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La situation de la pêche commerciale en Antarctique

Chapitre 3 : Le cadre général de l'exploitation des ressources naturelles marines

B. La situation de la pêche commerciale en Antarctique

Approfondir la situation de la pêche commerciale dans l'Océan Antarctique est pertinente dans cette mise en contexte étant donné que de nombreux points communs peuvent être établis entre les deux océans. Tout d'abord, le climat est semblable dans les deux océans, ce sont deux climats polaires, avec la présence de banquise qui fond l'été. La banquise est aujourd'hui victime des changements climatiques avec un recul net de celle-ci l'été. Aussi, de nombreuses espèces sont présentes dans les deux océans, notamment le krill, l'espèce qui a longtemps été la plus exploitée dans l'Océan Antarctique.

Néanmoins, de nombreuses différences doivent être soulignées. Tout d'abord, l'Océan Antarctique entoure l'Antarctique qui fait l'objet d'un accord international protégeant le continent notamment de la militarisation, ou bien de la revendication territoriale d'un pays sur le ou une partie du continent. Au contraire, l'Océan Arctique est entouré de continents (l'Europe, l'Asie et l'Amérique du Nord) et de pays (Norvège, Russie, États-Unis d'Amérique, Canada et Danemark par l'intermédiaire du Groenland) dont la souveraineté sur certaines eaux arctiques est protégée par les accords internationaux, notamment la Convention des Nations Unies sur le Droit de la mer de 1982. Les différences entre les banquises d'été et d'hiver dans l'Océan Arctique et l'Océan Antarctique sont très différentes (entre 4 000 000 et 15 000 000 de km² et entre 2 000 000 et 18 000 000 km² respectivement), principalement dû au fait que les continents, qui entourent l'Océan Arctique, protègent la banquise en partie de la débâcle estivale. Aussi, l'Arctique est habité par plusieurs peuples qui exploitent les poissons dans un but de subsistance depuis des millénaires alors que l'Antarctique est un endroit inhabité en dehors de quelques stations scientifiques. De plus, la pêche commerciale dans l'Antarctique se déroule principalement dans la haute mer dans laquelle la liberté de pêcher est inscrite dans la Convention sur le droit de la mer de 1982 alors que les pêcheurs exploitent les ressources marines biologiques de l'Arctique, à l'heure actuelle, dans les zones économiques exclusives des États qui la contrôlent et la régulent.

Les principales espèces pêchées dans ces eaux froides sont le krill, pour l'industrie de la pharmaceutique et des produits de beauté, et le poisson des glaces (Champsocephalus gunnari), la

légine australe (Dissostichus eleginoides). Les autres pêcheries sont le crabe (Lithodidae), le poisson-lanterne (Electrona carlsbergi), la grande-gueule épineuse (Chaenodraco wilsoni), le bocasse aux yeux rayés (Lepidonotothen kempi), le bocasson (Trematomus eulepidotus), la calandre antarctique (Pleuragramma antarcticum), et le calmar (Martialia hyadesi). Ce ne sont pas des espèces que l'on retrouve dans l'Arctique en dehors de la découverte récente du krill.

On peut voir à travers le tableau 4 ci-dessus que la pêche commerciale dans les eaux antarctiques a débuté à la fin des années 1960 avant de connaître son maximum entre 1980 et 1995. Depuis, le niveau des prises dans l'Océan Antarctique est restée à un niveau entre 100 000 et 150 000 tonnes. L'éloignement des pêcheries antarctiques par rapport aux principaux marchés de consommation et aux ports a fait que l’activité a décliné sans que les Totaux Autorisés de Capture soient abaissés de manière significative.

Tableau 4 : Évolution de la pêche dans les différentes parties de l'Océan Antarctique

entre 1950 et 2010

La gouvernance de la pêche commerciale dans l'Antarctique fut longtemps absente, ce qui a conduit à une surexploitation des espèces. Celle-ci, conjuguée avec les changements climatiques, a conduit à un déclin important des stocks. La Convention sur la Conservation des ressources marines vivantes antarctiques (CCAMLR) a été créée en 1982 afin de réglementer l’exploitation des stocks dans les trois différentes zones de l'Antarctique afin de faire face à cette surexploitation. La CCAMLR dispose d'un comité scientifique qui donne des conseils sur les quotas de pêche, mais elle

0 100000 200000 300000 400000 500000 600000

Évolution de la pêche dans les différentes

parties de l'Océan Antarctique entre 1950 et

2010

Océan Antarctique, côté Atlantique Océan Antarctique, côté Océan Indien

Océan Antarctique, côté Pacifique

accorde des totaux autorisés de capture beaucoup plus importante que ce qui est pêché, plus de 4 000 000 tonnes pour le krill. Pour le poisson des glaces, son exploitation intensive a conduit à un effondrement des stocks qui a conduit à un moratoire sur l'espèce en dehors de deux zones, 48.3 et la division 58.5.2 dans laquelle les prises sont autorisées à des fins de recherche scientifique uniquement.

La légine australe est très recherchée par les restaurants de luxe et le marché de luxe, ce qui a conduit à une intense pêche illégale, non déclarée et non réglementée. En effet, cette pêche était dans les années 1990 six fois plus importantes que les niveaux autorisés alors que les stocks ne s'étaient pas encore rétablis de la surpêche des années 1970.

Ce qu'il faut retenir de la pêche dans l'Antarctique est que le manque de structure régissant une exploitation durable des ressources a conduit à un déclin massif des espèces ciblées et que ces stocks ont eu du mal à se rétablir ou ne se sont pas rétablis du tout. Malgré le fait que les eaux antarctiques soient éloignées de toute infrastructure portuaire n'a pas représenté un frein réel pour les pêcheurs. En effet, les bateaux-usines sont capables de naviguer en mer plusieurs mois de manière autonome. La différence avec l'Arctique réside dans le fait que l'Antarctique n'est pas encerclé par des zones économiques exclusives comme c'est le cas dans l'Arctique, donc qu'aucun État n'était directement concerné par cette surexploitation.

Chapitre 4 : L'Arctique, un environnement marin