HOMME - ENVIRONNEMENT DE ELEVES DE
LYCEES DE LA LOMBARDIE.
R. GAGLIARDI, LDES Université de Genève. P. BERNARDINI MOSCONI, Université de Pavie, Italie.
G. BARBIERI, B. UNGARO, E. CAMILLUCI, M. MINUTTI, et G. PAGANNI,
Groupe sur l'éducation à l'environnement de l'IRRSAE Lombard.
MOTS CLES : EDUCATION A L'ENVIRONNEMENT - ANALYSE DES
REPRESEN-TATIONS.
RESUME: L'analyse des représentations des élèves des Lycées en Lombardie indique qu'ils n'ont pas construit des conceptions scientifiquement correctes sur l'environnement. Ils ont des idées de type magique sur la nature et sur son rôle. Comme solution possible, un modèle d'éducation à l'environnement centré sur le concept de territoire est proposé.
SUMMARY : Analysis of representations of studient of secondary high schools in Lombardy shows that they have not built scientifically correct concepts about the environment. The students have magical ideas about nature and its role. A possible solution is discussed : to organize the environmental education around the concept of territory.
1. INTRODUCTION
Dans le cadre du Projet d'Educationàl'Environnement dans l'Ecole Moyenne et Supérieure de Lombardie (Progetto di Educazione Ambientale nella Scuola Media Superiori della Lombardia), organisé par "l'Institut Regional de Recherche, Expérimentation et Formation Permanentes en Education de Lombardie" (Istituto RegionaledeRicerca, Sperimentazione e Aggiornamento Educativi -IRRSAE, Lombardia), nous avons analysé les représentations sur l'environnement des élèves de deuxième et troisième année (16 - 17 ans). L'analyse était centré sur les représentations générales sur la nature, sur les rapports entre l' homme et l'environnement, sur les principaux problèmes quotidiensàdifférentes époques, en Italie et dans le Tiers Monde actuellement. Nous avons vérifié aussi si les élèves possèdent les connaissances nécessaires pour comprendre les processus de l'environnement.
2. METHODOLOGIE ET RESULTATS
Nous avons utilisé un questionnaire auquel ont répondu des élèves de deuxième et de troisième année de trois écoles supérieures: un lycée classique, un lycée scientifique et un institut de formation des maîtres. Le questionnaire comprenait six questions ouvertes.
Dans la première question nous avons utilisé une méthode qui avait donné des bons résultats avec des étudiants en sciences sociales: présenter une liste de cinquante mots et demander de formuler une phrase en utilisant au moins six de ces mots. Celte méthode permet de calculer la fréquence des mots utilisés et d'analyser les phrases élaborées. Par expérience, on savait en outre que la très grande liberté dans les réponses permet l'expression des aspects émotionnels difficilement analysables avec des autres méthodes. La liste comprenait des mots relatifsàl'environnement(eau, arbre, animaux, air, environnement, forêt, écosystème, énergie, équilibre, évolution, fruit, nature, plante, pluie, soleil, terre, transformation) et d'autres mots (beauté, brique, café, cosmos, création, défense, feu, homme, machine, maison, maître, mère, miroir, pain, qualité, table, tasse, univers, utilité, ville). Les mots étaient disposés en ordre alphabétique sans distinction entre eux.
Le mot le plus fréquent a éténature (dans 42 réponses sur 83). Dans les phrases où ce mot était présent les élèves ont souvent utilisé d'autres mots sur les végétaux, les animaux, et l'homme. Par contre le mot écosystème ne figure que chez 5 élèves.
Les réponses montrent quatre caractéristiques importantes:
- Le panthéisme: l'environnement est aperçu comme "contrôlé" par une entité magique. - La nature, qui protège l'homme et certaines espèces.
- L'anthropocentrisme: l'environnement est conçu comme étant au service de l'homme. - Le pessimisme: les rapports entre l'homme et l'environnement sont toujours aperçus de façon négative pour l'environnement; l'homme détruit l'environnement et il n'y a pas d'issuesàcette situation.
Ces "caractéristiques" constituent des obstacles à la construction des connaissances scientifiques sur l'environnement et au développement de changements de comportement nécessaires pour la protectionàl'environnement.
La deuxième question était:
Signale les principaux problèmes delavie quotidiennedans: lapréhistoirelaGrèce ancienne -la
Rome ancienne - le Moyen-dge - l' dge rrwderne - l'dge contemporain - l'Italie - le Tiers Monde. Les réponses indiquent une vision figée du passé, où les problèmes de la vie quotidienne sont réduitsàdeux ou trois stéréotypes:
- Pour la préhistoire les problèmes quotidiennes sont: la nourriture, les animaux sauvages et le refuge.
- Pour la Grèce et la Rome anciennes: les guerres.
- Pour la moyen âge: la santé, les guerres et l'hygiène. - Pour l'âge moderne: la révolution industrielle.
- Pour l'age contemporain le principal problème est la pollution.
Les réponses sur les problèmes de la vie quotidienne en Italie et dans le Tiers Monde ont été plus diversifiées: 37 des 83 réponses disent que le principale problème de l'Italie est la pollution, 36 réponses signalent les problèmes politiques et sociaux, 21 le chômage, 12 la santé, 10 la drogue, 10 la maffia et 7 le mauvais gouvernement.
Pour ces élèves les problèmes du Tiers Monde sont différents: 65 réponses indiquent l'alimentation et l'agriculture comme les principaux problèmes et 35 indiquent la santé. La pollution n'est mentionnée que dans 5 réponses, l'instruction dans 7, l'eau dans 5 et la démographie dans 3 réponses.
Apparemment ces élèves ne sont pas conscients des problèmes de pollution dans le Tiers Monde, ni de la drogue (qui n'est pas mentionnée comme problème pour le Tiers Monde), ni des difficultés de logements, ni des mauvais gouvernements.
La différence entre la perception de la pollution comme principal problème de la vie quotidienne en Italie et non dans le Tiers Monde montre,ànotre avis, la non-compréhension des systèmes complexes qui lient la production, la consommation et la pollution dans les pays industrialisés et dans le Tiers Monde.
La troisième question était:
«Aujourd' hui, on parle beaucoup de transformation négative de l'environnement: explique ce que cela signifie et indique quelles ont été les causes déterminantes de ceci dans les différentes périodes de l'histoire.
Les réponses à celte question indiquent une confusion entre les causes des transformations négatives de ('environnement et les effets eux-mêmes.
Lephénomène le plus mentionné est la destruction des forêts (28 réponses sur 83), suivie par la pollution (16 réponses) et l'extinction des espèces (6 réponses). Le trou dans la couche d'ozone est mentionné par 3 élèves.
Les causes les plus mentionnées sont l'industrie (18 réponses), l'avidité (7 réponses), l'urbanisation (6 réponses), l'ignorance (6 réponses) et le progrès (4 réponses). Selon 7 élèves les problèmes de l'environnement ont commencé aujourd'hui, selon 6 élèves à la révolution industrielle et 7 élèves indiquent que la transformation négative de l'environnement s'est développé progressivement.
TI est intéressant de signaler qu'aucun élève n'a mentionné comme transformation négative de l'environnement la désertification, l'augmentation globale de température provoquée par l'effet de serre ou la transformation des fonds marins. Ils n'ont pas mentionné, non plus, comme cause de transformation négative de l'environnement l'agriculture ou la voiture.
Apparemment les élèves ont centré leurs réponses sur les transformations négatives les plus perceptibles, en particulier la pollution, très évidente en Lombardie.
La quatrième question demandait pourquoi une forêt est importante ?
Pour la plupart des élèves la forêt est importante par la production d'oxygène, d'énergie et de bois. Peu d'élèves ont mentionné l'importance de la forêt comme écosystème, et aucun n'a mentionné ce mot
La sixième question demandait la signification d'une série de concepts sur l'environnement, commeenvironnement, biosphère, déforestation, écologie, écosystème, pollution. recyclage, ordure, révolution industrielle, pluie acide, science et technique.
Les réponses à ces questions indiquent que les élèves n'ont pas de connaissances précises sur l'environnement. Par exemple les réponses surenvironnement:38 élèves ont répondu que "c'est tout ce qui entoure", 6 ont répondu que "c'est l'endroit où l'on vit", 8 ont répondu que "c'est l'ensemble des êtres vivants et non vivants", 4 ont dit que "c'est un endroit caractérisé par certains paramètres". Seulement 4 élèves ont utilisé dans la réponse le mot écosystème, en disant que l'environnement est le lieu où se développe un écosystème (2 réponses) ou que c'est un écosystème en équilibre où les organismes vivent (2 réponses). L'ensemble des réponses montre que les élèves pensent que l'environnement est extérieur aux organismes, que c'est un espace occupé par les organismes.
Les réponses surl'écosystèmemontrent l'absence totale de connaissances solides sur ce sujet. Sur 83 élèves qui ont répondu au questionnaire, 27 n'ont donné aucune définition de l'écosystème; parmi les réponses obtenues, aucune ne peut être considérée comme correcte d'un point de vue scientifique.
Les réponses sont vagues et font appel àdes notions telles que celle d'équilibre (13 réponses), d'interaction (lI réponses), de cycle (5 réponses) et de développement des organismes (5 réponses). 9 élèves utilisentlemot nature ou le mot naturel dans leurs réponses.
Toutes les réponses montrent que certains élèves ont des notions sur les interactions et les processus d'équilibration dans les écosystèmes, mais ces notions sont très vagues et ne sont pas reliéesàdes connaissances solides sur les processus sous-jacents.
CONCLUSIONS
Les réponses analysées indiquent:
Une vision anthropocentrique et panthéiste de l'environnement.
Le rapport homme/systèmes de l'environnement est aperçu de façon schématique et simpliste. Les élèves n'ont pas construit de concepts corrects d'un point de vue scientifique sur l'écosystème
HYPOTHESE DE TRAVAIL
A partir de ces conclusions il est évident pour nous que l'éducation à l'environnement dans l'école ne peut pas se réduire à une simple transmission d'information sur les écosystèmes et sur les rapports entre l'homme et l'environnement. La pensée des élèves doit se transformer pour pouvoir construire des connaissances scientifiques solides, utilisables et transferables entre disciplines, et surtout entre l'école et l'activité quotidienne en dehors de l'école. Trois aspects nous préoccupent particulièrement: la pensée panthéiste, l'anthropocentrisme et les idées simplistes sur les rapports entre l'homme et l'environnement. Ces trois caractéristiques s'opposent au développement de la responsabilité et de la solidarité vis-à-vis de la société et de l'environnement. Un élève centré sur lui-même, sans la capacité de comprendre la complexité des rapports qui relient l'homme et l'environnement, sans la capacité de se "décentrer", c'est un élève qui ne peut pas développer une pensée scientifique, support d'une éthique de l'environnement. Notre hypothèse de travail est de centrer l'éducationàl'environnement sur le concept de territoire, de façon à pouvoir intégrer tous les aspects de l'environnement en un réseau conceptuel qui relie les systèmes physiques, géologiques, météorologiques et écologiques avec les systèmes humains. Le concept de territoire peut aussi être utile pour développer la capacité des élèves à comprendre des systèmes complexes, tels que les systèmes sociaux, les ecosystèmes, les systèmes physiologiques, etc.
Le territoire peut être "enseigné" dans différentes disciplines (géographie, histoire, biologie, etc.) de façon à faire construire à l'élève les connaissances fondamentales propres à chaque discipline. Cependant l'expérience indique que l'intégration des connaissances ne se produit pas spontanément, et qu'il faut un travail cognitif intense pour l'obtenir. TI faudrait donc organiser la conduite des différentes disciplines autour des problèmes du territoire, de son histoire, des effets de l'action humaine, de l'impact de l'introduction des différentes techniques de production, des rapports entre les différents systèmes de l'environnement, etc. de façon à faire travailler à l'élève sur ce même thème vu sous des angles différents.
