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Perspectives de la pêche commerciale dans l'Arctique : eldorado ou richesse unique à protéger?

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Academic year: 2021

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Perspectives de la pêche commerciale dans l’Arctique

:

Eldorado ou richesse unique à protéger?

Mémoire

Augustin Boyer Chammard-Bangratz

Maîtrise en sciences géographiques

Maître en sciences géographiques (M.Sc.Geogr.)

Québec, Canada

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Résumé

Avec les changements climatiques et le recul progressif de la banquise, l'Arctique s'ouvre doucement aux activités économiques. La pêche commerciale ne fait pas exception et l'exploitation commerciale des poissons arctiques pourrait avoir des conséquences fâcheuses pour les écosystèmes marins de cette région du monde.

Il semble pertinent d'analyser la stratégie des acteurs politiques et économiques et leurs interactions dans le contexte de la pêche commerciale et de comprendre leurs volontés de développer ou non cette activité dans le cadre du développement durable.

À partir des statistiques nationales, sous-nationales et régionales, des questionnaires aux compagnies de pêche, des entretiens avec les ministères fédéraux et territoriaux et les conseils de gestion autochtones ainsi qu'avec les autres États côtiers arctiques, il s'agit de comprendre le développement de la pêche et l'évolution de sa gestion durable dans l'Arctique canadien et dans la haute mer arctique.

La volonté d'exploiter les stocks de poissons est indéniable de la part des acteurs politiques et des compagnies de pêche, mais de nombreux obstacles d'ordre technique, économique, scientifique et juridique semblent limiter l'augmentation et l'expansion de la pêche commerciale. Dans l'Arctique canadien, les différends entre les pêcheurs concernant les droits d'exploitation des ressources, le manque de connaissances scientifiques et d'infrastructures, et une faible productivité dans l'Arctique canadien laissent à penser que la pêche commerciale se limite à la baie de Baffin. À l'échelle internationale, la réglementation permet un accès libre aux ressources de la haute mer arctique encore recouverte de glace, mais les différentes stratégies des États côtiers arctiques et les faibles possibilités de pêche n'incitent pas à la mise en place d'un cadre durable dans cette région du monde. Néanmoins, le principe de précaution voudrait qu'un cadre de gestion durable des pêches soit mis en place avant que le retrait de la banquise permette un début de pêche commerciale. Nous n'assistons donc pas à une course vers un eldorado arctique ni à une interdiction totale de pêcher dans l'Arctique. Les possibilités de pêche sont faibles et l'activité se développe lentement, mais la durabilité de la pêche commerciale n'est pas encore assurée.

Mots-clés : Arctique, changements climatiques, cogestion, pêche commerciale, gouvernance, Organisation Régionale de Gestion de la Pêche, développement durable

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Abstract

According to climate change and retreat of sea ice, Arctic becomes progressively opened to human activities which include commercial fishing and marine biological resources should have negative consequences for Arctic marine ecosystems.

It seems relevant to analyze political and economic actor’s strategy and their interplay within the framework of commercial fishing and to understand their wishes to develop this commercial activity within the framework of sustainable development.

Based on national, international and subnational statistics, a questionnaire was sent to fishing companies, meetings with federal and territorial ministries, management boards and other arctic coastal states. I would like to understand the development of commercial fishing and sustainable fishing evolution in Canadian Arctic and Arctic high sea.

The wishes of economic and political actors to exploit fish stocks are incontestable but some technical, scientific, economic and legal obstacles limit commercial fishing expansion and increasing. In Canadian Arctic, disagreements between southern and northern fishers regarding resources exploitation, lack of scientific knowledge and infrastructures, and low productivity suggests that commercial fishing is limited in Baffin Bay. Within Arctic Ocean, different strategies of Arctic coastal states and low commercial fishing perspectives do not encourage a sustainable framework of commercial fishing. However, precautionary principles request commercial fishing framework implementation before sea ice retreat allows a commercial fishing beginning.

So, we are not witnessing a race to fishing Eldorado nor a ban of Arctic fishing. Fishing perspectives are low and commercial fishing development is slow but commercial fishing sustainability is not ensured.

Keywords: Arctic, climate change, comanagement, commercial fishing, governance, Regional Fishing Management, sustainable development

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... v

Table des matières ... vii

Liste des tableaux ... ix

Liste des figures ... xi

Liste des abréviations ... xiii

Remerciements ... xvii

Acknowledgements ... xix

Chapitre 1 : Introduction ... 1

1. Limites du terrain d'étude ... 3

2. Intérêt de la recherche ... 5

3. Objectifs et hypothèse (s) ... 6

A. Objectif général et objectifs spécifiques ... 6

B. Problématique ... 7

C. Hypothèse (s) ... 7

4. Revue de littérature ... 7

A. Les perspectives de pêche commerciale... 7

B. Les travaux scientifiques ... 9

C. La gestion de la pêche ... 12

Chapitre 2 : Méthodologie ... 15

1. Sources et cueillette des données ... 15

2. Limites et obstacles de la recherche ... 21

Chapitre 3 : Le cadre général de l'exploitation des ressources naturelles marines ... 23

1. Principaux concepts ... 23

A. Le développement durable ... 23

B. L'écosystème et la gestion écosystémique ... 25

C. La gouvernance ... 26

D. Ressource renouvelable et productivité biologique ... 28

E. Le principe de précaution ... 28

2. Les principales théories de l'exploitation durable des ressources marines ... 30

A. Les principales théories économiques de l'exploitation des ressources renouvelables ... 30

B. Les modèles d'exploitation des ressources renouvelables ... 31

3. Le cadre théorique de l'exploitation des ressources biologiques marines ... 34

A. Le droit international ... 34

B. Les modèles de gestion de la pêche ... 39

4. La pêche commerciale, un contexte mondial et en Antarctique ... 42

A. La situation de la pêche commerciale dans le monde ... 42

B. La situation de la pêche commerciale en Antarctique ... 44

Chapitre 4 : L'Arctique, un environnement marin spécifique ... 47

1. Territoire d'analyse ... 47

2. Territoire physique ... 49

A. Bref historique de l'environnement arctique ... 49

B. Les changements climatiques actuels ... 49

3. Territoire politique ... 55

A. Présentation de l'Arctique politique ... 55

B. Les coopérations régionales ... 56

C. Les subdivisions nationales ... 59

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A. Présentation des principales espèces pêchées de l'Arctique ... 62

B. La pêche illégale, non réglementée et non déclarée ... 66

5. Les spécificités de l'Arctique canadien... 67

A. Le contexte humain de l’Arctique canadien ... 67

B. Les spécificités de la gouvernance de la pêche dans l'Arctique canadien ... 70

C. Les spécificités des ressources marines et de leurs exploitations dans l'Arctique canadien 73 Chapitre 5 : Les perspectives de la pêche commerciale dans l'Arctique ... 79

1. La durabilité et la rentabilité de la pêche commerciale dans l'Arctique canadien ... 79

A. La cogestion ... 79

B. Le retrait progressif du gouvernement fédéral ... 85

C. Des produits particulièrement sains qui attirent ... 87

D. La durabilité des pêches commerciales arctiques ... 88

E. Conclusion ... 95

2. Développement de la pêche commerciale ... 96

A. L'évolution des pêcheries hauturières existantes ... 96

B. La pêche dans la baie de Cumberland ... 107

C. Une possibilité limitée d'exploiter de nouvelles pêcheries ... 116

D. Expansion de la pêche dans l’Archipel Arctique canadien et vers le nord de l’Arctique 118 E. Conclusion ... 122

3. La pêche commerciale dans l'Océan Arctique... 122

A. La pêche commerciale dans la partie canadienne de la mer de Beaufort ... 123

B. Comparaison entre la vision canadienne et états-unienne du développement de la pêche commerciale dans l'Arctique ... 124

C. Le développement de la pêche dans l’océan Arctique ... 127

D. Conclusion ... 144

Conclusion ... 147

Bibliographie ... 153

Annexe 1 : Questionnaire for commercial fishing company ... 165

Annexe 1b : Questionnaire pour les compagnies de pêche ... 167

Annexe 2 : Questionnaire pour les pêcheurs commerciaux de Pangnirtung (non soumis) ... 169

Annexe 2b : Questionnaire for commercial fishers of Pangnirtung (not submitted) ... 171

Annexe 3 : Résultats scientifiques des contaminants dans la crevette nordique ... 173

Annexe 4 : Résultats scientifiques des contaminants dans l’omble chevalier ... 175

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Liste des tableaux

Tableau 1 : Ensemble des entretiens ... 17 Tableau 2 : Critères pris en compte pour la mise en place d'une approche écosystémique ... 36 Tableau 3 : Évolution de la pêche commerciale dans le monde entre 1950 et 2011 ... 42 Tableau 4 : Évolution de la pêche dans les différentes parties de l'Océan Antarctique entre 1950 et

2010 ... 45 Tableau 5 : Propriétaires de licences de pêche de crevette nordique ... 76 Tableau 6 : Ensemble des compagnies de pêche du flétan du Groenland dans l'est canadien ... 77 Tableau 7 : Statistiques des prises d'omble chevalier dans les rivières de la baie de Cumberland ... 91 Tableau 8 : Évolution du trafic des bateaux de pêche dans la zone NORDREG entre 2005 et 2011 99 Tableau 9 : Évolution de la valeur de débarquement des prises de crevette et du flétan du Groenland entre 2005 et 2011 ... 104 Tableau 10 : Pourcentage des prises par rapport aux Totaux Autorisés de Capture entre 2005 et

2011 pour la crevette nordique ... 105 Tableau 11 : Pourcentage des prises par rapport aux Totaux Autorisés de Capture entre 2005 et

2011 pour le flétan du Groenland ... 106 Tableau 12 : Prise du flétan du Groenland dans la baie de Cumberland entre 1987 et 2009 ... 109 Tableau 13 : Évolution de la pêche commerciale de la crevette nordique dans la zone de pêche 3

entre 2005 et 2011 ... 120 Tableau 14 : Évolution de la pêche au krill dans l'Antarctique ... 130 Tableau 15 : Évolution de la pêche commerciale de la morue arctique entre 1950 et 2011 ... 141

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Liste des figures

Figure 1 : Délimitation de l'Arctique selon différents critères ... 4

Figure 2 : Modèle théorique classique du développement durable ... 23

Figure 3 : Modèle concentrique du développement durable ... 24

Figure 4 : Théorie du principe de précaution ... 29

Figure 5 : Différent statuts des eaux selon la Convention des Nations Unies du droit de la mer ... 35

Figure 6 : Différents cas de stocks migrateurs et chevauchants ... 37

Figure 7 : Cas de stocks transfrontaliers et de stocks homogènes... 38

Figure 8 : Évolution de la pêche commerciale dans le monde entre les années 1950 et 2010 ... 43

Figure 9 : La pêche dans l'Arctique : entre protection, exploitation et vulnérabilité ... 48

Figure 10 : évolution de l’extension de la glace de mer entre 1980 et 2011 en septembre (extension minimale) ... 52

Figure 11 : un des nombreux icebergs dans la baie de Cumberland ... 54

Figure 12 : Conseil de l'Arctique ... 55

Figure 13 : Organisations Régionales de Gestion de la Pêche dans l'Arctique ... 57

Figure 14 : Délimitation des régions de Pêches et Océans Canada... 60

Figure 15 : Activité de la pêche dans les Grands Écosystèmes Marins dans l'Arctique (moyenne de 2000 à 2006) ... 63

Figure 16 : Grille Nordmore utilisée pour éviter les prises accessoires ... 65

Figure 17 : Ensemble des Accords sur les revendications territoriales et communautés de l'Arctique Canadien ... 71

Figure 18 : Procédure de la mise en place d’une nouvelle pêche au Canada ... 74

Figure 19 : Zones de pêche de la crevette nordique dans la zone économique exclusive canadienne de la baie de Baffin ... 75

Figure 20 : Ordures à ciel ouvert non loin d'une rivière à Iqaluit ... 86

Figure 21 : zones de pêche de la crevette nordique et du flétan du Groenland dans la baie de Baffin ... 97

Figure 22 : Évolution de la pêche commerciale à la crevette nordique entre 1990 et 2010 dans la baie de Baffin ... 100

Figure 23 : Évolution de la pêche commerciale au flétan du Groenland entre 1950 et 2010 dans la baie de Baffin ... 102

Figure 24 : Débarquement pendant la marée basse ... 111

Figure 25 : Débarquement pendant la marée haute ... 111

Figure 26 : Port d'Ilulissat ... 112

Figure 27 : Port de Nuuk ... 112

Figure 28 : Usine de transformation de poisson à Pangnirtung (NU) ... 115

Figure 29 : Berges d'Iqaluit ... 117

Figure 30 : Zones potentielles de pêche dans la haute mer arctique ... 128

N. B. : Sauf indication contraire, les tableaux, figures, photographies et cartes ont été réalisés ou pris par l'auteur du mémoire

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Liste des abréviations

AMAP : Arctic Monitoring and Assessment Program

CCAMLR : Convention sur la Conservation des ressources marines vivantes antarctiques CGRFN : Conseil de Gestion des Ressources Fauniques du Nunavut

CPANE : Commission des Pêches de l'Atlantique Nord-Est

FAO : Organisation des Nations Unies pour l'Agriculture et l'Alimentation MPO : Ministère des Pêches et Océans Canada

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économique OPANO : Organisation des Pêches de l'Atlantique Nord-Ouest

ORGP : Organisation Régionale de Gestion de la Pêche ZEE : Zone Économique Exclusive

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Remerciements

Je voudrais remercier, tout d'abord mon directeur de recherche, Frédéric Lasserre et mon comité de direction, Jean-Éric Tremblay et Caroline Desbiens, pour le soutien qu'ils m'ont offert et la confiance qu'ils m'ont accordée pendant ces deux ans. De plus, je voudrais remercier toutes les personnes des différents ministères fédéraux (ministères de Pêches et Océans spécialement, mais aussi ministère du Transport, Agence Canadienne de l'Inspection des Aliments), les ministères et agences territoriales (CGRFN, la Division des Pêches du Ministère de l'Environnement du Nunavut, et la Conseil Mixte de Gestion des Inuvialuit) pour le temps qu'ils m'ont consacré et leur apport essentiel dans ce mémoire. J'aimerais aussi être reconnaissant envers les Ministères des Pêches de Norvège, du Groenland et des États-Unis d'Amérique pour leurs avis et l'attention qu'ils m'ont accordée ainsi que les compagnies de pêche qui ont bien voulu répondre à mes questions. Une attention spéciale pour Michael Neumann et Kendra Ulrich de l'usine de pêche de Pangnirtung.

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Acknowledgements

I would like to thank, first of all, my supervisor, Mr Frédéric Lasserre and my management committee (Jean-Éric Tremblay and Caroline Desbiens) for their encouragement and their confidence during these two years. Also, I would like to acknowledge all employees from federal departments (Department of Fisheries and Oceans, Transport Canada and Canadian Food Inspection Agency), and territorial departments and board (Nunavut Wildlife Management Board and Division of Fishing of Department of Environment of Nunavut and Inuvialuit Fisheries Joint Management Committee for their time and their helpful in my M Sc. I would like to thank Norwegian, Greenlandic and American departments of fishing for their advice and given attention and fishing companies who answered my questions. Last but not least, a special thanks to Michael Neumann and Kendra Ulrich of Pangnirtung fishing plant.

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Chapitre 1 : Introduction

En 2008, les États côtiers ont déclaré unanimement à Ilulissat la volonté commune d'exploiter les ressources naturelles, dont les stocks de poissons, dans le cadre international existant, mais ils ont aussi reconnu que l'Arctique est un écosystème unique profondément touché par les changements climatiques et que l'augmentation des activités humaines, dont la pêche, représentait un risque pour cet environnement et l'impact sur les populations autochtones : « Climate change and the melting of ice have a potential impact on vulnerable ecosystems, the livelihoods of local inhabitants and indigenous communities, and the potential exploitation of natural resources »1 puis plus loin : « By

virtue of their sovereignty, sovereign rights and jurisdiction in large areas of the Arctic Ocean the five coastal states are in a unique position to address these possibilities and challenges »2.

En effet, une des particularités de l'Arctique est la proportion d'Autochtones. Environ 200 000 Autochtones vivent dans l'Arctique soit environ entre 5 et 10 % de la population totale arctique qui varie entre 2 et 4 millions d'habitants selon les limites retenues. La population autochtone y est largement minoritaire, excepté au Groenland et dans certains territoires du Canada tels que le Nunavut (Alhenius, 2008)3.

La superficie des terres émergées recouvre 14 000 000 km², et la densité, bien inférieure à 1 hab./km², de l'Arctique est l'une des plus faibles du monde. La population arctique, encore plus que dans le reste du monde, vit principalement le long des côtes.

Considéré par le monde occidental comme une des régions du monde les plus éloignées et les plus mystérieuses du monde, l'Arctique est restée longtemps inexplorée occidental jusqu'à une époque récente, et a longtemps suscité la curiosité des explorateurs européens et nord-américains, comme en témoigne la course au pôle nord entre Frederick Cook et Robert Peary à la fin du 19e siècle.

Aujourd'hui, ce territoire, dont la mise en valeur et l'exploitation ont été, pendant des millénaires, l'œuvre des habitants du Nord, est en profonde mutation. La rencontre entre les peuples du Nord et ceux du Sud s'est déroulée progressivement et récemment avec l'exploration.

1 « Les changements climatiques et la fonte de la glace ont un impact potentiel sur les écosystèmes

vulnérables, les moyens d'existence des habitants locaux et des populations autochtones, et l'exploitation potentielle des ressources naturelles », traduction libre

2 « En vertu de leur souveraineté, de leurs droits souverains et de leur juridiction dans les vastes étendues de

l'océan Arctique, les cinq États côtiers sont dans une position unique pour s'occuper de ces possibilités et de ces défis », traduction libre

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L'accès vers l'Arctique a souvent été une mission périlleuse pour les explorateurs et les baleiniers et en devient facilité, à l'heure actuelle par le recul de la banquise. Alors que l'Océan Arctique a longtemps su garder ses richesses de la main de l'homme pour les donner aux prix d'efforts et de patience, elle s'ouvre doucement à l'exploitation intensive des hommes (Sale et Michelsen, 2008). Mais paradoxalement, l'Océan Arctique central est la dernière étendue d'eau à n'avoir jamais accueilli de marins, encore moins de pêcheurs et dont les seules personnes à l'avoir explorée ont été des explorateurs qui voulaient atteindre le pôle Nord (Frederic Cook, Robert Peary, Roald Amundsen) sur la banquise ou, plus récemment, les sous-marins et avions militaires des puissances russes/soviétiques et états-uniennes.

L'Arctique comporte cinq États côtiers, surnommés les Arctic 5, c'est relativement peu pour un Océan d'une telle superficie. Tous ces pays sont historiquement et économiquement tournés vers la pêche. Un de ces pays a les côtes les plus longues du monde, le Canada avec une longueur de côte supérieure à 200 000 kilomètres. Le deuxième pays n'est autre que la Norvège, loin derrière avec un peu plus de 84 000 kilomètres. Les États-Unis, la Russie et le Danemark sont tous les trois classés parmi les dix pays possédant les plus longues côtes du monde. La pêche commerciale y est souvent une activité importante pour les communautés locales comme au Groenland, les villages de pêcheurs le long des côtes norvégiennes et des côtes russes dans la mer de Barents, les Maritimes au Canada.

Ainsi, l'étude porte sur des disciplines tant humaines telles que la géographie, l'économie et la politique ou bien les disciplines plus physiques telles que la biologie et l'océanographie à travers une analyse multiscalaire, aussi bien mondiale, régionale, nationale et locale. En effet, dans toute activité commerciale, l'économie reste une discipline importante, l'homo œconomicus n'exerçant une activité commerciale que si elle est viable économiquement. L'économie prend d'autant plus son sens que les coûts sont élevés quand il s'agit d'exploiter des ressources dans l'Arctique. La politique est un élément capital dans l'analyse, car la pêche commerciale implique la gestion d'une ressource d'un territoire géré et délimité politiquement. D'autres paramètres plus physiques doivent être intégrés dans l'analyse pour qu'elle soit pertinente. L'océanographie permet de prendre en compte l'environnement et les changements que subissent les poissons dans un contexte particulier comme l'océan. Ces paramètres sont nécessairement pris en compte dans la gestion de l'exploitation d'une ressource marine biologique. L'ichtyologie a son intérêt, car la biologie des poissons arctiques est spécifique et s'est adaptée aux conditions nordiques. La biogéographie permet d'appliquer la géographie à la répartition des espèces, des paramètres biologiques des poissons dépendent leurs répartitions et par conséquent la localisation de leur exploitation.

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Le présent mémoire se structure en cinq parties. La première partie introduit le sujet, la problématique, les hypothèses et les objectifs généraux et spécifiques. Puis la méthodologie sera présentée. La troisième partie présentera les différents concepts indispensables à l'analyse, le cadre théorique de la pêche commerciale, les accords et les traités internationaux, et les différentes théories de cette exploitation des ressources naturelles marines, sa mise en contexte dans le monde et de l'Antarctique. Puis je présenterai le cadre plus spécifique de la pêche commerciale dans l'Arctique, comment la pêche commerciale est gérée, les différentes organisations régionales, les difficultés inhérentes de gestion à l'Arctique. Enfin, j'analyserai, dans la dernière partie, l'évolution de la pêche commerciale dans l'Arctique et de sa réglementation dans l'Arctique.

1. Limites du terrain d'étude

Avant de commencer ce mémoire, il est important d'expliquer le choix du terrain d'étude.

L’Océan Arctique est défini selon l’Arctic Monitoring and Assessment Programme (AMAP) comme montré dans la figure 1. La définition climatique s’attache à la limite des arbres ou l’isotherme 10 °C pour le mois le plus chaud ou bien pour ce qui nous concerne plus particulièrement la limite entre les eaux arctiques plus froides ou moins salées et les eaux plus chaudes et plus salées des Océans Atlantique et Pacifique, excluant toutefois l’Islande, la mer de Barents, la baie d’Hudson et le Nord québécois.

Cette limite ne peut pas constituer une délimitation pertinente de ce mémoire parce que sa limite n'est pas précise, notamment dans la baie de Baffin et qu'elle se trouve excessivement au nord dans la mer de Barents, traversant l'Archipel du Svalbard qui se trouve à un millier de kilomètres du pôle Nord, et coupant l'île de Nouvelle-Zemble. L’autre définition limite l’Arctique au 66° 33' 44" parallèle, c'est-à-dire le Cercle Arctique, limite à partir de laquelle il y a au moins une journée pendant laquelle le soleil ne se lève pas.

Le territoire d’analyse recouvre le territoire défini par l'AMAP puisque ce sont les limites les plus pertinentes. En effet, cette limite intègre les zones de pêche de l'Atlantique nord-ouest et nord-est, ainsi que la mer de Béring et l'océan Arctique tout en prenant en compte la baie James et la baie d'Hudson, dont les écosystèmes marins, possèdent des caractéristiques communes aux écosystèmes marins arctiques malgré qu'ils soient plus méridionaux.

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L'analyse se concentre plus particulièrement sur les zones de pêches réelles ou potentielles, en se concentrant plus particulièrement sur les parties canadienne et groenlandaise et toutes les installations et les infrastructures terrestres qui sont liées à une activité de pêche marine (ports, usine de conditionnement) et les infrastructures d’exportation. La position et la volonté des acteurs économiques et des institutions politiques qui s’occupent de cette activité seront analysées. L’importance des peuples indigènes vivant sur quasiment l’ensemble du territoire doit aussi être prise en compte ainsi que la façon dont les États du Sud gèrent les peuples nordiques vivant sur leur territoire.

Aussi, il est important de préciser que la recherche scientifique présente se limite à la définition la plus simple de la pêche : « Action ou manière de prendre des poissons » (Le Petit Robert 2012), en y incluant les crustacés, à des fins commerciales, c’est-à-dire dans le but de le vendre ou de le troquer à autrui et non pas à des fins personnelles. Les mammifères marins (baleines, phoques, bélugas, etc.) sont donc exclus de l’analyse qui suit.

2. Intérêt de la recherche

La recherche menée trouve son intérêt dans le fait que la gestion de la pêche commerciale a longtemps été considérée comme le domaine exclusif de la biologie et de l'ichtyologie. On considère aujourd'hui que la recherche halieutique comprend d'autres domaines scientifiques plus humains, notamment la sociologie, l'économie.

La place de la géographie dans la gestion de la pêche commerciale prend son sens dans l'analyse multiscalaire de la gestion, et le rôle de son analyse systémique.

L’intérêt de la recherche étant lié à la mise en place récente de cette activité commerciale dans cette région et au manque de connaissances des écosystèmes marins arctiques, il s’agira de comprendre comment évolueront les acteurs politiques et économiques et leurs interrelations dans la gestion d’un écosystème encore largement méconnu. Avec les effets des changements climatiques, de nouveaux stocks halieutiques pourront être exploités. Il s’agira de comprendre comment les acteurs font face à ce nouvel enjeu d’expansion de l’activité commerciale.

Aussi, les relations entre le gouvernement fédéral et les territoires canadiens, concernant le total autorisé des captures allouées à chaque société de pêches sont tendues en raison des bénéfices qui en sont retirés. En effet, les perspectives économiques des Territoires concernant une ressource renouvelable ouvrent de nouvelles voies de développement pour des Territoires dont les ressources économiques sont actuellement faibles.

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La pêche commerciale est une activité très bien connue dans le monde, en revanche, dans l’Arctique, elle est un phénomène encore marginal, à part dans la mer de Barents et la mer de Béring, par rapport aux océans Pacifique et Atlantique, mais qui pourrait augmenter de façon importante dans les années à venir.

Les retombées scientifiques possibles concernent la compréhension des enjeux politiques et économiques. Comprendre les relations de pouvoirs entre les différents échelons politiques canadiens et la concurrence qui se joue entre les compagnies locales de pêche, et les communautés Inuit permettra de mieux appréhender la gestion d’une ressource vivante renouvelable.

L’intérêt de cette recherche est donc d’apporter de nouvelles connaissances sur la rentabilité économique et le développement de la pêche commerciale dans l’Arctique et comment les acteurs peuvent interagir pour utiliser ce territoire selon leurs intérêts propres. Étant donné les nombreuses interrogations sur les nouvelles aires de pêche dans l’Arctique, cette recherche sur l’expansion de la pêche dans l’Arctique apporte de nouvelles données scientifiques sur la durabilité et l’évolution de la pêche commerciale dans l’Arctique dans un milieu en rapide mutation.

L'apport de l'opinion des compagnies de pêche et l'opinion des ministères fédéraux et territoriaux permettent de comprendre comment les différents acteurs politiques et économiques décident de gérer et développer la pêche commerciale dans l'Arctique. Aussi, l'intention et la vision des différents pays côtiers permettront d'apporter des connaissances sur la gestion de l’exploitation des ressources marines biologiques dans la haute mer arctiques et si l'exploitation des ressources marines est possible et la façon dont cette activité peut être gérée.

3. Objectifs et hypothèse (s)

A. Objectif général et objectifs spécifiques

L’objectif général de cette étude est d’évaluer l’évolution de la pêche commerciale dans l’Arctique. Les objectifs spécifiques seront de préciser :

- La rentabilité et la durabilité de la pêche commerciale dans l’Arctique

- L’évolution du rôle des institutions politiques (internationales, nationales, sous-nationales) dans la régulation de l’activité

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B. Problématique

Selon les objectifs que je me suis donnés pour ce mémoire, la question à laquelle j’ai tenté de répondre est la suivante :

Malgré la vulnérabilité et le manque de connaissances des écosystèmes arctiques dont les populations autochtones dépendent, la pêche commerciale arctique semble-t-elle se développer d’une manière durable?

C. Hypothèse (s)

L’hypothèse principale de l’étude est que la pêche commerciale augmente dans l’Arctique, favorisée par les changements climatiques, de façon durable grâce à un meilleur contrôle de l’activité, basé sur le principe de précaution.

Les hypothèses sur lesquelles je me suis basé pour entreprendre mon étude sont les suivantes : (1) Les espèces arctiques sont de plus en plus pêchées à des fins commerciales.

(2) Les espèces arctiques peuvent supporter une pêche commerciale dans l’Arctique canadien du fait des changements climatiques, en plus de l’exploitation de subsistance.

(3) Un meilleur contrôle et une législation plus importante avec la meilleure accessibilité de la pêche dans l’Arctique et une meilleure concertation entre les pays côtiers de l’Arctique permettent une meilleure durabilité de la pêche commerciale dans l’Arctique.

(4) La pêche commerciale dans l’Arctique évolue de manière durable grâce à une meilleure connaissance des écosystèmes et un plus grand contrôle des pêches commerciales.

4. Revue de littérature

A. Les perspectives de pêche commerciale

Maxwell John Dunbar (1968; 1970) s’est intéressé dès l’après-guerre aux écosystèmes arctiques et la possibilité de les exploiter. Il s’est plutôt montré pessimiste en concluant que les espèces qui pourraient être pêchées seraient les espèces subarctiques qui migreraient vers le nord avec le réchauffement des océans.

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Le développement de la pêche dans l’Arctique canadien est réclamé par le Nunavut (Brubacher Development Strategies Inc., 2004)4 et par le gouvernement fédéral. Néanmoins, les connaissances

sur l’évolution des stocks sont faibles et l’impact des pêcheries très incertain. Les rapports et les articles scientifiques restent très prudents et fragmentaires quant aux évolutions possibles de l’écosystème marin arctique. Les changements climatiques dans l’Arctique pourraient entraîner une augmentation de la productivité biologique, notamment sur les plateaux continentaux peu profonds alors que les conséquences de la productivité dans les zones plus profondes seraient moins importantes (Tremblay, 2011; Lee et al., 2012).

Ainsi, la meilleure accessibilité des ressources naturelles, notamment en Russie, mais aussi dans la mer de Barents ou dans l’Arctique nord-américain, contribue à une forte augmentation de la pollution dans l’Océan Arctique, notamment par les rivières (Kondratyev et al., 2003; Pavlov et al., 2004; Vera, 1995; Van Oostdam et al., 2005). L’importance de la productivité des planctons qui absorbent particulièrement bien les contaminants et la bioaccumulation dans la chaîne alimentaire se révèle efficace. Ces polluants ont pour effet une moindre efficacité dans la reproduction, des problèmes de croissance et surtout, un problème important de comestibilité qui affecte déjà les autochtones (Ravilious, 2011). Selon ce même rapport, il existe parmi ces polluants les Polluants Organiques Persistants (POP), les métaux lourds, ferreux et non ferreux (arsenic, cadmium, zinc) et la combustion de carburants fossiles. Les principales sources de pollutions sont l’Asie suivie de la Russie et les États-Unis d'Amérique. L’ouvrage Arctic Flora and Fauna : Status and Conservation publié par l’AMAP (Huntington et al., 2001) dresse un portrait général de l’écosystème arctique et des activités de pêche et leurs évolutions. On peut se rendre compte que, concernant la morue pacifique et atlantique (Gadus macrocephalus et Gadus morhua), la biomasse et les débarquements de prise sont en baisse depuis 1950 avec des variations importantes de prises et un arrêt complet des activités de pêche de la morue dans l’est du Canada dans les années 1990.

Les espèces invasives venant du sud pourraient aussi affecter l’écosystème arctique dont les composantes sont souvent peu productives et peu aptes à supporter une concurrence accrue. C’est aussi l’avis de Dunbar (1968) qui pense que les poissons venant de l’Atlantique ou du Pacifique pourraient permettre une pêche commerciale. Michael B. Usher (2004)5 dans le chapitre 10 précise

que les espèces invasives dans l’Océan Arctique sont un problème récent, mais que les données sont

4 Rapport disponible sur :

http://www.nunavuteconomicforum.ca/public/files/library/FISHERIE/aaConsultation%20document%20final. pdf

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encore incertaines. La décharge de ballasts avec l’augmentation de la navigation et du tourisme risque fort d’aggraver ce problème. Néanmoins, la survie de ces espèces aux conditions extrêmes hivernales est encore méconnue, il semblerait que la plupart de ces espèces n’y résistent pas malgré des conditions estivales plus propices. Les espèces invasives pourraient faire l’objet d’une exploitation plus importante si celles-ci venaient à survivre dans les conditions arctiques.

Des travaux ont été réalisés par les États-Unis, notamment dans les mers de Beaufort et de Tchouktches. Le Conseil de Gestion des Pêches du Pacifique Nord a publié un Plan de gestion des pêches pour les ressources de poisson dans l’aire de gestion de l’Arctique (2009) sur l’évolution de la biomasse et des politiques, concernant la morue arctique notamment, qui a conduit à un moratoire sur la pêche dans la zone économique exclusive au nord de l’Alaska, pour une période de 10 ans, sauf pour la pêche au saumon et le flétan du Pacifique qui est sous la juridiction, respectivement, d'un plan de gestion des pêches spécifique, qui interdit la pêche dans la mer de Beaufort et des Tchouktches, et de la Commission Internationale du Flétan du Pacifique qui inclut l'ensemble des zones économiques exclusives états-uniennes et canadiennes.

Néanmoins, les données et les études sur l’évolution des activités de pêche dans l’Arctique canadien sont très faibles en dehors de quelques rapports gouvernementaux sur la crevette nordique, le flétan du Groenland et l’omble chevalier dans la baie de Baffin. De plus, il existe une multitude de rapports du Secrétariat Canadien de Consultation Scientifique qui donnent de nombreuses informations sur les données biologiques des espèces arctiques, notamment ces dernières années. De plus, l'OPANO est doté d'un conseil scientifique qui met à disposition des articles sur l'état de santé des stocks arctiques et sur les totaux autorisés de capture.

B. Les travaux scientifiques

Les principaux travaux scientifiques qui ont été réalisés concernent spécifiquement les écosystèmes dans la Zone Économique Exclusive (ZEE) du Groenland (Gauthier-Ouellet, 2008; Hamilton, 2003) ou la mer de Barents (Gjosaeter, 2009; Klungsoyr et al., 1995; Werner, 2003; Ottersen, 2000). Les analyses portent sur l’importance du peuplement autochtone et des conséquences sur les gouvernances territoriales, surtout au Groenland ou bien l’impact de l’homme sur le milieu marin. Le Canada possède une littérature assez récente, portant sur les relations entre les écosystèmes marins et les Inuit notamment (Ford, 2007) et des rapports notamment des territoires canadiens (gouvernement du Nunavut). Ces articles scientifiques concernent généralement les conséquences des changements climatiques sur les comportements de reproduction, de survie, d’alimentation des poissons.

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Quelques ouvrages généraux sur l’environnement polaire ont été écrits comme l’ouvrage de Bobylev (2003) qui donne une vue globale sur l'environnement physique et biologique polaire et les effets des changements climatiques sur l’océan Arctique et les écosystèmes marins arctiques. Ces écosystèmes marins dépendent de façon importante à la fonte de la glace et les conditions favorables existantes pendant les périodes les plus chaudes qui permettent un développement du plancton alors que les saisons les plus froides sont caractérisées par la survie des organismes. Le plancton reste la base de la chaîne alimentaire marine et le réchauffement des océans conduit à un bouleversement important pour le reste de l’écosystème. Il y est précisé que la nature du plancton change avec la montée vers le nord de ces espèces avec le réchauffement de l’océan. De plus, de nombreux articles étudient la montée vers le nord d’espèces telles que le haddock et la morue atlantique et la concurrence concernant la nourriture (Renaud et al., 2011).

Les études portant sur la pêche dans l’Océan Arctique révèlent de profondes différences quant aux données et détails sur les activités de pêche données par les organismes internationaux. Dans les zones 21 et 27 de l'Organisation des Nations Unies sur l'Agriculture et l'Alimentation (FAO), les données sont assez nombreuses sur les activités de pêche menées par le Groenland dans la baie de Baffin et la Norvège et la Russie dans la mer de Barents. La FAO, l’Organisation de Coopération et Développement Économique (OCDE) et les différents gouvernements et ministères concernés donnent des informations assez claires concernant les types de prises, les navires de pêche qui entrent dans les zones de pêche. En revanche, dans la zone Arctique de la FAO (zone 18), il n’a été rapporté presque aucune prise depuis les années 1950 (FAO, État des ressources halieutiques marines mondiales. Rome, Département des Pêches de la FAO, 2005). Le Conseil International de l’Exploration de la Mer (ICES), dont fait partie le Canada, a publié un portrait récent des écosystèmes marins en 2010 dans le nord de l’Europe (Islande, mer de Barents, Îles Féroé, est du Groenland), mais les données restent partielles concernant la santé des écosystèmes.

Les principaux facteurs de productivité et de croissance seraient l’augmentation de la lumière, la disponibilité en nourriture, l’augmentation de la température et la baisse de la salinité. En revanche, les avis divergent sur la limite de ces trois facteurs sur la productivité et la croissance des poissons et de leur importance relative, mais il est généralement admis que l'élément déterminant est la température (Ottersen et Loeng, 2000; Meekan et al., 2003; Jiménez-Melero et al., 2012). Les effets positifs pourraient être contrebalancés par l’importance que revêt la glace pour des poissons comme la morue (Lafrance, 2009) pour se protéger des prédateurs (Darnis et al., 2012). Aussi, on note l’importance de l’atmosphère pour le transport de la pollution (Arctic Marine Assessment Program).

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Cheung6 pendant le symposium international sur la pêche dans l'Arctique (Anchorage, 2009) a prédit que la biomasse des principales espèces arctiques (morue arctique, morue du Groenland, omble chevalier) allait diminuer dans les prochaines années en raison du recul de la glace de mer et au réchauffement de l'océan. Ainsi, bien que ces espèces ne soient pas les principales espèces exploitées dans l'Arctique, la pêche commerciale de ces espèces tendrait à diminuer.

La zone côtière de la mer de Beaufort pourrait être une zone importante pour la pêche en raison de l’upwelling induit par le vent (Tremblay, 2011) et de l'amincissement de la banquise, (Mundy, 2009) mais ces eaux, très acides puissent avoir un impact néfaste sur la productivité biologique, des courants chauds venant du Pacifique et l’apport des grands fleuves, notamment celui du Mackenzie qui apporte de grandes quantités de nutriments et d’eau légèrement plus chaude (Lafrance, 2009). De nombreux ouvrages sur la biologie arctique, le fonctionnement des écosystèmes comme l’ouvrage d’Y. Herman (1989), D. N. Thomas (2008) ou des ouvrages plus généraux de Michel J. Kaiser (2011) ont été publiés. De nombreux articles scientifiques ont été écrits sur la biologie des espèces marines arctiques comme ceux de Louis Fortier et de Stéphane Thanassekos (2011) ou bien de Geoffroy (2011) qui tentent de modéliser la dépendance entre la croissance, la taille et la mortalité des morues dans deux polynies arctiques et reconnaissent l’importance du manque de connaissances sur ces espèces et sur leurs comportements. En tout cas, les morues arctiques dépendent de la glace pour se nourrir, se protéger des prédateurs et leur stratégie d’atteindre une longueur assez importante au moment du retrait des glaces pour réduire leur vulnérabilité face à leurs prédateurs peut être compromise par le réchauffement des océans. Aussi, les espèces marines vivent dans un écosystème, le déclin répété des stocks de capelan dans la mer de Barents a entraîné, selon Gjosaeter (2009) et Dolgov (2002), des conséquences importantes pour le reste de l’écosystème, notamment la morue atlantique en lien avec les changements climatiques. De nombreux articles ont été publiés concernant à pêche de l’omble chevalier, sa résilience face à l’exploitation humaine, qui semble assez faible (Dempson et al., 2008) et une acclimatation à des températures élevées qui décroit à mesure qu’elle s’élève au-dessus de 20 °C. La fécondité des ombles chevaliers ne semble pas dépendante de la latitude (Power et al., 2005), mais plutôt de la disponibilité en aliments et de la lumière. La distribution des crevettes nordiques dépend elle aussi

6 Rapport disponible sur :

http://doc.nprb.org/web/nprb/afs_2009/IAFS%20Presentations/Day1_2009101909/IAFS_Cheung_ClimateCh angeOnArcticFishStocks_am_101909.pdf

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de la disponibilité en phytoplancton et du modèle des courants océaniques (Perderson et Storm, 2002).

C. La gestion de la pêche

Comme l’affirme Geir Honneland (2005) concernant la pêche dans la Russie, des articles et des ouvrages scientifiques abordant spécifiquement la gestion de la pêche dans l’Arctique demeurent rares, la plupart se limitant plutôt aux questions biogéographiques. De plus, Becker (2010) prédit que malgré les différences entre les États arctiques concernant la gestion et les perspectives de pêche, une coopération pour la gestion de la pêche est plus plausible qu'un conflit. Un article de Molenaar (2009)7 discute des problèmes de la couverture de l’Océan Arctique par une Organisation

Régionale de Gestion de la Pêche (ORGP) dans l’Océan Arctique. Les études portant sur la pêche au cœur de l’océan Arctique n’apparaissent pas dans la littérature scientifique malgré certaines craintes d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) comme PEW Environment Group ou de la World Wildlife Fund (Koivurova et Molenaar, 2010)8.

Mr Roff (2011) explique que la gestion des ressources marines peut s’établir selon le modèle de la gestion de l’espèce ou de la gestion de l’écosystème. La gestion par espèce ne peut se faire que si l’espèce est bien connue tandis que la gestion par l’écosystème peut être préférable dans le cas d’un manque de connaissances de l’espèce (habitat, alimentation, reproduction), car il est plutôt convenable aux situations moins connues. Les scientifiques actuels s’entendent sur le fait que les espèces doivent être gérées de façon écosystémique, en intégrant, dans leur gestion, la chaîne alimentaire qui les englobe. La littérature (Table ronde nationale sur l’environnement et l'économie, 1998) concernant la gestion des ressources entre les pays occidentaux du Sud et les Autochtones apparaît progressivement du fait que la gestion des ressources est indissociable de la gestion humaine dans le cas de l’Arctique.

Bethan O’Leary (2012) montre dans l’article que la grande variabilité environnementale entraîne un plus grand risque d’effondrement des stocks et que la gestion des stocks est extrêmement compliquée dans ce contexte même quand les avis scientifiques sont respectés de manière stricte.

7 Rapport disponible sur :

http://doc.nprb.org/web/nprb/afs_2009/Molenaar%20Arctic%20Fisheries%20Conservation%20and%20Mana gement%20final%20version%20to%20YPL.pdf

8 Rapport disponible sur :

http://www.wwf.se/source.php/1223579/International%20Governance%20and%20Regulation%20of%20the% 20Marine%20Arctic.pdf

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Alan Kristofferson, de l’Université du Manitoba, a publié des articles concernant la pêche de l’omble arctique dans la baie de Cambridge (Kristofferson et al., 1984; Kristofferson, 2002) ou bien la cogestion au Nunavut des ressources renouvelables dans l’Arctique (Kristofferson et Berkes, 2005). Ces articles montrent la difficulté et la complexité croissante de la gestion des ressources fauniques de la pêche commerciale dans l'Arctique canadien.

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Chapitre 2 : Méthodologie

1. Sources et cueillette des données

Les données utilisées pour confronter les hypothèses ont été recueillies de différentes manières, des questionnaires pour les compagnies de pêche et des entretiens avec les employés des ministères territoriaux et fédéraux.

La technique utilisée a été l’entrevue via un informateur-clé concernant les rencontres à Ottawa, Winnipeg et Iqaluit dans les ministères pertinents (Pêches et Océans Canada, Agence Canadienne de l'Inspection des Aliments, Ministère de l'Environnement du Nunavut, Transport Canada, Conseil de Gestion des Ressources Fauniques du Nunavut). À travers des entrevues avec des spécialistes du MPO (analystes politiques, analystes des politiques internationales). Je suis allé recueillir des données précises et les avis des employés sur des sujets particuliers tels que les conséquences du changement climatique sur les espèces exploitées, la gestion et ses difficultés des espèces pêchées dans l'Arctique, les difficultés d’exploiter les stocks de poisson, les possibilités de développement de la pêche commerciale à partir d’entrevues centrées, c’est-à-dire, axées sur un certain nombre de sujets et de questions définis préalablement (Gumuchian et Marois, 2000), les employés ont souvent demandé les questions auxquelles ils devraient répondre, avant l'entretien afin de mieux le préparer et, parfois, d'amener des collègues de travail pour apporter d'autres éléments scientifiques et d'autres avis pertinents. Quand les employés n'étaient pas disponibles au moment de mes séjours et qu’il a été impossible de les rencontrer personnellement, des questionnaires leur ont été envoyés ou j'ai pu leur téléphoner de façon à recueillir leurs avis.

Ces entretiens (tableau 1) se sont déroulés avec les employés des différentes institutions politiques concernées par la pêche dans l’Arctique, qu’elles soient fédérales (MPO, Transport Canada, Agence Canadienne d’Inspection des Aliments), territoriales (Ministère de l’Environnement du Nunavut, le Conseil de Gestion des Ressources Fauniques du Nunavut, Commission Jointe de Gestion de la Pêche d’Inuvialuit, Nunavik) et les acteurs économiques tels que Makivik (société du Nunavik) qui exploitent des pêcheries commerciales), et la Pangnirtung Fisheries Ltée, usine de transformation du poisson à Pangnirtung.

J'ai contacté les employés fédéraux par courriel. La façon de définir les personnes-clés s'est faite à travers les différents rapports gouvernementaux concernant la pêche commerciale dans l'Arctique.

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Entretiens

Institution

Division

Fonction

Lieu de

l'entretien

Territoriaux

1 Conseil de Gestion des Ressources Fauniques du

Nunavut Biologiste Iqaluit

2 Ministère de l'Environnement du Nunavut Département des pêches Directeur Téléphone 3 Ministère de l'Environnement du Nunavut Département des pêches Employée Courriel 4 Conseil de Gestion des Ressources Fauniques

d'Inuvialuit

Président Courriel

Fédéraux

5 Transport Canada Projets spéciaux et navires arctiques Employé Ottawa 6 Agence Canadienne de l'Inspection des Aliments Normes techniques Analyste principal Ottawa 7 Pêches et Océans Canada Gestion des pêches et de l'aquaculture Agente supérieure

régionale Winnipeg 8 Pêches et Océans Canada Gestion des pêches, bureau d'Inuvik Biologiste Téléphone 9 Pêches et Océans Canada Programme de Ports pour Petits Bateaux Directrice générale Téléphone 10 Pêches et Océans Canada Gestion des pêches Technicien Iqaluit 11 Pêches et Océans Canada Bureau du sous-ministre délégué

Conseillère principale du sous-Ministre délégué

Ottawa

12 Pêches et Océans Canada Écologie/évaluation de poissons de

l'Arctique Chef de section Winnipeg 13 Pêches et Océans Canada Marine globale et affaires du Nord Directrice Ottawa 14 Pêches et Océans Canada Invertébrés marins Chef de programmes Courriel 15 Pêches et Océans Canada Région Arctique de l'Est Officier d'Administratio

n de Pêches Iqaluit 16 Pêches et Océans Canada Division aquatique arctique de

recherches

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Entretiens

Institution

Division

Fonction

Lieu de

l'entretien

17 Pêches et Océans Canada Science Aquatique Biologiste Iqaluit 18 Organisation des Pêches de l’Atlantique Nord-Ouest Agent d’information Courriel

Internationaux

19 Ministère des Pêches États-Unis d'Amérique Bureau des Affaires

Internationales Employé Courriel 20 Ministère des Pêches Groenland Directeur de division Courriel 21 Ministère des Pêches Norvège Conseiller Courriel

Acteurs économiques

22 Pangnirtung Fisheries Ltée Directeur Pangnirtung 23 Pangnirtung Fisheries Ltée Employée Pangnirtung

Scientifiques

24 ArcticNet Scientifique Téléphone

Tableau 1 : Ensemble des entretiens

Un service d'annuaire des employés du gouvernement fédéral interactif est en ligne9 afin de trouver leurs coordonnées et leurs fonctions dans les ministères. Comme la plupart des données et des avis sont rapportés dans les rapports scientifiques des différents ministères, les entretiens avec les biologistes ont servi plutôt à approfondir ces rapports et tenter d'éclaircir certains points spécifiques. Étant donné que l'étude ne se limite pas à l'Arctique canadien, mais aussi à l'Océan Arctique, il a été décidé de contacter les ministères des pêches des autres États côtiers de l'Arctique. Le Groenland, les États-Unis d'Amérique et la Norvège ont répondu à mes questions. Les tentatives pour contacter les ministères danois concernant les Affaires Étrangères et le ministère de la Pêche de Russie ont échoué. Les contacts ont été trouvés dans leurs sites officiels. Le manque de transparence de la part des États côtiers sur l’avancée des négociations internationales concernant la gestion de la pêche dans la haute mer arctique et la connaissance des sujets qui font l’objet de ces négociations a compliqué la recherche. Ces difficultés ont pu être contournées, soit en posant des questions aux ministères d’autres pays, soit en posant les questions de manière détournée. Malgré tout, les informations disponibles sont faibles concernant la mise en place d’une organisation internationale

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de la pêche dans la haute mer arctique. L’analyse se concentre donc plus particulièrement sur la volonté théorique des pêcheurs d’y entamer une pêche commerciale et des difficultés de mettre en place un organisme de gestion de la pêche.

Aussi, un questionnaire (voir annexe 1 et 1b) a été envoyé aux différentes sociétés de pêche qui exploitent les ressources marines dans l'Arctique. La façon de trouver les sociétés de pêche qui ont des intérêts dans l'Arctique s'est reposée sur les plans de gestion intégrée des espèces arctiques comme le flétan du Groenland et la crevette nordique. Mais ces plans n'indiquent pas quelles compagnies pêchent dans les eaux arctiques, car elles incluent aussi les eaux atlantiques plus au sud. Les données de NORDREG donnent les noms des bateaux de pêche qui sont entrés dans l'Arctique. Comme le signalement à NORDREG n'est pas obligatoire pour les bateaux d'une jauge inférieure à 300 tonneaux de jauge brute, dans un but d'exhaustivité, il a été préférable de contacter toutes les compagnies. Ainsi, les questionnaires ont été envoyés à leurs propriétaires trouvés sur le site d'Industrie Canada de Recherche de station de navire. Les contacts sont, dans tous les cas, inscrits sur les sites des compagnies. J'ai eu la chance de rencontrer le président de la Baffin Fisheries Coalition, une des compagnies de pêche du Nunavut, dans l'avion entre Pangnirtung et Iqaluit, ce qui m'a permis de lui poser quelques questions de façon brève et spontanée entre le décollage et l'atterrissage.

Ces entretiens et ces questionnaires ont nécessité l’approbation du Comité d’Éthique de la Recherche avec les êtres humains de l’Université Laval (CÉRUL) et le formulaire d’approbation et de recrutement et l’utilisation des données récoltées. Afin de rester dans les limites de mon étude et ne pas contrevenir aux règles d’éthique liées à la recherche en milieu autochtone tel qu’indiqué dans le protocole de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et Labrador et le chapitre 6 de l’Énoncé des Trois Conseils, la question des connaissances traditionnelles à la recherche que je mènerai n’est pas envisagée.

Afin de connaître l’évolution de l’exploitation commerciale des espèces arctiques, des sources secondaires ont été consultées. J'ai lu des ouvrages et des articles scientifiques, tandis que des bases de données tirées de différents sites de statistiques (Statistiques Canada, FAO, Conseil Arctique, ministère des Pêches et Océans). Il s'est agi de faire attention aux données utilisées, notamment les statistiques sur les prises de pêche parce qu'elles peuvent différer entre les différents organismes, notamment les organisations nationales (ministère des Pêches et Océans) et les organisations internationales comme la FAO et l'Organisation des Pêches de l'Atlantique Nord-Ouest (OPANO). Dans le cas des cartes qui montrent une situation internationale, seules les statistiques d'organisations internationales ont été utilisées afin de permettre la comparaison entre les différentes

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situations. Dans les cartes qui se limitent à une échelle nationale, ce sont plutôt les statistiques nationales qui ont été utilisées parce qu'elles sont plus précises. Des personnels de conseils de gestion mixte du Nunavut et d’Inuvialuit ont permis de comprendre la volonté des Inuit de développer la pêche commerciale sur leur territoire et les problèmes de mise en place de la cogestion entre le gouvernement fédéral et les Conseils mis en place au moment des revendications territoriales globales, le partage des compétences et de l’allocation des quotas aux différentes sociétés de pêche. Des entretiens avec l’Agence Canadienne de l’Inspection des Aliments ont permis de récupérer des informations concernant des politiques de développement et de contrôle de comestibilité des pêches canadiennes et les conséquences de la pollution pour les poissons commercialisées. À partir de ces entretiens et des données statistiques disponibles auprès des organismes fédéraux et locaux, j'ai mis en relation les données afin de comprendre l’évolution de l’exploitation commerciale des espèces arctiques. Aussi, un questionnaire a été envoyé aux compagnies de pêche qui possèdent des licences de pêche dans l'Arctique afin de comprendre leur intention de développer la pêche commerciale dans l'Arctique et leur opinion concernant une possible expansion spatiale de celle-ci. Le questionnaire a permis d'avoir leur avis concernant sa durabilité.

Des échanges avec des scientifiques du ministère de Pêches et Océans de Winnipeg et d’Iqaluit, à propos de leurs gestions et de leurs évolutions de ces espèces en fonction des changements climatiques, ont apporté des connaissances plus précises sur la capacité des stocks à supporter une exploitation commerciale. Avec l'apport de statistiques et de données de Pêches et Océans Canada, ils ont permis d'analyser la capacité des espèces de supporter l'exploitation commerciale. Seul l'omble chevalier est exploité de façon commerciale et dans un but de subsistance, ainsi, un questionnaire a été créé pour le soumettre aux pêcheurs de Pangnirtung (voir annexe 2 et 2 b), mais les difficultés de terrain n'ont pas permis d'avoir d'entretiens (voir les limites de la recherche dans la section suivante).

Étant donné que la législation de la pêche commerciale est un élément essentiel de cette étude, celle-ci s'est basée plus sur des données plus qualitatives sur l’évolution du contrôle de l’exploitation des ressources naturelles biologiques. La volonté de contrôler et réglementer le prélèvement des stocks halieutiques dans le contexte des changements climatiques aura des répercussions sur la durabilité de celle-ci. L’évolution de la législation et de la réglementation a été testée par des entretiens avec le ministère de Pêches et Océans à Ottawa et au Nunavut. La conférence de l’Année Polaire Internationale à Montréal, « De la connaissance à l’action » a apporté des renseignements supplémentaires concernant les politiques et la législation dans l’Arctique

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Des entretiens, principalement par courriel, ont été tenus avec les ministères norvégiens, états-uniens et groenlandais de la pêche, ce qui a permis de comprendre l'intention de ces États dans la volonté de réguler la pêche commerciale dans la haute mer de l'Arctique.

La rentabilité et la durabilité ont été vérifiées à partir des données scientifiques de MPO et des statistiques des différents organismes nationaux, des statistiques disponibles des différents pays arctiques et internationaux (OCDE, ICES, ORGP). Un entretien avec le directeur de la Pangnirtung Fisheries Ltée, usine de transformation du Nunavut a permis de mieux appréhender ces données de façon plus empirique. Aussi, un entretien avec un employé de la société Makivik a permis de comprendre la stratégie du Nunavik pour exploiter les stocks halieutiques arctiques.

Le Ministère des Pêches et Océans produit de nombreux rapports concernant les avis scientifiques sur les stocks et les perspectives de la pêche commerciale. Ils ont été utilisés dans le but de connaître les avis des scientifiques du ministère fédéral. Afin de préciser certains points ou d’apporter de nouvelles données, des entretiens avec les scientifiques du Ministère du MPO à Winnipeg (où se trouve l’institut des eaux douces qui accueille les principaux laboratoires de la recherche halieutique arctique) ont permis de comprendre les effets de la pêche et des changements climatiques sur les principales espèces canadiennes exploitées (crevettes nordiques, ombles chevaliers, flétan noir).

Ainsi, à partir de ces données, j'ai pu comprendre quels sont les impacts, sans oublier le manque de connaissances des écosystèmes marins arctiques, de l’exploitation des stocks halieutiques arctiques sur les stocks de poissons et la possibilité d’une pêche durable sans mettre en danger les stocks de poissons arctiques. La rentabilité de l’activité de pêche sera testée à partir des données quantitatives des pêcheurs commerciaux et des usines de transformation pour savoir comment cette rentabilité influence l’importance de cette activité et sa durabilité.

Les hypothèses ont été réfutées ou confirmées sur, autant que possible, des données quantitatives telles que les statistiques et les données apportées par les différentes entrevues pour comprendre l’évolution et des pêcheries et de sa gestion. L’analyse des politiques et l’évolution de la pêche commerciale permettront de comprendre si cette dernière se développe de manière à ce qu’elle ne mette pas les écosystèmes arctiques en danger. La réaction des écosystèmes marins arctiques face à un stress aussi important que celle de son exploitation sera mise en relation afin de comprendre si celle-ci se développe de manière durable dans l’Arctique.

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2. Limites et obstacles de la recherche

Le principal obstacle de la recherche présentée et la barrière culturelle et linguistique avec les pêcheurs Inuit.

Une tentative de contact avec l'Association de Pêcheurs et Trappeurs a été tentée avant d'aller sur le terrain, mais étant donné qu'il n'y a pas eu de réponse, des entretiens exploratoires ont été prévus une fois arrivés sur place. Arrivé à Pangnirtung, j'ai tenté d'approcher les pêcheurs au port. Les pêcheurs Inuit rencontrés ne sachant pas parler l'anglais, l'entretien avec l'usine de transformation du poisson m'a permis de récupérer les coordonnées téléphoniques des quelques pêcheurs anglophones. Suite à de nombreux appels, quelques rendez-vous ont été donnés, mais malgré l'attente, les rendez-vous n'ont pas eu lieu. Je n'ai pas eu moins de cinq rendez-vous avec le président de l'Association de Pêcheurs et Trappeurs, qui ont tous été remis à plus tard. Une autre solution a été de trouver un interprète pour traduire les questions en Inuktituk, mais là encore, l'interprète n'est jamais revenu avec les questions traduites.

Un deuxième obstacle est le faible taux de réponse des compagnies de pêche, seules quatre compagnies de pont répondu à l’Arctique sur la vingtaine de compagnies qui exploitent les stocks de poissons dans l’Arctique canadien. À partir de ce constat, il est difficile de généraliser les résultats qui suivent à l’ensemble des compagnies de pêche.

Un autre dernier est inhérent aux voyages arctiques. Le budget important que représente un séjour dans l'Arctique a limité ma présence dans l'Arctique à douze jours, ce qui permet d'acquérir des données et une certaine vision de la pêche commerciale dans l'Arctique, mais ne permet pas d'approfondir le sujet. Le court séjour n'a pas permis, par exemple, de monter à bord d'un navire ou de participer à un séjour en mer pour en avoir une vision plus pratique.

L'analyse se basera donc sur des éléments plus théoriques comme les entretiens avec les compagnies de pêche et les gouvernements territoriaux et fédéraux.

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(43)

Chapitre 3 : Le cadre général de l'exploitation des

ressources naturelles marines

1. Principaux concepts

A. Le développement durable

Le développement durable est un concept qui est apparu, pour la première fois, dans le rapport World conservation strategy: Living resources conservation for sustainable development de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (1980). Il est défini comme : « for development to be sustainable, it must take account of social and ecological factors, as well as economic ones ; of the living and non-living resource base ; and of the long term as well as the short term advantages and disadvantages of alternative actions »10

Figure 2 : Modèle théorique classique du développement durable

Ce concept est fondamental dans l'analyse de l'évolution de la pêche commerciale. En effet, la durabilité de l'exploitation actuelle d'une ressource marine est primordiale pour ne pas mettre en

10 « Pour que le développement soit durable, il doit prendre en compte les facteurs sociaux et écologiques,

aussi bien qu'économiques ; sur une base des ressources vivantes et non vivantes ; et les avantages et les inconvénients des choix des actions aussi bien sur le long terme que sur le court terme », traduction libre, rapport disponible sur : http://data.iucn.org/dbtw-wpd/edocs/WCS-004.pdf

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danger son exploitation présente et future comme on a pu le voir dans la pêche à la morue au large de Terre-Neuve et son déclin dans les années 1990.

Le développement durable est un concept qui repose sur trois volets : l'environnement, l'économique et le social comme le montre la figure 2. En effet, le développement prend en compte la rentabilité économique, les conséquences inévitables de toute activité économique sur l'environnement et l'acceptabilité sociale de ces conséquences.

Figure 3 : Modèle concentrique du développement durable

René Passet (1979) a proposé un modèle concentrique (figure 3) du développement durable en enlevant le caractère égalitaire de ces piliers pour établir une hiérarchie entre ces éléments. L'environnement n'est plus un pilier comme les autres, mais devient le pilier sur lequel toutes les activités humaines, sociales et économiques, reposent.

Ce modèle prend tout son sens dans le cas présent de l'exploitation de ressources marines biologiques dans l'Arctique. En effet, l'activité économique de la pêche commerciale repose sur l'environnement dans le cas des contextes humains et culturels particuliers de l'Arctique canadien. La conscience et la volonté des différents acteurs politiques et économiques de mettre en place un cadre de développement durable sont un facteur important de sa mise en œuvre et son efficacité.

Figure

Figure 4 : Théorie du principe de précaution 14
Figure 5 : Différent statuts des eaux selon la Convention des Nations Unies du droit de  la mer
Tableau 2 : Critères pris en compte pour la mise en place d'une approche  écosystémique
Figure 8 : Évolution de la pêche commerciale dans le monde entre les années 1950 et  2010
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