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LA ZONE DU PROJET : APERCU DES RESSOURCES NATURELLES ET DU PEUPLEMENT

LA VALLÉE DU NAKAMBÉ: UNE ZONE D’AMÉNAGEMENT EN PLEINE EXPANSION

L’EXPERIENCE DE SÉDENTARISATION DE L’ELEVAGE TRANSHUMANT DE SONDRE-EST

I. LA ZONE DU PROJET : APERCU DES RESSOURCES NATURELLES ET DU PEUPLEMENT

Sondré-Est est située à une trentaine de kilomètres, au nord-est de Manga, chef-lieu de la province du Zoundwéogo. Elle se trouve dans le bassin versant du Nakambé, à l’intérieur d’un espace géographique défini par les coordonnées 11º45-12º de latitude nord et 0º53-1º 03 de longitude ouest, et couvre une superficie de 16 459 ha. La zone est limitée à l’est par le Nakambé, au nord, à l’ouest et au sud-est par ses affluents : le Soussougou et le Wobogo (Figures 33et 34). Mais en dehors du Nakambé qui a un régime semi-permanent et conserve des poches d’eau capables d’abreuver le bétail en saison sèche, les autres rivières cessent de couler et tarissent dès octobre. Il en va de même pour certaines étendues d’eau stagnantes qui ne sont visibles que durant la période des pluies (bas-fonds du secteur nº 3 et celui qui traverse la piste reliant les secteurs nº 1 et 2)113.

Les ressources en eau souterraine sont aussi rares. Celles qui ont été reconnues se trouvent à une profondeur de 30 à 50 mètres et ne sont accessibles que par forage. Au demeurant, le faible débit des puits réalisés et l’assèchement total de certains quelques temps après (tels que ceux du secteur nº1, situés à côté du parc de vaccination)

112 Selon l’étude des potentialités, on pourrait encore créer 40 zones supplémentaires couvrant 2 millions

d’ha.

confirment cette pénurie de réserves souterraines. Quant aux ressources fourragères essentiellement constituées du tapis herbacé et de la strate ligneuse, on distingue quatre types (Figure 34 et Tableau 40).

Tableau 40 : Les pâturages de la zone pastorale et leur capacité de charge en ha/UBT114

Pâturages Charge annuelle sans feu

Charge saison pluvieuse

Charge saison sèche sans feu

Charge saison sèche avec feu Graminées vivaces 2,5 0,9 1,5 8,5 Graminées annuelles et vivaces 4,2 1,1 2,6 15 Graminées annuelles Impossible 2,3 - - Hydromorphes 1,5 0,6 1 7 (Source AVV)

• Les pâturages à graminées annuelles dominantes ou à cycle court présents sur les plateaux et les plaines sèches, se composent des formations suivantes : Elionorus elegans, Pennisetum pedicellatum, Brachia lata, Tenium aegyptium, Andropogon pseudapricus et Loudetia togoensis. On rencontre également des arbustes tels que Combretum glutinosum, Balanites aegytiaca, et des individus isolés ou groupés dans la strate arborée comme Lannea acida, Bombax costatum et Andasonia digitata. Abondamment utilisés en saison pluvieuse (juillet à septembre), ces pâturages sont détruits par les feux dès octobre. On les rencontre surtout au secteur nº1 et au nord de la zone pastorale, aux abords de la rivière Soussougou.

• Les pâturages à graminées vivaces dominantes reposent sur des formations pérennes parsemées d’espèces annuelles et situées en bordure du Nakambé, dans les bas- fonds, les plaines et les versants à pente faible. Les plus importantes sont: Andropogon gayanus, Andropogon ascinodis, Panicum anabaptistum et Vetiveria nigritana. Ici, les arbustes sont rares et la strate arborée réduite à certaines plantes comme Bombax costatum, Khaya Senegalensis, Mitragyna inermis, Vitellaria paradoxa, Andosonia digitata; les premières repousses des espèces pérennes sont pâturables en début de saison pluvieuse, mais davantage durant la période sèche. • Les pâturages à graminées vivaces et annuelles sont une combinaison des deux

précédentes. On les retrouve au centre-sud, notamment aux secteurs nº2 et 3. Quant aux pâturages hydromorphes, ils se composent de graminées vivaces et d’une

114 UBT: Unité de Bovin Tropical, représentant un animal d’un poids vif de 250 kg. Ainsi, un bovin adulte vaut

strate ligneuse dense. Les espèces dominantes sont: Andropogon gayanus et Hyparrhenia glabriuscula. Localisées dans le lit des rivières et inaccessibles en saison pluvieuse du fait de l’engorgement, ces formations sont entièrement consommées par les animaux dès la fin des pluies.

En ce qui concerne la capacité de charge des pâturages, elle représente le nombre d’animaux (convertis en UBT) qu’ils peuvent entretenir convenablement pendant une période déterminée sans se détériorer, les animaux devant se nourrir uniquement de ces pâturages pendant tout leur séjour. Cette capacité de charge est fonction de la nature des pâturages et de la saison. A Sondré-Est, elle varie de 1,5 ha/UBT/an pour les pâturages hydromorphes à 4,2 ha/UBT/an pour les pâturages à graminées annuelles et vivaces. Quant aux pâturages à graminées annuelles, ils ne peuvent supporter une quelconque charge animale pendant l’année.

Les superficies nécessaires à l’entretien d’une UBT, relativement faibles en saison pluvieuse, augmentent considérablement durant la morte saison avec les feux de brousse. A titre d’exemple, la capacité de charge des pâturages à graminées vivaces qui est de 0,9 ha/UBT pendant la période de pluies, passe à 1,5 ha/UBT en saison sèche, puis à 8,5 ha/UBT s’il y a des feux de brousse.

Cette pratique étant courante dans la zone, la capacité de charge des pâturages serait, d’après Klein N.D., de l’ordre de 4 à 5 ha/UBT/an. Sondré-Est pourrait donc, sans amélioration, recevoir et nourrir convenablement chaque année sur ses 16 459 ha, 3 060 à 3 825 UBT. Or, le projet préconise l’introduction des plantes fourragères (Sorghum almum et Stylosantes hamata) à raison de 250 ha par an, ce qui ferait passer la capacité de charge à 3,5 ha/UBT/an, et la capacité d’accueil de la zone pastorale à 4 371 UBT/an. Mais les pâturages naturels ne sont pas les seules sources d’alimentation du bétail. Les résidus des récoltes (tiges de mil, sorgho et maïs laissées dans les champs des villages environnants) y contribuent également pendant la saison sèche; leur exploitation constitue un apport appréciable dans l’alimentation des animaux à un moment où le fourrage naturel fait défaut.

Tout compte fait, Sondré-Est présente bien des conditions favorables pour l’activité pastorale. La zone appartient au domaine nord soudanien compris entre les isohyètes 880 et 900 mm, où les effets de la sécheresse sont moins dramatiques qu’au Sahel (la saison pluvieuse dure cinq mois environ: de la mi-mai à la mi-octobre). Par ailleurs, la trypanosomiase qui y représentait un obstacle majeur a été éradiquée. La diversité des pâturages est un autre atout important, assurant une variation du régime alimentaire du bétail et l’exploitation des ressources fourragères en fonction des saisons.

Mais ces avantages ne sauraient cacher certaines contraintes liées principalement au problème hydrique. En effet, les ressources en eau souterraine, qui devraient pallier la pénurie d’eau de surface nécessaire à l’alimentation humaine et animale sont très réduites, et leur exploitation difficile et coûteuse. Ceci constitue un facteur limitant les activités humaines.

Signalons pour mémoire, que le site actuel de la zone pastorale était inhabité avant la mise en valeur des vallées des Volta en 1973. Mais les traces d’habitats anciens et la présence de débris de poteries témoignent d’une occupation ancienne. La région a dû être abandonnée pour des raisons dont les plus probables seraient l’onchocercose et la

trypanosomiase, puis repeuplée par des éleveurs transhumants venus d’horizons divers après avoir été assainie (Tableau 41).

Tableau 41 : Répartition des éleveurs selon leur région d’origine (étude sur échantillon 1998)

Nombre de familles par secteur Total Province d’origine I II III IV Sanmatenga 14 1 1 6 22 Oubritenga 2 6 13 - 21 Namentenga 2 1 - 6 9 Ganzourgou 3 1 2 1 7 Boulgou - 2 1 - 3 Bam - - 2 - 2 Kadiogo - 1 - - 1 Total 21 12 19 13 65

Comme l’indique le tableau, 84% des familles résidantes sont originaires du nord de la plaine centrale (Sanmatenga, Oubritenga, Namentenga, etc.), les autres venant des provinces voisines telles que le Ganzourgou (11%) et le Boulgou (5%). Nombre d’entre elles reconnaissent avoir quitté leur village d’origine à cause des aléas climatiques (la sécheresse), mais aussi de la pression démographique et de l’extension des terres agricoles qui ont considérablement réduit les espaces pâturables. Quant à leur répartition sur le périmètre, elle s’est faite, comme le montre également le tableau, en fonction des affinités familiales ou de la région d’origine. Ainsi, au secteur nº1, 14 familles sur 21 sont ressortissants du Sanmatenga, tandis qu’au secteur nº3, 62% viennent d’Oubritenga.

Sur les 65 familles enquêtées en 1998, nous avons dénombré 910 personnes, soit en moyenne 14 individus par unité résidentielle. Et comme la zone pastorale en compte 114, sa population peut, par extrapolation, être estimée à 1 596 personnes, appartenant pour la plupart à l’ethnie Peul115. Leur habitat, généralement très sommaire, est une hutte faite de nattes tressées au moyen de tiges d’Andropogon gayanus116. La structure familiale, composée de plusieurs ménages placés sous l’autorité de l’aîné, s’est également maintenue; tout comme la religion musulmane et les habitudes alimentaires basées sur le régime lacté.

115 Seules 3 des 65 familles enquêtées sont des agriculteurs Mossi ayant réparti leurs membres entre la

colonie de peuplement agricole voisine (Kaïbo nord) et la zone pastorale.

116 Quelques éleveurs commencent à réaliser des constructions durables telles que les cases rondes faites

en banco et coiffées de chaume, typiquement Mossi. Même si cet habitat est encore peu répandu dans la zone, son adoption par certains producteurs est sans doute la preuve d’une volonté de sédentarisation.

Afin d’éviter une surcharge qui conduirait à la dégradation rapide des ressources, les éleveurs ont été, conformément au schéma de la figure 35, répartis dans quatre secteurs comportant chacun trois zones principales déterminées à partir des points d’eau (les forages): une zone de stationnement du bétail sur un rayon de 300 m autour d’un forage; une zone d’installation (500 m à partir de la première bande) où se trouvent les habitations et les champs des producteurs; une zone de pâture au delà de la précédente. Des mesures ont été également prises pour protéger les ressources naturelles. Ces mesures concernent l’interdiction des feux de brousse et la coupe du bois.

L’espace pastoral est ouvert aux éleveurs de la région désirant s’y installer, à condition d’en faire la demande au chef de la station d’élevage et de se soumettre aux conditions suivantes fixées par le projet:

• mettre son troupeau à la disposition de la station pour toute étude concernant le cheptel;

• avoir un habitat fixe dès son installation et éviter les déplacements intempestifs d’un point de la zone à l’autre;

• respecter scrupuleusement l’interdiction de la pratique des feux de brousse et de la coupe abusive du bois;

• être de bonne moralité et participer à la gestion et à l’entretien des infrastructures.

L’examen de ces dispositions appelle quelques inquiétudes. En effet, même si certaines pratiques nuisibles à l’environnement sont proscrites, les conditions d’accès à la zone ne précisent ni le mode de conduite et de gestion des parcours117, ni le seuil des effectifs du troupeau que les producteurs devraient atteindre pour respecter les capacités de charge. Or ces données sont aussi déterminantes dans le processus de dégradation de l’environnement et pourraient à la longue, poser problème: les pâturages étant un patrimoine collectif et le bétail un bien individuel, chaque éleveur aura tendance à profiter au mieux des ressources sans trop se soucier de l’entretien. On peut aussi craindre un accroissement des troupeaux au-delà des capacités de l’aire pastorale.

117 Les parcours désignent ici, l’ensemble des points d’eau et des pâturages exploités par un troupeau