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L’utilisation du flow dans les activités ludiques en soins de suite et de réadaptation adulte

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Academic year: 2021

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L’utilisation du flow dans les activités ludiques en

soins de suite et de réadaptation adulte.

Sous la direction de : Guérin Bénédicte et Fabrizio Isabelle

Diplôme d’état d’ergothérapie

UE 6.5 S6 : Mémoire d’initiation à la recherche

17/05/2017 Camille GUENIOT MORIZOT

D’Aix-Marseille

Faculté d’Aix-Marseille

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SOMMAIRE

1. Introduction 1

1.1. Contexte et thème général 1

1.2. Utilité sociale et intérêt et enjeux pour la pratique professionnelle 2

1.3. Questions de départ 2 1.4. Problématique pratique 3 1.4.1.Recherche documentaire 3 1.4.2.Enquête exploratoire 11 1.5. Cadre théorique 15 1.5.1.L’attitude ludique 16

1.5.2.La théorie du flow 21

2. Matériel et méthode 28

3. Résultats 32

3.1. Caractéristiques de l’activité ludique choisie 32

3.2. Caractéristiques de l’expérience optimale 34

3.3. Effets de l’expérience optimale 36

3.4. Base conceptuelle 39

3.5. Rôle de l’ergothérapeute 39

1.1.1.Choix du jeu 40

1.1.2.Avant le temps de jeu 42

1.1.3.Pendant le jeu 43

1.1.4.Au fil des séances 44

4. Discussion 45

4.1. Caractéristiques de l’activité ludique choisie 45

4.2. Caractéristiques de l’expérience optimale 46

4.3. Effets de l’expérience optimale 48

4.4. Propositions pour la pratique professionnelle 49

4.5. Critique du dispositif de recherche et limite des résultats 50

4.6. Perspectives 52

Bibliographie 53

Annexes 55

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1. Introduction

1.1. Contexte et thème général

Avant de reprendre des études pour obtenir le diplôme d’ergothérapeute, j’ai eu l’occasion de travailler avec des enfants en tant que professeur des écoles et animatrice. Au cours de ces expériences, j’ai utilisé le jeu à de nombreuses reprises, que ce soit pour le plaisir et la distraction des enfants ou pour soutenir des apprentissages. J’ai remarqué que le jeu motive l’enfant et que la notion d’effort disparait ; le jeu les amène à se dépasser.

Etant moi-même joueuse, je suis persuadée que le jeu peut avoir les mêmes effets chez certains adultes. J’ai pu expérimenter le fait d’être plongée dans un jeu, très concentrée et utilisant pleinement mes capacités.

Au cours de mes stages en soins de suite et réadaptation (SSR), j’ai pu observer que les jeux sont présents dans de nombreuses salles d’ergothérapie. J’y ai trouvé des jeux d’adresses (« Jenga », « Doigts malins », « Mikado »…), des jeux d’observation (« Lynx », « Dooble », puzzles…), des jeux de logique (« Chocolate fix », « Tipover », « Logix »…), des jeux de stratégie (« Puissance 4 », solitaire, « Rush hour »…), et des jeux de construction (« Mécano », « Légo », « Architecto »…). Il s’agit parfois de jeux créés spécialement pour la rééducation, mais le plus souvent de jeux du commerce, destinés au grand public. J’ai remarqué que ces jeux ne sont que rarement utilisés pour « jouer » lors de prises en charge de patients adultes. Leur potentiel ludique est souvent négligé, et ils ne sont parfois utilisés que comme un outil à manipuler pour répéter un mouvement.

Cette situation m’a interpellée, car il me semblait que jouer peut être une façon d’augmenter l’engagement dans l’activité de rééducation. Je me suis donc questionnée sur les raisons de cet usage limité des jeux avec des adultes. Le jeu est il une activité qui n’a pas de sens pour l’adulte ? Est-il perçu comme infantilisant par les patients ? Le jeu n’a t’il aucun intérêt thérapeutique?

Ayant observé l’effet positif de l’approche ludique auprès d’enfants, j’ai voulu comprendre pourquoi il était peu utilisé en rééducation adulte, et comment s’en servir dans sa pratique professionnelle. J’ai donc décidé de travailler sur l’utilisation du jeu avec les adultes en rééducation fonctionnelle.

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1.2. Utilité sociale et intérêt et enjeux pour la pratique professionnelle

Selon l’ANFE, en 2012, 18% des ergothérapeutes exerçaient en établissement de rééducation. En 2008, le nombre d’entrées en SSR (hospitalisation complète) s’est rapproché du million. Le nombre de venues (hospitalisation partielle), lui, a dépassé la barre des 2 millions, selon les chiffres de la confédération des soins de suite et de réadaptation. La pratique de l’ergothérapie en SSR est donc un thème qui touche une population importante, et une grande partie des ergothérapeutes.

Ce sujet me semble d’utilité professionnelle, car le jeu est un outil déjà présent sur le terrain. Lors de mon enquête exploratoire, qui sera détaillée plus loin, j’ai interrogé les ergothérapeutes de trois établissements de soins de suite et de réadaptation. L’ensemble des services d’ergothérapie possédait des jeux, de vingt à plus de cinquante.

Comprendre si le jeu est un média pertinent chez l’adulte permet de savoir si on peut l’ajouter au panel des médias utilisables. L’ergothérapeute doit utiliser tous les champs d’actions possibles, et il serait dommage de se priver d’un média s’il peut être intéressant pour l’adulte.

1.3. Questions de départ

En réfléchissant autour de ce thème général, plusieurs questions sont apparues.

 Alors que les jeux sont présents dans la plupart des salles d’ergothérapie, pourquoi, ne sont ils souvent utilisés que comme supports matériels?

 Le jeu est il une activité signifiante et significative pour l’adulte ?  Quel est l’intérêt thérapeutique du jeu?

 Comment le jeu est il perçu par les patients ? Par les professionnels ?  Comment le jeu est il utilisé par les professionnels ?

Nous avons donc défini une question de départ permettant de prendre en compte ces interrogations.

En quoi est-il pertinent d’utiliser le jeu comme média pour la rééducation

fonctionnelle chez l’adulte ?

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1.4. Problématique pratique

Nous allons ici faire un état des lieux des recherches et des pratiques professionnelles sur l’utilisation du jeu en ergothérapie dans un service de soins de suite et de réadaptation adulte. Nous avons réalisé une recherche documentaire dans la littérature publiée sur le jeu. Dans une première partie, nous nous sommes attelés à définir ce qu’est le jeu. Pour cela, nous nous sommes intéressés à l’apparition du jeu et à l’évolution de sa place au cours de l’histoire. Nous avons synthétisé les définitions des différents auteurs, puis, nous avons listé les différentes théories proposées pour expliquer pourquoi l’Homme joue. La deuxième partie aborde la place du jeu en ergothérapie. Après un petit détour historique pour expliquer l’apparition du jeu en pédiatrie, nous avons abordé rapidement le modèle ludique de Francine Ferland. Pour recenser les différentes possibilités d’utilisation du jeu, nous nous sommes appuyés sur l’analyse d’une activité de jeu. Nous nous sommes ensuite focalisés sur l’utilisation du jeu pour les apprentissages. Enfin, nous avons abordé le cas particulier des jeux numériques.

La recherche documentaire ne nous ayant pas permit d’obtenir des résultats satisfaisants sur les pratiques de terrain, nous avons réalisé une enquête exploratoire. Nous avons interrogé des ergothérapeutes sur les jeux présents dans leur service, l’utilisation qui en est fait, et l’image qu’ils ont du jeu. En parallèle, nous avons questionné des patients sur leur expérience du jeu pendant leur rééducation, et sur leurs ressentis.

1.4.1. Recherche documentaire

 D’où vient le jeu ?

Jean Piaget, dans « l’hygiène mentale des enfants et des adolescents », rapporte les observations de Karl Groos sur le jeu des animaux [1]. Il explique que les petits des animaux supérieurs jouent en exerçant les activités qu’ils poursuivront plus tard sérieusement (attraper des proies, sauter, mordiller…). Le jeu est donc présent chez les animaux comme chez les hommes : « Le jeu est plus ancien que la culture ». Par cette phrase qui introduit son propos, Johan Huizinga exprime dans son essai « Homo ludens » que le jeu était présent avant même l’existence d’une société humaine.

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Dans les sociétés antiques, le jouet a une grande valeur symbolique et se rapproche beaucoup de l’objet religieux : on le retrouve dans les sanctuaires. De nombreux jeux de l’antiquité sont encore présents aujourd’hui, on retrouve en autres des poupées, des dinettes, des toupies, des osselets et des objets à trainer [2]. Des jeux de société, proches du jeu de l’oie ont été retrouvés en Egypte, datant de plus de 3000 ans avant notre ère.

Au début de la renaissance, apparaissent les premiers jeux fabriqués à grande échelle : les soldats d’étain. A partir de XIX siècle, avec la révolution industrielle, le jouet est fabriqué en usine et son prix baisse. Mais le jouet reste un objet fragile et précieux, réservé aux enfants des villes et de la bourgeoisie [2].

Dans les années 1950, l’utilisation du plastique permet de réaliser des jouets à bas prix. L’étude de la psychologie de l’enfant se développe, et les jeux éducatifs apparaissent.

Enfin, au XXème siècle, on découvre les possibilités des nouvelles technologies et du jeu vidéo [2]. Selon l’Agence française pour le jeu vidéo (AFJV), 16 millions de français jouaient quotidiennement sur leur mobile en 2016.

Le jeu est ancré dans notre civilisation, c’est donc une activité significative, c'est-à-dire une activité qui a un sens pour la société. Or, pour l’ergothérapeute, l’engagement dans des activités importantes pour la personne (c'est-à-dire signifiantes) mais aussi aux yeux de la société (c'est-à-dire significatives), permet de développer ses capacités et de donner un sens à ce que l’on fait [3].

 Peut-on définir le jeu ?

On trouve de nombreuses définitions du jeu, nous allons en présenter ici quelques unes. Johan Huizinga dans son ouvrage Homo Ludens [4] propose une définition large, dans laquelle il veut englober toutes les formes de jeu, chez l’animal, l’enfant ou l’adulte. « Le jeu est une action ou une activité volontaire, accomplie dans certaines limites fixées de temps et de lieu, suivant une règle librement consentie mais complètement impérieuse, pourvue d’une fin en soi, accompagnée d’un sentiment de tension et de joie, et d’une conscience d’être autrement que la vie courante ».

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Roger Caillois [5] se base sur cette définition et considère que le jeu est une activité libre (pas d’obligation de participer), se distinguant des autres activités humaines (limite de temps et de lieu), incertaine (le résultat n’est pas connu), non productive (différente du travail), encadrée par des règles et fictive (pas de la vie courante).

Il classe les jeux en quatre catégories :

 Les jeux avec une relation de concurrence (jeux de compétition) ou « agon »

 Les jeux de hasard ou « alea »

 Les jeux d’imitation et les jeux de rôle ou « mimique »

 Les jeux de vertige (saut, vitesse) ou « ilinx »

Il distingue aussi les concepts de Paida et de Ludus, qui exposent la liberté du jeu et le goût de la difficulté gratuite.

Pour Francine Ferland « le jeu est une attitude subjective où plaisir, curiosité, sens de l’humour et spontanéité se côtoient, qui se traduit par une conduite choisie librement et pour laquelle aucun rendement spécifique n’est attendu » [3].

Nous finirons avec la définition de Ludovic Gaussot qui s’appuie sur les écrits de ses différents prédécesseurs. « L’activité ludique […] peut être conçue comme une réalité seconde (Caillois, 1967) ou une activité de second degré (Brougère, 1997), une situation fictive dans le sens de « ceci est un jeu » (Bateson, 1955), qui suspend, neutralise momentanément l’espace-temps ordinaire, ouvrant une aire intermédiaire (Winnicott, 1975), un espace d’expériences (Bruner, 1983) permettant une exploration et une expérimentation libre et réglée, frivole (les conséquences ne sont pas « pour de vrai ») et sérieuse (on joue néanmoins « pour de bon ») des dimensions du jeu social. »

Le jeu est donc une activité libre (que l’on choisit) et non productive. Il place le joueur dans une situation fictive, régie par des règles. Enfin, il procure du plaisir.

 Pourquoi joue t’on ?

Différentes théories ont été avancées pour tenter d’expliquer le rôle du jeu [6]:

 La théorie rudimentaire de G. S. Hall : le jeu est une nécessité biologique qui permet le développement organique.

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 La théorie idéaliste de F. Schiller : le jeu est une forme d’expression de la liberté.

 La théorie éducative de K. Groos : le jeu prépare l’enfant à la vie adulte.

 La théorie fonctionnelle de K. Bühler : le jeu permet l’exploration des nouvelles facultés qui apparaissent chez l’enfant.

 La théorie cathartique de H. Spencer : le jeu permet de décharger un surplus d’énergie.

 La théorie préventive d’E. D. Chapple et C. S. Coon : le jeu permet l’expression des tensions et conflits, et évite l’apparition d’hostilités.

 La théorie régénératrice d’A. L. Kroeber : le jeu permet de restaurer son niveau d’énergie.

 La théorie auto suggestive de K. Von Lange : le jeu sert à se tromper soi-même.

 La théorie psychanalytique de Freud : le jeu permet de remplacer des éléments par d’autres éléments symboliques.

Il existe de nombreuses théories pour expliquer le rôle du jeu. Aucune ne fait consensus, mais toutes se rejoignent pour affirmer l’utilité du jeu chez l’Homme.

 Quelle est la place du jeu dans notre société ?

« Dans notre conscience, l’idée du jeu s’oppose à celle du sérieux ». Par cette phrase tirée de son livre Homo Ludens, Huizinga exprime que pour la plupart des gens le jeu est une activité puérile. En effet, le jeu peut être vu sous deux angles opposés :

- Le jeu considéré comme du temps perdu, par opposition au sérieux de la vie réelle et du travail.

- Le jeu comme activité sociale, interactive et nécessaire au développement de l’enfant [7]

Cependant, comme l’affirme Jérome Legrix-Pagès dans un écrit sur la ludification de notre société [8], les représentations du jeu ont beaucoup changé au cours de l’histoire. Il rapporte que le jeu est aujourd’hui introduit dans de nombreux aspect de la société. On le retrouve par exemple dans les milieux pédagogiques à travers « l’apprendre autrement », ou en politique où l’on observe une mise en scène des débats et l’utilisation de vocabulaire emprunté aux jeux (victoire, défaite, joker…). Il apparait aussi dans la formation professionnelle (jeux de rôles),

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dans l’architecture (formes ludiques), la culture (expérimentation dans les musées), le sport (accent sur le plaisir et non sur la compétition) et la sexualité (démocratisation de sextoys).

Le jeu semble prendre une place de plus en plus importante dans la société. Il semble donc naturel de l’utiliser en rééducation.

 Le jeu en ergothérapie

Dans son ouvrage « le modèle ludique », Francine Ferland propose un historique du jeu en ergothérapie. Elle rapporte que le jeu est utilisé dans les années 40 pour assurer le bien être psychologique de l’enfant, en lui permettant d’occuper son temps et d’exprimer ses sentiments. Dans les années 50, l’activité de jeu est analysée, les ergothérapeutes s’intéressent aux mouvements sollicités et aux préhensions utilisées. Le jeu n’est plus utilisé dans sa globalité, on parle d’activité de jeu ayant un intérêt thérapeutique. Des évaluations du jeu de l’enfant sont créées dans les années 60 et 70, et de nouvelles approches voient le jour (intégration sensorielle, approche neuro-développementale…). Dans les années 90, le jeu devient un cadre de référence de l’ergothérapie en pédiatrie, c’est à la fois un moyen thérapeutique et un but à atteindre.

Lorsque l’on évoque le jeu en ergothérapie, il parait indispensable de se pencher sur le modèle que Francine Ferland lui a consacré, le modèle ludique.

Le modèle ludique a été créé pour la prise en charge d’enfants ayant une déficience physique. Elle évoque néanmoins une utilisation possible avec des enfants présentant d’autres déficiences, ou auprès d’adultes ou de personnes âgées, après adaptations. Elle présente plusieurs principes à respecter [9] :

- c’est le patient qui choisit le jeu qui l’intéresse.

- le thérapeute analyse l’activité choisie pour déterminer son potentiel thérapeutique. - le thérapeute manifeste une attitude ludique et il donne au patient les moyens d’agir. - la thérapie favorise le processus de décision et de choix.

Francine Ferland définit la situation de jeu par l’attitude ludique (plaisir, curiosité, sens de l'humour, et spontanéité), la capacité d’agir (accomplir l’activité, l’adapter à ses possibilités et

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réagir devant l’impossibilité de l’accomplir) et par l’intérêt pour le jeu (désir et plaisir de faire) [9].

Pour utiliser le jeu avec tout son potentiel ludique en ergothérapie, il faudra veiller à la présence de ses trois paramètres : le patient doit avoir une attitude ludique, il doit avoir envie de jouer et le jeu doit être adapté à ses capacités.

 Pourquoi utiliser le jeu ?

Un article proposant l’utilisation d’un jeu de plateau pour évaluer le développement des habilités des patients, cite les compétences sollicitées lors du jeu [10].

En premier lieu, les habilités motrices sont utilisées, notamment pour le maintien du contrôle postural, les mouvements de l’épaule, du coude du poignet et de la main, mais aussi pour le contrôle des muscles oculomoteurs. Les habilités sensorielles, avec la sensibilité kinesthésique et proprioceptive du bras et la sensibilité tactile des doigts sont aussi nécessaires. Les habilités de perceptions permettent d’évaluer les profondeurs, les relations spatiales etc., afin de planifier la séquence motrice adéquate). Le jeu nécessite également que la personne soit concentrée, et capable de suivre un raisonnement ou de résoudre un problème. Elle doit aussi prendre des décisions, organiser et planifier ses actions, les habilités cognitives sont alors fortement sollicitées. Enfin, accepter de perdre, et contrôler ses impulsions demande de bonnes habilités émotionnelles. A cela se rajoutent des habilités sociales, si le jeu se joue à plusieurs.

En plus de permettre le réentrainement d’un grand panel d’habilités, le jeu est intéressant car il est facilement graduable et peut donc facilement s’adapter aux capacités de la personne. Les auteurs proposent par exemple de jouer sur l’installation du jeu par le patient ou par le thérapeute, la taille des pions et leur matière, l’utilisation d’une main ou des deux mains, la complexification des règles, l’environnement (distractions, indices) ou encore la pression du temps.

Le jeu semble donc être un support intéressant, il permet de travailler des fonctions variées et est facilement ajustable aux progrès du patient.

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 Jeu et apprentissage

De nombreuses études ont porté sur l’apprentissage par les jeux. Pour rédiger cette partie, nous nous appuierons sur une synthèse de publication, présentant les résultats de 193 écrits traitant des impacts du jeu sur l’apprentissage [11].

Le jeu met en place une rétroaction, favorise l’interaction et la participation active des joueurs. Il permet d’aborder la résolution de problème dans un environnement amusant et une atmosphère détendue. Le jeu facilite aussi l’entrée en relation avec les autres et la collaboration, ainsi que le partage des ressentis. Il permet ainsi de perfectionner les capacités de négociation, et de discussion. Il favorise la motivation en mettant les participants face à un défi, une compétition, créant un effet d’entrainement. Les joueurs apprennent avec plaisir, dans l’excitation et l’enthousiasme. Le fait de gagner des points entraine chez certains une valorisation avec amélioration de l’estime et de la confiance en soi.

Cette activité permet la structuration des connaissances en encourageant la construction de schémas, le lien entre les différents apprentissages et l’assimilation de nouveaux concepts. L’intégration des connaissances est également facilitée. En effet, les liens entre les connaissances abstraites et concrètes sont plus aisés, ainsi que le stockage de l’information à long terme. Enfin, la résolution de problèmes est favorisée car le jeu stimule le développement de stratégie et de la logique, améliore les capacités à prendre des décisions et a poser des hypothèses, et exerce la pensée critique.

L’efficacité du jeu comme moyen d’apprentissage dépend de différents facteurs :

 Le type de jeu : les règles doivent êtres simples et claires, le jeu doit proposer une rétroaction et des interactions, et enfin être motivant.

 Les caractéristiques du joueur : niveau scolaire et profil d’apprentissage

 La façon dont le jeu est présenté, l’attitude du thérapeute pendant le jeu, et son retour après le jeu.

Le jeu a donc un impact positif sur les apprentissages, s’il est bien choisi, correctement mis en place, et adapté au participant. Il semble donc intéressant d’utiliser le média jeu pour la rééducation cognitive (résolution de problèmes, intégration et structuration de connaissances), ainsi que pour travailler certaines facultés de communication.

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 Les jeux numériques

Pour certains, le jeu numérique permet de capter plus facilement l’attention, en particulier des plus jeunes qui ont baigné dans ce média. De plus, il augmente la motivation grâce à un rythme soutenu et une rétroaction immédiate.

Il existe aujourd’hui de nombreux jeux numériques créés spécifiquement pour la rééducation. On en retrouve dans différents domaines dont :

- La rééducation du membre supérieur des patients souffrant de troubles neurologiques (Arméo, Voracy Fish…)

- La lutte contre la maladie d’Alzheimer avec le jeu X Torp qui propose de participer à une grande bataille navale. Au cours des missions, le joueur travaille la coordination, l’équilibre, l’orientation spatiale, la prise de décision, l’organisation… Il stimule ainsi les capacités cognitives, favorise l’activité physique et participe au maintien des interactions sociales.

- La lutte contre les troubles de la marche et de l’équilibre dans la maladie de parkinson grâce à Toap Run. Le joueur incarne un petit animal qui doit récolter des items tout en évitant des obstacles.

- La thérapie pour traiter des phobies, des addictions. Le joueur est plongé dans un monde de réalité virtuelle dans laquelle il devra affronter par étapes l’objet de sa peur, ou être confronté aux tentations par rapport à son addiction.

Dans un article présentant un nouveau jeu de réhabilitation sur ordinateur à l’intention des traumatisés crânien, les concepteurs exposent les avantages de ce mode de travail [12]. Ils proposent un outil simple et intuitif, permettant de créer facilement des niveaux de jeu adaptés pour chaque patient. La plate forme web, permet de visualiser les progrès du joueur en rendant possible un suivi précis de l’activité et des résultats des patients, même après leur sortie. Ces jeux augmentent la motivation des patients grâce à une réhabilitation personnalisée, et réduisent les coûts de la prise en charge. Pour une efficacité optimale, il est néanmoins nécessaire qu’une partie de la prise en charge se fasse avec le thérapeute.

Les jeux numérique captent rapidement l’attention et peuvent être personnalisables, ils sont aujourd’hui de plus en plus présents en rééducation.

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1.4.2. Enquête exploratoire

Face à l’absence de ressources scientifiques concernant le jeu chez l’adulte en ergothérapie, nous avons mis en place une enquête exploratoire pour interroger les pratiques professionnelles.

Cette enquête à été réalisé sous forme de questionnaires [Annexe 1, p55] qui ont été soumis à une population de 10 ergothérapeutes travaillant dans 3 services de soins de suite et de réadaptation.

 Les jeux en SSR.

Les jeux sont présents dans les trois services interrogés, qui possèdent respectivement 20, 30 et plus de 50 jeux.

5 + de 50 3 30

2 20

Figure 1 : Population interrogée lors de l’enquête exploratoire.

Il s’agit de jeux du commerce (présents chez tous les ergothérapeutes), de jeux spécifiques à la rééducation (8 ergothérapeutes sur 10), de jeux adaptés et de jeux copiés (6/10). Tous les professionnels ont à leur disposition des jeux de sociétés, des casse-têtes, des jeux de logique et des jeux papier crayons. Les jeux de manipulation et les jeux éducatifs ont été cités par 9 ergothérapeutes sur 10, et les jeux sur ordinateur et Wii par 3 ergothérapeutes.

Les jeux solitaires et duels sont les plus utilisés, les jeux de groupe sont les moins utilisés. Les jeux les plus utilisés sont le solitaire (cité 7 fois), les jeux de société (« Puissance 4 » (cité 2 fois), « Dooble » (cité 2 fois), « Reversi » (cité 2 fois), « Boogle », « scrabble »…), les

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puzzles (cité 4 fois), les jeux papier crayons (cités 3 fois) et les jeux de construction, de logique et de manipulation (cité 2 fois).

Figure 2 : les jeux les plus utilisés en SSR

Les jeux sont principalement choisis pour leur intérêt rééducatif (travail des préhensions et des fonctions supérieures principalement), et sur des aspects pratiques (solidité, nettoyage, aspect non enfantin), l’aspect ludique n’est cité que par un seul ergothérapeute.

Etonnamment, aucun ergothérapeute n’a de difficultés à faire acheter des jeux à son administration, ils n’ont pas d’arguments à donner, un budget est souvent prévu pour ça.

 L’utilisation du jeu.

9 ergothérapeutes sur 10 utilisent le jeu quotidiennement. Il est utilisé pour travailler : - les préhensions,

- les fonctions cognitives, - la motricité,

- l’équilibre - la revalorisation.

Le jeu est utilisé comme support de manipulation et pour jouer réellement, la majorité des ergothérapeutes utilisant les deux modalités.

solitaire 23% jeux de société 34% puzzle 13% jeux papier crayons

10% jeux de construction et de manipulation 13% jeux de logique 7%

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Le jeu est proposé pour rendre la rééducation plus ludique ou pour détourner l’attention du patient de l’effort à fournir (pour 4 ergothérapeutes). Pour deux professionnels, il permet d’éviter la répétition des exercices, de varier les activités. Trois répondants n’ont pas interprétés la question comme espéré, et ont cité à nouveau les buts visés par l’utilisation du jeu. Deux ergothérapeutes jouent avec leurs patients, cinq jouent parfois avec leur patients, trois jouent rarement ou jamais avec leurs patients.

Figure 3 : pourcentage d’ergothérapeutes jouant avec leurs patients.

 L’image du jeu auprès des ergothérapeutes.

Pour l’ensemble des professionnels interrogés le jeu est une activité qui a du sens chez l’adulte, même si l’un d’entre eux nuance ses réponses en rajoutant que ça dépend des personnes.

Ils pensent que les patients aiment le jeu car ils voient que ça les fait travailler et paradoxalement car ils ne se rendent pas compte qu’ils travaillent, et pour son aspect ludique. Ils pensent que les patients n’aiment pas le jeu parce qu’il le trouve infantilisant ou régressif, parce qu’ils n’aiment pas jouer, qu’il n’y a pas de jeu adapté à leur niveau de compréhension ou qu’ils ont peur de l’échec.

Le jeu est pour eux un bon support, permettant de mettre en place une bonne relation, de proposer un challenge moteur intéressant et de se rapprocher du quotidien.

Globalement leurs collègues ergothérapeutes ont le même regard sur le jeu. En revanche, selon eux le reste de l’équipe à une vision plus partagé. Quelques uns en ont une image

oui 20% parfois 50% rarement ou jamais 30%

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positive, mais la grande majorité pense qu’utiliser le jeu est céder à la facilité, que c’est de l’amusement et de l’infantilisation du patient. Certains ergothérapeutes n’utilisent donc pas le mot jeux devant l’équipe ou sont obligés de s’expliquer sur son utilisation.

 L’image du jeu auprès des patients

En parallèle, nous leur avons demandé de faire passer un autre questionnaire à leurs patients. Nous avons recueilli 10 réponses de patients âgés de 23 à 76 ans (moyenne d’âge de 61 ans), avec des pathologies variées (accident vasculaire cérébral (4), traumatisme du membre supérieur (4), traumatisme crânien ou prothèse d’épaule).

Pour tous, le jeu à du sens chez l’adulte, qu’ils soient eux même joueurs ou non. Chez eux, ils jouent pour se divertir, s’amuser, pour le plaisir ou pour l’exercice mental.

On a proposés des jeux à 6 d’entre eux durant leur rééducation, et ils ont pu jouer seul (4), avec leur ergothérapeute (3), ou avec d’autres patients (4). Pour 5 d’entre eux, l’expérience à été appréciée, la réponse du dernier étant incompréhensible. Nous pouvons noter qu’aucun d’entre eux n’a trouvé le jeu infantilisant.

Figure 4 : modalité du jeu pour les patients.

4 patients se sont vus proposer des jeux par d’autres professionnels, en séance de sport adapté, de kinésithérapie, d’orthophonie ou avec la neuropsychologue.

Seul 37% Avec d'autres patients 27% Avec l'ergothérapeute 36%

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Nous pouvons retenir quelques informations intéressantes de cette enquête exploratoire : - Le jeu semble apprécié par les patients.

- Il est utilisé pour son aspect ludique ou non.

- Le jeu est utilisé comme support ou comme moyen.

- Les professionnels doivent justifier son utilisation auprès des autres professionnels.

La recherche documentaire et les résultats de l’enquête exploratoire nous ont amené à reformuler l’objet de recherche, afin de cibler non plus l’utilisation du jeu en général, mais plutôt l’utilisation du potentiel ludique du jeu.

En ergothérapie, que peut apporter aux patients l’utilisation du potentiel

ludique du jeu?

1.5. Cadre théorique

Nous allons rechercher les concepts et savoirs se rapportant à cet objet de recherche afin de le confirmer, le préciser ou le modifier. Cette confrontation aux concepts et savoirs scientifiques permettra l’émergence de questions de recherche, et la construction de l’outil de recueil de données.

Nous avons vu lors de notre pré-enquête que pour certains ergothérapeutes le jeu est utilisé pour rendre la rééducation plus ludique. Ils estiment que les patients aiment l’aspect ludique du jeu. Nous allons donc nous intéresser à ce qui permet à la personne de percevoir l’aspect ludique d’une activité : l’attitude ludique.

Les mots « challenge » ou « défi » ont été cités par plusieurs professionnels. Cette notion est développée dans la théorie du flow de M. Csikszentmihalyi. Nous avons voulu approfondir notre connaissance de ce concept, afin de déterminer s’il pouvait s’appliquer à l’activité ludique.

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1.5.1. L’attitude ludique

Lors de nos recherches autour du jeu chez l’adulte dans la littérature scientifique, le concept de playfulness (attitude ludique) est ressorti à plusieurs reprises dans les articles anglophones. Les premiers résultats nous ont permis de comprendre que l’attitude ludique rend une personne capable de transformer une situation ou un environnement de manière à permettre le plaisir ou le divertissement [13]. La présence d’une attitude ludique apparait être un élément important dans l’utilisation du potentiel ludique, il nous a donc semblé intéressant d’approfondir nos recherches pour mieux comprendre ce concept.

Une ergothérapeute, P. Guitard, a consacré ses travaux de thèse à l’étude de l’attitude ludique à l’âge adulte, afin d’en proposer une définition conceptuelle et des pistes pour son utilisation en ergothérapie. Nous allons présenter ici le modèle conceptuel qu’elle a développé. L’ensemble de ce chapitre est rédigé à partir de la thèse de P. Guitard [14], et de l’article qui y est associé [15].

 Qu’est ce que l’attitude ludique ?

Pour P. Guitard, l’attitude ludique est un état d’esprit qui permet de voir la situation différemment, comme un défi, une occasion d’apprendre où les erreurs ne sont plus des échecs.

Avant de présenter sa propre définition du concept, P. Guitard a analysé et fait une synthèse des définitions de l’attitude ludique rédigées par les auteurs s’y étant intéressés. Elle distingue deux composantes essentielles présentes chez tous les auteurs : le plaisir et la spontanéité. L’imagination et la curiosité sont les composantes qui sont ensuite les plus souvent citées. Enfin, le sens de l’humour, le sentiment de contrôle, la spontanéité physique et la libération sont des composantes qui font moins consensus.

En se basant sur des entretiens auprès d’adultes d’âges et de milieux variés, P. Guitard a développé un modèle conceptuel de l’attitude ludique à l’âge adulte, dont les composantes sont le plaisir, la spontanéité, la créativité, la curiosité et le sens de l’humour (figure 5).

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Figure 5 : Les composantes de l’attitude ludique selon P. Guitard.

Elle définie la créativité comme la « capacité à utiliser son imagination pour arriver à un résultat concret et tangible ». Elle peut être de type artistique (par exemple dans l’écriture, la photographie, la cuisine…) ou de type intellectuelle (trouver des solutions originales à un problème, jouer avec les idées…). Etre créatif signifie faire preuve d’originalité, oser ne pas faire les choses comme les autres.

La créativité permet l’expression des émotions, la résolution de problème. Pouvoir exprimer sa créativité est une source de plaisir. Pour P. Guitard l’imagination est un préalable à la créativité.

La curiosité est décrite comme un « phénomène intellectuel qui se manifeste par une très grande soif d’apprendre et la quête de nouvelles expériences ». L’auteur distingue la curiosité saine, qui comprend la soif d’apprendre et la recherche de nouveauté, de la curiosité malsaine qui consiste à découvrir ce qui devrait rester caché et à envahir l’intimité d’autrui. La curiosité est liée au sens de l’observation et à l’ouverture d’esprit.

La curiosité permet de faciliter la créativité en multipliant les sources d’inspiration et de s’améliorer en favorisant l’accroissement des habilités et des connaissances. Elle renforce également le plaisir en permettant la découverte de nouvelles sources de plaisir.

Si pour certaines personnes le sens de l’humour s’oppose au sérieux (une personne est drôle ou sérieuse), pour d’autre il y a un continuum entre être drôle et être sérieux (une même personne peut être drôle ou sérieuse selon la situation). Le sens de l’humour nécessite la

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capacité de rire de soi. Il a un versant productif (capacité à provoquer le rire par des paroles, des mots ou des gestes), et un versant réceptif (recevoir en riant les histoires des autres, rire des situations cocasses). Il est utile pour communiquer (passer un message, charmer…), gérer une situation (dédramatiser, diminuer les tensions) et maintenir une bonne santé (plaisir, diminution du stress…).

P. Guitard définie le plaisir comme d’une sensation positive liée à l’appréciation du moment présent. On peut le rapprocher des sentiments de bonheur, satisfaction, joie, bien-être ou bonne humeur. Le plaisir permet de maintenir une bonne santé mentale, d’éviter le burn-out. Enfin, la spontanéité est le fait de ne pas planifier, de garder une liberté d’action, une certaine flexibilité. La personne peut avoir une action ou une réaction instantanée en fonction de son émotion et de son humeur du moment. La spontanéité facilite l’expression des sentiments et des émotions, et la créativité, car elle instaure une liberté d’expression. L’augmentation de la créativité, de la liberté d’expression et de la liberté d’action accroit à son tour le plaisir de la personne. Enfin, le fait de ne pas avoir d’idées préconçues et de s’ajuster aux situations qui se présentent augmente la capacité d’adaptation. Pour certaines personnes, la spontanéité permet de réaliser une activité sans avoir aucune attente, et donc d’éviter la déception.

L’attitude ludique est un état d’esprit rendu possible par la présence de spontanéité, de sens de l’humour, de créativité, de curiosité et de plaisir.

 Les conséquences de l’attitude ludique

L’attitude ludique permet de rendre une activité positive et agréable. La motivation intrinsèque de la personne pour réaliser cette activité augmente et l’activité devient donc plus significative.

L’attitude ludique modifie aussi la façon de percevoir une situation et de l’aborder et accroit la capacité à faire face aux différentes situations de la vie. La curiosité et l’ouverture d’esprit aident à faire face aux imprévus. La personne a aussi plus de capacités à assumer les difficultés et les échecs, à prendre les choses du bon coté.

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Enfin, l’impact positif sur le stress du plaisir et du sens de l’humour et la fonction exutoire de la créativité favorisent la santé et le bien être.

Figure 6 : modèle conceptuel de l’attitude ludique à l’âge adulte (P. Guitard)

 Quels sont les éléments favorisant l’apparition de l’attitude ludique ?

La créativité ne peut être présente que si la personne n’a pas peur du jugement des autres et a assez confiance en elle pour oser la prise de risque. L’éducation reçue et le milieu de la personne peut inhiber la créativité en créant la peur d’être jugé. Enfin, une personne curieuse développe plus de créativité. Des facteurs externes à la personne influencent aussi la créativité :

- les caractéristiques de l’activité réalisée (par exemple, le dessin et la lecture sont des activités qui favorisent la créativité).

- le contexte (par exemple, les fêtes thématiques stimulent l’imagination et la créativité). - La réalisation d’activités de routines permet à certain de laisser aller leur imagination,

leurs pensées.

Pour développer la composante curiosité, la personne doit avoir accès aux moyens permettant de satisfaire sa curiosité. La confiance en soi et les capacités d’initiative doivent être préservées.

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L’expression et l’appréciation de l’humour sont influencées par l’humeur de la personne, sa culture, ses valeurs personnelles et sa confiance en elle. Ils seront plus facilement présent dans un milieu familier et valorisant l’humour.

Le plaisir est présent si la personne à de l’intérêt pour l’activité et l’aime, et si l’activité répond à ses besoins. Les activités choisies et dans lesquelles ont peut choisir ses actions sont sources de plaisir. Il peut néanmoins être inhibé par un manque de confiance en soi, la présence de fatigue, ou de préoccupations limitant la disponibilité mentale. La présence des autres et les interactions avec eux ainsi que les contraintes matérielles et temporelles ont un impact sur le plaisir. Enfin, la notion de plaisir est abordée différemment selon la culture de la personne. Les activités acceptables et les façons de manifester du plaisir changent selon le milieu culturel.

La spontanéité est fortement influencée par le milieu. Les personnes sont plus spontanées dans un milieu familier, valorisant la spontanéité, et suffisamment flexible. Les capacités d’organisation rendent possible la spontanéité d’action. En effet, en s’organisant les personnes se dégagent du temps libre. Cependant, certaines activités, demandant beaucoup d’organisation, de temps et d’équipements empêchent la spontanéité. Pour finir, les personnes manquant de confiance en elles, limitent leur spontanéité par peur des réactions d’autrui. Nous remarquons que pour P. Guitard, la confiance en soi est un facteur influençant l’ensemble des composantes de l’attitude ludique, elle considère la confiance en soi comme un préalable à l’attitude ludique chez l’adulte.

L’attitude ludique est impactée par des facteurs propres à la personne comme sa confiance en elle, ses capacités d’initiatives, ses capacités d’organisation, son humeur du moment et ses valeurs ou son état de fatigue et ses préoccupation. Elle est aussi favorisée par des facteurs externes à la personne, comme les caractéristiques de l’activité et son contexte.

 L’utilisation de l’attitude ludique en ergothérapie

Ce modèle propose une approche globale de la personne (holiste), et étudie les interactions personne-environnement-activités. Il est donc en adéquation avec la philosophie ergothérapique.

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Pour Paulette Guitard, « favoriser la présence de l'attitude ludique dans la vie de tous les jours pourrait s'avérer fort utile pour aider le client adulte aux prises avec certaines incapacités à atteindre son plein potentiel. »

L’attitude ludique peut être utilisée pour permettre à l’adulte des activités agréables, en aidant à contrer les difficultés physiques, cognitives ou affectives. En effet, l’attitude ludique permet de ressentir l’activité de façon agréable et positive, ce qui la rend plus significative. Or le sens donné à une activité permet d’augmenter son potentiel thérapeutique. L’attitude ludique peut aussi favoriser l’indépendance et l’autonomie, en permettant de mieux faire face aux situations. Etre capable de dédramatiser et de trouver des solutions originales est utile face à la diminution des capacités. En rendant possible une vie quotidienne plus satisfaisante comprenant plus d’activités significatives, l’attitude ludique participe au bien être de la personne. Le rôle de l’ergothérapeute serait donc de favoriser le développement de l’attitude ludique, en assurant un milieu permettant sa manifestation et propice à l’amélioration de la confiance en soi.

L’attitude ludique permettrait de rendre toute activité agréable et positive, l’engagement dans cette activité est alors augmenté. Nous avons choisi de nous intéresser à cette notion d’engagement dans l’activité ludique à travers la théorie du flow.

1.5.2. La théorie du flow

 Le flow

En se basant sur les témoignages d’artistes, d’athlètes, de joueurs d’échecs et de musiciens consacrant beaucoup de temps à leur passion, M. Csikszentmihalyi a développé la théorie de l’expérience optimale ou théorie du flow [16], [l7].

Il s’est intéressé aux moments de notre vie où nous sommes dans le plein contrôle de nos actions et éprouvons un enchantement profond. Les personnes décrivent souvent cette expérience à travers la métaphore d’être porté par le courant, d’où le choix du vocabulaire d’expérience « flux » (flow en anglais).

Pour développer et valider ses observations, il a mis au point une méthode d’échantillonnage des expériences subjectives. Les participants réalisent leurs activités quotidiennes avec un téléavertisseur se déclenchant de façon aléatoire de cinq à huit fois dans la journée. A chaque

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signal, il note les informations demandées sur ses pensées, ses émotions et ses activités au moment présent. Cette expérience à été menée sur des milliers de personnes à travers le monde, et a permis de préciser et d’objectiver le phénomène.

Lors de l’expérience de flux, la personne a le sentiment d’une parfaite adéquation entre sensations, désirs et pensées. Toute l’énergie psychique est requise, la personne est focalisée sur la tâche, il n’y a pas de place pour les pensée dérangeantes ou les sensations superflues. La conscience de soi s’estompe et la notion de temps est modifiée. La tâche est alors accomplie pour elle-même.

Les aptitudes de la personne sont pleinement mises à contribution par l’exécution d’une tâche difficile mais réalisable. On observe un équilibre entre capacités d’action et tâche (figure 7).

Figure 7 : qualité de l’expérience vécue en fonction de la relation entre défis et capacités.

Si le défi est important mais les capacités non suffisantes, la personne est focalisé, active et impliqué dans la tâche, mais n’éprouve pas de sensation de force et de contrôle. Elle est alors en état d’excitation, et pour atteindre l’expérience de flux elle a besoin d’acquérir de nouvelles capacités.

Si le défi est inférieur aux capacités de la personne, elle ressent une impression de force et satisfaction et un manque de concentration, d’implication. Elle est dans un état de contrôle.

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Elle n’a pas la sensation de faire des choses importantes, et pour atteindre le flow il lui faut rechercher une tâche plus complexe.

Les états de contrôle et d’excitation sont favorables aux apprentissages. En revanche, l’absence de défi met dans un état d’ennui qui rend souvent trop apathique pour accéder au flux. De même, la confrontation à un défi largement supérieur aux capacités de la personne la met dans un état d’inquiétude ou d’angoisse. L’expérience optimale lui semble alors inatteignable, il recherche une situation moins difficile.

Lors d’une expérience de flow, les aptitudes de la personne sont pleinement mises à contribution par l’exécution d’une tâche difficile mais réalisable. La personne est alors focalisée sur la tâche, elle perd la conscience d’elle-même et la notion de temps. Il n’y a plus de place pour les pensées dérangeantes ou les sensations superflues et la tâche est accomplie pour elle-même.

 Les activités flux

Certaines activités favorisent l’apparition de l’expérience optimale, M. Csikszentmihalyi les appelle les activités flux. Ce sont des tâches requérant attention et concentration, avec des objectifs clairs et compatibles entre eux. Les buts de l’action sont définis, la personne sait ce qu’elle doit faire à chaque étape. Un feedback immédiat lui permet de savoir où elle en est. Il y a peu de distractions, la personne peut se concentrer sur sa tache. Le défi est proportionnel aux compétences de la personne. Elle a le contrôle de ses actions dans l’activité. Les contraintes extérieures sont sans importance, la personne peut oublier sa propre personne et ses besoins [16].

Selon une étude menée auprès d’adultes et d’adolescents aux Etats-Unis, les activités provoquant le plus d’expérience de flux sont les loisirs actifs, en particulier les violons d’Ingres. Les loisirs passifs sont appréciés mais n’entrainent que rarement l’expérience de flux. La conduite automobile est une expérience donnant de nombreuses occasions de flux. En revanche, les activités d’entretien sont rarement appréciées et offrent peu d’occasions de flux. Le travail peut déclencher le flux, même si l’expérience vécue dépend du poste occupé [16].

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Selon M. Csiksentmihalyi le jeu, au même titre que les rituels religieux, la musique, l’art et les sports est une activité qui est faite pour procurer le sentiment de flow [18]. Il affirme qu’il est facile d’entrer dans le flux en jouant à des jeux comme les échecs, le tennis ou le poker, parce qu’ils ont un but et des règles qui permettent au joueur de savoir quoi faire et comment le faire.

Les jeux et les sports ont environ trois fois plus de chances de provoquer un état de plaisir intense qu’un loisir passif comme par exemple regarder la télévision. Pourtant, les gens passent en moyenne moins de temps à les pratiquer, car elles demandent un investissement de départ avant d’être gratifiantes. Les activités passives entrainent moins de grandes satisfactions, mais demandent moins d’implication et sont responsables de moins d’anxiété [16].

Les jeux sont des activités flux, car ils proposent des règles précises et un objectif clair et ils demandent de l’attention et de la concentration.

 L’expérience optimale dans le jeu

M. Csikszentmihalyi étudie le lien entre jeu et expérience optimale en utilisant les différentes catégories de jeux définies par R. Caillois [17].

Dans les jeux de compétition (agon), si l’attention de la personne est portée sur l’activité, le défi est augmenté car chaque adversaire force l’autre à faire de son mieux. En revanche, si le but de la personne est de l’emporter sur l’autre, la compétition nuit à l’expérience optimale, car elle détourne l’attention du joueur de sa tâche.

Le plaisir des jeux de hasard (alea) vient du fait qu’ils donnent l’illusion de contrôler le futur, de pouvoir dépasser les contraintes du présent.

Les jeux de vertiges (ilinx)permettent d’altérer facilement la conscience, mais en entrainant une perte de contrôle de la conscience. On est donc à l’opposé de l’expérience optimale dans laquelle seule la conscience du soi est altérée.

Les jeux de fantaisie, de faire semblant (mimique) donnent l’impression d’être plus qu’en réalité, de devenir temporairement quelqu’un d’autre. Ils permettent donc de dépasser l’expérience ordinaire.

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 Intérêt du flux

Tout d’abord, l’atteinte du flux procure du bonheur. La personne est heureuse rétrospectivement, car pendant l’activité elle est trop absorbée par la tâche pour avoir conscience de ses ressentis [16]. La personne cherchera à reproduire cette sensation agréable, la motivation et l’engagement dans l’activité vont augmenter.

De plus, lors d’une expérience de flux, la souffrance physique est atténuée. En effet, quand notre énergie psychique est mobilisée par une tâche spécifique, nous sommes moins sensibles à ce qui ne va pas dans notre corps. Par exemple, on observe souvent plus de douleurs le week-end, ou quand la personne ne travaille pas, et la douleur nous semble plus supportable quand nous sommes en compagnie ou plongés dans une activité [16]. Cette diminution de la douleur peut être particulièrement intéressante lors de la rééducation. Pleinement absorbé dans son activité, le patient pourrait réaliser des mouvements limités par la douleur lors d’une activité de rééducation « classique ».

Dans son livre « The evolving self », M. Csikszentmihalyi développe plusieurs conséquences du flow [19]. Selon lui, l’expérience optimale permet l’amélioration des compétences. En effet, elle apparait lors des pointes de performance, ce qui encourage la personne à faire de son mieux pour revivre cette expérience. De plus, une étude a révélé que chez les adolescents la fréquence du flow était plus prédictive de la réussite que les tests de capacités cognitives, les traits de personnalité ou le statut et les revenus de leurs parents.

Les personnes passant plus de temps dans le flow montrent généralement une meilleure estime d’elles-mêmes. De plus, dans la période suivant une expérience de flow, l’individu a une plus haute estime de lui-même que le reste du temps [19].

Une étude menée auprès de managers a montré que les professionnels atteignant le plus souvent le flow éprouvaient moins d’anxiété que les autres face au même niveau de stress. Expérimenter le flow agirait donc comme un tampon entre le stress subi et ses habituelles conséquences psychiques négatives [19].

« [L’expérience optimale] entraine des conséquences très importantes : meilleure performance, créativité, développement des capacités, estime de soi et réduction du stress. Bref, elle contribue à la croissance personnelle, apporte un grand enchantement et améliore la qualité de vie. » M. Csikszentmihalyi [17]

(28)

 Personnalité autotélique

La méthode ESM a permit de montrer que certaines personnes se disent en situation de flux 70% de leur temps, alors que d’autres le ressente moins de 10% de leur temps. Autrement dit, certains individus peinent à atteindre le flux, tandis que d’autre l’atteignent facilement. M. Csikszentmihalyi nomme ses personnes, qui sont capable de trouver le flow là ou d’autres s’ennuient, des personnes autotéliques [16].

Une étude auprès d’adolescents a montré que ces individus, dits autotéliques, consacrent plus de temps à travailler, et a s’engager dans des loisirs actifs que les individus non autotéliques. Ils sont plus concentrés, et sont plus fiers d’eux lorsqu’ils réalisent une activité productive que les individus non autotéliques [16].

Pendant les activités de loisir, ils se concentrent aussi davantage, s’amusent plus et son plus fiers d’eux que les individus non autotélique.

Ils passent plus de temps en famille et sont moins préoccupés par eux même que le reste de la population. Ce sont des individus qui ont une volonté de comprendre, de résoudre des problèmes et qui savent porter leur attention où ils le souhaitent. Les personnes créatives sont souvent des personnes autotéliques.

Il est possible de développer un soi autotélique en apprenant à profiter de la vie et à transformer l’adversité en défis. Pour cela M. Csikszentmihalyi conseille de :

- Se donner des buts. Il faut choisir soi-même le but à atteindre et le modifier s’il n’a plus de sens

- S’immerger dans l’activité. L’engagement complet dans une activité nécessite l’équilibre entre le défi de la tâche et ses propres capacités, pour ne pas entrainer anxiété ou ennui.

- Porter attention a ce qui se passe. La concentration doit porter sur l’action, il ne faut pas se laisser distraire par ses préoccupations.

- Apprendre à profiter de l’expérience immédiate. Il faut être capable de voir le bonheur dans les petites choses et de s’ouvrir à la joie de vivre.

Il existe des personnes autotéliques qui, de par leur façon de voir la vie, sont plus souvent en situation de flow. Chacun peut développer sa personnalité autotélique en modifiant sa façon d’aborder ses propres activités.

(29)

Suite à l’étude de ces concepts, nous avons affiné notre objet de recherche pour obtenir des résultats plus pertinents. En effet, la problématique précédente, trop large, ne nous aurais pas permis de récolter beaucoup d’informations utiles à la pratique professionnelle. Nous nous sommes recentrés sur un des concepts présentés, la théorie du flow. La problématique sur laquelle portera notre enquête est donc :

En rééducation fonctionnelle, en quoi le flow peut-il être utilisé par

l'ergothérapeute lors d'une activité ludique?

(30)

2. Matériel et méthode

Nous cherchons à explorer cette problématique, à permettre l’émergence de nouvelles idées. Nous avons donc choisi d’utiliser une méthode clinique, qui permet de questionner les pratiques et de voir les singularités. En effet, la méthode clinique privilégie l’humanisme et la subjectivité, elle étudie la singularité du sujet. Elle vise à « essayer de mettre au jour le système d’organisation du monde que porte la personne sur la problématique choisie […] » [20]. Cette méthode permet de travailler sur l’inattendu, de dévoiler l’impensé de la problématisation.

Nous avons donc réalisé trois entretiens auprès d’individus sélectionnés dans une population d’ergothérapeutes. Nous avons utilisés des critères pour inclure les ergothérapeutes travaillant en SSR auprès d’adultes, et exclure les professionnels ne faisant pas jouer leurs patients au cours de leur prise en charge. Les trois individus sélectionnés ont donc des critères communs, mais aussi des critères particuliers permettant d’enrichir l’exploration de la problématique. Cela nous permet d’interroger des sujets susceptibles de penser différemment le phénomène. Nous avons contacté les services d’ergothérapie des Bouches-du-Rhône, pour privilégier les entretiens en présence plutôt que les entretiens téléphoniques. En effet, cela permet une communication plus facile par l’utilisation de la communication non verbale. Cela nous a aussi permis de voir le lieu de travail des professionnels interrogés et les jeux utilisés. Un mail présentant les critères d’inclusion et d’exclusion a été envoyé, et les personnes intéressées ont été recontactées afin de recevoir un supplément d’information, et de convenir d’une date de RDV. Les entretiens ont eu lieu sur le lieu de travail de la personne interrogée, et ont été enregistrés pour permettre une retranscription fidèle. Suite au manque d’interlocuteurs intéressés, nous avons utilisé le bouche à oreille pour réaliser un dernier entretien, par téléphone.

Pour mener les entretiens, nous avons créé une matrice issue de la théorisation précédente et permettant d’explorer le concept du flow à travers 4 dimensions :

- Les conditions d’apparition du flow

- Les caractéristiques de l’expérience optimale - Les conséquences de l’atteinte du flow

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Concept Dimension Composante Question principale

et questions complémentaires

Premières questions (mise en condition)

Depuis combien de temps exercez-vous?

Auprès de quel public? (âge, pathologie, durée d'hospitalisation)

Dans quel type de structure?

Question inaugurale J'aimerais comprendre comment vous utilisez l'activité ludique lors de votre prise en charge?

L'utilisation de l'activité ludique

Cadre

Durée de la séance Nombre de patients

Fréquence d'utilisation des activités ludiques

Objectifs Pourquoi utilisez-vous l'activité ludique?

LE FLOW

Caractéristiques de l’activité ludique

choisie

Comment choisissez-vous l'activité ludique?

Défi proportionnel aux compétences, équilibre capacité d’action et tâche

Quel niveau de difficulté par rapport aux capacités du patient?

Rétroaction immédiate/feedback

Comment vérifie-t-il sa réussite ou son avancement dans la tâche?

Seul?

Quand (fréquence, à la fin, quand il le souhaite, à certaines étapes).

Le patient peut il se corriger?

Objectifs clairs et compatibles

Quelles sont les consignes données? Par quels moyens?

Le patient sait il exactement ce qu’il doit faire moment après moment? Visualisation de la marche à suivre et de l'objectif final?

Demande concentration et attention

Quel niveau d'attention et de

concentration est demandé par la tache environnement (distractions réduites au minimum) ?

Caractéristiques de l'expérience

optimale

En quoi la personne est-elle immergée dans l'activité?

Conscience de soi Pensées dérangeantes

Sensations superflues

Le patient oublie t-il ses besoins? Ses préoccupations?

Focalisation sur la tache

Le patient se laisse t-il distraire par ce qui l'entoure?

Répond-il quand on l'appelle? Parle t-il d'autre chose pendant l'activité?

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Altération de la notion du temps

Doit-on lui rappeler la fin de la séance? Évalue-t-il correctement le temps écoulé depuis le début de l'activité? Tâche accomplie pour

elle-même La tâche est accomplie pour elle-même?

Effets de l'expérience

optimale

Quels sont les effets de l'immersion totale dans cette activité?

Motivation En quoi cette immersion impacte la motivation?

Plaisir L'activité a-t-elle entrainée du plaisir? Estime de soi En quoi cette activité impacte l'estime

de soi?

Anxiété En quoi cette activité impacte l'anxiété du patient?

Engagement Observez-vous un impact sur l'engagement du patient? Bonheur

Le patient était il heureux rétrospectivement d'avoir réalisé l'activité?

Douleur En quoi cette activité influence la sensation de douleur?

Base conceptuelle

Sur quels modèles vous appuyez vous lorsque vous mettez en place des activités ludique?

Connaissance de la théorie du flow

Connaissez-vous la théorie du flow ? L’utilisez-vous? Pourquoi?

Pensez-vous pouvoir l'utiliser? Pourquoi?

Tous les entretiens commencent par un court temps d’introduction, pendant lequel l’enquêteur se présente, rappelle le sujet de la rencontre et expose les conditions de l’entretien (confidentialité des réponses, enregistrement de la discussion).

Pour établir le contact, quelques questions de mise en conditions permettent d’instaurer un climat de confiance. La question inaugurale, très large, permet d’entrer dans le sujet. En fonctions des éléments apportés dans la réponse, des questions complémentaires permettent de guider l’entretien.

La première partie sert à recueillir des informations sur les objectifs suivis lors de l’utilisation d’une activité ludique, et sur le cadre mis en place.

Dans la seconde partie de l’entretien, nous voulons déterminer si l’activité ludique utilisée par l’ergothérapeute permet la mise en place des conditions nécessaires à l’apparition du flow.

(33)

Pour cela, après une question générale sur le choix de l’activité ludique, nous veillerons à aborder les composantes suivantes : le rapport entre les capacités d’actions et le défi proposé, la présence d’un feedback, la présence d’objectifs clairs et compatibles et le niveau de concentration et d’attention requis par la tâche.

La troisième partie doit nous permettre de déterminer si l’expérience optimale est atteinte lors de l’activité ludique. Nous avons choisi de commencer par la notion d’immersion complète dans l’activité, puis de vérifier la présence ou l’absence de chacun des points suivants : altération de la conscience de soi, focalisation sur la tâche, altération de la notion de temps, accomplissement de la tâche pour elle-même.

Enfin, nous voulons identifier les effets de l’atteinte du flow. Nous veillerons à aborder la motivation de la personne, le plaisir et le bonheur lié à l’activité, les modifications au niveau de l’estime de soi, de l’anxiété, de l’engagement et du ressenti de la douleur.

Une dernière partie permet de savoir si la personne connait la théorie du flow, et si elle l’utilise dans sa pratique professionnelle.

Nous avons délibérément choisi de ne parler de la notion de flow qu’à la fin de l’entretien, afin de ne pas orienter les réponses. De plus, cela nous permet de détecter si certains ergothérapeutes utilisant le jeu mettent en pratique les principes de la théorie du flow sans connaitre ce concept.

Tout au long de l’entretien, l’enquêteur est dans une posture d’écoute, mais oriente l’ergothérapeute vers ce qui l’intéresse. Il utilise pour cela des techniques de relance, comme la reformulation ou le questionnement.

Les enregistrements sont intégralement retranscrits peu après l’entretien [Annexe 2, p60], avant d’être analysés. Le but de cette analyse et de recueillir les informations recherchées et de faire émerger ce qui n’était pas prévu. Les tableaux de données brutes reprennent donc les thèmes de la matrice d’entretien, auxquels s’ajoutent les éléments non prévus mais qui ont été abordés lors des entretiens et nous ont paru intéressants. Les fragments de discours relevés sont cités entre guillemets et suivis du numéro de ligne et du numéro de l’entretien précédé d’un E (par exemple : « équilibre à la marche » (26, E1), signifie que cet élément se trouve à la ligne 26 du premier entretien). Dans les tableaux, seul le numéro de ligne apparait, car chaque colonne correspond à un entretien.

(34)

3. Résultats

Selon les données recueillies par les entretiens, le jeu peut être proposé pour de nombreuses raisons.

En premier lieu, il peut être à la base d’une grande variété d’exercices. Il permet le travail des « capacités de préhension » (11, E2) de « l’équilibre à la marche » (26, E1) et le « travail du membre sup » (14, E2). On peut aussi l’utiliser pour entrainer les « fonctions cognitives » (29, E1), et en particulier les « notions de compréhension, logique et attention » (16, E3). Le jeu donne un ton de légèreté dans la prise en charge (171, E2). Travailler par le jeu « c'est plus amusant » car les exercices techniques peuvent être « rébarbatif pour les patients » (34, E3). Le thérapeute peut « motiver par le jeu » (17, E1), il peut « réinsuffler de l’intérêt » (197, E1) à des personnes « réfractaires à la rééducation » (23, E1).

Le jeu peut aussi être perçu comme un exutoire, « ils peuvent plus faire comme avant, ils essayent de trouver un dérivatif, ils font les compétitions sur les jeux » (175, E3).

3.1. Caractéristiques de l’activité ludique choisie

Thème Fragments de discours entretien n°1 Fragments de discours entretien n°2 Fragments de discours entretien n°3 Equilibre capacités d’action et tâche

Tu travailles une fonction au niveau du patient 92 C’est ton choix qui va adapter 88

Je reste sur le niveau de capacité que je veux travailler 97

Au début [...] les capacités seront un petit peu descendues 46

Après, je lui mets des challenges 47

Je termine toujours par un exercice, voir peut être un jeu ou il n'y a pas d'échec 48

On prend des jeux qui nous paraissent adéquats par rapport au niveau actuel 58

Au départ, ça peut être des trucs un peu faciles 59 On va quand même chercher le niveau

légèrement au dessus pour que ça travaille 61

Tu as fait des progrès, […] on va faire plus dur 66

(35)

Rétroaction immédiate

Souvent c’est toi qui es moteur, parce que si elle a fait l’erreur, c’est que… 141

Elle va buter, elle va bien s’en rendre compte 143 Elle peut s’auto corriger 146

C’est à la fin 125

On essaie de voir avec lui l'avancement 63 J’accepte totalement qu’il puisse s’auto-corriger ou regarder la solution 65

A chaque étape 71 Si besoin je corrige 92

Dire à ton patient de corriger sa gestuelle 80 De leur expliquer [...] la correction qu’ils doivent apporter 89

Objectifs clairs et compatibles

Tu peux lui donner une marche à suivre 130 Ya un guidage en fonction de ses difficultés 137

J'explique toujours l'objectif 82

C'est lui qui va lire la règle et qui va me la réexpliquer 84 Ils vont essayer de s'expliquer le jeu 86 elle sait les étapes 91

Y’en a qui vont le comprendre tout seuls à quoi ça sert 97

Y’en a d’autres qui vont me demander pourquoi on fait ça 98 Concentration et attention Tu travailles la concentration de toute façon, et l’attention 157 La plupart des jeux se font en salle avec des gens autour 160

Mais nous ce que l’on aime bien, c’est les mettre en salle, justement pour que la personne elle se concentre, c’est plus difficile. 161

ça oblige à rester plus attentif que si tu fais un autre type d’exercice 223

Si ils accrochent au challenge de gagner [...] ils sont bien concentrés 103

Y’a plus d’attention et de concentration 113 Y'a un oubli par rapport à l'objectif mais y’a une

concentration plutôt intellectuelle par rapport au jeu 115

C’est un gros niveau d’attention 105

Il faut réfléchir un petit peu plus, être plus concentré 113

 Equilibre capacités d’actions et tâches

Des professionnels proposent des activités faciles en début de rééducation, puis des situations de défis avec des tâches légèrement au dessus des capacités de la personne. Un autre opte toujours pour des activités adaptées au niveau de capacité du patient. On peut aussi noter l’utilisation d’une activité sans échec en fin de séance. Enfin, apparait la nécessité d’adapter l’activité en fonction de l’évolution de la personne. Parfois, il est impossible d’utiliser le jeu au début de la prise en charge, le patient a trop de difficultés ; « en début de rééducation ce n’est peut être pas toujours possible » (29, E3).

Figure

Figure 1 : Population interrogée lors de l’enquête exploratoire.
Figure 2 : les jeux les plus utilisés en SSR
Figure 3 : pourcentage d’ergothérapeutes jouant avec leurs patients.
Figure 4 : modalité du jeu pour les patients.
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