LES CONCEPTIONS SUR LA REPRODUCTION
ET L'HEREDITE: UNE ETUDE CHEZ DES ELEVES D'UNE ECOLE RONAINE
G. NOCE,
S. STRUSBERG
Département de psychologie des processus
de développement et de socialisation
Université La Sapienza, Rome
Mots clés: Conceptions Cellule Hérédité Obstacles
-Pratique pédagogique.
Résumé:
Ce travail consiste en une enquête sur les conceptions des élèves de la
"Scuola media" (c.a.d. 5ème française)
à propos de la reproduction, de
l'hérédité, de la fécondation; et sur la possibilité de modifier ces mêmes
conceptions par une meilleure compréhension du concept de cellule.
Introduction
Les études concernent les conceptions "spontanées· ou "la science in génue" d'adultes ou de jeunes sujets montrent tou)urs clairement l'écart qui existe entre les shémas interprétatifs que les diverses sciences pro-posent pour l'explication de la réalité humaine et naturelle, et l'image qui en reste chez les individus. Le problème de l'éducation scientifique est celui de la non significativité des apprentissages scolairs et vient de la difficulté de changer des conceptions na1ves. Ainsi apparait la né-cessité de réfléchir aux possibilités de différencier, par de nouvelles formes d'enseignement, les croyances fondées sur les intruitions et les perceptions découlant de l'experience de la vie quotidienne, des formes d'interprétations objectives offertes par la science.
Pour G. Bachelard la connaissance scientifique doit tenir compte de celles pré-existantes. On arrive A chaque concept scientifique en surmon-tant les "obstacles épistémologiques", c.a.d. les erreurs qui ne sont pas seulement d'origine accidentelle, mais que le sujet a une grande propen-sion A répéter. Et c'est en termes d'obstacles que peut se poser le pro-blème de la connaissance scientifique, c.a.d. le passage des c?nceptions plus ou moins personnelles, plus ou moins culturelles ou idéologiques aux "concepts" ou mod~les de la science.
Ce travail part de quelques résultats interessants observés A partir d'une enquête réalisée précédemment à Genèv@ par l'un des deux auteurs
IS.
Strusberg, 1984), sous la direction de A. Giordan,avec des jeunes de 13 à 15 ans d'une classe de 8° genevoise correspondant A la 3~media ita-lienne. Ces él~ves montraient en général des conceptions très différentes des modèles scientifiques sur la fécondation, la reproduction, l'hérédi-té. En particulier i l leur manquait les concepts de cellule, ovule et spermatozoldes.D'apr~s cela nous avons posé l'hypoth~se que ce concept constitue, s ' i l n'est pas bien acquis un obstacle primaiNA l'apprentissage dss con-cepts de reproduction et d'hérédité.
Au cours de cette enqu~te nous avons rassemblé des informations sur Ge que pensaient quelques él~ves italiens du même Age sur ces sujets; et à travers une méthodologie de pré-test, intervention experimentale, post-test nous avons commencé à travailler sur les verifications de notre hypo th~se.
"terza media" (5efranç~ise) d'une école de Rome. Les él~ves des 3 groupes ont eu des enseignements différents avant notre intervention.
Discussion de quelques résultats"
Le materiel a été utiliaé selon deux systèmes différents: le premier tendant à relever le contenu des réponses en utilisant des indicateurs ?iologiques qui pouvaient ou non c01ncider dans les 3 groupes d'élèves; le second ragroupait lea réponses en trois niveaux (A, B, Cl, selon que cellea-ci étaient plus ou moins proches du concept scientifique.
En ce qui concerne le premier objectif de l'enqu~te visant à relever les conceptions des jeunes romains, il est intéressant de remarquer en a-nalysant les réponses, quelques aspects particuliers.
La cellule est vue comme un "micro-organisme", une "accumulation d'orga
nismes'I, "une particule", Ilune atome", "une particule minuscule composêe
de substancea vivantes".
Il existe aussi chez les élèves une confusion entre cellule, tissu, organe et appareil.
~'ovule et le spermatozoîde, outre le fait qu'ils sont perçus comme "org~
nlsme H, l'appareil", "oeuf", l'liquide", Ilorgane", "cellule", sont
considê-rés comme un~nfant déjà préformé"qui doit encore se développer.
De telles réponses laissent supposer chez beaucoup d'élèves l'exi-stence de conceptions pr~formationnistesqui ont eu leur rôle à JoUer dans l'histoire de la biologie. Ceci parait aussi confirmé par les répon-ses à la demande concernant le rôle du p~re et de la m~re dans la forma-tion de l'enfant: le premier prévaut comme étant celui qui donne une for-ce spéciale provoquant dans la m~re le commencement des développements de l'enfant; alors que la seconde a plut8t le rôle de "couveuse". Ce préfor-mationn;sm& apparait clairement aussi dans quelques dessins de l'ovule et du spermatozo.de qui confirment ainsi les résultats trouvés à Gen~ve.
Autour des conceptions de fecondation apparaissent soit l'idée d'une "rencontre" entre cellules masculinss et fem;nines, soit celle d'une union entre plusieurs ovules et plusieurs spermatozoldes; ou encore la f~ condation est définie comme la reletion sexuelle, la grossesse, la forma-tion de l'enfant ou de sperme, la menstruation.
L'hérédité peut di pendre "d'une maladie pendant la grossesee", de
" ~es r~sultats détaillés feront l'objet d'autres publications.
"l'Age", ou de "l'état d'esprit des parents au moment de la conception", "des caract~res. dominants ou recessifs", ou encore elle est considérée comme une phénom~ne en soi, elle peut dépendre des parents, grand-parents ou bisa~euls.
En ce qui concerne le second objectif de l'enqu@te, celui de veri-fier dans quelle mesure la confusion sur les schématisations de féconda-tion, de reproduction et d'hérédité pourrait dépendre du manque de com-préhension du concept de cellule, cette premi~re tentative ne nous permet pas encore d'affirmer que l'hypoth~se soit vérifiée. Cependant on peut remarquer un changement par rapport à certaines conceptions de la part de quelques élèves.
On a constaté cette amélioration à travers leurs dessins et l'utilisation d'expressions plus correctes dans leurs définitions. Il semblait aussi y avoir moins de confusion entre cellule, tissu, organe et appareil.
En outre il reste chez quelques élèves une confusion entre cellule et mi-croorganisme et entre cellule reproductive et non reproductive. Beaucoup d'él~ves parlent de la "reproduction" de la cellule au lieu de la divi-sion, ce qui a probablement e~tr~i~éla confusion entre cellule et organi sme, puisque seulement dans le cas des organismes unicellulaires les pro-cessus de division et de reproduction co<ncident.
Dans le post-test un plus grand nombre d'élèves, que dans le pré-test, considèrent que l'ovule et le spermatozolde sont des cellules et que la fécondation est l'union entre les cellules masculines et féminine."
Pour l'hérédité beaucoup d'élèves utilisent davantage le concept de gène; par example: la différence physique entre les enfants de m@mes parents dé pend de "g~nes différents", du "patrimoine chromosomique".
~~!_!~!~!_2!!f~!~!!!~~~!!!!!sur la génération animale semblent s'@-tre améliorées chez beaucoup d'élèves, ce que l'on a pu constater surtout grace aux changements intervenus dans les dessins de l'ovule et du sperma tozoide, aux considérations sur les cellules reproductives masculines et feminines, aux réponses sur le mécanisme de la fécondation et sur le type de r6le assigné au p~re et à la m~re dans la formation de l'enfant
("L'homme donne les spermatozo~des et la femme lea ovules".
En ce qui concerne le rapport entre les niveaux de connaiasance (cfr.ta-bleau 1) sur la cellule et sur l'hérédité, on constate que, en générall les él~ves qui ont répondu dsns le post-test avec un niveau B ou Caux
questions sur l'hér6dité, répondent toujours dans le post-test avec le ni veau 8 ou C aux questions sur l'ovule et le spermatozoïde. Par example: dans le post-test l'él~ve n·4 répond aux trois questions avec le niveau (C) alors que l'él~ve n·7 répond avec le niveau (B).
Si l'on compare les réponses des trois groupes, on constate une gra~ de différence de niveau initial entre les réponses des él~ves sur le cel-lule et sur l'hérédité ce qui en géneral a étE en relation avec l'ensei-gnement que les élèves ont reçu; et dans le cas de l'hérédité, il semble que leur niveau dépende aussi de leur compréhension de la cellule. Dans le groupe C, qui n'avait pas eu de leçons sur l'hérédité avant le pré-test, on constate que dans le pré-test beaucoup d'éléves répondent aux questions sur le cellule, l'ovule et le spermatozo~de à un bon niveau (B ou C) alors que leura réponses sur l'hérédité sont d'un niveau (A) au pré-test mais an niveau (C), plus correct du point de vue scientifique, au post-test.
Conclusion
Il nous reste toujours comme problème ce que veut dir "connaitre les représentations des él~ves" si on tient compte du fait
que ces repri
se~tation ne sont pas des états fixes, qu'elles dépendent du contexte, et qu'il y aura toujours un êcart entre les réponses faites et la réalité dynamique de la pensée en action.
Nous voudrions faire remarquer un point que nous considérons assez significatif, à ssvoir le grand nombre de fautes et d'images ambiguës ou scientifiquement incorrectes que nous avons trouvées en anslyssnt les l i -vres de textes utilisés psr les élèves, et l'information recueillie dans les leçons données par les professeurs. Par example quand il est question de reproduction de la cellule au lieu de division, c'est sure ment ce qui a provoqué des confusions entre le concept de cellule et celui d'organi-sme chez beaucoup d'él~ves.
Pour en revenir sux résultats déjà présentés, on peut dire que M~me s ' i l s ne prouvent pas l'hypoth~se, ils vont dans le sens de cette hypoth~ se, à savoir qU'une bonne connaissance préliminaire de la cellule est né-cessaire pour apprendre les concepts de la reproduction et de l'hérédit6.
TABLEAU 1
Comllaraison entre le niveau des réponsp.s sur la cellule 'lt sur
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Réfere!1ces
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o~heredit:', Atti A.G.I.,:lome.
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Les représentation
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