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Les « décrocheurs »- Enquête sur la non-réinscription en bibliothèque à Limoges et à Saint-Étienne

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Diplôme de conservateur de bibliothèque

Les « décrocheurs »- Enquête sur la

non-réinscription en bibliothèque à

Limoges et à Saint-Étienne

Céline Ducroux

Sous la direction de Daniel Le Goff

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 3 -

Remerciements

Mes premiers remerciements vont bien entendu à Daniel Le Goff qui a proposé ce sujet, me l’a présenté et m’a accompagné dans cette étude. Ses conseils, ses encouragements, son professionnalisme et sa générosité m’ont été précieux.

Je remercie également tous ceux qui ont pris le temps de répondre à mes sollicitations, nombreuses !, avec patience et bienveillance : Christophe Evans, Claude Poissenot, Gwenola Le Naour, Iégor Groudiev, Thierry Grognet, Annie Brigant et Guillaume Hatt de la bibliothèque de Grenoble, Mireille Lafarge et Alexandre Garcia, et tous les membres de l'équipe de la Bfm et Mr Vincent Schmidt, François Marin, Hélène Ouali Séon et Nathalie Verdier Riocreux et tous les membres de l'équipe de la BM de Saint Etienne.

Je remercie encore mes petits camarades de la promotion Rosa Luxembourg, qui ont subi mon obsession et mes doutes, et notamment Clément Babu, Amaël de Montgolfier, Brigitte Groleau, Yvan Hochet, Albane Lejeune, Claire Montel, Lucie Munsch et Mathilde Peyrou.

Je remercie enfin mon amour et ma famille pour leur soutien indéfectible et leur patience infinie.

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Résumé :

Le phénomène de non-réinscription à la bibliothèque inquiète les professionnels: qui sont les décrocheurs, et surtout, pourquoi décrochent-ils ? Quelles sont les raisons qui les poussent à abandonner la bibliothèque, en ne renouvelant pas leur adhésion d'une année à l'autre ? En interrogeant les « décrocheurs » et les nouveaux inscrits (les primo-arrivants, ceux qui s’inscrivent pour la première fois) des bibliothèques de Limoges et de Saint-Étienne, on peut essayer d’identifier ces raisons.

Parmi celles qui sont avancées pour expliquer la non-réinscription, certaines sont définitives et hors du champ d’intervention de la bibliothèque, tandis que d’autres peuvent être combattues par des actions ciblées.

Les rencontres et les échanges avec les usagers ont permis de comprendre finement les motivations de la non-réinscription, et permettent également de tracer des pistes d’actions, à partir des suggestions recueillies.

La bibliothèque doit sans doute évoluer vers un point d'équilibre entre la satisfaction des demandes individuelles et l'affirmation des valeurs et du projet qu'elle défend.

Descripteurs :

Bibliothèques municipales - - Utilisation Bibliothèques - - Publics

Bibliothèques - - Services aux utilisateurs - - France - - Enquêtes Sciences sociales - - Recherche sur le terrain

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 5 -

Abstract :

Librarians are worried about the increasing number of people abandoning libraries: who are the lapsed users? Why are they abandoning libraries? Asking the users of the library of Limoges and these of Saint-Étienne, some answers can be drawn at first.

Among the reasons for not coming on to libraries, some are definitive and depend not on library, but some can be fought against by a targeted action from libraries.

New users and lapsed users have been asked in Limoges and Saint-Étienne. Their answers explain what they expect from libraries and what can be done to make them come back. Thanks these meetings, libraries can know better their users, and from what they suggest, libraries can imagine new models and new process to appeal again their users.

Library may change to a new balance between satisfying individual demands and affirming values that are strongly defended by the project of the library.

Keywords : Library use Lapsed users Library survey

Droits d’auteurs

Cette création est mise à disposition selon le Contrat : « Paternité-Pas d'Utilisation Commerciale-Pas de Modification 2.0 France » disponible en ligne http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/deed.fr ou par courrier postal à Creative Commons, 171 Second Street, Suite 300, San Francisco, California 94105, USA.

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 7 -

Sommaire

SIGLES ET ABREVIATIONS ... 9 

INTRODUCTION ... 11 

PARTIE 1 – L’ABANDON DE LA BIBLIOTHEQUE : DE LA NON REINSCRIPTION A LA DECEPTION, LE DECROCHAGE ? ... 15 

1.1.  Pourquoi s’inscrire ? Représentations et enjeux de l’inscription en bibliothèque ... 15 

1.2.  Le phénomène de la non- réinscription en bibliothèque ... 20 

1.3.  les décrocheurs à Limoges et à Saint-Etienne ... 25 

PARTIE 2 - PRIMO-ARRIVANTS ET DECROCHEURS : QU’ATTENDENT-ILS DE LA BIBLIOTHEQUE ? ELEMENTS D’ANALYSE COLLECTES AUPRES DES PUBLICS A LIMOGES ET A SAINT-ETIENNE ... 37 

2.1.  Présentation de la méthodologie adoptée ... 37 

2.2.  Les résultats de l’enquête par questionnaire ... 42 

2.3.  Présentation des entretiens de groupes : éléments d’analyse ... 52 

PARTIE 3 - CHANGER LA BIBLIOTHEQUE : PROPOSITIONS D’USAGERS ET MARGES DE MANŒUVRE DE LA BIBLIOTHEQUE ... 69 

3.1. Accéder à la bibliothèque ... 69 

3.2. accueillir les usagers ... 75 

3.3. Prévenir plutôt que guérir : communication entre la bibliothèque et ses usagers ... 80 

CONCLUSION ... 85 

BIBLIOGRAPHIE ... 89 

TABLE DES ANNEXES ... 95 

TABLE DES ILLUSTRATIONS ... 135 

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 9 -

Sigles et abréviations

ABF Association des Bibliothécaires de France

AVS Assistant(e) de Vie Scolaire

BBF Bulletin des Bibliothèques de France

Bfm Bibliothèque francophone multimédia

BMI Bibliothèque multimédia intercommunale

BmL Bibliothèque municipale de Lyon

BMVR Bibliothèque municipale à vocation régionale

BnF Bibliothèque nationale de France

BPI Bibliothèque publique d’information

BRISE Bibliothèques en Réseau Informatisé de Saint-Étienne

BU Bibliothèque universitaire

CREDOC Centre de recherches pour l’étude et l’observation des

conditions de vie

CSP Catégorie socioprofessionnelle

DRAC Direction régionale des affaires culturelles

ECM Espace Culture Multimédia

ENISE École Nationale d'Ingénieurs de Saint-Étienne

ENSASE École Nationale Supérieure d'Architecture de

Saint-Étienne

ESC École Supérieure de Commerce de Saint-Étienne

ENSMSE École Nationale des Mines de Saint-Étienne

Enssib École Nationale Supérieure des Sciences de l’Information

et des Bibliothèques

EN3S École Nationale Supérieure de Sécurité Sociale

IGB Inspection Générale des Bibliothèques

INSEE Institut national de la statistique et des études

économiques

MOTif Observatoire du livre et de l’écrit en Île-de-France

SIGB Système intégré de gestion de bibliothèque

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 11 -

INTRODUCTION

Pourquoi s’intéresser au décrochage à la bibliothèque ?

Quels que soient les noms qu'on lui donne, l'abandon, l'exit, la désinscription, le désamour ou le décrochage, le phénomène de non-réinscription à la bibliothèque inquiète les professionnels.

Certes, les usages changent : l'emprunt de documents n'est plus le mode exclusif de relation entre les usagers et la bibliothèque1. L'adhésion n'est donc plus la règle pour profiter des services offerts quand on ne vient pas emprunter à la bibliothèque.

A Limoges, dans un équipement de prestige comme la Bibliothèque francophone multimédia (Bfm), à l'architecture spectaculaire, aux collections riches et variées, où la gratuité est pratiquée pour tous, on est perplexe : à en croire les données d'évaluation extraites du SIGB, la bibliothèque ne séduit plus. Décevrait-elle ?

Avec François de Singly, dans la préface qu'il a rédigé pour l'ouvrage de Claude Poissenot2 intitulée « Une forme de l’évaluation : l’analyse de « l’exit », de

la non-réinscription », on peut reprendre les analyses de Albert O. Hirschman, et

ainsi lire dans la non réinscription à la bibliothèque une forme de l'exit. Les travaux de Hirschman3 ont montré que l'usager du service public n'a que deux moyens de contester le service qui lui est rendu : la prise de parole ou le départ, qu'on peut alors considérer comme une fuite.

Mais pourquoi fuir la bibliothèque ?

Si le phénomène n'est pas récent, puisque plusieurs études ont approché cette question sous l'angle de la fréquentation ou de la connaissance des publics, il a acquis aujourd'hui une acuité particulière, qui lui confère toute légitimité pour être traité en tant que tel.

En effet, la généralisation de l'évaluation des politiques publiques dans un contexte de plus en plus contraint pour les collectivités qui financent les bibliothèques territoriales conduit les élus à mesurer strictement l'efficacité des investissements qui sont consentis: la bibliothèque mérite-t-elle encore les dépenses qu'on lui consacre si le public la déserte ?

Concurrencée fortement par les ressources numériques et Internet, auquel les ménages ont de plus en plus accès, la bibliothèque n'est plus le seul fournisseur de contenus culturels, éducatifs et récréatifs. Quelle est aujourd'hui la plus-value de la bibliothèque ? Quels sont les usages que les publics font de la bibliothèque et quels sont les services qu’ils en attendent aujourd'hui?

1 MARESCA, Bruno, Les bibliothèques municipales en France après le tournant Internet, Bibliothèque publique d’information/ Centre Pompidou, Paris, 2007.

2 POISSENOT, Claude, Les adolescents et la bibliothèque, Bibliothèque publique d’information/ Centre Pompidou, P aris, 1997.

3 HIRSCHMAN, Albert O., Face au déclin des entreprises et des institutions, Éditions Ouvrières, Paris, 1970. Le titre en anglais est « Exit, Voice et Loyalty », ainsi que l’indique F. de Singly dans la préface déjà citée.

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Le « décrocheur » à la bibliothèque, essai de définition

Venu du monde de l'éducation, le terme de décrocheur désigne la plupart du temps un enfant en rupture avec l'obligation d'assiduité scolaire.

Les raisons qui expliquent le décrochage scolaire sont multiples : difficultés scolaires, orientation subie et vécue comme une relégation, précarité sociale et économique de la famille qui incitent les jeunes à rechercher des petits boulots précocement, illettrisme des nouveaux arrivants...

Il se traduit par plusieurs symptômes, qui se répètent dans le temps : incompréhension cognitive banalisée progressivement par l'élève (ne plus comprendre est accepté avec résignation comme seul mode de fonctionnement scolaire possible), absence de travail personnel, absentéisme comme forme d'évitement de la confrontation avec l'institution scolaire, le repli et parfois même un rejet violent de l'école : « Pour l'élève, le décrochage signe un point de non-retour (...), [où] il s'inscrit contre le système scolaire dans un mouvement de fuite et d'évasion (…). Ce mouvement se cristallise autour d'une inversion symbolique : l'échec de l'élève devient celui de l'école « je te quitte car tu n'as pas su ni me plaire, ni me retenir » »4.

Face à ces causes multiples du décrochage, ajoutées à des parcours individuels plus ou moins accidentés, il est impossible de définir le profil-type du décrocheur.

Dans quelle mesure cette définition peut-elle s'appliquer au monde des bibliothèques ?

Tout d'abord, si le décrocheur scolaire est la plupart du temps un enfant entre 6 et 16 ans (âge limite de l'obligation scolaire en France), le décrocheur en bibliothèque ne semble pas connaître de limite d'âge : on observe des décrocheurs chez les adolescents, chez les actifs, chez les retraités.

La différence majeure entre les phénomènes de décrochage en milieu scolaire et en bibliothèque réside surtout dans l'obligation d'assiduité qui est une contrainte forte pour l'élève, alors que rien ni personne n'oblige à fréquenter la bibliothèque. L'inscription en bibliothèque est un acte choisi, de liberté individuelle, qui n'est jamais contraint. Le lecteur de la bibliothèque est libre de venir, de choisir des documents, d'avoir recours aux services, à une fréquence qu'il maîtrise également. Le décrochage en bibliothèque ne génère pas non plus, en règle générale, d'agressivité ou de violence, dans la mesure où aucune contrainte ne s'exerce pour faire revenir à la bibliothèque des lecteurs qui auraient décidé d'abandonner sa fréquentation.

S'il n'y a pas de profil type de décrocheur scolaire, il s'agit de déterminer s'il existe des spécificités du public décrocheur en bibliothèque, qui laisseraient supposer que certains critères sont récurrents au sein des publics qui ne se réinscrivent pas à la bibliothèque.

Les informations dont la bibliothèque dispose pour définir les spécificités du décrocheur sont en partie contenues dans le SIGB de la bibliothèque, dans les

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 13 - données relatives aux inscrits (âge, adresse, CSP). Ces informations sont le point

de départ de ce travail et seront complétées par des enquêtes plus approfondies. Comme pour le décrochage scolaire, le décrochage en bibliothèque doit s'inscrire dans la durée : on ne peut pas déduire de l'absence de quelques mois d'un lecteur un décrochage. Il est peut-être en vacances, hospitalisé, en déplacement professionnel...Pour être considéré comme décrocheur, l'absence doit être inscrite dans la durée, pendant au moins 1 an.

Le terme de décrocheur est entendu ici comme désignant les personnes qui, après avoir été inscrites à la bibliothèque, ont renoncé à renouveler leur adhésion (pour des raisons qui restent à expliciter).

« Décrocheur » peut paraître impropre mais il traduit bien la volonté d'inciter les responsables d'équipement à se saisir de cette question urgemment. Il est utilisé par ailleurs par Olivier Donnat5, qui n’hésite pas à parler de « décrochage du

monde du livre » et correspond à l'expression utilisée par Daniel Le Goff pour

proposer ce travail de recherche.

Le décrochage scolaire semble mettre en lumière l'incapacité de l'institution scolaire à s'adapter aux enfants en difficulté ou avec des parcours spécifiques. Pour le monde des bibliothèques, l’accentuation du phénomène de décrochage semble interroger les missions de la bibliothèque : comme si le décrocheur n'était que le symptôme visible de l'inadaptation de la bibliothèque aux besoins de son public.

Une meilleure connaissance des publics et de ses attentes, mais aussi la mise en place d'indicateurs qui permettraient de prendre en compte les usages nouveaux et sans inscription pourraient alors permettre de repenser les missions de la bibliothèque et être source d'innovation pour rencontrer les attentes de ses publics.

Hypothèses de travail et méthode

L'hypothèse de recherche qui fonde ce travail est simple : si les bibliothèques connaissent un taux élevé de décrochage, c'est le signe de la déception des usagers vis-à-vis des services proposés par la bibliothèque, et donc à terme le signe de la fin des bibliothèques. Quels sont les facteurs qui président au décrochage ? La bibliothèque peut-elle lutter contre ce phénomène ? Comment ?

Il s’agira de vérifier dans quelle mesure cette hypothèse initiale peut s’avérer pertinente, à partir de l’étude de la situation de la Bfm de Limoges et de la bibliothèque de Saint-Étienne, qui ont accepté de se prêter au jeu de l’approche comparative.

Ce travail s'attachera dans un premier temps à poser le cadre et les enjeux : qu'est-ce que l'inscription ? Que représente-t-elle ? Pourquoi ne pas s'inscrire ? Cette partie proposera également les premiers éléments de la méthode que nous

5 Voir l’article publié par Le Monde le 11 janvier 2012 qui présente en quelques pages les éléments complémentaires à l’étude d’O. Donnat sur les Pratiques culturelles des Français à l’ère numérique (2009) :

http://lafeuille.blog.lemonde.fr/2012/01/11/levolution-des-pratiques-de-lecture-a-laune-des-dynamiques-generationnelles-et-des-pesanteurs-sociales/

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avons suivie pour mener cette enquête : comment mesurer le décrochage? Avec quelles données travailler ? Quelle est la situation à l'échelle nationale ?

Dans un second temps, à partir des données extraites du SIGB et de questionnaires adressés aux décrocheurs, il s'agira d'interroger les usages qui sont faits de la bibliothèque : existe-t-il des caractéristiques récurrentes qui prédisposent au décrochage ? Quelles sont les raisons qui poussent les usagers à décrocher ? L’analyse quantitative que permet le questionnaire ciblé sera complétée par la mise en place d’entretiens de groupes (ou focus groups) qui proposent une approche plus qualitative des raisons de la non-réinscription. Pour apporter un contre-point à la vision de la bibliothèque des décrocheurs, qui se situent à la frontière du « non public » et dont on peut douter de l’intérêt qu’ils portent à la bibliothèque ou aux études la concernant, il a paru intéressant de s’intéresser en parallèle aux nouveaux inscrits : qui sont-ils et que viennent-ils chercher à la bibliothèque ? Leurs attentes initiales sont-elles les déceptions des décrocheurs ?

Enfin, dans une troisième partie, à partir des propositions des usagers recueillies via le questionnaire ou les focus groups, plusieurs pistes de solution pour essayer d'enrayer le phénomène de décrochage dans les bibliothèques seront présentées. La question de l’évaluation et la nécessité d’inventer de nouveaux indicateurs qui prennent en compte les usages des bibliothèques non comptabilisés pour l’heure seront abordées.

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DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 15 -

PARTIE 1 – L’ABANDON DE LA BIBLIOTHEQUE :

DE LA NON REINSCRIPTION A LA DECEPTION, LE

DECROCHAGE ?

1.1. P

OURQUOI S

INSCRIRE

?

R

EPRESENTATIONS ET ENJEUX DE L

INSCRIPTION EN

BIBLIOTHEQUE

1.1.1. Qu’est ce que l’inscription ?

a. Droits et devoirs de l’inscrit en bibliothèque

L'inscription à la bibliothèque est un acte individuel et libre, qui consiste pour un individu à se conformer à la procédure suivante : donner son identité, ses coordonnées, éventuellement acquitter un droit payant dont le montant dépend de plusieurs critères; en échange de quoi, il peut à loisir emprunter des documents de son choix en nombre défini et pour une durée limitée à la bibliothèque.

L'inscription valide le choix d'un individu de profiter du service public qu'est la bibliothèque, et cette validation a valeur d'engagement : on s'engage à se conformer aux règles de fonctionnement de l'établissement, dont la bibliothèque peut inviter l'inscrit à prendre connaissance via le site Internet ou sur un document papier.

Les modalités d'inscription diffèrent d'un établissement à l'autre : les tarifs sont très hétérogènes et dépendent de plusieurs facteurs (âge, revenus, lieu de résidence, supports auxquels on souhaite avoir accès…).Ces critères tendent à favoriser les jeunes (qui bénéficient presque toujours de la gratuité) et les personnes dont les revenus sont faibles. Enfin se développe une tendance à favoriser les habitants du territoire. Ces limites territoriales correspondent aux frontières de l'échelon administratif dont dépend l'établissement : la ville quand la bibliothèque est municipale, l'agglomération ou la communauté de communes quand elle est un équipement communautaire. Cette tendance souligne la volonté d'ancrer localement la bibliothèque et peut être aussi celle des élus de favoriser leurs électeurs-contribuables : la mise en place d'un tarif attractif pour les habitants du territoire pourrait alors être interprété comme un encouragement à profiter des services publics locaux auxquels ils contribuent. Cette pratique est relativement admise par les personnes que ce travail nous a amenées à rencontrer. Enfin, certains grands établissements pratiquent la gratuité pour tous les publics. C'est notamment le cas à Limoges où cette position, fortement politique, est largement assumée et défendue par le directeur de la bibliothèque6.

Ainsi la situation de l'inscription est hétérogène et ses modalités diffèrent d'un établissement à l'autre, et même si les principes sont globalement les mêmes,

6 Voir l’article de Daniel Le Goff consacré à cette question, dans l’un des derniers numéros du BBF : Le Goff, Daniel, « La gratuité, ça paye », BBF, 2012, n° 3, p. 47-50

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cela oblige l'usager à redécouvrir à chaque fois les us et coutumes de l'établissement dans lequel il arrive.

L'usager, une fois que l'inscription est faite, a alors le droit de bénéficier de tous les services offerts par la bibliothèque : prêt de documents (dans la limite de ce que prévoit le fonctionnement de l'établissement), consultation sur place illimitée de tous les documents et de tous les supports, participation aux ateliers mis en place par la bibliothèque (qui peuvent nécessiter une contribution supplémentaire), aux animations culturelles de tout type (conférence, débat, projection de films, rencontre avec des auteurs...qui peuvent là encore nécessiter une participation supplémentaire), accès à un compte lecteur administrable à distance depuis le site de la bibliothèque et qui permet, la plupart du temps, de réserver des ouvrages, de prolonger la date d'emprunt des documents..., accès aux collections numériques de la bibliothèque quand elle en possède (fonds patrimoniaux, abonnements à la presse ou à des outils d'autoformation). En fonction du réseau de partenaires dans lequel la bibliothèque est inscrite, l'inscription peut aussi permettre l'accès aux services de prêt des établissements partenaires, comme c'est le cas à Saint-Étienne et à Limoges.

Dans la mesure où certains de ces services sont également accessibles à l'ensemble des publics sans qu'il y ait besoin d'adhérer à la bibliothèque (la consultation sur place et les animations quand elles sont gratuites), l'inscription est souvent synonyme de droit d'emprunter des documents.

b. Pourquoi ne pas s’inscrire à la bibliothèque ?

Si on compare le coût des documents auxquels l'usager a alors accès grâce à son inscription, et l'effort induit par cette dernière (en termes financier ou de procédure), il apparaît clairement que l'inscription est « un acte rentable, donc

rationnel »7. C'est d'autant plus intéressant que l'emprunt d'ouvrages reste le service auquel les usagers associent le plus la bibliothèque et pour lequel ils déclarent s'inscrire, selon les chiffres avancés par l'enquête du CRÉDOC8 réalisée en 2005. Les éléments collectés dans les questionnaires distribués auprès des publics de Limoges et de Saint-Étienne vont dans le même sens.

Pourquoi donc ne pas s'inscrire à la bibliothèque ?

Plusieurs motivations peuvent être avancées, et Martine Burgos s'attache à les décrypter, en commençant par évoquer le comportement attendu des usagers : «L’administration a parfois tendance à considérer que seules les personnes qui ont

fait cette démarche d’inscription composent le vrai public de la bibliothèque (...), les autres, les usagers non-inscrits seraient des invités épisodiques, des hôtes de passage, des curieux, des indécis »9.

7 CATANESE-PALANCHE, Véronique, DESVOIS, Muriel, FRIGERIO, Eric, L’abandon de la bibliothèque, étude sur le

phénomène de non-réinscription, Enssib, 2006, p.23.

8

86% des adultes vont à la bibliothèque pour emprunter des documents, selon cette enquête. MARESCA, Bruno, (sous la dir.) Les

bibliothèques municipales en France après le tournant Internet attractivité, fréquentation et devenir, Bibliothèque publique

d'information - Centre Pompidou, 2007 9

BERTRAND et al., Les bibliothèques municipales et leurs publics : pratiques ordinaires de la culture, Paris : Bibliothèque publique d’information, 2001, 286 p.

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partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 17 - L'inscription, qui est alors encouragée par les équipes des bibliothèques,

comme si, par l'emprunt qu'elle autorise, elle permettait de « prolonge[r] à la

maison la lecture entamée sur place »10. C'est comme si l'inscription était «une

forme d’intégration très particulière au « Nous » : c’est en fait l’acceptation formalisée d’appartenir à une institution en acceptant ses règles, ses codes de conduite »11.

La non-inscription peut alors s'expliquer, selon Martine Burgos, par le rejet de la logique utilitariste qu'on peut lire dans le calcul rationnel des coûts d'une inscription à la bibliothèque, mais aussi par le refus d'appartenir à ce collectif, un refus d'engagement symbolique et de partage des valeurs qui fonde le projet de la bibliothèque.

1.1.2. L’inscription comme baromètre de la réussite

de la bibliothèque

Les bibliothèques comme l'ensemble des équipements relevant des politiques publiques procèdent régulièrement à des évaluations dont l'objet est de mesurer la réussite de la politique engagée localement, et ainsi de s'assurer de la bonne utilisation des deniers publics.

Il s'agit donc de prendre la mesure

- de l'efficacité de la bibliothèque, c'est à dire de sa capacité à parvenir à ses objectifs, ou à ceux qu'on lui a fixés ;

- de son efficience, c'est-à-dire le ratio entre les résultats obtenus et les moyens mis en œuvre pour les obtenir.

Parmi les indicateurs élaborés dans ces mesures d'évaluation, le nombre d'inscrits figure en bonne place comme un baromètre de la réussite de la bibliothèque.

Dans leur travail de recherche sur la BmL et « l'abandon de la bibliothèque », les auteurs expliquent que le taux d'inscription « traduit à la fois l’efficacité́ de l’utilisation de l’argent public et la réalisation de la mission traditionnellement dévolue aux bibliothécaires. En effet, d’une part, le taux d’inscription fonde en grande partie la légitimité́ des bibliothèques au regard des tutelles (…). D’autre part, la non-inscription, et a fortiori la non-réinscription, sont vécues par les bibliothécaires comme un échec de leur mission »12.

Cette mission des bibliothécaires est explicitée par Anne-Marie Bertrand : «la fréquentation des bibliothèques ne fait pas que légitimer l’institution aux yeux

des décideurs, elle traduit aussi la réussite (au moins partielle) de l’objectif de démocratisation culturelle auquel les bibliothèques travaillent en contribuant, dans leur domaine, au développement de la lecture et à la diffusion du patrimoine

10BERTRAND et al., Les bibliothèques municipales et leurs publics : pratiques ordinaires de la culture, Paris : Bibliothèque publique d’information, 2001, 286 p.

11CATANESE-PALANCHE, Véronique, DESVOIS, Muriel, FRIGERIO, Eric, L’abandon de la bibliothèque, étude sur le

phénomène de non-réinscription, Enssib, 2006, p.23.

12CATANESE-PALANCHE, Véronique, DESVOIS, Muriel, FRIGERIO, Eric, L’abandon de labibliothèque, étude sur le

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(...). La réponse du public à l’offre de la bibliothèque est, ainsi, à la fois une réponse à une offre de service et à une posture politique, celle de la République qui s’appuie sur des citoyens éclairés »13 .

La diminution du taux d'inscrits était déjà mis en lumière à la fin des années 1990 par Anne-Marie Bertrand, dans son ouvrage consacré aux publics des bibliothèques14, et de souligner que cette baisse met les bibliothèques en difficulté, car elle peut être interprétée comme la non-satisfaction des usagers, et susciter la suspicion des financeurs, et à termes la réduction des financements.

1.1.3. Des usages de la bibliothèque qui évoluent :

comment mesure l’importance de la

bibliothèque ?

a. Fréquentation « clandestine »

L'inquiétude face à cette baisse, qui a suscité de nombreux débats dans la presse professionnelle au début des années 2000 s’est progressivement transformée15. En effet, si la baisse des inscrits est réelle, il semble que la bibliothèque soit de plus en plus fréquentée : « On est progressivement passé

d’une analyse de la diminution du taux d’inscription comme affirmation d’un échec de la bibliothèque à une affirmation de la mutation des usages de la bibliothèque, comme l’illustre le titre de l’enquête confiée par la direction du livre et de la lecture au CRÉDOC [enquête qui s'intitule Évolution des usages de la

bibliothèque] en 2005 »16.

On peut donc en déduire un nouvel usage de la bibliothèque, un usage sur place où l'emprunt n'est plus la modalité dominante de la relation des usagers à la bibliothèque : le public vient à la bibliothèque et profite des services offerts sur place, qui ne nécessitent pas de carte valide ou d’inscription à jour.

b. Les services à distance dispensent de venir sur place : la bibliothèque, marque blanche ?

La bibliothèque par ailleurs développe de nombreux services accessibles à distance : gestion du compte de lecteur, réservation de documents, accès à des logiciels de formation (langues, permis de conduire, etc.), accès à des documents patrimoniaux numérisés...., autant de services pour lesquels les usagers avaient pris l'habitude de se déplacer, et pour lesquels il n'est plus désormais nécessaire de le faire. Ces services permettent de capter de nouveaux publics qui fréquentent le site Internet de la bibliothèque et qui ne voient plus l'inscription ou la visite physique du bâtiment comme nécessaire.

13BERTRAND Anne-Marie. Les publics des bibliothèques. Paris : Les éditions du CNFPT, 1999, 77 p., p.6. 14BERTRAND Anne-Marie. Les publics des bibliothèques. Paris : Les éditions du CNFPT, 1999, 77 p. , p.36 15 Voir à ce propos, notamment, les articles de la rubrique « Débats » du BBF en 2001 et 2002.

16CATANESE-PALANCHE, Véronique, DESVOIS, Muriel, FRIGERIO, Eric, L’abandon de la bibliothèque, étude sur le

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partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 19 - La dématérialisation des supports induit une forte transparence dans l'accès à

distance des ressources de la bibliothèque. Cette transparence fait que l'usager, en navigant sur le site Internet, ne sait plus qu'il accède à ces services par le truchement de la bibliothèque qui devient une « marque blanche »17, totalement transparente aux yeux des usagers. Delphine Coudrin dans son article consacré à l’évaluation de la fréquentation du site Internet de la BmL évoque à ce sujet le cas du Guichet du Savoir développé par la bibliothèque de Lyon : « La particularité du

Guichet du Savoir est qu’il dispose de son site Internet propre, une adresse URL qui ne fait pas référence à la bibliothèque et avec une charte graphique spécifique. S’il souhaite s’inscrire au service pour pouvoir poser une question, l’internaute doit communiquer son adresse mél. Ces principes de fonctionnement du service lui confèrent une forte identité, bien distincte de celle de la bibliothèque » 18.

La situation peut ainsi mettre la bibliothèque en difficulté : ignorant que c'est grâce à la bibliothèque que l'accès à telle ou telle ressource est possible (soit parce que ce sont les bibliothécaires qui en produisent le contenu, soit parce le moteur de recherche y donne accès sans passer par l’accueil du site de la bibliothèque), les usagers du service ne voient pas l'intérêt de la bibliothèque, arguant du fait que tout est désormais accessible par Internet ! Cet exemple montre bien la nécessité pour la bibliothèque de communiquer sur les services rendus en direction des usagers et ainsi ne pas avoir l'impression de « scier la branche sur laquelle la

bibliothèque est assise »19.

Survient alors une question : la fréquentation épisodique de certains services par les usagers volatiles compense-t-elle la baisse des inscriptions ? Il n’est pas aisé d'y répondre car ces usages du site ne sont pas systématiquement évalués ou quantifiés20.

Ces nouveaux usages de la bibliothèque sont donc difficilement et évaluables, et le dispositif d'évaluation en vigueur actuellement (notamment le questionnaire annuel adressé aux bibliothèques qui alimentent la base de données de l'observatoire de la lecture publique administrée par le Ministère de la Culture et de la Communication) a du mal à élaborer des indicateurs qui permettent d'en rendre compte.

17 Une marque blanche repose sur le principe commercial de mise à disposition d'outils sans citer la marque ni l'origine de l'information transmise. Pour plus d’informations sur cette question:

http://www.journaldunet.com/encyclopedie/definition/280/41/21/marque_blanche.shtml 18 Coudrin, Delphine, « Fréquentation du site Internet », BBF, 2006, n° 6, p. 54-58

19Cette expression est celle de François Marin, directeur de la bibliothèque de Saint-Étienne, qui en entretien analyse le développement exponentiel des services à distance pour développer les publics et constate que si la fréquentation augmente sur le site (mais comment le savoir précisément et de manière fine?), elle diminue sur les sites, et interroge ainsi la pertinence de maintenir l'accueil physique à la bibliothèque. Cette question est assez centrale concernant les collections patrimoniales à Saint-Étienne. 20

Voir cependant l’intéressant travail sur cette question de Delphine Coudrin : Connaître les publics du site Internet de la

(20)

1.2. L

E PHENOMENE DE LA NON

-

REINSCRIPTION EN BIBLIOTHEQUE

1.2.1. Une définition (presque) commune, mais des

pratiques hétérogènes

La réinscription dépend des établissements : il peut s'agir d'une « validation automatique » de la carte de l'usager lors du premier emprunt de l'année, comme c'est le cas à la bibliothèque de Bobigny, citée en exemple dans le travail de recherche de 200621. La réinscription peut ici être assimilée à un acte involontaire, facilité par la gratuité. Cette situation est proche de celle de Limoges.

Lorsque la réinscription nécessite une démarche plus volontaire, en s'acquittant par exemple d'une redevance comme à Saint-Étienne, les usagers qui souhaitent se réinscrire peuvent ignorer leur statut de « clandestin » jusqu'au jour où ils se voient opposer un refus de prêt. Les réactions à cette situation, quand l’usager est pris en défaut de validité de sa carte, peuvent être diverses, parmi lesquelles la non-réinscription est une option.

La réinscription a ainsi plusieurs modalités possibles, qui passe par quelques étapes de procédures :

Gratuité de l’inscription (ex : Limoges) Inscription payante (ex : Saint-Étienne) Revalidation de la carte gratuite

► Vérification des données personnes de l'usager, ou pas

Acquittement d'un montant correspondant à un statut d'usager

► Justification d'un tarif spécifique en présentant une attestation de logement, de minima sociaux, de scolarité, etc.

► Paiement

► Établissement d'une facture ou d'un récépissé,

► Vérification des données personnelles de l'usager, ou pas

La non-réinscription correspond, pour notre travail, au fait pour un usager qui s'est au moins une fois inscrit à la bibliothèque de ne pas renouveler son inscription. Ces usagers sont les décrocheurs.

21CATANESE-PALANCHE, Véronique, DESVOIS, Muriel, FRIGERIO, Eric, L’abandon de la bibliothèque, étude sur le

(21)

partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 21 -

1.2.2. La non-réinscription n’a pas les mêmes

motivations que la non-inscription

Anne-Marie Bertrand dans Portrait de groupes avec (ou sans) bibliothèque22 a montré que les motivations de la non fréquentation sont différentes de celles des personnes qui n'ont jamais fréquenté la bibliothèque. Contrairement aux non usagers, le rapport à la lecture et au livre n'est pas déterminant, c'est bien plutôt le fonctionnement de la bibliothèque qui est en cause.

L'hypothèse de base consiste alors à dire qu'on ne s'y réinscrit pas parce qu'on est déçu par les services rendus.

La déception peut avoir différentes explications:

- une motivation économique ou pragmatique, quand l'inscription est payante : la pression économique qui s'exerce sur certaines familles les conduit à développer par des stratégies rationnelles d'évitement des coûts (utilisation collective de la carte, relativement admise par les équipes). Cette utilisation collective de la carte peut être détectée à travers les statistiques de prêt des bibliothèques : la baisse des inscrits ne correspond pas à la baisse des prêts.

- les modalités d'accès à la bibliothèque, notamment les horaires ; - les modalités de prêt ;

- les collections : les documents mis à disposition par la bibliothèque ne correspondent pas à ce que les usagers attendent ou viennent y chercher ; - un incident : Claude Poissenot23 ajoute qu’un problème survenu à la

bibliothèque peut également être source de non- réinscription.

Enfin, comme nous l'avons dit précédemment, le développement des services à distance auquel les usagers peuvent avoir accès sans s'inscrire à la bibliothèque (accès à des ressources patrimoniales numérisées par exemple).

1.2.3. Les décrocheurs sont-ils forcément déçus de la

bibliothèque ? Éléments de méthodologie pour

les connaître

a. Une déception pas systématique mais un public difficile à comptabiliser

Claude Poissenot, qui s'est intéressé à la question des ex-inscrits24, a travaillé sur la non-satisfaction des usagers qui ne se réinscrivent pas. La déception est la raison de la non réinscription de seulement 20% des ex-inscrits.

22

BERTRAND et al., Les bibliothèques municipales et leurs publics : Pratiques ordinaires de la culture. Bibliothèque publique d’information, Paris, 2001, 286 p. , citée dans L’abandon de la bibliothèque, p.26

23 POISSENOT, Claude, Les adolescents et la bibliothèque. Bibliothèque publique d’information, Centre Pompidou, Paris, 1997, 362 p.

24 POISSENOT, Claude, Les ex-inscrits, deux enquêtes en Lorraine, intervention donnée à l’occasion des journées de l’ABF, 2006

(22)

Il avance plusieurs autres raisons possibles à la non-réinscription, que nous avons reprises pour réaliser les questionnaires auprès des décrocheurs de Limoges et Saint-Étienne.

Les décrocheurs ne seraient donc pas uniquement les déçus de la bibliothèque ? Combien sont-ils en réalité ? Et comment faire pour les connaître et comprendre les raisons de leur décrochage ?

Il existe très peu de données produites sur les publics décrocheurs : comment calculer le taux de décrochage d’un équipement ? Existe-t-il un taux de décrochage acceptable dans un fonctionnement normal de bibliothèque ?

L'ensemble des professionnels que nous avons sollicités sur cette question s'accorde à dire qu'il existe une volatilité normale des lecteurs, un taux de décrochage « naturel », ou en tout cas admis par les responsables de bibliothèque. Il recouvrerait notamment les personnes qui quittent la bibliothèque pour des raisons exogènes, comme un déménagement. Selon eux, ce taux se situe aux environs de 20%, de manière tout-à-fait empirique et sans référence validée.

Pour établir des comparaisons nationales, et élaborer des systèmes d'alerte face au phénomène de non réinscription dans les bibliothèques, un niveau de décrochage acceptable pourrait servir de référence. Cette moyenne nationale n'existe pas. L'Inspection Générale des Bibliothèques n'a, à notre connaissance, pas traité le sujet de la non-réinscription, comme Thierry Grognet l'a confirmé lors de nos échanges. Il ajoute que les seules données produites sur un sujet proche concernent les évolutions des inscrits actifs (au sens de l'Observatoire de la Lecture Publique25) ou la fréquentation. Pour collecter des informations spécifiques, il faudrait des paramétrages spécifiques du SIGB ou des enquêtes qualitatives dans les établissements. Il conclut qu'il n'existe pas à sa connaissance de fourchette acceptable, de taux moyen ou de taux limite.

b. Éléments de méthodologie

Dans la mesure où les chiffres disponibles sont peu nombreux, les données que nous avons produites sont le fruit de déduction.

La démarche de production de ces chiffres s'appuie sur 3 niveaux d'information :

Pour une comparaison nationale : production déductives des « données générales de cadrage »

Avant de présenter les tableaux que nous avons pu réaliser, il convient de s'arrêter un instant sur les données qui en sont la source.

Les tableaux de comparaison qui sont présentés un peu plus loin comportent des données extraites d'une même source, l'enquête annuelle de l'Observatoire de la Lecture Publique. Cet organisme, sous la tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication est chargé de « la collecte, l'exploitation et la diffusion de

25

Pour l’Observatoire de la lecture publique, un emprunteur actif est « Un emprunteur actif est un usager à jour de son inscription et ayant emprunté au moins un document dans l’année civile ».

(23)

partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 23 -

données statistiques relatives aux bibliothèques publiques »26. Les chiffres

présentés ci-après sont ceux de l'année 2010, les données 2011 n'ayant pas été consolidées. En 2010, donc, ce sont 8 405 bibliothèques qui ont été interrogées, dont 6 479 ont répondu. Les résultats obtenus sont classés en 2 catégories : les bibliothèques et les points d'accès à la lecture. Le document de présentation des chiffres clés de l'enquête explicite cette distinction27. Les sites retenus pour les comparaisons présentées plus loin appartiennent à la catégorie des bibliothèques.

En moyenne, les bibliothèques interrogées font état de 1 823 inscrits actifs, soit environ 16,6% de la population desservie par l'équipement. Quand on s'intéresse aux établissements de lecture implantés sur un territoire de plus de 200 000 habitants (ce qui correspond à la situation des agglomérations de Limoges et Saint- Étienne), le nombre moyen d'inscrits emprunteurs est de 23 538 personnes28.

Dans le questionnaire envoyé chaque année aux bibliothèques, plusieurs données peuvent servir de socle à une démarche déductive, notamment la distinction faite entre les inscrits et les emprunteurs actifs, ou encore la notion de nouveaux inscrits.

Selon l'Observatoire de la Lecture Publique, « un emprunteur actif est un

usager à jour de son inscription et ayant emprunté au moins un document dans l’année civile »29. Par déduction, les emprunteurs non actifs sont donc des usagers n'ayant pas emprunté de document dans l'année civile, et dont l'adhésion peut ne pas être à jour (mais ils continuent à être comptabilisés dans le SIGB). On peut faire l'hypothèse que ces emprunteurs non actifs sont des personnes de moins en moins intéressées par la bibliothèque et donc des candidats au décrochage. Une simple soustraction permet alors d'obtenir le nombre de décrocheurs potentiels.

Interrogé au sujet de la pertinence de cette soustraction, Mr Iégor Groudiev, en charge de l'Observatoire des bibliothèques au Service du Livre et de la Lecture (Direction générale des médias et des industries culturelles- Ministère de la Culture et de la Communication), a acquiescé, tout en apportant quelques nuances. En introduisant la notion d'emprunteur actif, on a voulu insister sur les usages « classiques » de la bibliothèque (emprunt de documents imprimés, sonores ou vidéo). Cette notion devait faire ressortir par déduction d'autres usages des bibliothèques, comme par exemple à Strasbourg où des groupes d'usagers originaires de Tchètchénie viennent à la bibliothèque exclusivement pour avoir accès à Internet30. Cette catégorie d'emprunteur non actif comprendrait également les personnes qui participent aux ateliers proposés par la bibliothèque ou aux animations culturelles sans profiter du prêt de documents. En théorie, et en suivant le raisonnement de l'Observatoire, et si les données sont collectées correctement, les emprunteurs inactifs ne devraient pas alors être considérés comme des décrocheurs.

26La présentation des missions de cet organisme est extraite du site internet :

http://www.observatoirelecturepublique.fr/observatoire_de_la_lecture_publique_web/

27http://www.observatoirelecturepublique.fr/observatoire_de_la_lecture_publique_web/docs/Chiffres%20clés%20synthèse2010.pdf 28Cette moyenne est réalisée à partir de la collecte d'informations auprès de 17 établissements couvrant des populations entre 150

000 et 200 000 habitants. Cf

http://www.observatoirelecturepublique.fr/observatoire_de_la_lecture_publique_web/docs/Fiche%20synthèse%20SLL%20200 %20000%20habitants.pdf

29Op.cit. p. 5

30Les bibliothèques, comme tous les services publics, doivent pouvoir fournir le nom et les coordonnées de toute personne utilisant un accès Internet dans leurs locaux et demandent pour celaaux utilisateurs d'être inscrit à la bibliothèque. Ces usagers tchètchénes sont donc inscrits à la bibliothèque mais n'utilisent pas les possibilités d'emprunt offert par leur statut.

(24)

Cependant, dans la mesure où il est parfois délicat de séparer les emprunteurs actifs des autres avec les outils du SIGB et dans la mesure où les bases ne sont pas purgées d'une année sur l'autre (ce qui tend à surévaluer la part des usagers actifs avec des « années flottantes » qui comptabilisent parfois 2 fois un même usager actif), la logique sous-jacente à notre proposition méthodologique a convaincu Mr Groudiev.

Malgré le soin apporté à la production de ces données nationales, il a toutefois insisté sur d'autres facteurs qui tendent à nous inciter à appréhender les chiffres présentés ci-après avec précaution :

- les données mises en ligne sont des données brutes qui ne sont pas toujours consolidées (ce qui a pu engendrer des chiffres étonnants, et qui ont nécessité certains éclaircissements)

- les politiques tarifaires pratiquées par les équipements peuvent générer des utilisations familiales d'une même carte, faisant diminuer le nombre d'inscrits mais pas celui des usagers réels de la bibliothèque.

Pour une analyse locale : traitement de données collectées dans le SIGB pour identifier un profil-type des publics :

Le SIGB contient une base de données relatives aux usagers de la bibliothèque, avec des données personnelles (âge, lieu de résidence, situation professionnelle...). L'approche que nous proposons a pour objectif de dessiner le contour du profil des décrocheurs, et de voir si certaines caractéristiques prédisposent au décrochage. Elle est calquée sur la méthode utilisée par Claude Poissenot31. Elle consiste à mesurer si la proportion de décrocheurs est la même au

sein de toutes les catégories d'usagers, en comparant la proportion chez les décrocheurs et chez les usagers fidèles au nombre d'inscrits total.

Pour une analyse ciblée : des questionnaires pour une compréhension plus fine :

Enfin, une fois que les publics cibles sont identifiés, il s'agit de comprendre ce qui a motivé leur décrochage plus finement.

La méthode retenue a été celle d'un questionnaire envoyé aux personnes précédemment identifiées par le SIGB, puis de les inviter à s'exprimer plus longuement sur ces motivations lors d'entretiens de groupe. La méthodologie suivie pour l'élaboration des questionnaires et l'organisation des focus groups sera présentée un peu plus loin.

31 Poissenot, Claude, Les ex-inscrits, deux enquêtes en Lorraine, intervention donnée à l’occasion des journées de l’ABF, 2006

(25)

partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 25 -

1.3.

LES DECROCHEURS A

L

IMOGES ET A

S

AINT

-E

TIENNE

1.3.1. Pour une approche doublement comparative

a. Comparer les territoires

Pour dépeindre le paysage français en matière de décrochage, il nous a paru intéressant de procéder à plusieurs comparaisons quantitatives, afin d'essayer de délimiter la zone dans laquelle le taux de non réinscription paraît « acceptable », c'est-à-dire qu'il reste le fait de raisons exogènes à la bibliothèque, comme par exemple le déménagement.

Deux critères ont été retenus pour procéder à des comparaisons :

– le statut de l'établissement : qu'en-est-il dans les autres BMVR32 ?

– Le bassin de population desservie : Qu'en est-il dans des villes dont les bassins desservis sont comparables à celles de Limoges ?

Il paraissait intéressant par ailleurs d'approfondir certaines comparaisons, notamment concernant le public décrocheur, et la bibliothèque de Saint Etienne, contactée sur la proposition de l'équipe de la Bfm, a acceptée de participer à cette étude.

Pour situer les villes retenues pour les comparaisons qui suivent, il paraît intéressant de mesurer le taux de pénétration33 de la bibliothèque sur les territoires.

Les villes retenues dans ce tableau sont au cœur d'une agglomération, et en sont souvent les villes-centres. Il paraît donc pertinent, pour calculer le taux de pénétration, de prendre en compte la population de référence de l'agglomération à laquelle appartiennent les villes comparées. En effet, le service public offert par la bibliothèque touche également les résidents de l'agglomération qui travaillent, sont scolarisés, font leurs courses, pratiquent leurs activités de loisirs... dans la ville centre. Par ailleurs, pour plusieurs des villes concernées, la compétence de la lecture publique a été transférée à la communauté d'agglomération. Elles sont signalées par un astérisque dans le tableau34.

32

« Créé par la loi du 15 juillet 1992, le programme des bibliothèques municipales à vocation régionale a permis le financement et la construction de grands équipements municipaux, destinés à jouer le rôle de pôles d’équilibre de la bibliothèque nationale de France (BnF) et d’acteurs privilégiés de la coopération régionale.

Ce dispositif, particulièrement incitatif (soutien pour l’Etat des efforts des collectivités locales à une hauteur de 40 %), a donné lieu à la naissance de douze grands établissements de lecture publique en régions : Châlons-en-Champagne, La Rochelle, Limoges, Marseille, Montpellier, Nice, Orléans, Poitiers, Rennes, Reims, Toulouse et Troyes.

Le programme des bibliothèques municipales à vocation régionale a permis de créer en une décennie plus de 150.000 m² de planchers venant s’ajouter aux quelque 50.000 m² annuels construits à l’heure actuelle en France.

Ce programme a eu des répercussions importantes sur le paysage des bibliothèques françaises. Il a contribué au renouveau et à la diversité des écritures architecturales et a permis aussi de repenser de manière novatrice le rapport entre l’offre documentaire et les usagers, en offrant d’importants espaces de détente, d’exposition, de mise en valeur des collections patrimoniales et d’action culturelle ». http://www.centrenationaldulivre.fr/?Les-B-M-V-R (consulté le 22 juin 2012)

33Le taux de pénétration est un indicateur emprunté au marketing et qui permet de mesurer la couverture d'une zone par un service donné. Il s'exprime en pourcentage et s'établit à partir du rapport suivant : Nombre d'inscrits à la bibliothèque/ Nombre de personnes potentiellement intéressées par le service, et donc, en ce qui nous concerne, résidantes sur le territoire. 34

Pour Perpignan Méditerranée, la situation est ambivalente : d'après le site de la communauté d'agglomération, seule la médiathèque attachée au Conservatoire, lui même équipement rattaché à l'agglomération relève de la compétence de la communauté d'agglomération. Il n'apparaît pas d'établissement de lecture publique sous la tutelle de la communauté d'agglomération.

(26)

Figure 1: Taux de pénétration et comparaison géographique en fonction du bassin de population desservi

Nom Nb de commune s composant l'agglomé ration Nb d'habitants Nb de km2 De nsité de population Nb d'inscrits à la bibliothè que Taux de péné tration sur le territoire de l'agglo. Limoges Métropole 18 202,938 472 430 47,918 24

Communauté d'agglo. Châlons en

Champagne 13 65,230 201 325 7,130 11

Communauté urbaine Marseille Provence

Métropole 18 1,038,940 605 1,717 80,356 8

Montpellier Agglomération 31 409,113 434 943 69,106 17

Communauté urbaine Nice Côte d'Azur 27 535,543 351 1,526 36,706 7

Reims Métropole 6 218,928 88 2,488 31,492 14

Orléans Val de Loire 22 272,172 334 815 33,244 12

Le Grand Poitiers 12 136,016 251 542 14,236 10

Rennes Métropole* 38 398,578 640 623 40,993 10

Communauté d'agglo. La Rochelle* 18 145,912 206 708 14,431 10

Toulouse Métropole 37 714,504 466 1,533 64,800 9

Le Grand Troyes* 17 130,000 130 1,000 Non renseigné 0

Saint Etienne Métropole 43 400,016 570 702 22,024 6

Grenoble Alpes Métropole 28 404,176 312 1,296 36,747 9

Clermont Communauté* 21 283,200 303 935 53,876 19 Amiens Métropole* 33 176,189 312 565 26,726 15 Metz Métropole 40 230,334 277 832 20,249 9 Le Grand Dijon 22 251,179 219 1,147 22,255 9 Perpignan Méditerranée 36 283,173 655 432 9,693 3 Chambéry Métropole 24 121,567 263 462 14,095 12

Sources : http://fr.wikipedia.org/ et http://www.observatoirelecturepublique.fr/ Les chiffres relatifs aux inscrits sont ceux de 2010, tandis que les chiffres de population sont ceux issus du recensement 2009. Si on compare à la moyenne nationale (environ 18% de la population est inscrite à la bibliothèque), on constate que la Bfm de Limoges est mieux placée que Saint-Étienne, c'est-à-dire que la population de Limoges fréquente plus son équipement que celle de Saint-Étienne. La gratuité pratiquée à Limoges, la modernité du bâtiment inauguré en 1998 peuvent être des pistes d'explication.

b. Comparer les publics

La comparaison entre publics : pourquoi rapprocher les nouveaux inscrits des décrocheurs ?

Afin d'affiner la connaissance des publics et les raisons qui président à leur inscription (ou leur décrochage) à la bibliothèque, il est intéressant de rapprocher les motivations des décrocheurs des attentes des nouveaux inscrits. L'hypothèse qui fonde ce rapprochement est la suivante : les attentes qui motivent la première inscription à la bibliothèque correspondent peut-être aux déceptions qui motivent le décrochage.

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partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 27 -

de l'année précédente n'était pas inscrit »35. Dans le cadre de cette définition, on peut considérer que les nouveaux inscrits des bibliothèques correspondent aux primo arrivants dans notre travail de recherche.

Le tableau suivant, selon la même méthode que celle proposée par Claude Poissenot36, présente la proportion des décrocheurs et des primo-arrivants par rapport à la totalité des inscrits.

Les chiffres se lisent donc de la manière suivante : 17% des inscrits à la Bfm de Limoges sont des nouveaux inscrits.

Figure 2: Proportion des décrocheurs et des nouveaux inscrits par rapport aux inscrits dans un échantillon national

*sont considérés comme décrocheurs les propriétaires d’une carte de bibliothèque inactive depuis un an.

Sources : Données 2010, collectées dans le cadre de l’enquête annuelle37 (http://www.observatoirelecturepublique.fr/observatoire_de_la_lecture_publique_web/)

35Définition donnée dans la note explicative accompagnant le questionnaire 2009 (p.5) :

http://www.observatoirelecturepublique.fr/observatoire_de_la_lecture_publique_web/docs/notice_explicative_2009.pdf 36 Poissenot, Claude, Les ex-inscrits, deux enquêtes en Lorraine, intervention donnée à l’occasion des journées de l’ABF, 2006 Nb d'inscrits 2010 Nb de nouveaux inscrits (= primo arrivants) % de nouveaux inscrits Nb de décrocheurs* Taux de décrochage BVRM en France BMVR Limoges 47,918 8,202 17 14,112 29 BMVR Châlons en Champagne 7,130 2,418 34 NR 0 BMVR Marseille 80,356 18,242 23 25,061 31 BMVR Montpellier 69,106 20,490 30 26,125 38 BMVR Nice 36,706 9,171 25 21,651 59 BMVR Reims 31,492 7,659 24 6,212 20 BMVR Orléans 33,244 4,297 13 15,933 48 BMVR Poitiers 14,236 5,896 41 NR 0 BMVR Rennes 40,993 8,089 20 10,033 24 BMVR La Rochelle 14,431 3,167 22 30 0 BMVR Toulouse 64,800 22,342 34 5,212 8 BMVR Troyes NR NR 0 NR 0

Autres BM dotées d'un réseau

BM Saint Etienne 22,024 4,943 22 5,581 25 BM Grenoble 36,747 7,746 21 9,395 26 BM Clermont Ferrand 53,876 9,346 17 23,429 43 BM Amiens 26,726 NR NR NR NR BM Metz 20,249 4,823 24 NR NR BM Dijon 22,255 3,984 18 4,787 22 BM Perpignan 9,693 2,542 26 0 0 BM Chambéry 14,095 5,216 37 287 2

(28)

Ce tableau montre que le taux de décrochage à Limoges est supérieur au taux présenti comme acceptable par les directeurs d’établissement. On constate également que lorsque le nombre d’inscrits est important (et on peut donc supposer lorsque le bâtiment est grand), le taux de décrochage a tendance à être plus élevé que dans les structures plus petites, avec moins d’inscrits. Cela tendrait à corroborer l’impact de la taille des établissements comme frein à la fréquentation, ainsi que l’a analysé Bruno Maresca38: les décrocheurs auraient besoin d’accompagnement personnalisé, car ils ne sont pas toujours familiers de la bibliothèque et de son fonctionnement, et ne s’y retrouvent pas toujours quand la bibliothèque est un gros équipement (taille du bâtiment, volume des collections, etc.)

1.3.2. Focus sur Limoges et Saint-Étienne

Afin de bien comprendre l'environnement dans lequel s'inscrit la présente enquête, il convient de s'arrêter brièvement sur le contexte local, pour Limoges et pour Saint-Étienne.

a. Limoges

« Le Limousin, région rurale et largement montagneuse est composé de trois départements, la Haute-Vienne, la Corrèze et la Creuse. Hormis Limoges en Haute-Vienne et Brive-la-Gaillarde en Corrèze, qui dépassent 50 000 habitants, les autres villes, y compris Tulle et Guéret, capitales départementales, n’atteignent pas les 20 000 habitants. Les 750 000 habitants de la région sont donc, très largement les habitants de petites et moyennes communes comptant entre 10 000 et quelques centaines d’habitants. Habitat dispersé, réseau routier accidenté du fait d’une géographie montagneuse et autoroutes rares, font que le réseau des bibliothèques a peiné à se construire »39.

Le travail des bibliothèques départementales de prêt et des bibliothèques municipales, notamment celles qui sont inscrites dans des dynamiques intercommunales, sont également essentiels dans la structuration de l'offre, et dans la fréquentation des publics.

La situation de Limoges, dans ce contexte contraint, est plutôt privilégiée : la ville a pu bénéficier du programme des BMVR en 1992 pour ouvrir un bâtiment neuf, s’appuyant sur un ancien hôpital, en centre ville, remplaçant l’ancienne bibliothèque et animant un réseau de cinq bibliothèques de quartier40. Le réseau de la ville comporte donc en tout 6 sites, permettant une desserte efficace du bassin de population de Limoges en matière de lecture publique. Le nom générique du réseau est « Bibliothèque Francophone Multimédia » (Bfm).

37 Quand ces chiffres n’étaient pas disponibles sur le site, nous avons tenté de les obtenir auprès des bibliothèques directement.

38 Maresca, Bruno, Les bibliothèques municipales en France après le tournant Internet, Bibliothèque publique d’information/ Centre Pompidou, Paris, 2007.

39Cette présentation brève est tirée de l'ouvrage « Bibliothèques en Limousin, 24 ans de construction », ainsi que les données auxquelles cette partie fait référence. L'article de Lydie Valero, conseillère livre et lecture à la DRAC du Limousin de 1997 à 2010 en partie repris sur le site http://www.limousin.culture.gouv.fr/spip.php?article220 (consulté le 22 juin 2012), brosse un portrait intéressant de la région Limousin dont nous reprenons ici les principales conclusions.

(29)

partie 1 – L’abandon de la bibliothèque : de la non réinscription à la déception, le decrochage ?

DUCROUX Céline | DCB | Mémoire d’étude | janvier 2013 - 29 - Le site Bfm Centre ville a ouvert ses portes en 1998. Mis en espace par Pierre

Riboulet, cet équipement est une vitrine importante pour la lecture publique au cœur de la ville, ainsi que le rappelle le site Internet: « Equipement phare des

bibliothèques de Limoges, le site du centre-ville déploie ses collections sur 15 000 m², dans un espace clair, aéré, où les couleurs chaudes du bois sont mises en valeur par l'éclairage naturel zénithal. Un jardin d'hiver assure la liaison architecturale entre le bâtiment conservé de l'ancien hôpital général de Limoges et le nouveau bâtiment. Il est particulièrement apprécié des usagers qui trouvent le calme nécessaire à la lecture des revues mises à disposition au forum des périodiques tout proche »41.

Les spécificités de la Bfm

Le théâtre et la poésie francophone

La région Limousin s'est engagée en faveur de la Francophonie et de ses formes artistiques d'expression depuis de nombreuses années, notamment à travers le festival Francophonie en Limousin. La Bfm a développé des collections spécifiques au sein du pôle de littérature francophone, pour lequel elle est pôle associé de la BnF. Ces collections s'adressent non seulement au grand public mais aussi aux chercheurs.

Une offre de services entièrement gratuite

La Bfm demeure une des rares bibliothèques d'une ville de plus de 100 000 habitants en France où l'inscription et le prêt sont entièrement gratuits, quelque soit le support emprunté, l'âge, le niveau de revenu ou le lieu de résidence de l'usager.
 Composante forte de l'identité de la Bfm, cette gratuité se veut démocratique et militante.

Parmi les services offerts par la Bfm, notons encore les navettes quotidiennes entre les bibliothèques du réseau qui assurent le transfert des ouvrages et permettent ainsi aux lecteurs de réserver, et de rendre leurs ouvrages en tout point du réseau.

La Bfm très présente sur Internet

La Bfm est également très présente sur Internet et propose également de nombreux services accessibles à distance pour les usagers des sites du réseau : un espace compte lecteur pour administrer ses prolongations, ses réservations, ses recherche dans le catalogue, des abonnements aux fils RSS et aux podcasts liés aux activités de la bibliothèque (notamment l'agenda culturel avec les expositions, les conférences, les concerts, les ateliers programmés par la Bfm sur tous les sites et la possibilité d'accéder aux expositions virtuelles), un service de questions/ réponses à distance où les usagers peuvent questionner les bibliothécaires, des abonnements à la presse en ligne, des ateliers multimédia pour déficients visuels, des blogs autour de la musique avec notamment l'e-muzic box42, des fonds patrimoniaux...

41 http://www.bm-limoges.fr/ 42

L’e-music box est un site web de la Bibliothèque francophone multimédia de Limoges et se définit comme « une boîte à musique électronique régionale » dont la vocation est de faire découvrir les artistes de la scène musicale locale en proposant des morceaux de musique en écoute. Ce site présente donc un gros avantage pour les usagers (qui peuvent découvrir de nouvelles créations

(30)

La Bfm est également à l'origine de plusieurs blogs thématiques (« Bibs sur un tapis volant », « Trop stylé », « Atelier multimédia », ...) et est par ailleurs présente sur plusieurs réseaux sociaux (Facebook, Twitter).

b. Saint-Étienne

La région Rhône-Alpes, deuxième de France par sa population (environ 6 millions d'habitants) et sa superficie (43 698 km²), est un territoire dynamique sur le plan économique et culturel. Composée de 8 départements (Ain, Ardèche, Drôme, Isère, Loire, Rhône, Savoie et Haute-Savoie), elle comporte également 3 unités urbaines qui comptent plus de 250 000 habitants (Grand Lyon, Grenoble, Saint-Étienne)43.

L'agglomération stéphanoise est le lieu de résidence d'un peu plus de 400 000 personnes. La part des ménages en difficulté économique et sociale est plus élevée à Saint-Étienne Métropole que dans les agglomérations lyonnaise et grenobloise et l'espace de précarité le plus important se situe dans le centre de Saint-Étienne.

En termes de lecture publique, la région compte en tout 1 114 bibliothèques, dont 8 BDP et 350 bibliothèques municipales de niveau 1 et 244.

La bibliothèque municipale de Saint-Étienne compte plusieurs sites : la médiathèque centrale Tarentaize, et les six médiathèques de proximité45. Le site Internet du réseau46 les présente individuellement, et les localise dans leur environnement, pour en faciliter l'accès : « au premier étage du Centre Social de Beaulieu », « située au sommet de la colline, en face de la boulangerie du centre commercial » (site de La Cotonne) ou encore « au rez-de-chaussée d'un immeuble, au terminus de la ligne 3 de bus » (site de Terrenoire).

Les différents équipements de Saint-Étienne sont regroupés au sein d'un réseau informatique, qui se compose de 2 parties: BRISE Ville (Bibliothèques en Réseau Informatisé de Saint-Étienne)47 et BRISE- ES (Enseignement supérieur)48. Un catalogue collectif est disponible à partir du site de la bibliothèque municipale.

Le partenariat avec le monde de l'enseignement passe également par des dispositifs complémentaires : ainsi, toutes les personnes inscrites à l'Université de

musicales) et pour les musiciens (qui se font ainsi diffuser etpeuvent rencontrer par ce truchement des tourneurs, des

producteurs...). Cf http://www.lemusicbox.bm-limoges.fr/#Infos

43http:// www.rhone-alpes.drire.gouv.fr/di/industrie/index.htm (consulté le 16 novembre 2012)

44La définition des niveaux prend en compte plusieurs critères : une ouverture d'au moins 8h par semaine, une surface et un budget minimum par habitant, et au moins une personne salariée pour gérer l'équipement. Cf http://www.culture.gouv.fr/rhone-alpes/region/reg.htm

45 Beaulieu, Carnot, La Cotonne, Solaure, Terrenoire et Tréfilerie

46http://www.bm-st-etienne.fr/medias/medias.aspx?INSTANCE=exploitation&PORTAL_ID=general_portal.xml 47

BRISE Ville réunit les sept médiathèques municipales et 8 bibliothèques partenaires : la Médiathèque de l'École supérieure d'art et de design, la Bibliothèque Andreï Roublev, la Bibliothèque du Musée d'art et d'Industrie, la Bibliothèque du Musée d'Art Moderne (équipement rattaché à la communauté d'agglomération de Saint-Etienne Métropole), la Bibliothèque des archives municipales de Saint-Étienne des archives départementales de la Loire, et la Bibliothèque du Mémorial de la Résistance et de la déportation.

48 Le réseau BRISE ES réunit quant à lui les bibliothèques des établissements d'enseignement supérieur situés à Saint-Étienne : des bibliothèques de l'Université Jean Monnet, de l'ENISE (École Nationale d'Ingénieurs de Saint-Saint-Étienne), de l'EN3S (École Nationale Supérieure de Sécurité Sociale), de l'ENSMSE (École Nationale Supérieure des Mines de Saint-Étienne), de l'ENSASE (École Nationale Supérieure d'Architecture de Saint-Étienne) et de l'ESC (École Supérieure de Commerce de Saint-Étienne).

Figure

Figure 1: Taux de pénétration et comparaison géographique en fonction  du bassin de population desservi
Figure 2: Proportion des décrocheurs et des nouveaux inscrits par  rapport aux inscrits dans un échantillon national
Figure 4: Comparaison du nombre de décrocheurs et de primo-arrivants  par équipement du réseau
Figure 5: Taux de réponse aux questionnaires envoyés  Nb de  questionnaires  envoyés  Nb d'erreurs à l'envoi*  Nb de  questionnaires complétés  Taux de  réponse (%)  Limoges              Décrocheurs 3473 41  119  3  Primo-arrivants 2012  11  112  6  Saint-
+5

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