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La violation des règles internes relatives à l’entrée et au séjour

PARAGRAPHE II : Les règles communautaires applicables aux ressortissants d’Etats tiers

A. Les ressortissants de pays tiers ordinaires

2) La violation des règles internes relatives à l’entrée et au séjour

108. Les individus en situation irrégulière sont généralement entrés sur le territoire communautaire en franchissant la frontière soit de manière clandestine soit à l’aide de faux documents ou de papiers falsifiés. La majorité d’entre eux a agi de façon totalement indépendante. Mais les entrées illégales sont de plus en plus le fait d’organisations et de

réseaux de passeurs401. Le séjour irrégulier peut également résulter d’un maintien sur le territoire d’un Etat membre après l’expiration de la durée de séjour autorisée402.

109. Depuis les années quatre-vingt-dix, l’Europe communautaire met en place un corpus de règles dans le domaine de l’immigration illégale. En réalité, le problème des personnes qui entrent et séjournent illégalement sur le territoire de l’Union européenne fait partie, avec la question de l’asile et de l’immigration régulière, d’une approche plus globale visant à élaborer une politique européenne commune en matière d’asile et d’immigration403.

110. La présence illégale de ressortissants de pays tiers sur le territoire communautaire est un problème qui faisait déjà débat avant l’entrée en vigueur du traité de Maastricht. L’adoption de recommandations, décisions et autres mesures sur le sujet devient en effet une des priorités de l’activité législative communautaire à partir de 1992. Dès cette époque, l’objectif est de lutter contre l’immigration clandestine et de rapprocher les pratiques nationales alors en vigueur en matière d’éloignement de ces ressortissants étrangers.

Deux recommandations sont ainsi prises le 30 novembre 1992 par les ministres des Etats membres des Communautés européennes, chargés de l’immigration. La première est relative aux pratiques des Etats en matière d’éloignement404. Elle prévoit que peuvent être

401 L’aide à l’immigration illégale débouche le plus souvent sur le trafic et la traite des êtres humains, l’exploitation des étrangers clandestins dans la prostitution et dans le travail. Voir WEYEMBERGH (A.),

L’union européenne et la lutte contre la traite des êtres humains, Cah. dr. eur., 2000, n° 1-2, p. 215 sqq.

Pour lutter efficacement contre ce phénomène, une des solutions est d’inviter les victimes à fournir aux autorités nationales compétentes les informations pouvant permettre de démanteler les différents réseaux. Ce faisant, la délivrance d’un titre de séjour est proposée aux victimes en échange de leur coopération effective. Voir la directive n° 2004/81/CE du Conseil du 29 avril 2004 relative au titre de séjour délivré aux ressortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine ou qui coopèrent avec les autorités compétentes, JOUE n° L 261 du 6 août 2004, p. 19. Les Nations Unies cherchent également à combattre ces infractions : cf. la Convention contre la criminalité transnationale organisée, adoptée par l’Assemblée générale en décembre 2000, ainsi que ses deux protocoles additionnels.

402 Le problème de l’immigration clandestine fait débat en France. Par exemple, un séminaire international sur la « lutte contre les filières d’immigration clandestine » a été tenu à Paris les 20 et 21 juillet 2000. Voir à ce sujet DELATTRE (L.), L’immigration clandestine ne cesse de se développer, Le Monde, 21 juin 2000, p. 3 ; ROCHE (B.), Immigration clandestine : un défi pour l’Europe, Le Monde, 25 juillet 2000, p. 12.

403 Voir CLERGERIE (J.-L.), L’absence d’une véritable politique européenne de l’immigration, RD publ., 1999, n° 4, p. 1201 sqq. ; EL GUEDARRI (A.), Vers une politique d’immigration de l’Union européenne, Hommes et Migratons, novembre-décembre 1999, n° 1222, pp. 77-84.

404 Recommandation du 30 novembre 1992 des ministres des Etats membres chargés de l’immigration relative aux pratiques des Etats membres en matière d’éloignement, non publiée au JO. Le texte et un commentaire de cette recommandation figurent dans l’ouvrage suivant : GUILD (E.), The Developing Immigration and Asylum

Policies of the European Union : Adopted Conventions, Resolutions, Recommendations, Decisions and Conclusions, The Hague, Kluwer Law International, 1996, 528 p., pp. 219-238. La version anglaise de cette

expulsées les personnes qui sont entrées ou qui sont demeurées illégalement sur le territoire d’un Etat membre, à moins que leur situation n’ait été régularisée. Elle affirme en outre que les décisions d’expulsion doivent alors être conformes aux principes garantis par la Convention de Genève de 1951 et le protocole de New York de 1967405. Ces dispositions furent confirmées dans la recommandation sur le contrôle et l’expulsion des ressortissants des Etats tiers résidant ou travaillant sans autorisation406. Cet acte s’applique aux « personnes

ayant travaillé en violation avec les règles sur l’immigration, le droit des étrangers ou des dispositions similaires », ainsi qu’à celles « qui, soumises à la même réglementation, facilitent, hébergent ou emploient des immigrants illégaux »407. La seconde recommandation du 30 novembre 1992 porte sur le transit aux fins d’éloignement408. D’autres recommandations ultérieures viennent, pour l’essentiel, fixer diverses règles à respecter quant à l’exécution des mesures d’éloignement409.

111. D’importants progrès commencent à se réaliser avec l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam en 1999 et l’intégration des questions d’asile et d’immigration410. Le titre VI du TUE concerne alors les « dispositions relatives à la coopération policière et judiciaire en matière pénale ». Le titre IV du TCE porte, quant à lui, sur les domaines des « visas, asile, immigration et autres politiques liées à la libre circulation des personnes »411. Dans ce cadre, il fut décidé de mettre en place un « espace de liberté, de sécurité et de justice » 412. L’article

405 Protocole relatif au statut des réfugiés du 31 janvier 1967, entré en vigueur le 4 octobre 1967.

406 Recommandation du 25 mai 1993 des ministres des Etats membres chargés de l’immigration sur le contrôle et l’expulsion des ressortissants des Etats tiers résidant ou travaillant sans autorisation. Cette recommandation est reproduite et expliquée par Elspeth GUILD dans sa compilation, The Developing Immigration and Asylum

Policies of the European Union …, op. cit., supra note n° 404, pp. 275-292.

407 Ibid.

408 Recommandation du 30 novembre 1992 des ministres des Etats membres chargés de l’immigration relative au

transit aux fins d’éloignement, JO n° C 5 du 10 janvier 1996, p. 5. Un addendum fut approuvé les 1er et 2 juin 1993, JO n° C 5 du 10 janvier 1996, p. 7.

409 Ce thème est abordé dans la Partie II de cette étude.

410 Sur cette question, voir DAUJAC (J.), La coopération européenne en matière d’asile et d’immigration, Hommes et Migrations, janvier-février 1998, n° 1211, pp. 120-126.

411 Voy. sur ce point HAILBRONNER (K.), European Immigration and Asylum Law under the Amsterdam

Treaty, CMLR, vol. 35, n° 5, 1998, pp. 1047-1067 et EL GUEDDARI (A.), Vers une politique d’immigration de l’Union européenne, op. cit., supra note n° 403.

412 Article 61 CE.

L’actualité de cet espace de liberté, de sécurité et de justice peut être trouvée sur le site qui lui est consacré : http ://www.europa.eu.int/comm/justice_home/index_fr.htm. Sur sa création, voy. CARLIER (J.-Y.) et VAN SIMAEYS (B.), Le nouvel espace de liberté, de sécurité et de justice, in LEJEUNE (Y.), « Le Traité d’Amsterdam. Espoirs et déceptions », Bruxelles, Bruylant, 1998, 498 p., p. 228. Un cours sur cet espace a été présenté en 2002 au sein de l’Institut universitaire européen de Florence : Académie de droit européen, session sur le droit de l’Union européenne, cours sur le thème « Appraising the EU “Area of Freedom, Security and Justice” », 1-12 juillet 2002.

2 du TUE dispose à cet égard que l’Union a pour objectif de développer cet espace « au sein

duquel est assurée la libre circulation des personnes, en liaison avec des mesures appropriées en matière de contrôle des frontières extérieures, d’asile, d’immigration ainsi que de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène». Sa création fut le thème

principal du Conseil européen de Tampere en octobre 1999. De grandes orientations politiques y furent établies mais, malgré l’impulsion donnée, l’adoption des mesures et instruments législatifs destinés au développement de cet espace s’avéra trop lente. Le problème fut soulevé à l’occasion du Conseil européen de Laeken de décembre 2001413. Puis, au sommet de Séville les 21 et 22 juin 2002, les chefs d’Etat et de gouvernement ont réexprimé leur volonté d’établir une politique commune d’immigration et d’asile afin d’ « aboutir à un véritable espace de liberté, de sécurité et de justice »414.

112. Depuis lors, les dispositions adoptées à cet effet se multiplient. Mais, alors qu’en principe elles devraient avoir « vocation à traiter » aussi bien de l’intégration des personnes immigrées en situation régulière que de la lutte contre l’immigration clandestine et autres « pratiques illégales », on peut faire le constat qu’elles appréhendent principalement l’immigration de ces étrangers d’un point de vue sécuritaire415. En ce qui concerne le problème de l’immigration illégale, les règles prennent un trait à la fois sécuritaire et répressif.

Une grande partie des dispositions touchant à l’immigration légale sont fondées sur le titre IV du TCE, ce qui explique qu’elles soient essentiellement destinées à assurer une sécurité minimale au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice. En effet, l’article 61 a) CE prévoit que le Conseil arrête les mesures relatives à la libre circulation des personnes en liaison avec des mesures d’accompagnement concernant les contrôles aux frontières

413 Pour en savoir plus sur les quelques progrès effectués de Tampere à Laeken, voy. la fiche pratique n° 110 dans 7 jours Europe n° 473 du 17 juin 2002. Pour une présentation assez complète du défi que représente la construction de cet espace, voy. plutôt FORTESCUE (A.), Un nouveau chantier prioritaire de l’Union

européenne : construire un espace de liberté, de sécurité et de justice, LPA, 27 septembre 2002, n° 194,

pp. 13-24.

414 GENSON (R.), Avancées au Conseil européen de Séville en matière de « justice et affaires intérieures », RMCUE, juillet-août 2002, n° 460, pp. 438-442, p. 438.

415 ROBIN-OLIVIER (S.), Droits fondamentaux et droit des étrangers dans l’évolution récente de l’Union

européenne », Colloque de Nanterre du 20 mai 2003, « Droits de l’homme et droit des étrangers depuis le 11 septembre 2001 : approche comparée France, Europe, Etats-Unis », Gaz. Pal., 19-21 octobre 2003, n° 292 à

extérieures, l’asile et l’immigration conformément à l’article 62, points 2 et 3416. Le renvoi à cet article 62 illustre clairement l’idée que l’entrée des ressortissants des Etats tiers est principalement appréhendée « en termes de sécurité » plutôt « que de liberté »417.

De même, les mesures de lutte contre la clandestinité ont pour la plupart un but essentiellement répressif. Cette approche trouve un écho avec la position qui était déjà celle du Traité sur l’Union européenne au 1er novembre 1993. En effet, le titre VI du TUE envisageait la lutte contre l’immigration illégale et le séjour irrégulier comme une question d’intérêt commun418. En ce sens, les mesures adoptées avaient rapidement négligé de garantir une protection effective des droits des immigrés en situation irrégulière au profit de l’aspect sécuritaire419. De plus, le Plan d’action du Conseil et de la Commission sur la manière de mettre en œuvre les dispositions du traité d’Amsterdam relatives à un espace de liberté, de sécurité et de justice adopté en 1998 spécifiait que les mesures prioritaires incluaient la lutte contre l’immigration clandestine, l’adoption de mesures d’expulsion et l’établissement d’une politique de réadmission et de retour420.

113. Une partie de la doctrine souligne et conteste cette orientation que prend la politique de l’Union depuis 1992421. De son côté, la Commission estime que « le développement d’une

politique équilibrée en matière d’immigration clandestine, doit aussi englober la

416 Ces dispositions limitent le déplacement des ressortissants des pays tiers à une durée maximale de trois mois et règlent la procédure permettant au Conseil de prendre les mesures sur le franchissement des frontières extérieures fixant les normes sur les visas pour les séjours d’une durée maximale de trois mois.

417 PICHERAL (C.), Espace de liberté, sécurité et justice et champ d’application du droit communautaire, Rev. aff. eur., 2003-2004, n° 1, pp. 95-108, sp. p. 101.

418 Cf. l’ex-article K.1 du TUE.

419 Voir supra § 110.

420 Plan d’action du Conseil JAI et de la Commission, 3 décembre 1998, JOCE n° C 19 du 23 janvier 1999, § 36. Ce plan est appelé Plan de Vienne.

421 Voir par exemple CHOLEWINSKI (R.), The EU Acquis on Irregular Migration : Reinforcing Security at the

Expense of Rights, EJML, 2000, vol. 2, n° 3-4, pp. 361-405.

L’Assemblée paritaire de la Convention conclue entre les Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et l’Union européenne s’est également inquiétée de l’adoption au Conseil européen de Florence des 21 et 22 juin 1996 de ces politiques d’asile et d’immigration « envisagées sous le seul aspect du “besoin de sécurité” des

citoyens de l’Union européenne au même titre que la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogues (…) » :

Assemblée paritaire de la Convention conclue entre les Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et l’Union européenne (ACP-UE), Résolution de septembre 1996 sur l’expulsion des immigrés en situation irrégulière en Europe, JOCE n° C 62 du 27 février 1997, p. 39. Voir aussi dans ce cadre, concernant les législations nationales sur l’immigration et les pratiques nationales en matière d’expulsion : Assemblée paritaire de la Convention conclue entre les Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et l’Union européenne (ACP-UE), Résolution de septembre 1996 sur les pratiques d’expulsion des immigrés en situation irrégulière, JOCE n° C 62 du 27 février 1997, p. 40.

prévention »422. Autrement dit, afin de gérer au mieux l’immigration illégale, il serait nécessaire de la combattre à la source. Une politique essentiellement répressive ne peut à elle seule contrer ce type d’immigration. Pourtant, l’approche du « Plan global de lutte contre l’immigration clandestine et la traite des êtres humains dans l’Union européenne » du Conseil, approuvé en février 2002 et sur lequel s’est basé le Conseil européen de Séville, s’est complètement inscrit dans cet esprit423.

114. Les événements du 11 septembre 2001 ont à ce titre accentué et légitimé le développement de cette politique communautaire « de sécurité coercitive »424. Dans cette perspective, ont notamment été adoptées la décision-cadre du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2002, relative à l’immigration clandestine et visant à renforcer le cadre pénal pour la répression de l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers425, ainsi que la directive du Conseil en date du 28 mai 2001 sur « la reconnaissance mutuelle des décisions d’éloignement des ressortissants de pays tiers »426.

115. En ce qui concerne les infractions d’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers, les Etats membres doivent légiférer de manière à les assortir de « sanctions pénales effectives,

proportionnées et dissuasives susceptibles de donner lieu à extradition »427. Le cas échéant, ces sanctions peuvent être accompagnées d’autres mesures, dont l’expulsion.

116. Quant à la directive n° 2001/40, elle fait partie intégrante de la politique communautaire d’immigration et participe à la création de l’espace de liberté, de sécurité et de justice. Elle a été adoptée sur initiative de la République française428, dans la mesure où les

422 Communication du 15 novembre 2001 de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur une politique commune en matière d’immigration clandestine, COM(2001) 672 final, 28 p., p. 10.

423 Document n° 6621/1/02 JAI du Conseil, 28 février 2002, JOCE n° C 142 du 14 juin 2002, p. 23.

424 ROBIN-OLIVIER (S.), Droits fondamentaux et droit des étrangers …, op. cit., supra note n ° 415, p. 20.

425 Décision-cadre 2002/946/JAI du Conseil du 28 novembre 2002 relative à l’immigration clandestine et visant à renforcer le cadre pénal pour la répression de l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers, JOCE n° L 328 du 5 décembre 2002, p. 1 ; cette décision-cadre est d’initiative française. Les infractions d’aide à l’entrée, au

transit et au séjour irréguliers sont définies dans une directive adoptée le même jour : cf. Directive n° 2002/90/CE du Conseil du 28 novembre 2002, JOCE n° L 328 du 5 décembre 2002, p. 17.

426 Directive 2001/40/CE du Conseil, op. cit., supra note n° 392.

427 Article premier de la décision-cadre 2002/946/JAI du Conseil, supra note n ° 425, p. 2. Voir sur cette question GUYOT (I.), A propos de l’immigration clandestine et de ses filières. Vers une harmonisation européenne, Rev. sc. crim., avril-juin 2002, n° 2, pp. 303-317.

428 Initiative de la République française en vue de l’adoption de la directive du Conseil relative à la reconnaissance mutuelle des décisions d’éloignement des ressortissants de pays tiers, JOCE n° C 243 du 24 août 2000, p. 1.

dispositions du traité d’Amsterdam prévoyait, notamment pour les mesures relatives à la politique d’immigration, que « pendant une période transitoire de cinq ans » à compter de son entrée en vigueur, « le Conseil statue à l’unanimité sur proposition de la Commission ou

à l’initiative d’un Etat membre et après consultation de Parlement européen »429. La directive 2001/40 a donc été prise sur la base de l’article 63 § 3 du TCE en vertu duquel le Conseil arrête des mesures concernant la politique d’immigration, et notamment en matière d’immigration clandestine et de séjour irrégulier, ainsi que sur le rapatriement des personnes en séjour irrégulier.

Au terme de cette période de cinq ans, dans son bilan sur le programme établi à Tampere, la Commission européenne soulignait cette contrainte à la fois juridique et institutionnelle, et regrettait que ce pouvoir d’initiative partagé avec les Etats membres ait « parfois conduit à privilégier les enjeux nationaux par rapport aux priorités de

Tampere »430.

Concernant cette directive, il ressort de son article 3 § 1 b) que le non respect des réglementations nationales relatives à l’entrée et au séjour des étrangers suffit à légitimer l’expulsion d’un ressortissant d’un Etat tiers. Dans son livre vert de 2002, la Commission semble soutenir à ce propos qu’une décision d’expulsion prise pour ce motif apparaît nécessaire afin de dissuader ceux des ressortissants des Etats tiers qui se trouvent encore en dehors du territoire de l’Union d’y entrer illégalement431. Elle ajoute que ces ressortissants, « qui n’ont pas de statut juridique leur permettant de rester, soit à titre permanent, soit à titre

429 Voir les articles 63 et 67 du TCE.

430 Communication du 2 juin 2004 de la Commission au Conseil et au Parlement européen, « Espace de liberté, de sécurité et de justice : bilan du programme de Tampere et futures orientations », COM(2004) 401 final, 17 p., p. 5. Pour une présentation de ce bilan, voy. MATTERA (P.), Le bilan du programme de Tampere et les futures orientations, RDUE, 2004, n° 2, pp. 275-277.

Depuis le sommet de Tampere, la Commission présentait chaque semestre dans une communication au Conseil et au Parlement européen un « Tableau de bord pour l’examen des progrès réalisés en vue de la création d’un espace de liberté, de sécurité et de justice dans l’Union européenne ». La dernière communication est celle du 2 juin 2004. Un nouveau programme, dit « de La Haye », a été établi pour les cinq prochaines années par les Chefs d’Etat et de gouvernement réunis à Bruxelles les 4 et 5 novembre 2004, JOUE n° C 53 du 3 mars 2005, p. 1. Sur ce programme, voir GENSON (R.), Un nouveau programme pluriannuel pour consolider l’espace de

liberté, de sécurité et de justice – Le programme de La Haye (2005-2010), RMCUE, mars 2005, n° 486,

pp. 172-176. Dans ce cadre, la Commission a publié une communication « Programme de La Haye : Dix priorités pour les cinq prochaines années – Un partenariat pour le renouveau européen dans le domaine de la liberté, de la sécutité et de la justice », 10 mai 2005, COM(2005) 184 final. La Commission a aussi adopté en septembre 2005 un certain nombre de mesures, notamment une proposition de directive relative aux normes et procédures communes en matière de retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 1er septembre 2005, COM(2005) 391 final) ainsi qu’un programme commun pour l’intégration, et deux communications respectivement relatives aux migrations et au développement, et aux programmes de protection régionaux.

temporaire, et dont aucun Etat membre n’a l’obligation légale de tolérer le séjour », ont le

devoir de quitter le territoire communautaire432.

117. En réalité, l’article 63 § 3 du TCE a pour origine l’article 23 de la Convention d’application de l’Accord de Schengen du 14 juin 1985433. Cet article 23 prévoit en son paragraphe 1er que « l’étranger qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions de court

séjour applicables sur le territoire de l’une des Parties contractantes doit en principe quitter sans délai les territoires » de ces dernières434. Il poursuit au paragraphe 3 que « lorsque le

départ volontaire d’un tel étranger n’est pas effectué ou lorsqu’il peut être présumé que ce départ n’aura pas lieu, l’étranger doit être éloigné du territoire de la Partie contractante sur lequel il a été appréhendé, dans les conditions prévues par le droit national » de celle-ci435. Il est légitime en effet d’avoir la volonté d’empêcher que la circulation entre les Etats membres de ressortissants d’Etats tiers, frappés d’une mesure administrative d’expulsion, devienne incontrôlée. La directive 2001/40 répond donc en cela parfaitement aux conclusions du