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Penser la sélection des enseignants en lien avec le développement professionnel

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Academic year: 2021

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Penser la sélection des enseignants en lien avec le développement

professionnel

Mémoire

Anne-Michèle Delobbe

Maîtrise en administration et évaluation en éducation

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

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Penser la sélection des enseignants en lien avec le développement

professionnel

Mémoire

Anne-Michèle Delobbe

Sous la direction de :

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Résumé

S’il est bien connu que l’enseignant occupe un rôle central dans les succès des élèves, il est à se questionner sur la façon dont s’opérationnalise et s’évalue la qualité en enseignement dans le cadre des pratiques de sélection des enseignants. Ce mémoire identifie les connaissances, habiletés, aptitudes et autres caractéristiques recherchées par les recruteurs de même que les outils de sélection utilisés par ceux-ci pour l’embauche des candidats aux postes d’enseignement au primaire et au secondaire. Les données proviennent d’un questionnaire auquel ont répondu un représentant des ressources humaines de vingt commissions scolaires francophones du Québec (n=20). Ceux-ci révèlent que les commissions scolaires attribuent de l’importance à plusieurs exigences dont, surtout, les connaissances des stratégies de gestion de classe, les connaissances de la matière, la capacité à communiquer à l’oral, les habiletés pédagogiques et de gestion de classe. Au regard des outils, l’entrevue classique figure parmi les plus utilisés. Les outils généralement considérés comme très valides sont, pour leur part, peu utilisés. Des corrélations ont révélé des liens significatifs entre le type d’instruments utilisés et les perceptions des directions quant à leurs pratiques de sélection. La discussion propose une réflexion sur l’utilisation des pratiques de sélection des commissions scolaires au regard de ce que la littérature scientifique recommande sur le sujet. La possibilité que certaines caractéristiques recherchées par les commissions scolaires chez le personnel enseignant soient considérées pour être au cœur des activités de développement professionnel en emploi est également discutée.

Mots-clés : sélection des enseignants, qualité de l’enseignement, exigences, outils d’évaluation, développement professionnel.

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Abstract

Although it is well known that teachers play a key role in the academic success of students, it remains unclear how teaching quality is operationalized and assessed within teachers’ selection practices. This Master thesis identifies the knowledges (K), skills (S), abilities (A) and other characteristics (O) that are sought-after when recruiting a new primary or secondary level teacher as well as the instruments that are favored to assess these characteristics. A human resources representative from 20 French School Districts (Commissions scolaires) from Quebec answered a questionnaire designed for this study. Results show that School districts have multiple requirements when selecting a teacher but that they particularly value knowledge of classroom management strategies, subject matter knowledge, oral communication, pedagogical skills and classroom management skills. The classic interview appears among the instruments that are most frequently used for teachers’ selection. The most valid selection instruments, however, seem to be scarcely used. Correlations reveal a significant relation between the recruiter’s perceptions of his/her use of the most valid selection instruments and those that they actually use. Discussion focuses on the ways School districts can improve the selection of teachers, considering recommended practices emerging from the personnel selection literature. The opportunity to consider some requirements of the School districts as competences to be further developed through professional supervision and continuous training is also discussed.

Keywords: teacher selection, teaching quality, exigencies, selection instruments, professional

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Table des matières

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Problématique ... 5

Préoccupations générales pour la qualité de l’enseignement ... 5

Les réformes éducatives ... 6

Importance de l’enseignant ... 7

La formation initiale des maîtres ... 9

Insertion professionnelle et décrochage enseignant ... 11

Accompagnement, développement professionnel et caractéristiques individuelles ... 13

Chapitre 2 : Cadre théorique ... 16

L’efficacité en enseignement ... 16

Les connaissances. ... 18

Les habiletés. ... 19

Les aptitudes. ... 21

Les autres caractéristiques personnelles ... 23

Le processus de sélection ... 32

Processus de sélection des enseignants. ... 33

Propriétés psychométriques du processus ... 34

Fidélité. ... 34

La validité. ... 35

Les exigences ... 37

Les connaissances. ... 38

Les habiletés ou compétences spécifiques ... 39

Les aptitudes ou compétences générales. ... 39

Les autres caractéristiques. ... 40

Importance des exigences ... 41

Instrument de mesure ou prédicteur ... 42

Le formulaire de demande d’emploi et le curriculum vitae. ... 43

Les références. ... 44

La lettre de présentation ... 44

Le portfolio professionnel. ... 45

Les autorisations d’enseigner, le diplôme et le relevé de notes ... 46

Les tests de maîtrise de la langue d’enseignement. ... 48

L’entrevue. ... 49

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Les tests d’habiletés cognitives. ... 53

Les tests de personnalité. ... 54

Objectifs ... 58 Chapitre 3 : Méthodologie... 59 Participants ... 59 Instrument de mesure ... 60 Déroulement ... 61 Chapitre 4 : Résultats ... 63 Analyses descriptives ... 63

Taille de la commission scolaire. ... 63

Nombre d’embauche au cours de la dernière année. ... 64

Difficultés de recrutement. ... 65

Les acteurs impliqués dans les étapes du recrutement des enseignants. ... 68

L’utilisation de pratiques de sélection recommandées par la littérature ... 71

Les exigences de sélection utilisées par les commissions scolaires ... 71

Synthèse sur les catégories d’exigences les plus importantes. ... 82

Les exigences jugées les plus importantes pour la réussite des élèves et les exigences les plus susceptibles d’être améliorées par des activités de développement professionnel. ... 82

Les instruments d’évaluation. ... 86

Utilisation moyenne générale des instruments d’évaluation selon leur validité ... 89

Analyses statistiques ... 91

Chapitre 5 : Discussion ... 94

Description des processus de sélection des commissions scolaires ... 94

Les acteurs impliqués dans le processus. ... 96

Les exigences ... 96

Liens avec le développement professionnel ... 100

Les instruments de sélection ... 101

Appariement instrument et exigence ... 103

Lien avec certaines caractéristiques des participants ... 104

Limites de la recherche ... 105

Recommandations ... 107

Conclusion... 109

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Liste des tableaux

Tableau 1 Synthèse des caractéristiques les plus importantes pour les enseignants au

primaire et au secondaire pour la réussite des élèves et pour le succès des activités de

développement professionnel ... 28

Tableau 2 Synthèse des propriétés psychométriques des instruments d’évaluation ... 56

Tableau 3 Plus haut niveau de scolarité complété selon la discipline de formation des

participants ... 60

Tableau 4 Distribution des commissions scolaires selon le nombre d’enseignants au

primaire et au secondaire (n=20) ... 64

Tableau 5 Ratio de sélection moyen dans les processus de recrutement interne et externe

des enseignants, dans les situations typique et complexe ... 68

Tableau 6 Pourcentage moyen d’implication de différents acteurs aux étapes de la

sélection des enseignants (n=20) ... 70

Tableau 7 Importance moyenne de diverses connaissances à titre d’exigences dans le

processus de sélection des enseignants (n=20) ... 73

Tableau 8 Pourcentage moyen d’utilisation des instruments les plus utilisés pour évaluer

les trois connaissances jugées les plus importantes ... 75

Tableau 9 Importance moyenne de diverses habiletés à titre d’exigences dans le processus

de sélection des enseignants (n=20) ... 76

Tableau 10 Pourcentage moyen d’utilisation des principaux instruments évaluant les trois

habiletés jugées les plus importantes ... 77

Tableau 11 Importance moyenne de diverses aptitudes à titre d’exigences dans le processus

de sélection des enseignants ... 78

Tableau 12 Pourcentage moyen d’utilisation des principaux instruments évaluant les

aptitudes jugées les plus importantes ... 78

Tableau 13 Importance moyenne de diverses autres caractéristiques à titre d’exigences

dans le processus de sélection des enseignants (n=20) ... 80

Tableau 14 Pourcentage moyen d’utilisation des principaux instruments évaluant les trois

autres caractéristiques jugées les plus importantes ... 81

Tableau 15 Nombre de mentions d’une exigence, par les participants, comme étant l’une

des plus importantes pour les enseignants au primaire et au secondaire pour la réussite des

élèves ... 84

Tableau 16 Nombre de mentions d’une exigence, par les participants, comme étant l’une

des plus susceptibles d’être améliorées par des activités de développement professionnel

pour les enseignants au primaire et au secondaire ... 85

Tableau 17 Pourcentage moyen d’utilisation des instruments d’évaluation (classés selon

leur indice de validité prédictive) ... 87

Tableau 18 Pourcentage moyen total d’utilisation des instruments de sélection les plus

valides, moyennement valides, les moins valides et ceux dont la validité est inconnue (n

variant de 11 à 20) ... 90

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Tableau 19 Corrélations entre la moyenne d’utilisation des instruments les plus valides,

moyennement valides, et les moins valides, la taille de la commission scolaire, le nombre

d’années d’expérience dans le poste du participant, le ratio de sélection et la perception

des pratiques ... 92

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Liste des figures

Figure 1. Nombre de commissions scolaires qui ont des difficultés de recrutement au

primaire (n=15) et au secondaire (n=18), par discipline. ... 66

Figure 2. Distribution des participants, en pourcentage, selon leur opinion à l’égard de leurs

pratiques de sélection (n=20). ... 71

Figure 3. Importance moyenne des quatre catégories d’exigences (n=20). ... 82

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Liste des annexes

Annexe A : Les douze compétences enseignantes selon le MEQ (2001) ... 133

Annexe B:Représentation des commissions scolaires participantes selon leur région

administrative ... 134

Annexe C: Questionnaire... 135

Annexe D:Définition des différents outils de sélection ... 169

Annexe E : Inventaire des termes utilisés pour définir les différentes exigences les plus

importantes relatives à la réussite scolaires des élèves ... 170

Annexe F : Inventaire des termes utilisés pour définir les différentes exigences les plus

susceptibles d’être améliorées par des activités de développement professionnel des

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Liste des sigles et des symboles

ANOVA : Analysis of variance

AERA :

American Educational Research Association

APA : American Psychological Association

AQCS : Association québécoise des cadres scolaires

CÉFRANC : Centre d’évaluation du rendement en français écrit

CPNCF : Comité patronal de négociation pour les commissions scolaires francophones

CSE : Conseil supérieur de l’éducation

DG : Direction générale

DRH : Direction des ressources humaines

ÉT : Écart-type

FCE : Fédération canadienne des enseignants

LCR : Loi canadienne sur les droits de la personne

LIP : Loi sur l’instruction publique

M : Moyenne

M.A. : Maître ès arts

MELS : Ministère de l’Éducation du Loisir et du Sport

MEQ : Ministère de l’Éducation du Québec

OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques

SIOP : Society for Industrial and Organizational Psychology

SPSS : Statistical Package for the Social Sciences (Logiciel d’analyse statistique)

TECFÉE :

Test de certification en français écrit pour l’enseignement

UQAM : Université du Québec à Montréal

URL : Uniform Resource Locator

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Remerciements

La réalisation de ce travail a été possible grâce à de nombreux acteurs, qui à leur façon ont contribué à l’avancement du projet de recherche. D’abord, impliquée à chacune des étapes, je remercie ma directrice de recherche, Madame Chantale Jeanrie. L’encadrement dispensé, sa disponibilité de même que ses judicieux conseils m’ont grandement aidée non seulement à rédiger ce mémoire, mais également à développer des habiletés spécifiques au domaine de la recherche.

Je remercie également le Conseil de recherche en sciences humaines (CRSH) qui a contribué au financement de l’étude. Je dois également souligner la précieuse collaboration de l’Association québécoise des cadres scolaires (AQCS). Un merci également plus particulier aux directions des ressources humaines des vingt commissions scolaires francophones qui ont participé à l’étude.

Enfin, qu’auraient été ces deux dernières années sans le soutien indéfectible de ma famille. Linda, Daniel, Gilbert, Élyse ainsi que mon cher frère et colocataire, Raphaël, sachez que vous êtes pour énormément dans cet accomplissement. Votre compréhension et votre fierté ont été une grande source de motivation tout au long de ce parcours.

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Introduction

Le souci pour le développement d’une main-d’œuvre qualifiée et compétente qui saura répondre aux défis actuels et futurs des entreprises a rendu l’éducation primordiale pour tout pays soucieux d’assurer sa croissance. Cette préoccupation à l’égard de la qualité de la formation des individus a des répercussions sur les attentes de la société envers son corps professionnel enseignant (Gauthier et Mellouki, 2003; Moore, 2004; Organisation de Coopération et de Développement Économiques [OCDE], 2006; Tardif, 2012). En effet, les exigences relatives à la profession enseignante se sont complexifiées dans les dernières années (OCDE, 2006, Ministère de l'Éducation du Québec [MEQ], 2001). Parallèlement, l’émergence d’un important mouvement de recherches axé sur l’école efficace a mis de l’avant le rôle de première importance de l’enseignant dans la réussite scolaire des élèves (Hattie, 2009; Wang, Haertel et Walberg, 1993). Eu égard à cela, nombre de chercheurs se sont intéressés aux caractéristiques associées à l’enseignement de qualité (Cain, 2001; Duckworth, Quinn et Seligman, 2009; Ingersoll, 2001a), soulignant à la fois certaines connaissances, compétences, aptitudes ou autres caractéristiques personnelles de l’enseignant essentielles à la profession. D’une part, certains auteurs (Darling - Hammond et Youngs, 2002; Kosnik, Brown et Beck, 2005; Stronge, Ward et Grant, 2011) s’entendent sur le fait que l’enseignement efficace ne saurait se traduire uniquement par la formation ou certification de l’enseignant puisqu’au-delà des connaissances acquises pendant la formation, certaines caractéristiques personnelles contribuent directement à l’efficacité dans l’exercice du poste. D’autre part, certains (Hattie, 2009; Hiebert et Morris, 2012; Soar, 1983; Talbot, 2012) dénoncent ce trop grand intérêt pour l’identification des caractéristiques individuelles associées au « bon enseignant » au détriment des pratiques enseignantes efficaces, qui, elles, rendraient davantage compte de la qualité de l’enseignement. Bien que quelques ouvrages aient été proposés par différents chercheurs tentant de mettre en lumière l’apport de différents facteurs ou caractéristiques de l’enseignant dans la réussite des élèves (Hattie, 2009; Stronge, 2007), les auteurs ont encore du mal à s’entendre au sujet de ce qui détermine réellement l’efficacité de l’enseignant (Korthagen, 2004). Une des raisons pour lesquelles dresser le portrait de l’enseignant efficace suscite autant d’intérêt auprès de la communauté scientifique et des milieux de pratique est que l’identification de ces facteurs permet à la fois d’orienter la formation des maîtres, de déterminer les exigences essentielles pour la sélection en poste de même que d’orienter les diverses activités de développement professionnel (Stronge et al., 2011). Somme toute, s’il apparaît des plus crucial de se soucier de l’adoption de pratiques probantes à l’égard de la formation et de la sélection

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des enseignants, c’est en raison de leurs conséquences sur la qualité des apprentissages des élèves (Rose, English et Finney, 2014; Stronge et Hindman, 2003).

Les gestionnaires en éducation se doivent d’embaucher les enseignants les plus susceptibles de dispenser un enseignement de qualité aux élèves et de bien s’intégrer à la profession, considérant le taux de décrochage enseignant fort préoccupant (Gingras et Mukamurera, 2008; Karsenti, Collin et Dumouchel, 2013; OCDE, 2006) se situant autour de 15 % chez les nouveaux enseignants (Martel, 2009). Mais qu’en est-il des exigences qui sont utilisées par les responsables de la sélection des enseignants au Québec pour identifier les candidats les plus aptes à répondre à ces défis considérant les nombreuses théories relatives à l’efficacité en éducation ? Si plusieurs études ont été menées aux États-Unis pour déterminer les caractéristiques recherchées par les directions scolaires chez les candidats au poste d’enseignant lors de leur embauche (Harris, Rutledge, Ingle et Thompson, 2010; Mason et Schroeder, 2010; Ralph, Kesten, Lang et Smith, 1998), peu d’auteurs, à notre connaissance, ont étudié la question au Québec.

Il est d’autant plus important de s’intéresser à ce sujet que, la responsabilité de l’embauche des enseignants étant déléguée à chacune des commissions scolaires du Québec, les exigences et outils privilégiés sont susceptibles de varier selon les régions (Comité patronal de négociation pour les commissions scolaires francophones, 2011). Si, selon la littérature américaine sur l’étude de la sélection des enseignants (p.ex., Harris et al., 2010; Mason et Schroeder, 2010), l’on peut présumer que les responsables de la sélection au Québec ont recours à l’évaluation de certaines caractéristiques (capacité à communiquer à l’oral, l’enthousiasme, etc.), il y a tout de même lieu de se questionner si celles-ci correspondent, selon la littérature scientifique, aux caractéristiques les plus susceptibles de contribuer à la performance en emploi. Il y a également lieu de se demander si certaines des exigences, souhaitables mais non essentielles dès l’embauche, ne pourraient plutôt pas être développées par différents modes de perfectionnement, une fois en emploi. Compte tenu à la fois de la complexité de la profession enseignante et du fait que les programmes de formation à l’enseignement ne peuvent être considérés comme une étape terminale dans le processus de formation ou de développement de savoirs, savoir-faire, savoir-agir et savoir-être de l’enseignant (Conseil supérieur de l’éducation, 2014 [CSE]; Duchesne et Kane, 2010; Martineau et Presseau, 2003; MEQ, 2001a), il est primordial de bien identifier les caractéristiques individuelles et les pratiques qui sont les plus liées à la qualité de l’enseignement, en plus de départager celles qui devraient, idéalement être maîtrisées dès l’embauche de celles susceptibles d’être consolidées en cours d’emploi.

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Dans un autre ordre d’idées, il semble d’autant plus pertinent de savoir comment ces caractéristiques sont mesurées. La qualité des différents outils de sélection utilisés pour mesurer les caractéristiques requises pour l’emploi constitue un enjeu important afin de s’assurer de l’embauche des meilleurs candidats à la profession (Guion et Highhouse, 2006; Pettersen, 2000; Rose et al., 2014). À cet effet, plusieurs auteurs (Gelade, 2006; Highhouse, 2008; Konig, Klehe, Berchtold et Kleinmann, 2010; Langhammer, Bernhard-Oettel et Hellgren, 2012; Rynes, Giluk et Brown, 2007; Tenhiälä et al., 2016; Terpstra et Rozell, 1998; Van Der Zee, Bakker et Bakker, 2002) ont démontré que les praticiens ont peu recours aux pratiques et aux instruments les plus valides dans le cadre de leur processus de sélection, se fiant davantage à leur intuition. Ils considèrent la littérature scientifique peu accessible ou préfèrent l’autonomie que leur confère le fait de ne pas recourir à des outils très standardisés, ce qui peut amener les décideurs à faire des choix reposant sur des bases erronées. Il paraît ainsi des plus intéressants d’étudier la qualité des pratiques de sélection utilisées en éducation en raison du fait qu’elles entraînement de lourdes conséquences, et, ce, à la fois pour le principal bénéficiaire du système, soit l’élève, dont la réussite est optimisée par un enseignement de qualité, de même que pour les gestionnaires qui souhaitent éviter les coûts liés aux erreurs de sélection.

Dans le contexte spécifique de cette étude, il y a lieu de s’intéresser aux exigences utilisées pour sélectionner les nouveaux enseignants au primaire et au secondaire ainsi qu’aux instruments choisis pour les évaluer.

Le premier objectif de ce mémoire est de décrire le processus sélection des enseignants au primaire et au secondaire dans les différentes commissions scolaires francophones du Québec en ce qui a trait aux caractéristiques recherchées et aux outils d’évaluation utilisés. Le deuxième objectif est d’analyser la qualité de ce processus en regard de ce que la littérature identifie comme les pratiques les plus valides en sélection. Enfin, un dernier objectif de ce mémoire est d’établir si certaines exigences évaluées seraient susceptibles d’être affinées par des activités de développement professionnel en emploi (supervision pédagogique, mentorat, etc.).

Le premier chapitre présente d’abord la problématique à l’étude en y exposant des éléments théoriques relatifs à la formation initiale ainsi qu’aux activités de développement professionnel, dans le but de mieux cibler les concepts fondamentaux devant être évalués lors de la sélection du personnel enseignant.

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Le deuxième chapitre traite des principaux déterminants de la qualité de l’enseignement et présente le contexte de sélection des enseignants spécifique au Québec francophone ainsi que les éléments qui permettront de mieux analyser la qualité des pratiques recensées. Ainsi, les éléments qui caractérisent un bon processus de sélection, les différentes qualités psychométriques que ce dernier doit comporter de même que des définitions générales de ce que représentent les exigences de sélection et les instruments d’évaluation seront les principaux éléments abordés.

Le troisième chapitre expose les caractéristiques méthodologiques de l’étude en présentant les participants, l’instrument de mesure utilisé ainsi que le déroulement de l’étude.

Le quatrième chapitre décrit les résultats obtenus dans le cadre de la recherche. D’abord, les résultats descriptifs sont exposés et présentés sous forme de tableaux de fréquences ou de figures. Ensuite, les résultats obtenus à la suite des analyses statistiques (corrélations de Pearson et analyse de variance à un facteur) sont présentés. Plus spécifiquement, la perception des pratiques de sélection, la taille de la commission scolaire, le nombre d’années d’expérience dans le poste, le ratio moyen de sélection, la région géographique de la commission scolaire et le domaine de formation du participant ont été mises en relation avec la moyenne d’utilisation des instruments selon leur validité qui comporte le niveau d’utilisation des outils considérés valides, moyennement valides ou peu valides. De plus, l’importance moyenne des catégories d’exigences a été mise en relation avec la moyenne d’utilisation des instruments selon leur validité.

Le dernier chapitre discute des pratiques recensées en relation avec ce qu’indique la littérature scientifique quant aux meilleures pratiques de sélection ainsi qu’en ce qui concerne ce qui pourrait faire l’objet d’activités de développement professionnel en emploi. Cette partie traite également des principales limites et retombées de l’étude de même que de ses implications à la fois pour la communauté scientifique et pour le milieu éducatif.

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Chapitre 1 : Problématique

Ce premier chapitre présente différents éléments liés à la problématique de la qualité de l’enseignement. Des éléments en lien avec les réformes éducatives, l’importance des enseignants, la formation initiale de ces derniers, leur insertion professionnelle et leur accompagnement une fois en poste en formation sont abordés.

Préoccupations générales pour la qualité de l’enseignement

L’éducation, domaine clé de la vitalité économique, politique et sociale d’une société (Gauthier et Mellouki, 2003; Wotherspoon, 1998) représente une préoccupation profonde à l’échelle internationale (OCDE, 2006). Avec l’essor mondial d’une économie axée sur le savoir (Istance, 2002; OCDE, 2006; Petrella, 2000), l’éducation constitue désormais un champ d’intérêt important pour beaucoup de disciplines dont l’économie (Orivel, 2006). En effet, selon Orivel (2006), l’investissement dans la formation des individus entraîne, certes, des coûts, mais les bénéfices engendrés par celle-ci sont généralement supérieurs au coût initial d’investissement, ce qui en fait « une activité rentable ». Plusieurs, de fait, ont souligné les retombées individuelles marchandes et non-marchandes liées à l’éducation, comme un meilleur taux d’emploi (OCDE, 2014), un meilleur revenu (Alba-Ramirez et San Segundo, 1995; OCDE, 2014; Psacharopoulos et Patrinos, 2004; Siphambe, 2000), une meilleure santé (Elo et Preston, 1996; Kenkel, 1991; Sander, 1995) et un meilleur niveau de bien-être (Centre for Educational Research Innovation, 2007). De plus, il faut souligner que les bénéfices de l’éducation ne se limitent pas au plan individuel, puisque celle-ci contribue au développement économique de l’état (Hanushek, Machin et Woessmann, 2016; OCDE, 2014). Par ailleurs, considérant l’obligation de performance, de productivité et de résultats occasionnée par une économie orientée vers la compétitivité, les entreprises sont désormais à la recherche d’effectifs hautement qualifiés qui répondent à leurs objectifs organisationnels croissants (Bourhis, 2013; Gauthier et Mellouki, 2003; Petrella, 2000; Tardif, 2012). Compte tenu de ce contexte économique également caractérisé par une main-d’œuvre vieillissante et par des attentes élevées des gestionnaires en regard des compétences et savoirs que devraient avoir les individus qui font leur entrée sur le marché du travail (Bourhis, 2013; OCDE, 2006; Tardif, 2012) il paraît juste d’affirmer que « la matière grise est devenue la véritable matière première » (Tardif, 2012, p. 6) des organisations.

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6 Les réformes éducatives

Au Québec, nombre de réformes éducatives se sont succédées dans les dernières décennies afin, entre autres, d’adapter le système éducatif aux nouvelles exigences de la société contemporaine. Plus précisément, c’est le Rapport Parent (1963), marqueur identitaire fort, qui souligna l’entrée de la société québécoise dans l’ère moderne (Rocher, 2004). En effet, c’est à la suite des recommandations formulées dans ce rapport qui suivait la Commission Royale d’enquête visant la révision de l’organisation et du financement de l’enseignement (Dufour, 1997; Rocher, 2004) que le gouvernement québécois commença réellement à réformer le système éducatif (Dufour, 1997). Sans en faire ici une liste exhaustive, les principaux apports du Rapport Parent ont été de rendre le système éducatif québécois plus accessible et plus équitable pour un maximum d’individus (démocratisation de l’éducation), de même que de mettre de l’avant des pistes pour rehausser la qualité de l’éducation (Dufour, 1997; Rocher, 2004; Wotherspoon, 1998). Les principales préoccupations ciblées par la commission d’enquête, soit l’accessibilité et la qualité de l’éducation (Commission royale d'enquête sur l'enseignement dans la Province de Québec, 1963), bien qu’elles aient été l’objet de nombre de réformes éducatives dans les années suivant le rapport (p.ex., la création du MEQ, des commissions scolaires et des Cégeps, l’obligation de la formation universitaire pour les enseignants, fréquentation scolaire obligatoire jusqu’à 16 ans) (Dufour, 1997), sont, encore aujourd’hui, des enjeux éducatifs capitaux (OCDE, 2014).

Les séries de réformes éducatives qui ont succédé au Rapport Parent ont fait l’objet de nombreuses critiques et ont mené à un autre vaste mouvement de réformes initié par les États généraux de l’éducation de 1995 (Gauthier et Mellouki, 2003; Pelletier et Lusignan, 2009). Tel que souligné par la Commission des États généraux sur l'éducation du Québec (1996), à la différence du Rapport Parent, qui visait à édifier un système éducatif de masse et de qualité, cette dernière commission avait pour principal objectif de dresser un portrait du système en place et, à la lumière de l’Exposé de la situation, document publié à la suite des audiences publiques de 1995, «[d’en] indiquer les voies de rénovation possibles » (p.4) (Guimont, 2009). L’Exposé de la situation, a soulevé différents problèmes relatifs au système éducatif québécois: l’abandon scolaire des garçons notamment, le manque de ressources pour accompagner les élèves issus de l’immigration et en difficulté, le besoin marqué d’activités de formation continue pour les enseignants, le caractère obsolète des curricula, la trop importante centralisation des responsabilités administratives aux instances supérieures, etc. (Commission des États généraux sur l'éducation du Québec, 1996a).

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Compte tenu des différents problèmes identifiés, les visées de la Commission étaient nombreuses : améliorer et rationaliser la gestion de l’éducation, revoir la mission éducative du système, développer des activités de formation continue pour les enseignants, réviser les curricula, etc. L’enjeu principal était toutefois de réunir le maximum de conditions possibles pour contribuer à la réussite de l’élève (Guimont, 2009; Pelletier et Lusignan, 2009). Les années qui ont suivi les États généraux de l’éducation, plus précisément le début des années 2000, ont notamment été marquées, sur le plan législatif, par des modifications à l’égard de la Loi sur l’Instruction publique (LIP) (Guimont, 2009). Celle-ci a été modifiée à la fois pour préciser la triple mission de l’école québécoise1 et pour décentraliser le système, transférer certains pouvoirs décisionnels des instances supérieures (gouvernement) vers les instances locales (commissions et établissements scolaires) (Dutercq, 2005; Pelletier, 2001). Cette situation, bien que favorisant une certaine autonomie de gestion des ressources par les instances locales, a entraîné nombre d’actions relatives à la reddition de compte pour les acteurs locaux envers le gouvernement, dont l’obligation de produire un projet éducatif et un plan de réussite pour s’assurer du succès des élèves (Guimont, 2009; Langlois, 2004).

Puisque les réformes des dernières décennies ont fait de la réussite éducative et de la qualité de la main d’œuvre enseignante leurs principales orientations (Tardif, 2012), il semble essentiel d’optimiser les différentes ressources du système pour faire en sorte qu’elles convergent vers cet objectif de réussite éducative (Van Zanten, 2004). Le personnel enseignant constitue en effet un acteur clé dans l’application des politiques éducatives (Carpentier, 2012; Gauthier et Mellouki, 2003; Haddad et Demsky, 1995; Wang et al., 1993), mais aussi, voire plus encore, en ce qui concerne l’efficacité du système éducatif dans son ensemble (Coleman, 1966; Hattie, 2009; Stronge, 2007).

Importance de l’enseignant

Plusieurs études ont, au cours des dernières décennies, rendu compte de l’importance des caractéristiques et pratiques de l’enseignant pour la réussite des élèves. La méta-analyse de Wang et al. (1993) évaluant l’influence de différents facteurs (p.ex., l’environnement familial, les caractéristiques de l’élève, les politiques scolaires, les pratiques dans la classe) sur l’apprentissage des élèves a grandement contribué à la compréhension de ce champ de recherche en soulevant le

1Instruire, qualifier et socialiser (MEQ, 2001)

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caractère essentiel des variables dites proximales sur les apprentissages des élèves. Selon ces auteurs, celles-ci, c’est-à-dire les caractéristiques psychologiques des élèves, les pratiques d’enseignement adoptées en classe, l’efficacité de la gestion de classe de l’enseignant, etc. sont directement liées au succès des élèves, alors que les variables qualifiées de distales, soit, principalement, les pratiques organisationnelles, la culture de l’école, les politiques éducatives, etc. n’auraient que des effets indirects sur les apprentissages des élèves. Plus récemment, une étude d’Hattie (2009) a corroboré le caractère déterminant de l’enseignant dans le succès des élèves au moyen d’une synthèse de plus de 800 méta-analyses. Bien que ses travaux soulignent l’importance du climat scolaire, du style de leadership exercé par la direction et des aspirations parentales, le principal constat de l’auteur est que ce sont les enseignants qui demeurent les principaux artisans de la qualité des apprentissages des élèves, avec une taille d’effet, soit un d de Cohen de d=0,49.

Bien qu’il existe nombre de recherches empiriques portant sur ce qui est susceptible d’entraîner les meilleurs résultats en termes d’apprentissages chez les élèves, certains auteurs (Luke, 2003; Slavin, 2002; Thomas et Pring, 2004) déplorent le peu de considération ou d’intérêt à l’égard de ces résultats. En effet, en dépit du fait que l’on assiste depuis quelques années à une certaine volonté de référer aux pratiques les plus efficaces en enseignement, ce que prône d’ailleurs le No Child Left Behind aux États-Unis (2002) qui vise à assurer à tous les élèves, quel que soit leur milieu, une éducation de haute qualité (Office of Superintendent of Public Instruction, 2011), les pratiques éducatives les plus efficaces, selon la recherche, ne sont pas nécessairement celles qui sont utilisées par les enseignants (Boutin et al., 2014; Cheng, Cheng et Tang, 2010). En effet, par exemple, comme le démontre la méga-analyse de Bissonnette, Gauthier et Péladeau (2010) alors que les méthodes d’enseignement explicite sont les plus efficaces pour l’apprentissage de la lecture, l’écriture et les mathématiques chez les élèves, il ne s’agit pas des pratiques les plus valorisées en formation initiale et continue des enseignants. Ce peu de considération à l’endroit des pratiques fondées sur des données probantes en éducation, c’est-à-dire, sur des pratiques rigoureuses ayant des fondements scientifiques (Davies, 1999), nuit grandement à la qualité des services éducatifs offerts aux élèves (Gauthier, 2006). Les incidences de cette situation se manifestent notamment dans l’élaboration des programmes de formation à l’enseignement, dans les processus de sélection en emploi des enseignants, dans la mise en place d’activités de développement professionnel, (Harris et Rutledge, 2010) ainsi que dans les réformes éducatives, activités la plupart du temps basées sur des croyances, des tendances ou intuitions plutôt que sur des recherches empiriques (Davies, 1999; Gauthier, 2006). Il va ainsi sans

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dire que la connaissance des véritables déterminants de la qualité de l’enseignement est capitale pour ces activités qui ont pour mission d’améliorer la qualité du système éducatif, et, par le fait même, d’optimiser la réussite des élèves (CSE, 2004; Gauthier et Mellouki, 2003; Ko et Sammons, 2013; Riley, 1998; Stronge et Hindman, 2003).

La formation initiale des maîtres

Tel qu’en fait état le CSE (2004), l’une des principales façons d’intervenir sur la qualité de l’enseignement dispensé aux élèves est d’améliorer la formation initiale des maîtres. Celle-ci représente d’ailleurs un enjeu mondial au cœur des réformes scolaires (Gauthier et Mellouki, 2006; Laroui, 2011). Au Québec, les programmes d’enseignement sont, depuis 2001, basés sur un référentiel de douze compétences2 que doivent développer les futurs maîtres lors de leur formation initiale (MEQ, 2001). Le référentiel est constitué des compétences jugées essentielles à l’exercice de la profession enseignante et vise à orienter la formation initiale des maîtres ainsi qu’à définir les pratiques enseignantes dans un langage commun (MEQ, 2001). Il vise également à rendre compte d’un intérêt généralisé à professionnaliser l’enseignement, c’est-à-dire, d’une part à reconnaître socialement et légalement l’autonomie professionnelle des enseignants, et d’autre part, à faire de la profession un processus d’apprentissage continu par la mobilisation de ressources et de savoirs spécifiques, le partage d’expertise, etc. en cours d’exercice des fonctions (Laroui, 2011; MEQ, 2001). Les compétences que l’on y retrouve sont variées et concernent plusieurs variables du champ éducatif. Par exemple, il est souligné que les enseignants doivent utiliser des stratégies d’enseignement variées pour transmettre les contenus à faire apprendre, s’assurer de l’insertion des élèves en difficulté, faire de la classe un lieu ouvert à la pluralité, intégrer les technologies de l’information, collaborer avec l’équipe-école ainsi que les parents, etc. (voir le référentiel à l’annexe A).

Le programme de formation des enseignants, incluant le référentiel, a suscité, depuis son implantation en 2001, nombre de critiques ciblant notamment, la trop grande importance accordée aux compétences (Baillargeon, 2009; Carbonneau et Tardif, 2002; CSE, 2004; Gauthier, 1997;

2L’UQAM a ajouté au référentiel, en 2002 , une treizième compétence soit « S'approprier la réalité pluriethnique de la société québécoise

et de l'école montréalaise, se sentir réellement concerné dans ses actions pédagogiques, développer les compétences de l'éducation interculturelle.»

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Laroui, 2011; Perrenoud, 2008). En dépit de la volonté ministérielle d’assurer l’intégration, le développement et l’évaluation de ces compétences professionnelles au cours de la formation initiale, il faut tenir compte du fait qu’une compétence, par définition, est appelée à se développer et à évoluer (Nicholson, Schuler et Van de Ven, 1995; Tardif, 2006). Bien que la définition de la compétence professionnelle puisse comporter différentes dimensions et varier selon la perspective théorique adoptée (MEQ, 2001; Nicholson et al., 1995), la perspective éducative québécoise (MEQ, 2001) définit la compétence comme « un savoir agir complexe prenant appui sur la mobilisation et l’utilisation efficaces d’une variété de ressources » (Tardif, 2003, p. 37) se situe sur un continuum qui va du simple au complexe et se déploie en contexte d’exercice professionnel réel (MEQ, 2001). Ainsi, un individu, au terme de sa formation, ne peut être considéré comme un «praticien achevé » puisque son processus d’apprentissage et de formation se poursuivra tout au long de sa carrière par l’entremise des expériences vécues, des années passées et des activités de formation suivies (MEQ, 2001). Le MEQ (2001) insiste d’ailleurs sur le caractère inachevable de la compétence : « la compétence, du moins celle qui se situe à un niveau élevé de généralité, gagne donc à être perçue comme un horizon de travail qui est davantage une finalité sans fin qu’une finalité atteignable » (p.51). Conséquemment, il faut comprendre que bon nombre des compétences professionnelles ne seront maîtrisées qu’au cours de la carrière enseignante grâce à l’expérience acquise ainsi qu’aux activités de développement professionnel suivies (MEQ, 2001; OCDE, 2014). Il va sans dire que les nouveaux enseignants, compte tenu de leur peu d’expérience, sont moins outillés (stratégies, ressources matérielles, etc.) que leurs collègues plus expérimentés pour faire face aux tâches et difficultés quotidiennes (Dufour et Chouinard, 2013; Mukamurera, Martineau, Bouthiette et Ndoreraho, 2013; Perrenoud, 2001). Les jeunes enseignants peuvent, par exemple, moins souvent référer à des expériences vécues pour élaborer diverses stratégies de planification et d’intervention. De plus, les jeunes enseignants arrivent souvent dans la profession avec d’importantes lacunes en gestion de classe, ce qui fait en sorte qu’ils passent beaucoup plus de temps à organiser et à structurer l’environnement qu’à transmettre les contenus à faire apprendre aux élèves (Chouinard, Chené, Roy, Nault et Fijalkow, 1999).

En somme, malgré la réforme de la formation initiale des enseignants au début des années 2000 (MEQ, 2001), l’intégration des nouveaux enseignants au marché du travail représente toujours un défi en ce sens où ceux-ci seront soumis à des situations inédites pour lesquelles ils n’ont pas été nécessairement préparés au cours de leur formation initiale (Martineau et Presseau, 2003).

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11 Insertion professionnelle et décrochage enseignant

« Choc de la réalité », telle peut être appelée la période où le nouvel enseignant doit à la fois s’intégrer à l’organisation qui l’accueille (Martineau et Presseau, 2003), et, comme le soulignent Tardif et Lessard (1999), adapter ses pratiques à celles de ce nouvel environnement. Duchesne et Kane (2010) soulèvent que le nouvel enseignant peut parfois, malgré une formation initiale comportant des stages en milieu de pratique, être désenchanté par la réalité du milieu : sur-structuration des tâches, précarité de l’emploi, peu de reconnaissance, etc. À cela s’ajoutent d’importants défis qui viennent complexifier la réalité enseignante: diversité de la clientèle scolaire, intégration des nouvelles technologies, gestion de classe difficile, etc. (Martineau et Presseau, 2003; MEQ, 2001; Mukamurera, Bourque et Gingras, 2008; OCDE, 2006; Smaller, Clark, Hart, Livingstone et Noormohamed, 2000; Tardif, 2012). On rapporte, au Canada comme dans de nombreux pays industrialisés, la difficile insertion professionnelle des jeunes enseignants (Gingras et Mukamurera, 2008; Karsenti et al., 2013). À cet effet, une étude de Mukamurera (2005) réalisée auprès de 251 enseignants à statut précaire, relève que, durant leur première année, 45 % d’entre eux enseignent des matières pour lesquelles ils n’ont pas été formés. Cette étude fait état de plusieurs difficultés liées à l’étape de l’insertion professionnelle : la mobilité professionnelle, soit le fait que les nouveaux enseignants sont fréquemment appelés à changer d’écoles et de niveau d’enseignement (primaire et secondaire), ainsi que l’hétérogénéité des tâches (enseignement de plus d’une discipline). Sur le plan personnel, une étude de Houlfort et Sauvé (2010) révèle que les enseignants ayant moins de six ans d’expérience présentent, de façon générale, un sentiment d’anxiété plus élevé que les enseignants plus expérimentés. Cette situation pourrait s’expliquer, selon eux, par les difficiles conditions liées à l’emploi : instabilité, adaptation, charge de travail élevée, etc. Martineau et Presseau (2003) soulignent que plusieurs aspects relatifs aux tâches de l’enseignant peuvent faire en sorte que ce dernier développera une faible estime de lui-même, voire un sentiment d’incompétence pédagogique ou de non-contrôle vis-à-vis de la tâche professionnelle à effectuer. Ceux-ci soulignent que les tâches qui suscitent un sentiment d’incompétence élevé sont principalement la gestion de classe et la gestion des contenus à enseigner. Nombre d’enseignants déplorent d’ailleurs un manque de ressources pour faire face à ces nombreuses difficultés (Houlfort et Sauvé, 2010; Martineau et Presseau, 2003; Royer, Loiselle, Dussault, Cossette et Deaudelin, 2001).

À la lumière de ces constats, les sources de difficultés vécues par les enseignants constituent un enjeu fort préoccupant puisqu’elles peuvent mener à l’abandon de la profession (Ingersoll, 2001b).

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Au Québec, les données statistiques concernant l’insertion professionnelle des enseignants (Martel, 2009), indiquent que 83 % des finissants en éducation, tous domaines et statuts d’embauche confondus, sont insérés dans l’année suivant leur diplomation, et qu’environ 15 % de ceux-ci quittent l’emploi pour différentes raisons. Kamanzi, Tardif, Lessard et Dionne (2015), dans une étude pancanadienne menée en 2006 sur le décrochage enseignant font état que près d’un enseignant canadien sur quatre (24 %) pense souvent à quitter la profession. Selon la même étude, ce sont 26 % des enseignants québécois qui pensent régulièrement à décrocher.

Ce taux de déperdition élevé chez les jeunes enseignants peut se révéler une des causes de la pénurie d’enseignants que vivent actuellement certains pays développés dans l’enseignement de certaines disciplines (OCDE, 2006). Au Québec, il s’agirait principalement de difficultés de recrutement pour les domaines d’enseignement des mathématiques, des sciences et technologies et des langues secondes, ces difficultés étaient d’ailleurs plus marquées dans certaines régions plus éloignées (Gauthier et Mellouki, 2003; Martineau et Ndoreraho, 2006). Le CSE (2004) mentionne d’ailleurs que « la question des difficultés de recrutement de personnel enseignant est directement liée à celle de la qualité des services éducatifs offerts » (p.47). En effet, si les commissions scolaires ont des difficultés de recrutement de candidats, cela est susceptible d’affecter les exigences de sélection, qui risquent d’être revues à la baisse, affectant ainsi la qualité du personnel enseignant embauché, donc la qualité des services offerts aux élèves. De plus, les départs prématurés d’enseignants créent des besoins d’embauche fréquents, ce qui implique un renouvellement perpétuel du personnel enseignant, ce qui engendre des coûts importants pour l’organisation (Karsenti, 2015). Ainsi, plutôt que de se trouver en présence d’un corps enseignant de plus en plus expérimenté dans une école, l’école peut avoir à recommencer son processus d’intégration professionnel avec des enseignants moins expérimentés sur une base régulière. Aussi, certains enseignants peuvent être embauchés à la dernière minute et n’ont ainsi pas la chance de préparer les contenus à enseigner avant d’être parachutés dans une classe.

Aux États-Unis, Barnes, Crowe et Schaefer (2007) estiment le coût national annuel du décrochage des enseignants à 7,3 milliards. Selon le rapport du « Texas Center for Educational Research » (2000), un prof qui décroche, au Texas, entraîne des frais d’environ 8 000$ US. Les coûts découlent principalement du recrutement et de la sélection, de la formation du nouvel enseignant, des pertes liées à la productivité (le nouvel enseignant sélectionné aura besoin de temps avant d’atteindre un niveau de productivité similaire à celui qui occupait le poste) ainsi que de toute autre dépense

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administrative occasionnée par le de départ de l’enseignant (Barnes et al., 2007; OCDE, 2006; Synar et Maiden, 2012). Au Canada, aucune étude n’a été recensée concernant les coûts financiers associés au décrochage des enseignants.

Parmi les différents facteurs susceptibles de mener au décrochage des enseignants recensés par Karsenti et al. (2013), notons aussi ceux liés à l’environnement social. En effet, selon plusieurs études (Hancock, 2008; Hughes, 2012; Smith et Ingersoll, 2004), le soutien de la direction (rétroactions sur les pratiques adoptées disponibilité du supérieur, etc.) et l’accompagnement offerts aux nouveaux enseignants seraient des facteurs clés pour la rétention de ceux-ci. Des pratiques favorisant le soutien des nouveaux enseignants devraient être mises en place dans chaque école, car sans accompagnement efficace, les nouveaux enseignants ne susciteront pas les apprentissages escomptés chez les élèves (Hattie, 2009; Wong, 2004). En somme, il est essentiel de s’assurer que les enseignants qui sont disposés à dispenser un enseignement de qualité aux élèves sont bien soutenus dans leur milieu de travail.

Accompagnement, développement professionnel et caractéristiques individuelles

Le développement professionnel est vu comme un processus individuel ou de groupe qui vise à améliorer les connaissances, habiletés et attitudes des individus en regard de l’emploi (Sparks et Loucks-Horsley, 1989). Les activités qui y sont liées doivent à la fois considérer les besoins des nouveaux enseignants en situation d’insertion professionnelle, ceux des enseignants qui accèdent à de nouveaux postes (Hétu, Lavoie et Baillauquès, 1999) ainsi que ceux des enseignants déjà en emploi. Pour les enseignants, les activités de développement professionnel peuvent se révéler fort pertinentes pour répondre aux difficultés rencontrées en cours de carrière (CSE, 2004, 2014) ou pour combler les besoins qui n’auraient pas déjà été comblés au terme de leur formation initiale (Hénault, 2011). Le Comité d'orientation de la formation du personnel enseignant (2000) insiste sur le fait que: « […] le dispositif québécois actuel de formation des enseignants et des enseignantes, conçu comme une formation initiale à l’enseignement, constitue un seuil qui marque une étape dans une formation "professionnalisée" qui doit se poursuivre tout au long de la carrière […]. » (p.54). Plusieurs (Alliance for Excellent Education, 2004; CSE, 2014; Hamel et al., 2013; Loeb, Kalogrides et Béteille, 2012; OCDE, 2006; Williby, 2004) soulignent d’ailleurs l’importance pour les établissements et

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commissions scolaires d’instaurer des programmes officiels généralisés d’insertion et de développement professionnel pour les enseignants, non seulement pour actualiser leurs connaissances et compétences, mais également pour assurer leur rétention au sein de la profession.

Selon les études, plusieurs compétences ou connaissances peuvent être développées au moyen d’activités de développement professionnel, mais ce sont principalement les connaissances de la matière, des stratégies d’enseignement et des styles d’apprentissage ainsi que les compétences de gestion de classe et certaines caractéristiques personnelles, dont la capacité à innover et le sentiment d’efficacité personnelle, qui semblent faire le plus l’objet d’activités de formation ou de développement une fois en poste (Cochran-Smith et Lytle, 1999; Garet, Porter, Desimone, Birman et Yoon, 2001; Hord et Sommers, 2008; Moore Johnson, Harrison Berg et L. Donaldson, 2005). Pour maximiser leur efficacité, il apparaît essentiel que ces activités de développement et d’accompagnement répondent aux besoins réels de leurs participants qui ont chacun des expériences différentes dans le milieu (CSE, 2014).

En outre, puisque « [le ministère] sollicite la responsabilité des enseignants dans leur propre formation continue […]. » (Murray, 2014, pp. 108-109), il faut comprendre que l’enseignant est lui-même au centre de son développement, ce dernier étant appelé à être responsable devant ses pratiques, activités et décisions (Perrenoud, 2001; Uwamariya et Mukamurera, 2005). Donc, certaines caractéristiques apparaissent essentielles pour que l’enseignant puisse s’engager activement dans son processus de développement continu, et par le fait même, en bénéficier. Certaines qualités personnelles comme la motivation envers le processus et les activités, l’engagement, l’ouverture, l’esprit de coopération, le leadership exercé par l’enseignant et certaines habiletés comme l’analyse réflexive semblent être des caractéristiques clés servant de leviers aux différentes activités de développement professionnel (Broad et Evans, 2006; CSE, 2014; Karabenick et Conley, 2011; Kent, 2004; Murray, 2014; Spanneut, 2010; Uwamariya et Mukamurera, 2005; van den Bergh, Ros et Beijaard, 2015). À ce sujet, si les habiletés, les connaissances et certaines autres caractéristiques peuvent être développées par différentes activités de développement professionnel, Murphy (2002) souligne que les individus qui sont les plus susceptibles de voir leur rendement augmenter à la suite de celles-ci sont ceux ayant notamment un niveau de motivation élevé dès l’embauche. Considérant cela, il semblerait pertinent de ne pas seulement évaluer les connaissances et compétences des candidats, mais également certains traits liés à la personnalité susceptibles de rendre compte de la probabilité qu’un nouvel enseignant s’investisse dans son développement professionnel. Dans un

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même ordre d’idées, Murphy (2012) insiste sur le fait que les différences individuelles telles les capacités cognitives et, notamment, la personnalité, sont généralement stables dans le temps. Cela témoignerait ainsi de la pertinence d’évaluer en contexte de sélection, les capacités cognitives et la personnalité des candidats en regard du poste, puisque ces facteurs seraient moins susceptibles d’être modifiés ou développés. Cela appuie les propos de Brandstätter (1997) qui soulève que, les compétences, contrairement aux traits de personnalité, seraient des différences individuelles davantage susceptibles d’être développées ou améliorées ou moyen d’activités de formation, de programmes d’éducation ou autres.

Or, bien qu’importantes, les activités de développement professionnel ne peuvent constituer le seul vecteur de l’efficacité d’une école et de son personnel (OCDE, 1998). En effet, s’il est possible d’accompagner les nouveaux enseignants et de créer des activités répondant à certains de leurs besoins, ces derniers doivent toutefois, dès leur embauche, posséder certaines caractéristiques ou habiletés qui, d’une part, favoriseront la réussite des élèves, et, d’autre part, les aideront à s’intégrer à leur nouvel environnement de travail. Par exemple, bien qu’il semble essentiel que les connaissances de la matière soient constamment perfectionnées grâce à des activités de développement professionnel en emploi (Desimone, 2009; Van Driel et Berry, 2012), il demeure essentiel que, dès son embauche, le candidat possède un niveau minimal de connaissances de la matière qu’il enseignera (Darling-Hammond, Berry et Thoreson, 2001; Krauss et al., 2008; Shulman, 1986). Il en va également de même pour l’habileté de gestion de classe. En effet, si, certes, le milieu et l’expérience peuvent contribuer au développement de cette habileté (Chouinard et al., 1999; CSE,2014), un enseignant doit être capable d’instaurer un climat de classe favorable aux apprentissages et d’exercer son leadership et son habileté à gérer et à organiser la classe, et cela dès son entrée en poste (Martineau et Gauthier, 1999; Stronge, Ward, Tucker et Hindman, 2007).

Il apparaît donc des plus importants de cibler les facteurs individuels de l’enseignant et ses pratiques qui sont susceptibles de contribuer positivement au succès de l’école québécoise (apprentissages des élèves, rétention des enseignants, intérêt pour développement professionnel, etc.) afin de mieux orienter les pratiques de sélection.

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Chapitre 2 : Cadre théorique

Ce deuxième chapitre expose différents concepts clefs retenus pour répondre aux objectifs de la présente étude. Ainsi, les principales caractéristiques associées à la qualité de l’enseignement sont présentées ainsi que les principales qualités relatives aux bonnes pratiques de sélection. À ce sujet, le processus de sélection c’est-à-dire ses principales étapes et propriétés psychométriques sont d’abord soulevées, pour, ensuite, présenter les principaux instruments de sélection pouvant être utilisés dans la sélection des enseignants au primaire et au secondaire au Québec.

L’efficacité en enseignement

Si la littérature consacrée aux caractéristiques du bon enseignant est abondante, on n’y retrouve pas de véritable consensus quant à celles que doit nécessairement posséder un enseignant pour avoir un impact sur la réussite des élèves (Darling-Hammond, 1999; Guarino, Santibañez et Daley, 2006; O'Neill, 1988; Palardy et Rumberger, 2008; Ronfeldt, Reininger et Kwok, 2013; Talbot, 2012). Stronge et al. (2011) mentionnent que la complexité relevant de la définition de la qualité de l’enseignant ou de son efficacité tient du fait qu’elle dépend de ce à quoi on l’attribue. Ainsi, la qualité de l’enseignement peut se définir par les facteurs relevant de la personne enseignante (qualifications, caractéristiques, etc.) ou encore par la situation d’enseignement, soit les pratiques utilisées par l’enseignant en classe (Ko et Sammons, 2013). Ce qui suppose l’établissement de critères de performance clairs ainsi que des outils de mesure valides. À cet effet, Soar (1983) dans son article « Measure of quality in the classroom » passe en revue trois façons de mesurer l’efficacité de l’enseignant mis en lumière par Mitzel (1960). D’abord, il pose un regard critique sur les mesures qualifiées de prédictives (presage measures) qui sont liées aux prédispositions de l’enseignant pour le poste, par exemple, les tests de connaissances ou d’intelligence, le nombre d’années d’expérience, etc. Ces mesures seraient, selon l’auteur, dépourvues d’intérêt considérant les conclusions très peu convaincantes des études portant sur leur apport dans les apprentissages des élèves. Ensuite, il soulève l’intérêt accordé, dans la littérature scientifique, aux mesures liées au produit (résultats des élèves à des tests quelconques). La majorité des recherches recourent d’ailleurs à cette mesure à titre d’indicateur de la qualité de l’enseignement (Goe, Bell et Little, 2008; Van Damme et al., 2009; Wang et al., 1993). Il est pourtant difficile de mettre les résultats des élèves en relation directe avec la qualité de l’enseignant compte tenu des nombreux autres facteurs pouvant influencer ces résultats (Cusset, 2011; Ko et Sammons, 2013). En effet, les résultats des élèves peuvent être liés à d’autres facteurs

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tels que des caractéristiques liées aux caractéristiques personnelles des élèves ou à des apprentissages vécus dans des lieux extérieurs à l’école (Talbot, 2012). Finalement, la dernière mesure consiste en l’évaluation directe de la performance de l’enseignant au moyen d’échelles d’évaluation par des observateurs. Cette méthode est également critiquée par l’auteur notamment, car l’évaluation s’effectue, le plus souvent, sans véritable structure. Soar (1983) rend ainsi compte de l’importance d’utiliser des instruments d’évaluation standardisés comportant des scores. Ceux-ci devraient être utilisés pour évaluer les pratiques utilisées par l’enseignant qui permettent à l’élève d’apprendre de façon efficace, de réussir aux tests, d’être motivé, etc.

Dans un même ordre d’idées, Hattie (2009) mentionne, en référence à l’efficacité en enseignement, que trop souvent l’on cible les caractéristiques personnelles ou professionnelles que l’enseignant doit posséder, au détriment des effets de ses comportements et pratiques sur les apprentissages des élèves. En effet, tel que souligné dans sa revue de diverses méta-analyses, la qualité des pratiques de l’enseignant constitue un facteur de première importance dans les succès et apprentissages des élèves (d=0,44), et ce, plus encore que la formation académique (d=0,11) ou les connaissances de la matière (d=0,09), par exemple. Talbot (2012) établit également que l’on devrait davantage considérer l’importance des pratiques enseignantes dans les communautés de recherche et dans le monde scolaire, puisqu’il n’existerait pas de « bon enseignant » en soi, notamment en raison du caractère fort contextuel des situations d’enseignement-apprentissage. C’est également ce que soulèvent nombre d’auteurs depuis quelques années (Bédard, 2011; Bissonnette et al., 2010`; Cusset, 2011; Hiebert et Morris, 2012) en suggérant que la formation des maîtres devrait être orientée vers l’enseignement des pratiques efficaces en éducation, soit celles qui, selon les recherches empiriques, occasionnent le plus d’apprentissages chez les élèves.

Or, en raison de leurs différences individuelles et des types de pratiques adoptées qui ne sont pas nécessairement celles les plus susceptibles de contribuer aux apprentissages des élèves, tous les enseignants n’ont pas la même contribution sur la réussite des élèves (Duckworth et al., 2009; Gauthier et Dembélé, 2004; Guarino et al., 2006; Hattie, 2009; Palardy et Rumberger, 2008; Talbot, 2012). Il semble donc pertinent de s’intéresser à ces caractéristiques, facteurs et pratiques qui permettent de reconnaître l’enseignant ou un enseignement de qualité (Darling - Hammond et Youngs, 2002; Kosnik et al., 2005; Stronge et al., 2011).

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Les caractéristiques personnelles sont, dans les écrits scientifiques traitant de sélection du personnel, généralement classifiées en quatre grandes catégories de caractéristiques individuelles, communément appelées en anglais KSAO: les connaissances (Knowledge), les compétences ou habiletés (Skill), les aptitudes (Ability) et les autres caractéristiques (Other characteristics) (Bourhis, 2013; Guion et Highhouse, 2006; Schmitt et Chan, 1998). Le fait de recourir à ces catégories permet notamment de mieux structurer les activités liées à l’analyse de poste de sorte à s’assurer que les caractéristiques personnelles les plus importantes de chacune des catégories soient présentes dans la description des exigences du poste (Society for Industrial and Organizational Psychology [SIOP], 2003). Cela permet de proposer une classification qui servira à mieux structurer ainsi qu’à illustrer la mise en relation avec les différentes tâches associées à l’emploi (Guion, 2011). Cette catégorisation servira, ultérieurement, à établir la nature des exigences évaluées par les commissions scolaires et permettra de mettre en relation celles-ci avec les instruments utilisés.

Les connaissances. Il s’agit d’informations qui peuvent porter sur des faits, des règles ou des procédures pouvant être spécifiques ou plus générales au poste, généralement acquises au terme d’un processus d’apprentissage (Gatewood et Feild, 1994).

Ce sont principalement les travaux de Shulman (1986, 1987) qui ont contribué à mettre en évidence les types de connaissances nécessaires à l’enseignant pour transmettre un contenu disciplinaire spécifique. Ce dernier a proposé un modèle composé de quatre catégories : les connaissances du contenu disciplinaire, les connaissances pédagogiques, les connaissances du contexte et les connaissances pédagogiques liées au contenu. D’abord, la catégorie « connaissances du contenu disciplinaire » semble être celle qui a suscité le plus d’intérêt auprès des chercheurs dans les dernières années (Darling-Hammond, 1999; Holt-Reynolds, 1999; Krauss et al., 2008; Metzler et Woessmann, 2012; Rowan, Chiang et Miller, 1997; Wilson, Floden et Ferrini-Mundy, 2001). Selon Rowan et al. (1997), l’importance des connaissances de la matière peut se justifier par le fait que celles-ci aideraient à la fois l’enseignant dans la planification des cours de sorte à cibler les contenus les plus pertinents, ainsi que dans la réalisation de la leçon en lui permettant de formuler des exemples et explications clairs et variés. Ensuite, selon Shulman, les connaissances pédagogiques générales qui renvoient aux connaissances nécessaires de l’enseignement pour susciter des apprentissages par les élèves, c’est-à-dire, l’organisation et la gestion de la classe, du temps, etc. seraient également fort importantes. Notons le principal apport des recherches de Shulman, qui a été de rendre compte de l’importance des connaissances pédagogiques de la matière, qui se distinguent des connaissances

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pédagogiques générales, d’un point de vue théorique. Cette catégorie de connaissances est dépendante de la situation d’enseignement. Elle inclut les modes de représentation des contenus ainsi que les modes de compréhension des élèves de ces contenus. Il s’agit ainsi, pour l’enseignant, de prendre en considération les différentes façons de représenter un même contenu afin de le rendre compréhensible (Wilson et al., 1987). Dans cette perspective, l’enseignant doit ainsi posséder une large compréhension de sa matière, des problèmes pouvant nuire à la compréhension de celle-ci et des façons d’intervenir pour que les contenus soient compris par tous (Akbari et Dadvand, 2014; Hauw, 1997; Martineau et Presseau, 2003; Shulman, 1987). Shulman aborde également les connaissances du contexte et du matériel de l’environnement qui renvoient à la connaissance des procédures d’évaluation en place, des curriculums à enseigner, des objectifs d’apprentissage, à la connaissance de l’établissement scolaire de façon plus générale, etc. Les études empiriques établissent cependant que les connaissances de la matière de l’enseignant sont faiblement corrélées avec la réussite des élèves (Ahn et Choi, 2004; Darling-Hammond, 1999; Rowan et Miller, 1997). Les faibles corrélations obtenues peuvent s’expliquer par les nombreuses variations méthodologiques relatives aux différentes études, notamment quant aux indicateurs de performance utilisés à la fois pour mesurer la maîtrise du contenu par les enseignants (souvent évaluée par la performance à un test ou par la formation suivie) et la performance des élèves qui peuvent remettre en question certaines corrélations obtenues (Ahn et Choi, 2004; Cusset, 2011; Kunter, Voss et Baumert, 2011; Wayne et Youngs, 2003).

Enfin, les travaux portant sur les pratiques de sélection des directions scolaires américaines indiquent que ce sont les connaissances relatives à la matière (Engel, 2012; Harris et al., 2010; Ingle, Rutledge et Bishop, 2011; Kersten, 2008) et les connaissances des stratégies d’enseignement (Dunton, 2001; Kersten, 2008) qui sont jugées les plus importantes par les directions scolaires en contexte de sélection. Les études de Ingle et al. (2011) et de Harris et al. (2010) soulignent par ailleurs que les directions scolaires jugent davantage importante une connaissance approfondie de la matière à enseigner au secondaire qu’au primaire. En effet, les directions auraient tendance à considérer l’enseignant au secondaire comme un spécialiste de son domaine. La situation diffère au primaire où les enseignants doivent être polyvalents et transmettre des contenus disciplinaires variés (mathématiques, français, histoire, etc.).

Les habiletés. Les habiletés ou compétences spécifiques (Catano, 2009) se différencient des connaissances par le fait qu’elles impliquent leur mise en œuvre, soit leur application dans un contexte spécifique lié à l’emploi (Bourhis, 2013). Celles-ci doivent être directement en lien avec le poste et

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sont souvent conceptualisées comme des caractéristiques nécessitant généralement certaines connaissances ou aptitudes pour être exercées (Guion, 2011). Elles se différencient nommément des traits de personnalité qui ne sont pas des compétences (Walsh et Eggerth, 2013). Par exemple, le leadership ou encore le sens des responsabilités ne reposent pas sur la capacité d’un individu à accomplir une tâche quelconque spécifique au poste, mais plutôt sur des traits propres à l’individu, c’est pourquoi elles ne sont pas des habiletés

.

Les habiletés constituent l’essence même du programme de formation des maîtres (MEQ,

2001). La profession enseignante étant fort complexe, il va sans dire qu’elle nécessite la maîtrise de nombre de compétences (Gauthier et Mellouki, 2006). Plusieurs auteurs (Bissonnette, Richard, Gauthier et Bouchard, 2010; Gauthier et Dembélé, 2004; Hiebert et Morris, 2012; Talbot, 2012), dans les dernières années, ont répondu à un besoin d’un grand intérêt pour le domaine éducatif, soit celui d’identifier les pratiques enseignantes efficaces ou les pratiques qui sont associées à des résultats positifs chez les élèves. D’abord, tel que le soulève Doyle (1986), si l’une des principales tâches de l’enseignant est de transmettre les contenus à faire apprendre, une autre tâche centrale de la profession est liée à la gestion de classe. Selon l’auteur, l’enseignant doit ainsi être en mesure de structurer l’environnement de la classe, réagir aux propos et comportements des élèves, instaurer des règles et procédures à suivre dans la classe, etc. L’habileté de gestion de classe est considérée par plusieurs auteurs comme une variable de première importance lorsque l’on réfère aux pratiques efficaces en enseignement (Chouinard et al., 1999; Engel, 2012; Martineau et Gauthier, 1999; Stronge, 2007; Talbot, 2012; Wang, Haertel et Walberg, 1994). De bonnes pratiques de gestion de classe contribuent, selon la synthèse des travaux portant sur la gestion de classe de Martineau et Gauthier (1999) d’une part, à améliorer les résultats scolaires des élèves, et, d’autre part, à créer un environnement de classe propice aux apprentissages. Une bonne gestion de classe réduit les facteurs pouvant restreindre le temps consacré aux situations d’enseignement-apprentissage et améliorerait l'engagement de l'élève envers les tâches (Patrick, Turner, Meyer et Midgley, 2003; Ryan et Patrick, 2001; Wang et al., 1994). Ryan et Patrick (2001) définissent l’engagement de l’élève comme la capacité de ce dernier à autoréguler ses apprentissages et à persister dans la réalisation des tâches malgré les difficultés rencontrées. Dans un même ordre d’idées, Talbot (2012) soulève que les enseignants dits « efficaces » sont des experts de la gestion et de l’organisation. En effet, ceux-ci doivent avoir une excellente expertise en gestion didactique. Ils présentent ainsi clairement les contenus à faire apprendre aux élèves, en proposent différentes opportunités d’apprentissages et s’assurent de la compréhension des objectifs par chacun (Feyfant, 2011; Hattie, 2009; Talbot, 2012). Ils ont également une bonne gestion

Figure

Figure 2. Distribution des participants, en pourcentage, selon leur opinion à l’égard de leurs pratiques de sélection  (n=20)
Figure 3. Importance moyenne des quatre catégories d’exigences (n=20).

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