• Aucun résultat trouvé

Une étude sur la cohérence pédagogique : une recherche expérientielle

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Une étude sur la cohérence pédagogique : une recherche expérientielle"

Copied!
121
0
0

Texte intégral

(1)

S . S l i L

ne>3

K581-FACULTE DES SCIENCES DE L'EDUCATION

THESE PRESENTEE

A L'ECOLE DES GRADUES D E L'UNIVERSITE LAVAL

POUR L'OBTENTION

D U GRADE DE MAITRE ES ARTS (M.A.) PAR

MADELEINE RIOUX LICENCIEE EN ENSEIGNEMENT

DE L'UNIVERSITE LAVAL

/ ■<;

UNE ETUDE SUR LA COHERENCE P E D A G O G I Q U E : UNE RECHERCHE EXPERIENTIELLE

(2)

R ESUME

Cette thèse est une étude sur la cohérence pédagogique. Elle veut rendre compte du cheminement d'une enseignante qui découvre que la recher che de qualité au niveau de son geste pédagogique s'inscrit dans un p r o ­ cessus plus global qui vise l 'ac tualisation de tout son être.

L'approche de recherche utilisée est de nature expérientielle en ce sens que l'auteur a accordé la priorité à son vécu pédagogique. Celui ci est considéré comme une source importante d'informations qui s'allie avec d'autres sources puisées dans la littérature. La principale m é t h o ­ de utilisée fut celle du journal grâce auquel l'auteur a recueilli son vécu pédagogique, l'a analysé et a conceptualisé sur son expérience pour dégager une meilleure compréhension de son geste pédagogique.

Au chapitre premier, l'auteur se situe elle-même dans le monde de l'éducation et présente sa recherche de cohérence pédagogique à l ' i n t é ­ rieur d'un mouvement de re nouveau pour améliorer la qualité de l ' e n s e i ­ gnement dans les écoles. Par la suite, elle énonce ses objectifs pe r s o n ­ nels et ses critères de recherche, ses valeurs, ses sources et décrit les étapes de sa démarche ainsi que la méthode du journal qu'elle a utilisée (chapitre II). Dans le chapitre III, elle fait une description des évé­ nements et de son vécu pédagogiques et présente sa compréhension progre- sive de son geste pédagogique en énonçant ses fondements conceptuels et en le situant à l'intérieur de son processus de croissance personnelle.

La cohérence pédagogique est décrite comme un processus dynamique et continu où la cohérence devient une découverte de son identité, une responsabilité à vivre et une qualité donnée à l'action (chapitre IV). Enfin, l'auteur donne sa compréhension du pédagogue et suggère des objec­ tifs d'action susceptibles de faciliter la croissance de celui-ci ( c h a ­ pitre V).

(3)

et de son expérience et suggère que l'analyse d'un vécu pédagogique peut amener une meilleure compréhension du geste pédagogique et devenir aussi une voie pour un perfectionnement professionnel.

Madeleine Rioux

Thérèse Lafer'rÿere Directeur* de recherche

(4)

A tous ceux et celles qui ont collaboré à cette recherche, j'exprime ma reconnaissance et plus particulièrement à

Madame Thérèse Laferrière qui a assumé la direction de cette thèse. Sa grande disponibilité, son respect et son o u ve r ­ ture face à mon expérience pédagogique me furent très précieux tout au long de ma recherche.

Monsieur André Paré qui m'a conseillée dans ma recherche. La richesse de ses écrits en pédagogie ont aussi facilité ma démarche.

Monsieur Wilfrid Bilodeau qui a fait la prélecture de cette thèse.

Tous ces jeunes avec qui j'ai vécu mes expériences et ma recherche en p é d a g o ­ gie.

(5)

AVANT-PROPOS ... ... iii

TABLES DES MATIERES ... iv

INTRODUCTION ... 1

Chapitre I. PRESENTATION DE LA QUESTION ... 3

II. DESCRIPTION DE MA DEMARC HE DE RECHERCHE ... 8

Mes objectifs personnels et mes critères de recherche .. 9

Mes valeurs de recherche ... 11

Les étapes de ma recherche ... ... ... ... 12

Mes sources ... ... 19

La méthode du j o u r n a l ... ... ... 23

III. L'ACTION ET LE VECU PEDAGOGIQUES: DONNEES DE RE C H ERCHE .. 38

Description des événements et de mon v é c u pédagogiques . 38 Compréhension progressive de mon geste pédagogique ... ^5

IV. LA COHERENCE PEDAGOGIQUE ... 78

Une découverte de son identité ... 80

Une responsabilité à vivre ...-... 86

Une qualité d'action

...

93 Page

(6)

V.

DEVENIR PEDAGOGUE ...

101

Posséder son identité ... „...

103

Opérer un choix... ...

104

Innover dans sa tâche ...

105

Assurer son perfectionnement ...

107

Adopter des attitudes ...

108

REFERENCES ...

110

(7)

Devenir pédagogue est un rêve qui depuis longtemps tente de percer

ma réalité. Je crois que j'ai toujours désiré enseigner mais cette ac­

tivité a revêtu plusieurs significations depuis mes débuts dans le do­

maine de l'éducation. La pratique de l'enseignement fut une source de

questions, de défis, entraînant successivement peur et sécurité, dépit

et enthousiasme, routine et innovation. Au cours des dernières années,

ce rêve s'est concrétisé à l'intérieur d'un désir d'une plus grande co­

hérence dans mon action pédagogique.

Cette thèse voudrait rendre compte du cheminement qui m'a permis

de comprendre que toute ma recherche de qualité au niveau de mon geste

pédagogique s'inscrivait dans un processus beaucoup plus global qui vise

l'actualisation de tout mon être. C'est pourquoi, dans une première éta­

pe, je tenterai de décrire ce que fut mon processus de recherche pédagogi­

que et par la suite j'expliciterai ce que le devenir pédagogue revêt com­

me signification dans le quotidien de mon action pédagogique.

Ce travail n'a pas pour objectif d'apporter des éléments nouveaux

pour une meilleure compréhension de l'acte pédagogique, pas plus qu'il

ne se veut un éclairage sur le dilemme dans lequel se trouve l'éducation

au Québec. Ma thèse devra être interprétée comme un geste de solidarité

à l'endroit de tous les praticiens(nés) de l'enseignement, et particuliè­

rement ceux(celles) de l'école primaire, qui cherchent jour après jour,

à optimiser leur action pédagogique dans la complexité du milieu éduca­

tif.

De plus si j'écris cette thèse, c'est aussi parce qu'à l'intérieur

de ma démarche, j'aurais souhaité lire des écrits d'enseignants(es) qui

se sont réalisés(es) à travers leur geste d'éducateur(trice) ou qui

(8)

2

auraient explicité les facettes de leur vécu dans la classe. A certaines

heures d'un cheminement, l'écoute d'une expérience humaine est plus sti­

mulante que bien des théories.

Au lecteur éventuel, je souhaite qu'il puisse dépasser le caractère

personnel de cette recherche pour tendre vers ce qui est plus universel

dans cette expérience humaine.

(9)

PRESENTATION DE LA QUESTION

Etre dans le domaine de l'éducation au Québec comme ailleurs,

c'est faire l'objet de multiples études, enquêtes et sondages qui veu­

lent élaborer une conception de l'éducation et du système scolaire qui

serait adaptée à la société nouvelle.

Si d'une part, nous entendons de multiples critiques sur l'école

et l'incompétence des enseignants(es), nous assistons aussi à de vérita­

bles efforts pour améliorer la pédagogie. Plusieurs agents de l'éduca­

tion ont été touchés par cet esprit de renouveau et s'y sont engagés avec

enthousiasme et énergie.

Je m'en voudrais de donner ici l'impression que seul les ensei-

gnants(es) ont été questionnés(es) dans leur action. Mais je suis une

enseignante et comme tous mes collègues, je suis directement impliquée

dans ce processus d'adaptation. Comme tant d'autres, j'ai été moi aussi

entraînée dans ce courant d'innovations depuis la découverte des méthodes

actives, les stages intensifs pour apprendre à élaborer des objectifs qui

devaient faciliter la tâche de l'évaluation, les sessions sur les objec­

tifs des nouveaux programmes qu'ils soient institutionnels ou non, et

toutes ces journées d'étude sur de nouvelles stratégies d'enseignement,

sur les composantes des différentes approches pédagogiques.

Je ne veux pas m'engager dans un débat sur l'efficacité de tous

ces efforts de perfectionnement, je voudrais plutôt donner ma vision de

l1enseignant(e) qui chemine à travers tout ce remue-ménage.

(10)

if

D'abord, nous portons les limites d'une formation inadéquate. On

nous accuse d'être non-pédagogues, sans culture, sans technique. Nous

le ressentons aussi. Plusieurs parmi nous tentent de remédier à cette

situation en s'inscrivant à des sessions ou à des cours parfois enrichis­

sants, d'autres fois ne correspondant pas à leurs besoins.

Nous sommes trop souvent la proie plutôt facile des éditeurs qui

savent vanter leurs produits. Nous cherchons dans chaque nouvel outil,

le moyen d'être à point. Certains(es), parmi les plus agés(es), se dé­

fendent de retrouver un brin de nostalgie pour la pédagogie de la page

qui tourne, ce temps où à chaque soir le maître n'avait qu'à tourner la

page de chacun des livres scolaires pour préparer les cours du lendemain.

Nous avons appris aussi que nous n'étions plus les maîtres qui dé­

tenaient l'autorité. Nous devons être encore les gardiens de la disci­

pline mais nous ne nous y sentons plus tellement à l'aise ne sachant pas

faire le pont entre la directivité et le laisser-faire.

Nous nous engageons de façon dynamique dans de nouveaux projets.

Nous les réalisons souvent avec succès mais nous nous retrouvons inca­

pables de faire une relance de nos réussites.

Nous devenons de plus en plus réticents à toute idée ou proposition

de changement. Nous recherchons une certaine stabilité, une forme de

sécurité dans notre travail.

Le drame de bien des enseignants(es) et je suis du nombre, est de

se retrouver toujours en deçà de l'idéal du pédagogue perçu lors de la

formation première, proné dans les livres ou véhiculé par la culture de

la société. La norme de compétence, nous la recherchons trop souvent à

l'extérieur de nous-mêmes et ce n'est pas sans de loyaux efforts que nous

tentons de nous y conformer.

Pour illustrer un tant soit peu ce phénomène d'adéquation à une

norme, il s'agit d’observer à quelle vitesse les innovations peuvent

entrer et sortir d'une classe. Regardons la situation d'un professeur

(11)

qui vient de participer à un court stage de perfectionnement en pédagogie.

Il retourne dans son école avec l'impression d'avoir enfin compris sa

tâche. Dans les jours qui suivent, l'organisation matérielle de la clas­

se est transformée, un mobilier nouveau apparaît souvent, une nouvelle

discipline et un nouveau mode d'enseignement s'installent sous un vent

d'enthousiasme. Puis les jours passent et il devient de plus en plus

difficile de se sentir à l'aise dans l'action adoptée. L'excuse souvent

classique à cette forme d'échec est d'affirmer que les jeunes ne sont

pas aptes à entrer dans une situation qui amènerait un changement de leur

habitude scolaire.

Certains diront que tous les enseignants(es) ne sont pas ainsi.

Ils ont parfaitement raison. Je n'ai pas tracé le portrait du profes­

seur-type. On peut facilement en trouver qui sont complètement désa-

busés(es), qui aspirent à prendre leur retraite ou à dénicher un emploi

meilleur. Je n'en ai pas rencontré qui soient sûrs d'eux (elles)-mêmes,

se percevant comme de bons pédagogues. Mais, il y en a sûrement. Je

m'attache plutôt à ces enseignants(es) qui cherchent dans la monotonie

et les exigences du quotidien, à donner une plus grande qualité à leur

action pédagogique.

L'enseignant(e) vit une situation difficile de déséquilibre qui a

de multiples causes prenant source en lui(elle) en tant qu'individu ina­

chevé ou dans un milieu social en pleine mutation. Je crois qu'une voie

possible pour contrecarrer cet état d'effritement en éducation est d'a­

mener les pédagogues à prendre conscience que leur action posée en clas­

se n'est pas exclusivement une réponse accordée à leur rôle d'ensei-

gnant(e) mais que cet acte renferme une valeur d'actualisation de tout

leur être.

C'est à partir de mon expérience comme être-pédagogue que je vou­

drais éclairer cette affirmation non que je considère que mon action

doit avoir valeur d'exemple mais parce que je crois que la meilleure

façon de comprendre un phénomène humain est de le regarder d'abord à

(12)

6

partir de sa propre expérience. C'est dire que je crois que la connais­

sance est le résultat d'une démarche personnelle. Comme le dit André

Paré: "La connaissance n'a pas d'existence en soi, elle n'existe que

dans une relation étroite englobant le sujet qui apprend et son univers."

(1977 b, p.

k6).

Dire qu'un geste pédagogique s'inscrit dans un geste plus large

d'actualisation de soi, c'est reconnaître en chaque personne un désir

fondamental, plus ou moins conscient, de croissance, de réalisation de

toutes ses potentialités. C'est à la théorie de Maslow (1972) que je me

réfère principalement pour comprendre que la recherche d'actualisation

de soi repose d'abord sur la satisfaction des besoins fondamentaux.

Pour percevoir qu'un(e) enseignant(e) se réalise, il faut consi­

dérer qu'il(elle) est apte à trouver dans l'école comme ailleurs, la sa­

tisfaction de ses besoins de sécurité, d'appartenance et d'estime, de

respect de soi et de reconnaissance de sa compétence. Dans une telle

perspective., la classe n'est plus vin lieu de savoir, de travail, mais

un milieu de croissance.

Il m'apparaît de plus en plus évident que toute innovation pédago­

gique doit être le fruit d'un long mûrissement chez le(la) pédagogue et

s'inscrire comme en réponse à un désir profond d'une plus grande cohé­

rence pédagogique. L'effort pour optimiser le geste pédagogique peut

certainement s'inscrire dans un processus de créativité que Maslow (1972)

décrit comme un processus d'actualisation de soi. Le désir de devenir

pédagogue n'est qu'une facette d'un devenir qui englobe tout l'être.

De plus, je suis portée à croire que l'innovation pédagogique

peut devenir, pour certains(es), une oeuvre de création au même titre

que la toile pour l'artiste, le livre pour l'écrivain ou la théorie

pour le physicien.

Cette recherche n'est pas une démonstration d'une théorie de crois­

sance, ni l'analyse de la situation des enseignants(es) dans l'école du

(13)

Québec. Elle est uniquement la description d'un cheminement dans lequel

j'ai voulu regarder mon action pédagogique comme partie prenante de l'ac­

tualisation de tout mon être.

Dans une première partie de ma démarche, je veux mettre des mots

sur mon processus de recherche, regarder comment à partir de l'explora­

tion de mon vécu comme pédagogue, de mes efforts pour rendre cohérente

et signifiante mon action pédagogique, j'en suis arrivée à considérer

que mon geste pédagogique est un geste qui m'actualise en tant que per­

sonne.

Dans la deuxième partie de cette thèse, je veux dégager les com­

posantes de mon devenir comme pédagogue à travers l'expérience quoti­

dienne d'être avec des enfants dans une classe.

Je vois dans l'acte même d'écrire sur ma démarche et mes résultats

de recherche une voie me permettant de me connaître davantage comme indi­

vidu, personne et pédagogue et une façon de découvrir les meilleurs che­

mins pour réaliser ce que je me sens appelée à devenir.

Au pédagogue qui éventuellement lira cette thèse, je

souhaite

qu'il(elle) se sente invité(e) à lever le voile que la monotonie du

quotidien place sur son geste pédagogique, pour le reconsidérer, le re­

découvrir comme geste significatif dans son devenir comme personne.

(14)

CHAPITRE II

DESCRIPTION DE MA DEMARCHE DE RECHERCHE

J'ai choisi de faire une recherche sur la cohérence pédagogique.

J'ai d'abord pensé qu'une bonne façon de faire serait d'explorer les

différentes théories pédagogiques afin d'y découvrir un ensemble d'élé­

ments susceptibles de donner une plus grande cohérence à mon action en

classe. J'ai vite compris que si je voulais respecter mes objectifs

de recherche, il me fallait faire l'étude de la cohérence pédagogique

à partir de ma propre expérience comme enseignante.

Aborder une telle question par une approche de nature expérien-

tielle n'est peut-être pas une façon habituelle de faire si on peut en

juger par les différentes études publiées se rapportant à des problèmes

ou à des théories pédagogiques. Cependant, j'ai la conviction qu'en

utilisant une méthode de recherche qui me permet de me centrer sur mon

vécu pédagogique, de l'analyser, de rationaliser sur mon expérience de

pédagogue à l'aide de théories éducatives, je peux collaborer à l'étude

de la cohérence pédagogique en y apportant le point de vue d'une ensei­

gnante qui vit cette réalité dans le quotidien.

Cette démarche de recherche incluant même l'écriture de ma thèse

fut un travail de réflexion et de conceptualisation sur mon expérience

pédagogique afin d'en dégager les éléments qui sont susceptibles de me

faire progresser dans ma recherche de cohérence pédagogique. L'option

méthodologique fut donc de lier action et réflexion, expérience et con­

ceptualisation sur cette expérience.

(15)

Je vais décrire avec quelle rigueur j'ai poursuivi cette étude

dans laquelle j'ai essentiellement pris le langage de la praticienne

de l'enseignement avec l'espoir que cette prise de parole devienne un

élément dynamique dans mon propre processus de croissance et soit aussi

quelque peu entendue du monde des sciences de l'éducation.

J'exposerai ici mes objectifs personnels et mes critères de recher­

che, mes valeurs de recherche, les étapes poursuivies dans ma recherche

de cohérence pédagogique, les sources qui ont orienté mon action et la

principale méthode utilisée.

Mes objectifs personnels et mes critères de recherche

Poursuivre une recherche en milieu universitaire fut le fruit

d'une décision qui avait longtemps mûri. J'avais des objectifs person­

nels de perfectionnement et ceux-ci ont donné des critères à ma recher­

che.

Individualité

Je voulais m'engager dans une recherche dont je serais la première

bénéficiaire non seulement en terme de processus de recherche mais aussi

au niveau des résultats de l'expérience.

J'étais confrontée à des problèmes réels dans l'organisation pé­

dagogique de ma classe. C'étaient ces réalités que je voulais analyser

de façon à trouver une solution qui me conviendrait. Je n'avais aucu­

nement l'intention que ma recherche n'occupe qu'un espace sur un rayon

de bibliothèque. Elle devait m'être utile dans mon action pédagogique

vécue en classe.

Globalité

Mon étude devait couvrir l'ensemble de mon action pédagogique.

Je n'entendais privilégier aucun des multiples problèmes qui surgissent

dans l'organisation d'une classe. Plusieurs secteurs de l'acte

(16)

pédago-1 0

gique m’auraient intéressée et l'énoncé de mes interrogations au début

de ma recherche démontre la compréhension que j'avais des difficultés

inhérentes à l'acte d'enseigner. Je suis consciente de l'urgence de

faire des études sur la qualité des interventions en classe, sur le sui­

vi et l'évaluation des apprentissages, sur les modèles d'activités, sur

l’exploitation de l'environnement, sur le mode de gestion, etc. Il fal­

lait que ma question de recherche agisse comme un fil conducteur ou soit

un pôle de centration de mon acte pédagogique. C'est le phénomène du

geste pédagogique dans sa totalité que je voulais aborder.

Centration sur mon expérience

Ma recherche devait aussi respecter mon expérience comme ensei­

gnante et ce pour deux raisons. Premièrement parce que je crois que

l'expérience est une source d'apprentissage. Chaque événement ou vécu

peut nous amener à des prises de conscience sur soi et à une meilleure

compréhension d'un phénomène humain. Il me semble que l'expérience quo­

tidienne d'un professeur en classe peut éclairer plusieurs questions

pédagogiques si on ose un peu plus y faire confiance et trouver des fa­

çons de la recueillir et de l'analyser.

Une deuxième raison touche à mon individualité. Je n'ai rien

d'une théoricienne. Je suis une femme qui se réalise dans l'action et

ma recherche se doit de respecter cette qualité de mon être.

Continuité

Ma recherche ne devait pas être une suite de réflexions plus ou

moins structurées, artificielles ou sans lien avec ma réalité de pro­

fesseur. J'entendais faire une réflexion qui sans s'enfermer dans des

critères de rigidité devait être systématique et surtout continue. Un

facteur de régularité dans ma démarche me semblait un critère pour dé­

terminer le sérieux de ma recherche.

(17)

Flexibilité

Tout mon processus de recherche devait se mettre à l'écoute de la

vie. Je ne voulais pas m'imposer une démarche si structurée que l'ob­

jectif même de mon étude soit isolé du mouvement de vie qui se continue

en moi. Ma démarche devait me respecter en tant que personne qui se

transforme à l'intérieur d'une action. Je devais me garder ouverte et

attentive à toutes les données de mon expérience qui pouvaient survenir

au cours de ma démarche. J'avais opté pour me laisser questionner,

interpeller par mon expérience.

Mes valeurs de recherche

En commençant cette recherche de cohérence pédagogique, j'ai senti

qu'il me fallait la faire avec honnêteté, responsabilité et solidarité.

Honnêteté

M'engager dans un processus de recherche, c'était accepter de vivre

cette expérience avec la plus grande ouverture et authenticité. Garder

ferme la volonté d'aller aussi en profondeur dans l'analyse de mon vécu

que j'en étais capable sans me laisser arrêter par les multiples bar­

rières qui sont à affronter dans une expérience de connaissance de soi.

C'était aussi accepter de vivre mon expérience de recherche, jour après

jour, avec ses lenteurs, avec patience pour ne forcer aucune porte,

avec une grande disponibilité pour entendre ce qu'elle voulait bien me

dire. C'était aussi traduire son langage dans des mots qui ne déforment

pas sa réalité mais qui permettent de dire tout ce qu'elle veut dire et

seulement ce qu'elle veut bien me dire.

Responsabilité

J'ai en moi un sentiment de responsabilité envers les enfants qui

chaque année forment mon groupe-classe. Chacun(e), il est vrai, est res­

ponsable de sa propre croissance. Cependant, je crois que l'enfant a le

(18)

1 2

droit d’avoir les conditions les meilleures pour réaliser ses propres

apprentissages et se développer harmonieusement.

Dans cette expérience, je devais être responsable de mon propre

apprentissage mais aussi tenir en éveil cette responsabilité que je por­

te et qui fait que mon geste pédagogique doit respecter et faciliter la

croissance de chaque jeune.

Solidarité

Ma recherche devait respecter un critère d'individualité. Cepen­

dant, je suis solidaire de mes collègues qui travaillent avec moi dans

un milieu socio-culturel particulier où il est difficile de poursuivre

un perfectionnement à cause du manque de ressources. Les chances que je

me donne pour faire une réflexion plus systématique sur mon approche pé­

dagogique devraient me permettre d'être un élément dynamique dans l'évo­

lution de la pédagogie dans l'école de mon milieu. Je n'ai pas le droit

de gaspiller du temps et de l'énergie quand je considère toutes les res­

sources qui devraient être investies dans le milieu social et éducatif

où je vis.

Les étapes de ma recherche

Ma démarche dans cette étude sur la cohérence pédagogique se divise

en quatre étapes. La compréhension de chacune d'elles me fut facilitée

grâce à une étude sur la recherche heuristique réalisée par Peter Erik

Craig à l'intérieur d'une thèse de doctorat (1978).

Celui-ci consacre le chapitre deuxième de sa thèse

à

l'explication

de la méthode heuristique, chapitre qu'il intitule: "Heuristic research:

a passionate approach to human inquiry." Il décrit quatre phases dans

le processus heuristique qu'il ne faut surtout pas considérer comme en­

tités séparées mais plutôt corrélatives. Celles-ci sont: l'interroga­

tion, l'exploration, la compréhension et la communication (1978,

(19)

pp.20-87)-Je voudrais décrire ici ce que furent ces quatre étapes dans ma

propre recherche.

Interrogation

La première étape fut laborieuse car j'avais de la difficulté à

cerner ce qui était vraiment au coeur de ma recherche, définir la ques­

tion de recherche. Bien sûr, c'était une étude de la cohérence pédago­

gique mais celle-ci m'apparaissait comme une adéquation entre des prin­

cipes et les gestes concrets posés en classe.

Dans un premier temps j'ai fait une description de mon geste péda­

gogique et j'ai explicité mes croyances et mes principes. Puis, comme

je percevais que mon incohérence était due à une incompréhension ou à

une mauvaise utilisation du vocabulaire de psychopédagogie, je me suis

centrée sur la tâche de définir adéquatement des termes véhiculés en édu­

cation.

J'ai par la suite structuré mon approche pédagogique en l'appuyant

sur une conception éclairée de l'éducation et en décrivant les principes,

les objectifs et les politiques que je faisais miens.

Tout cet effort de clarification était une tâche qui me sécurisait

en me donnant les outils pour répondre de mon geste pédagogique. Mais

en même temps que j'avais l'impression de mettre des mots pertinents sur

une réalité que je vivais, je recherchais, de façon plus ou moins cons­

ciente ou avouée, un dynamisme nouveau.

Tout ce long travail de clarification, d'essai pour me situer dans

mon rôle de professeur a abouti à une situation de crise où je me suis

mise à douter de mes propres capacités à enseigner et à poursuivre une

recherche en pédagogie.

Le dynamisme de croissance à l'intérieur de l'être humain a une

force étonnante... Cette situation de crise m'a amenée à prendre cons­

cience que mon geste pédagogique ne serait cohérent pour moi qu'en autant

(20)

1*+

qu'il agirait comme un apport dynamique dans la réalisation de mon être

total. Dès lors ma question de recherche était claire et évidente.

Comment mon geste pédagogique m'actualise et comment en m'actualisant

je deviens plus cohérente dans mon action pédagogique?

Cette interrogation a jailli en moi comme une évidence. Il me

semblait que j'avais atteint là le coeur de ma recherche. Cette ques­

tion respectait mes critères de recherche et avait la capacité de cana­

liser toutes mes énergies de croissance.

Je retrouve vraiment la description de cette étape de ma recherche

dans cet extrait de la thèse de Craig où il cite Polanyi et Gendlin.

The first heuristic process involves the awareness of a subjec­

tively felt question, problem or interest. Initially, this is

often experienced only preconsciously or preverbally as a sub­

sidiary awareness (Polanyi, 196^ (a), p. 55) of personal crisis

or challenge. At this point the individual's primary concern is

the particular crisis or challenge and very little, if any, at­

tention is given to the question, problem or interest as such.

As the experiential crisis or challenge persists, the individual

becomes focally aware of its existence (Polanyi, 196^, PP*

55~57)

and, as he attends to the feelings associated with this awareness,

words and phrases begin to appear (Gendlin, 1971,

P-

70). The

process is further developed with the emergence of specific

statements or questions which are then clarified and revised

as

to their

felt meaning for the individual. (1978, p. ^2).

Exploration

Une fois que ma question fut ressentie comme le problème-clé, il

m'a fallu explorer la résonance que le concept d'actualisation de soi

avait dans ma vie personnelle et professionnelle, car, on ne le dira

jamais assez: on ne peut pas isoler la vie professionnelle de la vie per­

sonnelle. Elles font partie d'une même croissance.

Cette étape fut une période de travail intense où j'étais parti­

culièrement ouverte et sensible à mon monde intérieur. Je me suis alors

engagée dans un processus d'écriture. Dans un premier temps j'ai explo­

ré davantage au niveau des différents besoins de la personne pour

(21)

décou-vrir comment, à travers mes années, j'avais répondu à mes besoins fonda­

mentaux qui selon une idée de base de Maslow (1972), doivent être satis­

faits pour que l'être soit polarisé par des besoins de croissance. J'ai

cherché à identifier les différentes étapes de mon processus de croissan­

ce et j'ai découvert comment celles-ci ont eu une influence dans ma vie

d'enseignante.

Le deuxième temps de cette étape d'exploration a coïncidé avec

mon retour dans l'enseignement après une année d'étude. J'étais alors

très attentive à reconnaître la manifestation de mes besoins de crois­

sance à travers mes actions posées en classe. Ce fut une lecture de

mes gestes pédagogiques dans la perspective de l'actualisation de mon

être.

Différents sentiments m'habitaient au cours de cette étape. A cer­

tains moments, j'étais surprise et émerveillée de ce que je retrouvais

en moi. A d'autres heures, je percevais des résistances et il me fallait

prendre du temps pour pouvoir les affronter. Parfois je me demandais où

me mènerait tout cela. J'étais envahie par des craintes, des peurs, peur

de devenir un être égoïste et irresponsable en me centrant sur moi, peur

de me perdre comme devant un grand mystère... Puis, je retrouvais une

énergie nouvelle, le goût d'y aller vraiment en profondeur. Je crois

que ce qui m'a fait continuer la recherche à certains moments ce n'est

qu'une "certitude", réelle mais ténue, que quoi qu'il arrive le résultat

sera positif. C'est un peu ce qu'exprime Craig lorsqu'il écrit:

"Throu-ghout the entire process of exploration the individual is guided by an

intuitive sense of growing proximity to the unknown." (1978, p. ^8).

Ce qui me paraît aujourd'hui faciliter ou rendre possible cette

étape, c'est une capacité de se laisser enseigner, analyser par sa pro­

pre expérience. A certaines heures dans ce processus d'écriture, j'avais

l'impression que mon expérience me parlait d'une façon aussi claire que

si j'avais entendu une personne près de moi.

(22)

16

d'exploration fut de laisser monter les données, de les laisser se dé­

voiler sans vouloir immédiatement les analyser, les cataloguer, les uti­

liser. Cette étape fut certes la plus riche à l'intérieur de ma démar­

che.

Compréhension

Je m'en voudrais de donner ici l'impression que mon cheminement fut

linéaire, que les étapes se sont succédé

les unes après les autres.

Tel ne fut pas le cas. Même l'identification de ma question première fut

reprise tout au long du processus, non pour la changer, mais pour en

comprendre toutes ses dimensions profondes.

Il y a eu à l'intérieur de ma démarche des temps de compréhension,

nn éclairage sur des gestes antérieurs, des circonstances passées qui me

permettent de comprendre la portée des gestes d'aujourd'hui.

Pour moi, il y avait comme deux types d'intelligence des faits et

des événements. Une première compréhension me venait souvent de façon

intuitive et prenait corps sous une forme imagée. Elle se faisait spon­

tanément et me laissait la certitude que toute l'explication était là

sans que je puisse en saisir toute la logique. Dans un autre temps me

venait une compréhension plus structurée, plus apte à être communiquée.

A titre d'exemple j'aimerais donner ici un extrait de mon journal. Je

notais un rêve que j'avais fait.

J'ai des roses, beaucoup de roses, de toutes les couleurs, des

jaunes, des roses, des rouges, des blanches. Elles ont toutes

des nuances différentes. Certaines ont une longue tige, d'au­

tres ont des épines. Je place les roses dans des pots et les

pots sont de formes variées, de nature différente. Je place

les arrangements floraux sur une table et les fleurs disparais­

sent sans que je sache à qui elles vont. Je m'en préoccupe

très peu comme si l'important était que cela serve à quelqu'un.

Ce qui me donne de la joie, c'est qu'il y a toujours des roses

nouvelles.

(23 juillet 1981).

(23)

Quelques mois plus tard, j'ai compris que le véritable don de soi

ne consistait pas à donner aux autres mais à être disponible et ouverte

aux autres de façon à ce que les gens puissent cueillir ce dont ils ont

besoin. Dans mon geste pédagogique, je n'ai pas à déterminer ce que je

veux donner à chaque enfant. J'ai à me mettre en situation de croissan­

ce et d'apprentissage. Je n'ai pas à répondre à leurs besoins mais à

créer des conditions de vie qui facilitent la croissance et l'apprentis­

sage de chacun(e).

Lorsque j'écris en langage fantaisiste, je ne comprends pas tou­

jours la signification immédiate pour ma recherche pédagogique. Je n'ai

pas à forcer l'expérience mais plutôt à être disponible au sens qui va

se dévoiler.

A décrire ainsi cette étape, je risque peut-être de donner l'im­

pression qu'il faut se laisser faire, que tout vient facilement. Pour­

tant non, ce n'est pas une période de passivité à moins de parler d'une

passivité active. Il faut faire un effort, mettre du temps, de l'énergie

pour comprendre ou pour assembler différentes significations. Il faut

confronter une nouvelle signification non seulement à son propre vécu mais

aussi à l'expérience des autres dans le but non de la justifier ou de la

valoriser par l'appui d'un autre, mais pour en voir toutes les dimensions.

Il faut comme situer chaque nouvelle signification, intuition, à l'in­

térieur d'un ensemble.

J'aimerais prendre ici l'image du puzzle. On peut chercher long­

temps un morceau avant de le trouver. Par contre, en plaçant un morceau

il devient tout à coup très facile de situer plusieurs autres morceaux.

Comme le souligne aussi Craig dans sa thèse, cette étape du proces­

sus est une expérience personnelle. C'est en soi et pour soi que l'on

découvre des significations nouvelles. Le sens que je découvre à mon

geste pédagogique, je le découvre en moi et il est significatif à l'inté­

rieur de mon propre vécu.

(24)

18

It is an organization of data for oneself, a clarification of

patterns for oneself, a conceptualization of concrete subjective

experience for oneself, an intégration of generic meanings for

oneself, and a refinement of ail these results for oneself.

(1978, p. 52).

Communication

L'écriture de ma thèse c'est plus qu'une exigence académique,

c'est une expérience et un cheminement. Je ne veux rien forcer de mon

processus pour le rendre plus crédible aux yeux des autres. Je veux

communiquer ma recherche parce que le fait de l'écrire pour la faire

lire à un autre me permet d'en comprendre davantage la portée. C'est

un peu comme si le fait de la communiquer me la rendait plus réelle, plus

vraie, comme si le fait de la mettre dans des mots me permettait de

l'authentifier.

Jç, veux aussi partager cette expérience de recherche avec d'autres.

J'accepte qu'elle soit discutée mais j'aimerais qu'on la reconnaisse

comme une étape dans un processus de croissance, comme un effort pour

rendre accessible aux théoriciens(nes) de la pédagogie, le vécu d'une

classe et comme un geste de solidarité envers tous(tes) les ensei-

gnants(es) qui comme moi cherchent à se comprendre dans la complexité du

monde éducatif.

Le problème à l'intérieur de cette étape n'est pas de savoir ce

que l'on veut communiquer mais de savoir comment le communiquer. Cher-^

cher le mot qui rend adéquatement la justesse de l'expérience est un

travail laborieux, un peu trop du domaine littéraire. Je sais seulement

qu'il me faut retourner aux motivations personnelles qui sous-tendent cet

effort de communication pour accepter d'en vivre toutes les contraintes.

Le processus d'écriture dans une approche heuristique exige un

profond engagement, une ouverture à son expérience, une confiance dans

son propre dynamisme de croissance, une grande honnêteté, un respect de

ses propres lenteurs, de la durée de son temps de mûrissement. Il faut

aussi une grande assiduité au travail.

(25)

C'est aussi un processus continu qui ne peut être interrompu. Il

exige une présence continuelle, une grande attention à tout ce qui se

passe. Il exige à la fois une grande réceptivité et une grande partici­

pation. On n'a aucun pouvoir sur les résultats, on les reçoit. Tu vis

avec l'expérience. Elle te façonne et tu la conduis.

C'est une méthode qui convient parfaitement à un(e) enseignant(e)

qui croit à son expérience comme pédagogue, qui sent qu'il(elle) a quel­

que chose à dire et qui perçoit son travail comme un facteur positif

dans la richesse de son être. Cette méthode respecte le(la) praticien(ne).

Il me semble de plus en plus que toute la recherche pédagogique ne peut

plus se faire sans un contact direct avec l'expérience de l'enseignant(e).

Il faut de plus en plus questionner l'expérience du professeur et surtout

lui donner un langage pour l'exprimer. Je rêve du jour où il me sera

possible de parler de mon expérience pédagogique non plus en la confron­

tant à une grille d'analyse mais en la dialoguant avec l'expérience ver­

balisée et écrite de plusieurs enseignants(es).

Ce qui me rend cette méthode de recherche encore plus intéressante

c'est qu'elle me donne les outils pour continuer ma démarche. La com­

munication de ma thèse ce n'est pas pour moi un terme c'est un palier

qui est atteint. Il me faut continuer mais cette fois à partir d'une

expérience qui est valorisée et avec un langage plus personnalisé.

Mes sources

Ma recherche étant centrée sur mon expérience pédagogique, ma pre­

mière source d'information fut donc mon vécu pédagogique passé et présent.

L'exploration d'une certaine littérature m'a permis de me situer dans ma

recherche et m'a donné des outils qui m'ont aidée à l'intérieur de diffé­

rentes étapes. La participation à des séminaires sur la créativité fut

aussi un élément important dans cette expérience.

(26)

2 0

Mon vécu pédagogique

Ma première tentative pour regarder mon expérience pédagogique

fut de regarder mon vécu en classe. Il m'a fallu d'abord le recueillir,

faire une description de mon vécu pédagogique de ma dernière année d'en­

seignement en terme d'organisation de classe: activités, interventions,

environnement, de relations avec les autres intervenants dans l'école,

d'objectifs poursuivis.

Dans un premier temps, j'ai dû énoncer mes croyances, mes valeurs,

mes contraintes, mes questions. Il aurait été intéressant d'avoir des

textes recueillis depuis mes débuts dans l'enseignement. A cette époque,

je ne croyais pas en la valeur de mon écriture. C'est une limite à ma

recherche de ne pas avoir des écrits rédigés au fur et à mesure du dérou­

lement de mes expériences pédagogiques. Cependant, quelques textes que

j'ai rédigés dans le cadre de cours de perfectionnement me permettent de

voir la montée de ma recherche de cohérence. Ces travaux s'échelonnent

sur une période de

k

ans de

1975

à 1978. J'y retrouve certaines questions

ou affirmations qui annoncent ma recherche pédagogique et mes croyances

pédagogiques.

Dans un essai réalisé en 1975, j'écrivais, au moment d'effectuer

un retour à l'enseignement après une période d'animation pédagogique,

... que l'école sera centrée sur le s'éduquant et le s'éduquant

c'est l'enfant, mais aussi le professeur qui perdra bien de son

"prestige" pour apprendre, lui aussi, à être; elle sera un lieu

d'apprentissage plus qu'un lieu de savoir et d'enseignement,

elle deviendra un milieu où nous serons heureux de vivre parce

que nous y ferons enfin des activités qui nous plaisent et qui

nous permettent de développer toute notre richesse d'être...

L'école doit permettre à l'enfant d'être et de vivre aujourd'hui

son enfance.

Dans un autre texte de mai 1978, je souhaitais que le milieu

scolaire "devienne un milieu où l'on vit c'est-à-dire un lieu où l'on

développe ses possibilités, ou l'on grandit au lieu de n'être qu'une

usine plus ou moins bien organisée de transmission de savoir."

(27)

A la suite d'un travail sur la lecture en classe, je notais mon

souci de cohérence pédagogique. "Il fut l'occasion de modifier l'orga­

nisation pédagogique de ma classe et de faire ainsi un pas de plus vers

la cohérence entre mes croyances pédagogiques et ma pratique de l'ensei­

gnement." (1977)*

Cet écart entre mes croyances et mon vécu en classe je le percevais

et je ressentais un malaise.

... les enseignants ne sont pas sans ressentir l'écart qui exis­

te entre ce qu'ils vivent dans leur classe et ce qui est prôné

par différents auteurs qui veulent trouver ou semblent avoir

trouvé la "pédagogie" pour notre temps.

Je cherche une pédagogie réaliste qui tiendrait compte du rythme

de croissance de l'enfant et du professeur et du milieu environ­

nant avec ses valeurs et ses contraintes... une pédagogie qui

serait axée autour: d'une conception dynamique de l'enfant,

d'un minimum d'apprentissages codifiés à acquérir, d'activités

ouvertes d'apprentissage et d'une exploitation de l'environne­

ment réel. (1977)*

Je définis l'enseignement comme une composante de l'acte pédagogi­

que. "Enseigner, c'est selon moi, permettre à l'enfant d'apprendre à

devenir à travers le quotidien c'est-à-dire créer des situations d'ex­

ploration et d'expérimentation qui lui permettront de se développer in­

tégralement." (1978).

D'après ce que j'écrivais en 1978, je situais aussi la qualité de

l'intervention pédagogique en fonction de la qualité d'être de 1'ensei­

gnante e). Il m'apparaissait aussi que tout effort de renouvellement

devait porter sur l'être même de 1'enseignant(e) et non sur des trucs

nouveaux ou l'adoption de nouveaux courants pédagogiques.

L'analyse de mon vécu pédagogique quotidien pendant près de quatre

mois à l'intérieur d'une expérience de journal fut aussi une source im­

portante d'informations.

(28)

2 2

J'ai abordé différents types de littérature à l'intérieur de mon

processus de recherche. Je n'ai pas cherché à épuiser la littérature

qui avait été écrite sur l'un ou l'autre des aspects sur lesquels je me

documentais. J'ai plutôt recherché des ouvrages de base éclairants ou

des ouvrages qui m'aidaient à vivre mon expérience.

Une première recherche en littérature voulait me permettre de dé­

couvrir des grilles d'analyse susceptibles de rendre plus claire la des­

cription de mon vécu pédagogique ou d'appuyer plus théoriquement mes orien­

tations pédagogiques.

Dans ce domaine, les écrits de Pierre Angers (

1963

, 1973, 197^,

1976, 1977, 1978) et ceux d'André Paré (1970, 1971, 1972, 197\ 1977,

1978, 1979,

1980) furent des plus importants et signifiants. J'ai même

opté à un moment donné pour me centrer davantage sur les écrits de ces

deux pédagogues québécois parce que j'y retrouvais mes intuitions et mes

désirs. J'ajoute aussi des écrits de Claude Paquette (1972, 1973, 1976)

sur l'organisation de la classe et l'étude de Bertrand et Valois (

1980)

sur les différentes options dans le monde de l'éducation.

Un autre type de littérature fut celle qui touchait au concept

d'actualisation de soi. Dans ce domaine, j'ai utilisé quelques livres

de Maslow (196^, 1970, 1971, 1972) auxquels j'ai ajouté des ouvrages

de Horney (1978), Hétu (1980), Rogers (1976) et des livres sur l'oeuvre

de Jung écrits par Fordham (1979) et Perrot (

1980).

Quant à la compréhension de mon processus de recherche et aux exi­

gences pour la communication d'une recherche expérientielle, je me suis

plus particulièrement référée aux thèses de doctorat de Peter Erik Craig

(1978) et de Thérèse Laferrière (1978).

Une autre littérature me fut précieuse en termes d'appui dans ma

recherche parce qu'elle se situe au niveau d'un dialogue, de la communi­

cation d'une expérience. Ce sont des écrits d'Anaïs Nin (1977) et les

Exploration d'une certaine littérature

(29)

deux thèses de doctorat mentionnées ci-dessus. Ces textes sont une lit­

térature que l'on écoute beaucoup plus que l'on ne lit.

Séminaires sur la créativité

Deux séminaires que j'ai suivis pendant deux trimestres consécutifs

ont exercé une grande influence sur ma recherche. Le premier, animé par

Denyse Pelletier et André Paré, portait sur la créativité et l'expres­

sion. Le deuxième sur les aspects irrationnels de la créativité était

dirigé par André Paré.

Ces rencontres m'ont permis de me centrer sur mon monde intérieur,

de faire confiance à ce que je ressentais, de croire à la richesse de

mon processus créateur. Elles m'ont facilité l'exploration de différents

moyens ou techniques d'expression. J'ai surtout compris qu'il ne pouvait

pas y avoir une expression de soi sans une grande ouverture à sa réalité

intérieure.

J'ai aussi appris à distinguer créativité et création, à ne pas

réserver la créativité au seul domaine artistique. J'ai saisi la créativi­

té comme une capacité d'être proche de soi, de son expérience et ce à tous

moments, comme un don qui rend unique chaque expérience de vie. La créa­

tivité est devenue pour moi une façon d'optimiser mon être et ma vie.

A l'intérieur de ces rencontres je me suis familiarisée avec les

techniques du journal. Celui-ci est devenu un véritable moyen d'expres­

sion et la principale méthode que je devais utiliser par la suite dans

mon processus de recherche.

La méthode du .journal

L'écriture d'un journal personnel fut une expérience-clé dans ma

recherche. J'aime à considérer mon journal comme le témoin de tout mon

processus. Il fut plus qu'un spectateur. Il a été un agent de découver­

te, d'exploration et de compréhension.

(30)

Après une expérience d'écriture qui s'échelonne sur plus d'un an

et demi, je peux parler de son évolution, des techniques que j'ai ex­

plorées, de mes rythmes et rites d'écriture.

L'évolution de mon journal

Je distingue trois phases dans l'évolution de mon journal, chacune

ayant ses caractéristiques, son rythme et ses rites. Ces phases ne sont

pas distinctes car je peux retrouver chacune de leurs caractéristiques

à chaque étape mais c'est leur dominance à certains moments qui me permet

de faire cette distinction et ce uniquement pour tenter d'expliciter

l'importance que le journal a eue dans ma recherche.

1ère phase; Expression libre

L'écriture de mon journal a commencé sous la forme d'un projet

personnel à l'intérieur du séminaire sur l'expression et la créativité.

Comme nous explorions différents modes d'expression, je me sentais moti­

vée à faire une expérience d'écriture plus en profondeur, de façon plus

continue. C'était pour moi un moyen de devenir plus consciente de ce

qui se passait en moi, de poser un regard sur ce que j'étais devenue,

sur ce qui faisait que j'étais ce que je suis. Cela m'apparaissait une

expérience très valable au début d'un temps d'arrêt qui se voulait un

véritable perfectionnement.

Pendant cette première phase, j'avais l'habitude d'écrire presque

quotidiennement. Je le faisais le soir, en respectant certains rites

que je me donnais: temps de détente, lumière tamisée, préparation du

matériel: crayon noir et papier blanc non-ligné.

Habituellement, j'écrivais de façon spontanée, ce qui venait tout

simplement et je ne me relisais jamais. Je n'aimais pas suivre une cer­

taine démarche lorsque j'écrivais seule même si je me sentais très libre

et spontanée dans quelques expériences d'écriture faites en groupe où

une personne orientait la démarche d'écriture à l'aide de techniques com­

me celles suggérées par Progoff (1977)»

(31)

Je ne prenais pas la décision d'écrire sur un thème en particulier

mais une relecture de mes textes me permet de constater que j'abordais

toujours à peu près les mêmes sujets:

mon histoire à travers le récit de faits de mon enfance, des

essais pour me situer présentement et exprimer mes besoins.

- ma vie personnelle à travers l'écriture de mes rêves, mes fan­

taisies, mes croyances, mes contradictions et mes peurs.

- mes relations avec des parties de moi, des personnes ou des

événements.

Je n'ai pas écrit au sujet de mon travail à ce moment-là en partie,

je crois,parce que je rédigeais des travaux académiques sur mon vécu pé­

dagogique. Il y avait une séparation qui se faisait entre mon vécu per­

sonnel et mon expérience comme enseignante.

Techniques. Au cours de cette phase, j'ai utilisé trois techniques.

Une première technique fut celle de l'écriture spontanée pour décrire mes

émotions, mes sensations. J'écrivais ce qui venait avec l'impression

d'écrire de façon non-logique. Une autre fut l'utilisation du dialogue.

J'écrivais sous la forme d'une conversation entre deux personnes. Je dia­

loguais aussi avec l'une ou l'autre des parties de mon corps, avec mon vécu,

mes peines ou encore avec des personnes qui sont proches de moi ou qui ont

une influence sur moi. Le dessin fut aussi une forme d'écriture. J'uti­

lisais les couleurs et les formes pour exprimer des émotions ou traduire

des sentiments. J'avais l'impression de pouvoir mieux dire ou de dire

davantage ce que je ressentais. Habituellement lorsque j'utilisais cet­

te technique, c'était à la fin d'un temps d'écriture.

Analyse de l'expérience. Cette phase fut une expérience de crois­

sance personnelle. C'était une recherche de limpidité dans ma vie. Etre

limpide signifiait se dévoiler dans la simplicité. Cela évoquait en moi

l'image d'une clarté sans éblouissement. Ce fut une nouvelle prise de

conscience des richesses qui m'habitent, une recherche de l'unicité de

mon être, une découverte, à travers mes étapes de vie, du même désir

(32)

2 6

Cette première phase s'est terminée de façon plutôt abrupte sans

que j'aie vraiment pris la décision d'arrêter d'écrire, je n'ai pas

repris mon journal pendant près de cinq mois. Je considérais que l'é­

criture de mon journal m'avait trop centrée sur mon moi et de façon plus

ou moins avouée, la poursuite de l'expérience me paraissait un geste

égoïste. Il y avait ma recherche en pédagogie qui était importante et

que je considérais comme un secteur distinct et auquel je devais consa­

crer tout mon temps et mes énergies. Il y avait eu aussi une confron­

tation à des difficultés et j'avais le goût de laisser reposer tout

cela. Enfin, je ne connaissais pas suffisamment les difficultés inhé­

rentes, normales qui surgissent dans l'écriture d'un journal et je n'é­

tais pas outillée pour les solutionner.

2ème phase: Exploration thématique

Mon journal est devenu un moyen d'explorer les avenues de

ma croissance. L'écriture demeurait spontanée mais j'avais un choix de

thèmes. J'étais centrée sur mon désir de réalisation personnelle. Je

prenais de plus en plus conscience que s'actualiser est un besoin de

croissance qui surgit lorsque l'individu a satisfait ses besoins fonda­

mentaux (Maslow, 1972).

L'écriture de mon journal est devenue une sorte d'auto-analyse.

Je décrivais comment j'avais répondu à mes besoins fondamentaux. Ce

fut une véritable revue d'histoire personnelle et ce à tous les niveaux

de mon être.

Dans sa forme la plus intensive, cette phase n'a duré que quel­

ques semaines mais je pouvais écrire plus d'une dizaine d'heures par

jour. Mes rites d'écriture s'étaient modifiés. J'écrivais à n'importe

quelle heure du jour ou de la nuit, sur un papier ligné avec des crayons

au plomb que je prenais le temps de soigneusement aiguiser avant de com­

mencer. J'écrivais en pleine lumière, à un bureau de travail où il n'y

avait que les feuilles à utiliser pour écrire.

(33)

J'écrivais avec une grande intensité passant du rire aux larmes

mais avec une volonté de vaincre les blocages qui survenaient à certains

moments dans l'écriture. Au lieu de contourner un blocage, j'entrais en

dialogue avec lui. Je devenais de plus en plus sensible à mes moyens

de défense lorsque j'abordais des réalités qui me paraissaient plus pé­

nibles.

Techniques. J'ai beaucoup utilisé la technique de l'écriture de

la lettre qui ne s'envoie pas (Rainer, 1978). J'écrivais à différentes

personnes et je m'écrivais aussi à moi. J'ai fait des dialogues avec

certaines parties de mon expérience. A d'autres moments, j'utilisais

le langage fantaisiste surtout lorsque je voulais aborder des thèmes

plus difficiles. Pendant cette phase, j'ai fait aussi quelques jeux

de couleurs mais davantage pour me détendre.

Analyse de l'expérience. Je considère cette

phase comme une riche

expérience où je me sentais pleine d'énergie et où la centration sur moi

devenait un geste concrètement positif. Je retrouve cette forme d'ex­

ploration tout au long de l'écriture de mon journal mais elle prend pla­

ce à travers des temps d'analyse, de compréhension ou d'écriture intuitive.

Au cours de cette période intensive d'exploration, la préoccupa­

tion de ma recherche et de la rédaction d'une thèse a été complètement

oubliée. Pourtant,je constate aujourd'hui que ce fut une période où

j'ai accumulé un matériel qui s'est avéré primordial dans ma recherche de

cohérence pédagogique.

Cette expérience m'a fait comprendre que le premier perfectionne­

ment à se donner, c'est de se mettre à l'écoute de ses propres poussées

de croissance. Cette phase fut déterminante dans l'orientation de ma

recherche.

(34)

28

3ème phase: Retour sur mon vécu

Dans cette dernière phase, mon journal est devenu davantage un

moyen de réflexion et de compréhension. Elle a coïncidé avec mon retour

dans l'enseignement.

Mon journal se divise maintenant en deux parties. Dans l'une j'é­

cris à partir du vécu de mes journées passées en classe. Je relève des

faits. Je tente de décrire mes sentiments, mes émotions face à ce que

je vis avec les jeunes. J'essaie de voir comment j'exprime et je satis­

fais mes besoins, quelles sont mes attentes, mes préoccupations.

Dans une autre partie, je continue d'écrire de façon plus sponta­

née. Je prends note de mes rêves, mes fantaisies.

Je poursuis une ré­

flexion. Je tente de décrire ce qui se passe au moment où j'écris. Je

l'utilise aussi pour exprimer les satisfactions, les craintes, les peurs

qui surviennent dans l'écriture de ma thèse. C'est une façon de demeurer

sensible à mon vécu.

Dans cette troisième phase de mon journal, mes rites et mes

rythmes d'écriture se sont légèrement modifiés. Les jours de classe,

j'écris quelques pages et parfois même seulement quelques paragraphes

à chaque soir. Pendant les fins de semaine j'y consacre une bonne par­

tie de mes débuts de journée.

J'écris sur un papier ligné, sur un seul côté

des feuilles que

j'insère par la suite dans un cahier. Pour écrire dans mon journal, je

me rends dans une pièce qui me sert de bureau de travail et qui me permet

de m'isoler complètement des autres et des bruits familiers. Avant d'é­

crire, je prends toujours le temps d'aiguiser trois ou quatre crayons.

C'est ma façon de me "ramasser" pour entrer dans une expérience d'écri­

ture même si celle-ci est de très courte durée. Quant aux techniques

d'écriture, j'y retrouve celles qui furent utilisées au cours des phases

précédentes.

(35)

Dans cette troisième phase, j'ai constaté que si j'avais des

temps d'écriture, j'avais aussi des périodes où mon journal devenait

une expérience de lecture, de recherche de sens. Si dans un premier

temps, j'écrivais dans mon journal pour me parler, dans un deuxième

temps, je laissais mon journal me parler. Cette constatation m'amène

à décrire de façon plus précise ma façon d'utiliser la méthode du jour­

nal.

L'utilisation du journal

L'utilisation du journal comme méthode de recherche s'est répartie,

pour moi, en deux temps: un moment d'écriture et un moment de lecture

de ce qui était écrit. Voici une description de la nature de l'utilisa­

tion que je fais de "mon journal".

Le temps d'écriture

Lorsque j'entre dans le processus d'écriture de mon journal celui-

ci peut jouer plusieurs rôles ou fonctions. Il me permet de me centrer

sur mon expérience, sur ma façon de vivre des situations ou des événe­

ments qui peuvent être partagés avec d'autres. Ainsi, lorsque je vis

une fête avec les enfants, j'ai ma façon à moi d'en parler. Habituelle­

ment je ne décris pas la fête elle-même mais ce qui m'a touchée pendant

la fête ou à la suite de cette activité. Mon journal n'est pas un rele­

vé des événements de la journée.

Lorsque j'écris dans mon journal, je me centre sur ce qui se passe

en moi au moment où j'écris. Ce peut-être le récit d'un fait qui me pa­

raît anodin mais j'ai confiance que s'il veut me parler à ce moment-là

c'est qu'il est signifiant. J'écris sur cet événement. Je me le racon­

te. Je me situe face à lui. J'écoute (j'écris) ce qu'il me dit de moi

et de moi en relation avec les autres.

(36)

30

Mon journal est un moyen de m'exprimer face à des situations qui

m'enthousiasment, me fatiguent, m'énervent, me tendent. Mon rythme

d'écriture est alors très rapide et je répète souvent les mêmes mots

comme en écho. En écrivant ainsi je retrouve peu à peu mon calme et

les événements qui ont provoqué ces situations prennent une plus juste

dimension.

Mon journal est aussi une façon de faire des prises de conscience,

de comprendre des situations et ce au moment où j'écris. Ainsi, un jour

où j'écrivais au sujet de ma relation avec une de mes élèves particu­

lièrement défavorisée, je prenais conscience comment elle était dépen­

dante de moi, me réclamant sans cesse près d'elle. J'ai réalisé que

c'était la seule élève à qui je ne permettais pas de faire des choix.

J'organisais tout pour elle et ce dans le but de lui faciliter les choses.

Cette prise de conscience de mon incohérence m'a permis de modifier ma

façon d'intervenir auprès d'elle.

Une autre journée où je relevais ce qui rendait les enfants heureux

d'après leur témoignage lors d'une réunion de classe, j'ai pris conscien­

ce que la nouveauté n'était pas synonyme d'intérêt, que les enfants aiment

répéter le même genre d'activités s'ils s'y sentent à l'aise, qu'une ac­

tivité nouvelle peut provoquer plus d'insécurité que d'enthousiasme.

L'écriture d'un journal, c'est le premier temps d'une préparation

de classe. C'est là où je peux me rendre compte que si par exemple, j'ai

dû intervenir plusieurs fois dans une équipe c'est que je n'avais pas

vraiment perçu leur difficulté ou encore que les multiples informations

que j'ai dû donner dans le déroulement d'une activité n'étaient pas at-

tribuables à l'inattention des enfants mais à l'imprécision de la tâche

ou à des difficultés que j'avais mal calculées. C'est là aussi que je

prends conscience que si la journée fut déprimante avec les enfants ce ne

peut-être dû qu'à une divergence d'opinion à la salle des professeurs.

Références

Documents relatifs

Dans la deuxième partie intitulée un jeu entre l’ici et l’ailleurs, nous avons procédé, dans le premier chapitre à l’étude de l’espace qui se compose de deux villes :

Aujourd'hui, quand, à la fin de mes spec- tacles ou d'une émission, je vois un aveugle ou une personne dans un fauteuil roulant quitter la salle, heureux d'avoir ri pendant

Mais bon, j'espère qu'ils ont raison, que cette histoire va vite se tasser et que dans quelques jours, tout le monde aura oublié.
?.

Pour qu’ovule et spermatozoïdes se rencontrent, il faut donc avoir un rapport sexuel au plus tard le jour de l’ovulation, idéalement dans les deux à trois jours la

To indicate the starting date or duration of an action or situation which is still going on in the present, use the preposition depuis + a time expression.. Note that depuis can

Je ne sais pas si j'ai pêché une truite.. Les oiseaux font

Or, pour cette modeste tentative d'analyse socio-sémiotique, nous avons été tenté – audacieusement, sans aucun doute – d'éclairer notre sujet (un objet et un

[r]