souligné Éliane Apert à l’ouverture d’un séminaire : « Pour ouvrir nos travaux, je voudrais d’abord souligner
que le thème de la culture à l’hôpital est séduisant, comme tous les sujets qui impliquent la culture, mais qu’il est aussi ingrat. »4 Celle-ci démontre alors la valeur de la « Culture à l’Hôpital » et quelle influence elle peut avoir sur la médecine : « Face au poids de la maladie, face à la représentation de la souffrance, du médecin et du soignant, l’action culturelle et artistique dans l’enceinte hospitalière paraît décalée ou anecdotique, alors qu’elles peuvent,
1
La resocialisation est l’ensemble des procédés qui ont pour but la réinsertion sociale ou bien même une réadaptation harmonieuse et progressive d’un malade mental. Cette notion est encore développée dans plusieurs écrits à l’exemple de l’article de Jean-Pierre BARANGER., « Intérêt de structures spécialisées pour la resocialisation des malades de longue durée », Actualités psychiatriques, A. 1988, vol. 18, n° 5, pp. 51-55 [bibl. : 4 ref.].
2
« Appliquée au domaine de la santé, l’IEC (information, éducation, communication) est une intervention d’ensemble visant à provoquer
chez des individus ciblés des changements de comportement ou d’attitude ou à les consolider, pour leur bien-être. Pour l’UNICEF, l’IEC est « le processus d’apprentissage par lequel des individus et des communautés adoptent volontairement et maintiennent des comportements bénéfiques à leur santé. » La réussite des programmes de santé dépendent du changement de comportement des populations. Pour atteindre ces objectifs, l’élément moteur est l’IEC, de ce fait il constitue l’une des composantes, sinon l’axe principal, de certains programmes de santé publique ». Mustapha BOUCHENTOUF, « Intérêts de l’IEC (Information, Education, Communication) dans la prévention des complications de la sclérose en plaque », https://www.memoireonline.com, consulté le 8 septembre 2019
3 Convention signée le 4 mai 1999 entre les ministères chargés de la Culture et de la Santé.
4 Éliane APERT, sous-directrice de la qualité et du fonctionnement des établissements de santé, ministère de la Santé et de la Protection
Sociale, « Culture et Hôpital ; des compétences, des projets de qualité », acte séminaire au ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées, des 30 et 31 mars 2004, p. 13.
14
comme nous le savons bien, contribuer à améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leurs proches et aussi celle des professionnels de la santé. En établissant un lien différent soignant/soigné, en prenant mieux en compte les besoins humains et les choix de la personne malade, la « Culture à l’Hôpital » s’inscrit pleinement dans le mouvement de reconnaissance du droit du patient. »5
Cette ouverture à la « Culture à l’Hôpital »6 constitue un droit du patient qui n’est pas uniquement une obligation ou une doléance à pourvoir, mais il est en fait, un droit à l’écoute et à l’attention. Or, la médecine expérimentale n’en a pas fait usage pendant longtemps et n’a pas été encouragée à la développer à l’hôpital dès ses origines. En France, ce droit était ignoré non seulement des professionnels de santé, mais aussi du système. La culture a forcé son entrée à l’insu de la politique nationale de santé française.
Cela a contraint les ministères chargés de la culture et de la santé à mettre en place un
« Programme national Culture à l’Hôpital »7 via une Convention signée le 4 mai 1999. Cette Convention a été soutenue par d’autres conventions régionales émanant de structures telles que les Directions régionales des affaires culturelles8 et les Agences régionales de l’hospitalisation. Ainsi s’est répandue, sur tout le territoire, une politique nationale commune de développement de la « Culture à l’Hôpital »9. Par ce dispositif, des partenariats se sont tissés au niveau national, mais aussi entre régions et jusqu’au plan local. Or il se trouve que le concept « hôpital » représente un grand univers institutionnel, égalitaire, géographique et culturel, médical, social et juridique.
Il serait important de développer ce droit de la culture pour montrer son importance au niveau social et de l’identité du patient, qu’il est inaliénable et imprescriptible à tout un chacun en suivant les principes : de ce qui ne peut pas être vendu ou hypothéqué, de ce qui ne peut pas être caduc et même de ce dont nul ne peut être privé. Le concept d’inaliénabilité qui prévoit en principe l’imprescriptibilité est bien évidemment utilisé en matière de droit de la personne humaine qui devient par la suite un droit constitutionnel, au sein de l’article 2 de la Déclaration de 1789 qui dispose que : « Le but de toute association politique est la
conservation des droits naturels et imprescriptibles à l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. »10
Il a été encore repris et élargi par le préambule de la Constitution de 1946 qui dit que : « Le peuple français proclame à nouveau
que tout être humain, sans distinction de race, de religion et de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. »11 Ce concept d’inaliénabilité lié à la personne humaine est clair et
5
Ibid., p. 13.
6
Convention signée le 4 mai 1999, op. cit.
7 La convention signée le 4 mai 1999 entre les ministères chargés de la Culture et de la Santé est un acte qui marque leur volonté commune
de défendre le développement d’activités culturelles et artistiques dans les établissements de soins. Elle marque l’annonce d’un Programme National « Culture à l’Hôpital » dont le but recherché est d’inciter tous les acteurs culturels et les directeurs des établissements de santé à prévoir ensemble une politique culturelle concernant chaque hôpital et adaptée à ses besoins et à celui des patients. Ils doivent faire appel au réseau culturel de proximité pour assurer un plan d’action et de mise en œuvre.
8 Les Directions régionales des affaires culturelles représentent le ministère de la Culture et de la Communication dans chaque région depuis
1977 et la loi du 6 février 1992 organise l’administration territoriale de la République et ses services déconcentrés dans les activités culturelles. Ces directions sont chargées de mettre en œuvre, sous la tutelle du préfet de région ou du département, la politique culturelle définie par l’État. Elles exercent en principe une fonction de conseil et d’expertise auprès des partenaires culturels et leurs domaines sont : le patrimoine, la danse, le théâtre, les musées, les archives, le livre, la lecture publique, la culture scientifique et technique, l es arts plastiques, le cinéma et l’audiovisuel, la musique et les spectacles, etc.
9 Convention signée le 4 mai 1999, op. cit.
10 Légifrance, « Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 », consulté le 27 février 2017. 11
15 défini sous plusieurs angles et développé dans l’ouvrage : « L’inaliénabilité des collections,
performances et limites ? »12.
La culture, par ses principes, a su modifier ou faire évoluer l’étude du corps humain dans les différentes établissements de santé, comme d’autres sciences. Cette vision a été encore une fois soulevée par Jean de Kervasdoué qui écrit que c’est à travers différentes sciences que l’hôpital fait l’objet de son évolution : « Cette organisation porte la marque de
notre époque, de ses exigences, de la science médicale, mais aussi de l’histoire. Depuis à peine plus d’un siècle, les découvertes scientifiques et leurs applications ont bouleversé la compréhension du corps humain et la pratique de la médecine. L’hôpital a accompagné cette évolution en gardant souvent les valeurs du passé pour ce qu’elles ont de meilleur, mais en ne réussissant pas toujours à se libérer d’archaïsmes pesants. »13
I] LES ÉCRITURES DU THÉÂTRE ET DE LA MÉDECINE.
À Athènes, il y a eu plusieurs critiques et différents courants idéologiques du théâtre selon la manière dont il est aperçu socialement. Les écritures des artistes spécialistes14 du théâtre antique ont sans doute influencé la politique des tragédies grecques, la politique de l’État, la politique de santé, mais aussi le regard social dans ses dimensions de liberté, d’égalité et de démocratie participative. C’est un aperçu général et beaucoup plus synthétique puisque leur rapport était incertain et mal vu par les politiques et par d’autres courants idéologiques de l’époque. Il y eut donc, des courants majeurs ou des pratiques savantes qui ont structuré cette problématique d’une manière peu critique et qui font face à l’évolution du théâtre tragique jusqu’à aujourd’hui. « Depuis les études très influentes de Louis Gernet et
Jean-Pierre Vernant, la tragédie grecque n’est plus considérée comme un genre littéraire, mais comme un spectacle qui nécessite d’être placé dans son contexte historique et culturel, les festivals civiques et religieux d’Athènes au Ve
siècle av. J.-C. Cet héritage de la pensée de Vernant a toutefois donné naissance à deux postures critiques opposées, que l’on pourrait résumer à gros traits de la manière suivante : d’un côté, une lecture historiciste de la tragédie, considérée comme émanation des structures idéologiques et des institutions athéniennes, et donc nécessairement politique. Ce mouvement est lui-même partagé en deux courants divergents : pour les uns, le théâtre tragique, contemporain et consubstantiel de la démocratie, participe à la construction de l’État en venant affermir ses fondements idéologiques. À l’opposé, et dans la droite ligne des écrits de Vernant, pour qui "la tragédie n’est pas le reflet de la réalité sociale", mais "la met en question", d’autres affirment que la fonction de la tragédie n’était ni de relayer ni de faire la propagande de l’idéologie civique d’athénienne, mais au contraire d’interroger et de mettre en crise le fonctionnement démocratique. »15
12 Marie CORNU, Jérôme FROMAGEAU, Jean-François POLI, Anne-Christine TAYLOR (sous la direction de), « L’inaliénabilité des collections, performances et limites ? », aux éditions L’Harmattan, 2012. Cet ouvrage explique d’une manière très explicite le terme
d’inaliénabilité et son évolution historique du droit et du patrimoine.
13
Jean DE KERVASDOUÉ, avec la collaboration de Stéphane BILLON ., « L’hôpital », Que sais-je ?, 1ère édition : 2004, quatrième édition mise à jour 12e mille, p. 5.
14 Catherine COURTET, Mireille BESSON, Françoise LAVOCAT et Alain VIALA (sous la direction de), « Corps en scène », éd. CNRS
Éditions, Paris, 2015, p. 176.
15
16 Des médecins et des scientifiques mettent leurs plumes au service de l’activité théâtrale pour valoriser davantage l’image donnée par les comédiens et d’autres hommes de l’art théâtral. La plupart d’entre eux essaient de tisser un lien très étroit entre le corps, l’esprit, et l’art dans leur imagination, leur capacité d’émouvoir, de donner du plaisir, du doute et de la douleur.
L’idée des spécialistes du théâtre de faire de la médecine une partie intégrante du théâtre dramatique, investit de près la renaissance de la compréhension de la société hellénique du spectaculaire qui donne naissance à l’alliance de la médecine traditionnelle et de l’art dramatique couramment appelé : « La tragédie ». Cette naissance affecte le système de l’hôpital dans sa façon d’exercer, mais aussi produit des effets considérables sur la tragédie comme à l’apogée de ses principes. « Lorsque l’auteur hippocratique compare les mauvais
médecins aux figurants que l’on fait paraître dans les tragédies, c’est moins pour assimiler le bon médecin à l’acteur, que pour condamner une usurpation des apparences et se livrer à l’éloge de tout nouveau professionnalisme : ces gens [les médecins charlatans] ressemblent beaucoup aux figurants qu’on fait paraître dans les tragédies. De même que les figurants ont l’apparence, l’habit et le masque d’acteurs, sans être acteurs, de même, parmi les médecins, beaucoup le sont par le titre, bien peu le sont par le fait. »16
Le médecin était toujours élu par le peuple. Il devait être capable de convaincre ses patients à partir d’une culture du discours plus soigné en efficacité de parole, mais aussi en assurance de ton qui étaient des valeurs beaucoup plus attendues que des soins qui étaient bien incertains. Jean-Marie Pradier montre encore que : « l’orateur Antiphon n’avait-il pas ouvert
boutique avec une enseigne où il avait inscrit qu’il était capable de traiter les chagrinés par les discours ? »17 Selon Platon, il voyait d’un mauvais œil ce mode de recrutement qui ne facilitait pas la profession médicale et qui mettait à l’écart les professionnels de l’art et de la médecine de leurs exercices. Jean-Marie Pradier affirme que : « Platon, dans le Gorgias,
s’attriste dans ce mode de recrutement qui avantageait les bavards impudents et séducteurs et laissait pour compte les artisans habiles, mais taciturnes. »18 Les maux sont enlevés par des guérisseurs bien appropriés tels que les médecins et les acteurs qui mettent ensemble la pratique de l’art dans la médecine au profit de leurs patients. « Médecins et acteurs sont bien
les gens qui lèvent les maux par le pouvoir de l’évocation. Les premiers ajoutent à la voix le geste qui soulage ; les seconds animent le texte par le mouvement qui émeut. »19
Pour ce qui est de la médecine hippocratique, elle s’est dotée de l’idée de s’éloigner de la magie et des pratiques purement rituelles pour mettre en place l’exploration rationnelle de la maladie. Elle a dû faire face à de nombreuses critiques et des théories explicatives sur le plan physique et organique. Elle s’est allouée une autre manière de concevoir la médecine et de définir les différentes causes des maladies. « L’idée d’une réalité composée d’éléments
primaires organisés selon des principes et des règles existant en soi, en dehors de tout caprice divin, a progressivement conduit les médecins à envisager les irrégularités physiologiques et mentales de l’homme comme la manifestation des anomalies d’un système interne imaginé après une réflexion sur les nombres, l’harmonie et leurs combinaisons, et la gestion. Un
16
Jean-Marie PRADIER, « La scène et la fabrique des corps : ethnoscénologie du spectacle vivant en Occident (Ve siècle av. J.-C.-XVIIIe siècle) », Presse Universitaire de Bordeaux, 2000, p. 80.
17 Ibid., p. 80. 18 Ibid., p. 80. 19
17
grand nombre de médecins, y compris parmi les inventeurs, se contentaient de considérer les causes de la maladie en termes d’excès ou de défaut à partir de deux coordonnées bipolaires : l’une constituait l’axe du sec et de l’humide, l’autre, celui du chaud et du froid. »20
Cela signifie tout simplement que certaines critiques de médecins avancent à partir de postulats21 tels que le chaud, le froid, l’humide, le sec qui continuent à être la cause originelle des maladies et de la mort des hommes. Cette nouvelle philosophie de la médecine a été clairement définie sous plusieurs angles et donne de nouvelles valeurs subtiles et d’autres substances que les traités théoriques et critiques intitulés l’Ancienne médecine22 ont mis en
place pour la nouvelle interprétation de l’art et de la médecine.
A] HISTORIQUE
L’histoire témoigne largement de la rencontre institutionnelle et du métissage de deux grands domaines : la médecine et la culture sont nées dans les hôpitaux grâce au passage par l’hôpital de grands hommes de la peinture, des romanciers et d’autres courants d’idées de la médecine qui sont découverts et qui laissent des traces qui révèlent le début d’une longue histoire qui est celle de l’art dans les milieux hospitaliers. Le terme médicalisation23
est souvent utilisé pour parler de l’évolution que connaît la pratique médicale dès le XIIIe siècle dans les pays méditerranéens. Les termes d’institutionnalisation24 et de professionnalisation25 de la médecine sont définis par Joseph Shatzmiller et Michael McVaugh pour désigner des aspects de la médecine qui sont à la fois théoriques et pratiques.
Tout cela a conduit à la création des facultés de médecine qui redonneront très rapidement un nouveau regard sur la médecine, la constitution d’un curriculum d’études et le renforcement, d’une manière stricte, du contrôle de l’accès à la profession par différentes instances ad hoc (administrations adéquates) et la mise en place des différentes formations de collège de praticiens. Les médecins et les autorités publiques soucieuses du système de santé publique conçoivent ensemble une transformation de l’hôpital pour un principe d’une grande utilité commune et qui permettra d’avoir un corps médical habilité à prendre en charge la santé des populations.
En faisant référence à l’histoire, l’hôpital doit être considéré comme une maison d’homme et pourtant, il est pertinemment resté bien longtemps un lieu à part du reste de la société ou un espace de grand renfermement pour ceux qui n’avaient pas droit de cité. « Les
affinités électives de la Culture et de la Santé ne sont (…) pas nouvelles, si l’on veut bien y songer : dans l’Antiquité, déjà, Apollon était à la fois le dieu des arts et le dieu guérisseur ! Et l’histoire de la médecine est traversée de recherches, de thérapies qui ne sont pas uniquement centrées sur la seule question organique, mais qui, plus largement, prennent en
20
Ibid.
21
Hippocrate NULL, « L’ancienne médecine », éd., Belles Lettres, Coll., Des Universités De France – Coll Budé, 1990.
22
L’Ancienne médecine ou De l’Ancienne médecine est un texte écrit par l’auteur grec Hippocrate qui est parfois assimilé comme une œuvre
propre d’Hippocrate. Ce livre divulgue d’une part, les idées d’Hippocrate et les débats afférents de l’époque, et d’autre part, les méthodes utilisées dans ces débats. Ce texte est rédigé contre les auteurs qui faisaient usage de la théorie des quatre éléments qui expliquait l’origine des maladies par : chaud, sec, froid et humide. Il contredit ce point de vue par deux notions telles que la médecine ne peut s’argumenter sur des hypothèses réservées aux choses non certaines. Selon lui, la médecine doit se justifier principalement sur des observations et des faits, appelés la réalité. La médecine doit au-delà faire référence à des raisonnements.
23 Marilyn NICOUD, « Formes et enjeux d’une médicalisation médiévale: réflexions sur les cités italiennes (XIIIe-XVe siècles) », Belin,
Genèses-Sciences sociales et histoire, 2011-1 n° 82, pages 7-30.
24 Ibid. 25
18
compte la dimension psychologique, spirituelle et culturelle du patient – au moyen, notamment, de la musique, du dessin, de l’écriture. Tel Proust découvrant avec émerveillement le fameux "théâtrophone" et son pouvoir de faire entrer les opéras de Wagner et de Debussy dans sa chambre de malade, le patient doit avoir la possibilité de transformer ce temps de la traversée de la maladie en un temps de réflexion sur soi et sur le monde. »26
C’était donc une manière de savoir-faire, pour faciliter l’accès à ce loisir à un public éloigné de la culture du fait d’un handicap ou d’une maladie, quel que soit sa nature ou son origine, la culture doit en principe rester accessible à tous sous toutes ses formes. Elle doit demeurer à chacun, non seulement dans son individualité et dans sa singularité, mais aussi dans son humanité, indispensable dans le processus de soins hospitaliers et dans le fondement de démocratisation culturelle. Par l’aspect respectif de l’hôpital en tant que lieu d’enseignement et de recherches, il est par la suite devenu ouvert à différentes figures d’arts et d’artistes pour faciliter leurs exercices au profit des malades.
Les arts et les hôpitaux s’embrassaient depuis le Moyen Âge et les pauvres étaient assistés aux XIIe et XIIIe siècles par des hôpitaux de la ville épiscopale. Les hôpitaux de charité entre le XIVe et le milieu du XVe siècle se trouvaient dans l’obligation d’accueillir les pauvres et les blessés de guerre, de surmonter les crises économiques et les famines ainsi que de faire face aux différentes épidémies ; leurs actions s’étalèrent largement aux populations miséreuses.
Cela a impliqué que des personnages laïcs et très fortunés construisissent des hôpitaux pour lutter contre ces temps pénibles. « L’Hôtel-Dieu27 de Beaune est un fleuron de l’architecture hospitalière, fondé en 1443 par Nicolas Rolin, chancelier de Philippe le Bon. »28 « La chartreuse de Champmol29 témoigne avec le puits de Moïse30 réalisé par Claus Sluter pour Philippe le Hardi et Marguerite de Flandres dans le cadre de la commande de cette Chartreuse de Germolles en 1378. »31 C’est l’une des sculptures rares qui date de la fin du XIVe siècle et qui relate la présence de l’art dans les établissements de santé. Il s’agit bien évidemment des vestiges d’un calvaire situé au centre d’un puits. Aujourd’hui, il se trouve au sein du parc du centre hospitalier spécialisé, un asile psychiatrique de Dijon. L’Allemand Erwin Panofsky (1892-1968), historien de l’art et essayiste, précisait que, dans les œuvres de Claus Sluter, il y a non seulement du Michel-Ange, mais aussi du Bernin. Au début du XXe
26
Frédéric MITTERRAND, ministre de la Culture et de la Communication, extrait de son Discours prononcé le 6 mai 2010 à l’occasion de la signature de la convention Culture et Santé avec Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la Santé et des Sports, revue de la société française d’Histoire des hôpitaux, numéro spécial 140, juin 2011, p. 5. Annexe numéro 1 : Discours du ministre.
27 Le Musée de l’Hôtel-Dieu sur l’ordre de classement est le 6e musée de France : « L’Hôtel-Dieu », brille par ses immenses façades
gothiques avec ses styles de toits vernissés, charpentés ou tapissés de figures géométriques et aux couleurs très éclatantes. Il fait partie du grand patrimoine des Hospices de Beaune à but charitable. Cet établissement a été construit en 1443 sous le patronage de Nicolas Rolin, chancelier du Duc de Bourgogne et de son épouse Guigone de Salins. Pour acheter leur salut, ils ont décidé par la suite de transformer l’établissement en un hospice pour les pauvres, et ce n’est que le 1er
janvier 1452 que l’hôpital accueillit son premier patient. L’hôpital a reçu des dons qui ont permis de développer et d’ouvrir de nouvelles salles, mais aussi d’acquérir des œuvres d’arts.
28 Alain VASSEUR, directeur artistique d’Itinéraires Singuliers, « Histoire de la Culture à l’hôpital », Service Communication Centre
Hospitalier la Chartreuse, décembre 2015, p. 1.
29
La chartreuse de la Sainte-Trinité de Champmol est un ancien monastère de l’ordre des Chartreux situé à Dijon, chef-lieu de la Bourgogne-Franche-Comté, et occupé par un centre hospitalier. Le début sa construction remonte en septembre 1378 par Philippe le Hardi au lieu -dit de Champmol à l’extérieur de la ville de Dijon. Il a clairement précisé dans son testament de 1386 qu’il sollicite d’y être inhumé dans le même style d’habit que les chartreux. C’est pour cette raison que les ducs du Bourgogne ont eu l’idée de faire venir différents artistes dans le but de réaliser des œuvres d’art telles que la peinture et la sculpture afin de décorer le couvent. Ce dernier est fermé et vendu au mois d’avril 1791 pendant la Révolution française. Le nouveau propriétaire a par la suite démoli l’église et les bâtiments n’ont pas été utilisés jusqu’en 1833. Le site est ensuite racheté par le même département de la Côte-d’Or pour le transformer en un asile psychiatrique. La plus grande partie des œuvres d’art qui étaient conservées sont éparpillées et en partie dispersées dans de nombreux musées du monde entier.
30 L’œuvre du sculpteur hollandais Claus Sluter et de son neveu Claus de Werve, en collaboration avec le peintre Jean Malouel pour la
polychromie, le puits de Moïse, était une commande de Philippe II de Bourgogne.
31
19 siècle, plus précisément en 1905, l’historien de l’art spécialiste du Moyen Âge, Arthur Kleinclausz, écrivait la première monographie sur Claus Sluter avec un lien très étroit de l’histoire sociale de l’art. Il affirme que c’était le lieu où logeait et travaillait Claus Sluter tout au long de la période où il était au service du duc. Il était chargé d’étudier tout à la fois les questions du rôle et de la place de l’artiste sous la période du XIVe
siècle et de s’interroger sur sa formation.
L’évolution du patrimoine hospitalier constitué d’apothicaireries (anciennes pharmatices), d’objets mobiliers, ainsi que d’archives et sa noble qualité architecturale, incite à croire que les hôpitaux présentèrent des espaces d’accueil tout à la fois pour les artiste et pour les créations d’œuvres. Au XVIIe siècle, la Révolte plongée dans la guerre de Trente Ans véhicula encore une fois des misères et des maladies non négligeables et les populations furent gravement touchées. Le pouvoir royal affecté par la peur des mendiants et des malades en 1662 publie une déclaration encourageant les grandes villes vers une politique de mise en place d’un hôpital général ayant pour but d’héberger les malades, les invalides, les pauvres, les orphelins et les mendiants et de mieux les contrôler. Au fur et à mesure, les hôpitaux se sont développés dans la seconde moitié de ce siècle par les bienfaits des initiatives privées. La culture s’introduisit encore plus au sein des hôpitaux et se développa plus largement dès 1634 avec l’apparition de la lecture à l’hôpital lancée sous le vocable « distraction des malades » qui, par la suite, ouvrit les portes aux bibliothécaires jusqu’en 1845 environ où apparaissent dans les établissements de santé, pour la première fois, des bibliothèques qui faciliteront la lecture aux patients, aux usagers ainsi qu’aux personnels médicaux et hospitaliers.
L’Hôpital de la Pitié à Paris appelle en 1934 pour la première fois un bibliothécaire qui marque le début de la lecture en établissement de santé, suivi par l’ouverture des bibliothèques aux différents centres médicaux universitaires.
« Dans les années 1800, l’hospitalisation du Marquis de Sade à la Maison de Charenton favorisa l’entrée du spectacle vivant en unité de soins et la pratique artistique des malades puisque ce personnage illustre mit en scène des représentations théâtrales "thérapeutiques" auxquelles le Tout-Paris était convié. D’ailleurs, en 1930, les pouvoirs publics préconisèrent la construction des salles de spectacles dans l’enceinte des hôpitaux pour distraire les malades en long séjour et en isolement (tuberculose…). »32
La valeur de l’artiste dans les hôpitaux est apparue « entre 1950 et 1960,
l’administration de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris introduisit la notion d’excellence artistique en rédigeant des circulaires adressées aux directeurs d’établissements insistant sur les critères de qualité et satisfaction des hospitalisés dans le choix des spectacles proposés aux malades et en fixant une politique tarifaire pour les spectacles et les séances cinématographiques. En 1959, la création du ministère de la Culture permit de mettre en évidence la notion de politique culturelle et de démocratisation. »33
Les années quatre-vingt marquent le symbole de l’émergence et de l’évolution d’actions socio-culturelles et culturelles justifiées par la présence des marques artistiques issues des multiples disciplines confondues. Ces artistes ont donc le courage d’améliorer le système des soins, ainsi cette recherche de qualité que la médecine expérimentale envisage comme nouveau procédé de savoir-faire et de sens et qui se développe petit à petit dans des
32 Ibid., p. 1. 33
20 services plus appropriés, comme la pédiatrie au profit des enfants et dans des hôpitaux psychiatriques.
La vision artistique à l’hôpital envers les malades ne s’arrête pas là, elle prend en compte les personnes âgées, les personnes handicapées ou les malades pour les aider à oublier leurs malheurs et leurs douleurs dans un temps bien précis. Certains travaux peuvent faire l’objet d’exemples de clarté en prenant en compte plusieurs aspects de valeurs telles que l’étude portant sur l’enseignement universitaire, la grande diversité ouverte dans les milieux médicaux, la place donnée aux femmes et aux charlatans sur les pratiques communales ainsi que dans les médecines rurales. Il est encore important de tenir compte de la méthode appliquée à la politique de prévention face aux épidémies, mais aussi à la transformation des hôpitaux dits établissements charitables hier en établissements de soins aujourd’hui. Pour Marylin Nicoud, « une autre dimension de cette médicalisation médiévale a peut-être été plus
négligée : ce qui touche notamment aux relations qu’entretiennent patients et médecins et qui conduit souvent les praticiens à mieux définir non seulement l’objet même de leur art, le champ de leurs compétences, l’éthique à suivre dans la pratique, mais aussi les rapports que leur discipline doit entretenir avec d’autres savoirs proches. »34
La place faite à l’étude continue et les grands spécialistes se voient confier des tâches lourdes pour le bien-être du patient. « En 1981, le Fonds d’intervention culturelle confia à
Geneviève Gallot une étude sur les pratiques artistiques et culturelles des personnes âgées, malades ou handicapées. Le rapport final proposa la création de structures associatives régionales pour faciliter la sensibilisation de ces publics à l’expression artistique par l’intervention des artistes professionnels dans les établissements de soins. De 1982 aux années 1995, les programmes « Culture à l’Hôpital », et « Handicap et Culture » (1982) commencèrent alors timidement à se décentraliser pour faire rentrer la culture subventionnée dans les lieux réputés d’exclusion : maisons de retraite, hôpitaux psychiatriques et de longs séjours… »35. L’hôpital de Montpellier comme ceux de Rouen, d’Aix, de Nanterre, de Dijon
et de Lyon sont tous retenus comme des hôpitaux de références et ils incarnent des expériences très diversifiées en spectacle vivant, mais aussi en peinture et en art plastique. Tous ceux-là ont la légitimité de la régénération à la « Culture à l’Hôpital. »36
La culture institutionnelle entre dans les hôpitaux officiellement en 1996 pour étendre l’offre culturelle à un public restreint dit « empêché », suite à une enquête menée par le ministère de la Culture et de la Communication au ministère de la Santé sur la question de la mise en place d’un « Programme Culture à l’Hôpital »37
. « Ces fréquentations d’abord
clandestines, les tâtonnements du début du XXe ont permis d’aboutir à une réelle volonté politique et interministérielle qui sont aujourd’hui devenus une véritable volonté d’humaniser l’hôpital et de redonner à l’art sa vraie nature : celle de rester accessible à tous. »38
L’hôpital prend une autre dimension et ouvre ses portes pour tous sans distinction de race, de religion et d’origine. Il est non seulement un lieu d’hébergements, de naissances, de guérisons mais aussi un lieu où la présence de la mort est toujours fréquente. « En ce début du XXIe siècle, en
34
Marilyn NICOUD., « Éthique et pratiques médicales aux derniers siècles du Moyen Âge », Médiévales, n° 46, Paris, PUV, printemps 2004, p. 5-10.
35 Alain VASSEUR, « Histoire de la Culture à l’hôpital », op. cit., p. 2. 36 Convention signée le 4 mai 1999, op. cit.
37 Op. cit. 38
21
France, l’hôpital soigne et prend en charge tous les malades. On y naît et on y meurt (ref : en 2006, selon l’INSEE (état civil) 70 % de Français sont morts dans une institution sanitaire ou médico-sociale), on y accueille 24 heures sur 24, et souvent gratuitement, toutes les détresses, toutes les maladies et les accidents, ceci sans discrimination d’origine, de sexe ou de fortune. »39 Cette institution applique bien entendu l’art-thérapie sous l’influence et le courage
des différents artistes avec différentes formes de bases telles que la lecture, le théâtre, la peinture, l’art plastique, la musique et la danse et autres. Dans ce travail de recherche, le théâtre ou le théâtre thérapeutique constitue l’axe principal de l’étude. Le théâtre représente pour le patient un élément ou un passage indispensable dans sa vie médicale. Pour Aristote, la tragédie emporte le spectateur ou le patient à l’hôpital comme l’acteur par le fait de la théorie de la catharsis, la délivrance qui se produit par la représentation artistique comme le théâtre dramatique ou comme dans certaines mélodies qui transportent l’âme hors d’elle-même. Molière par le biais de ses œuvres et ses représentations théâtrales reste l’inévitable, l’incontestable ou le repère du théâtre comique et scientifique qui parle de la médecine et de la maladie. D’une part, dans ses jeux de farces, le professionnel médical se sent touché et ciblé et, d’autre part, le patient se libère de ses émotions en oubliant ou en atténuant ses douleurs par l’accompagnement d’un plaisir.
1) Avant Molière (1622-1673)40
Les scientifiques de l’histoire de la médecine mettent en relief que le théâtre est la branche la plus ancienne de l’art-thérapie consacrée à l’étude de l’anatomie humaine, à l’étude des connaissances, à la pratique médicale et à la recherche chirurgicale de tous les temps. Ce qui a impliqué toutes les classes humaines à avoir recours à des croyances médicales nobles issues de la mythologie ou de la superstition pour donner des explications aux phénomènes naturels comme la naissance, la vie, la maladie et/ou la mort. La force du mythe dans le théâtre restait incontournable puisque la présence de la maladie ou la maladie elle-même a été attribuée d’une part, à la sorcellerie et aux démons et, d’autre part, aux influences astrales qui vont toutes à l’opposé de la volonté des dieux. Quelques traces de ces opinions demeurent encore une fois répandues sous la croyance en la guérison par la prière, mais le développement de la médecine scientifique et expérimentale du monde contemporain a éradiqué et rendu caduques certaines croyances très anciennes de la médecine.
Pour ce qui est du droit, ou plutôt de la loi, elle est toujours présente dans la médecine et elle a toujours laissé des marques de son passage dès l’Antiquité. La présence d’un recueil de plusieurs articles et normes contraignants appelé couramment le Code d’Hammurabi41
au
39 Jean DE KERVASDOUÉ, avec la collaboration de Stéphane BELLINI., op. cit., p. 5.
40 Jean-Baptiste Poquelin, connu sous le nom de Molière, baptisé le 15 janvier 1622 en l’église Saint-Eustache à Paris et mort le 17 février
1673 dans sa ville natale, là où il a passé sa vie professionnelle de dramaturge et de comédien français. Il a eu des critiqu es, mais aussi des éloges, reconnu comme étant le meilleur acteur et auteur comique du royaume. Après sa mort, une autre image est associée à so n personnage comme l'un des génies les plus réputés de l’histoire de la littérature universelle, mais aussi le référant du théâtre dans la médecine. Pendant treize ans, il a fait le tour des provinces méridionales du royaume avec d’autres comédiens, en s’imposant comme les meilleurs acteurs tragiques. Il se met à écrire des pièces, des farces et des comédies dans le goût purement italien. Une fois de retour à Paris en 1658, il a pris la direction de la « Troupe de Monsieur », et en 1665 cette troupe devient « Troupe du Roy ». Après avoir mis en scène plusieurs pièces touchant au domaine de la médecine, il décède à l’âge de cinquante et un ans. Il est resté le symbole de l’art théâtral non seulement en France, mais aussi dans le monde entier. Pour exemple le français est fréquemment désigné comme la langue de Molière tout comme l’anglais, la langue de Shakespeare.
41 Le Code de Hammurabi est un texte juridique babylonien daté d’environ 1750 av. J.-C. Il rassemble les différentes normes et il est le plus
ancien à ce jour et le plus complet des codes de lois connus de la Mésopotamie antique. Ce n’est qu’en 1901 à 1902 qu’il a ét é découvert en Iran et à Suse. Ces normes sont gravées sur une stèle (tableau) de 2,25 mètres de hauteur et la grande partie des textes est en écriture
22 XVIIIe siècle av. J.-C. témoigne des premières traces écrites en droit ayant un lien très étroit avec la médecine. Ce Code découlait des normes réglementant la profession médicale, particulièrement ses horaires de travail ainsi que différents risques que les médecins encouraient en cas de faute professionnelle.
Quant à la période de l’Antiquité, il serait noble de parler de la construction de la bibliothèque médicale d’Assurbanipal42
au VIIe siècle av. J.-C., marquant en soi le début de la formation médicale. Elle avait comme idée principale de dissocier la médecine et la magie dans un même aspect professionnel. La plus grande majorité des savants de l’Antiquité grecque sont des promoteurs de la médecine occidentale à l’exemple de certains précurseurs : Pythagore, Thalès de Milet, et Empédocle d’Agrigente qui sont bien sûr connus dans ce monde contemporain par leurs écrits en philosophie ou en mathématiques, mais qui étaient tout de même de grands médecins connus, d’une réputation incontestable. Il y a aussi le premier savant grec célèbre de la médecine, Hippocrate, connu par ses œuvres et ses recherches en la matière au Ve siècle av. J.-C. Il a encore traditionnellement marqué ses traces par le serment d’Hippocrate43
dont il est l’auteur et qui porte son nom. Ce texte a une valeur juridique puisque chaque médecin doit, avant d’exercer ses fonctions, faire le serment de respecter ses engagements. Il a également fait partie du programme d’étude de médecine jusqu’au XVIIe
.
L’anatomie humaine qui lie le théâtre, la santé et le droit est un élément fondamental de l’étude théâtrale et indispensable aux enseignements de la médecine, mais aussi elle fait l’objet principal à l’étude de droit. Les enseignements produits en matière d’anatomie humaine à l’école d’Alexandrie44
en 320 av. J.-C. sont malheureusement abandonnés pendant
longtemps par des médecins qui ont préféré utiliser des enseignements d’Aristote qui se basent sur les extrapolations d’études des animaux, au détriment de l’anatomie humaine. Claude Galien45, au IIe siècle, a repris la théorie des quatre éléments avancés par Hippocrate dans différents manuscrits qui firent une grande autorité jusqu’à la Renaissance, mais la rationalise avec des organes producteurs. Certaines normes et quelques définitions des maladies et des blessures sont définies dans le papyrus Edwin Smith46 qui contient des
cunéiforme, mais aussi en langue akkadienne. Ce Code est exposé de nos jours au Musée du Louvre à Paris. Ce Code présente plus qu’une valeur juridique, il contient une inscription royale glorifiant le souverain Hammurabi dont la période de règne sur Babylone s’étend de 1792 à 750 av. J.-C. Une grande partie de ce texte est constituée d’un bon nombre de décisions de justice. Dans cet arsenal se trouvent des normes d’organisations et des pratiques judiciaires, des droits de la famille et de la propriété, des statuts sociaux ainsi que des activités économiques.
42 La Bibliothèque royale d’Assurbanipal couramment appelée par le nom du dernier grand roi d’Assyrie antique qui l’a construite,
Assurbanipal (668- 627), présente une collection de vingt-cinq mille tablettes d’argile et aussi de fragments portant des textes du VIIe siècle av. J.-C., qui pour la plupart d’entre eux sont rédigés en akkadien cunéiforme. Ces textes présentent une valeur considérable pour les textes fondateurs de la civilisation mésopotamienne.
43 Annexe numéro 2 : serment d’Hippocrate 44
Cette ville a été fondée par Alexandre le Grand en 331 av. J.-C. Alexandrie est une des grandes villes d’Égypte, elle comptait environ 4 300 000 d’habitants en 2010. Elle était la capitale du pays, un des plus grands centres du commerce, mais aussi le foyer culturel hellénistique de la mer Méditerranée par la présence de son immense bibliothèque.
45 Galien est un médecin grec de l’Antiquité, né à Pergame en Asie Mineure (129-216), qui exerça la médecine dans sa ville natale et à
Rome où il soigna plusieurs empereurs de son époque. Il fut un des grands auteurs prolifiques et géniaux, il était un personnage exceptionnel influencé par sa passion de la science et de la recherche des réalités médicales. Son domaine de recherche était basé à la fois sur la raison et l’expérience, mais aussi sur des explications sur toutes sortes de formes d’art médical. Selon l’histoire, il est considéré non seulement comme un grand médecin créateur parmi d’autres de l’Antiquité gréco-romaine. Avec Hippocrate, il est considéré comme l’un des fondateurs de la médecine européenne. Sa grande théorie médicale a dominé la médecine en général jusqu’au XVIIIe siècle. Ce n’est que le développement de
la théorie expérimentale qui installa une base solide du système cardiovasculaire, respiratoire et digestif, mais aussi du sy stème nerveux. Sa base était la théorie des quatre éléments représentés symboliquement dans la tradition alchimique : la Terre a comme symbole : ; l’eau est représentée par : et l’air par : ; et pour finir le feu est symbolisé par : . En partant de cette base, chaque substance est constituée d’un ou de plusieurs de ces éléments en plus ou moins grande quantité. Cela justifie la présence de certaines matières volatiles, chaudes, froides et humides ou sèches.
46 Le Papyrus d’Edwin Smith a été acheté à Thèbes en 1862 par un revendeur, le grand collectionneur Edwin Smith, puis traduit et publié par