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Les travailleurs et les résidents de longue durée

200. Certains étrangers, qui désirent travailler et résider dans un Etat membre, peuvent bénéficier du droit d’y entrer et d’y séjourner en vertu d’un accord d’association, ayant notamment trait à la liberté de circulation, passé entre leur Etat d’origine et la Communauté européenne698. Un exemple d’accord de ce type est l’accord relatif à l’espace économique européen (EEE), conclu avec certains pays membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE)699, et qui prévoit que les nationaux de ces Etats tiers disposent des quatre libertés communautaires selon les mêmes conditions que les citoyens européens.

201. Il existe également des accords avec des pays non européens. Un accord d’association a par exemple été conclu en 1963 avec la Turquie, Etat candidat à l’adhésion à l’Union européenne700. Il tend à favoriser l’intégration des ressortissants turcs dans l’Etat membre d’accueil et porte donc notamment sur l’établissement progressif de la libre circulation des travailleurs. Il résulte de cet accord et du protocole additionnel701 que les principes, admis dans le cadre des articles 39 CE à 41 CE, sont transposés aux ressortissants turcs bénéficiant des droits reconnus par la décision n° 1/80 prise pour le développement de cette association702. Cette décision contient des dispositions relatives à l’emploi et à la libre circulation des travailleurs. Plus particulièrement, son article 6 § 1 tiret 3 prévoit que « le

travailleur turc, appartenant au marché régulier de l’emploi d’un Etat membre (…) bénéficie, dans cet Etat membre, après quatre ans d’emploi régulier, du libre accès à toute activité

698 Ce type d’accord a pour base juridique l’article 310 du TCE : « La Communauté peut conclure avec un ou

plusieurs Etats ou organisations internationales des accords créant une association caractérisée par des droits et obligations réciproques, des actions en commun et des procédures particulières ».

699 Traité de Stockholm du 20 novembre 1959.

700 Accord d’association Communauté économique européenne - Turquie, op. cit, supra note n° 519. Le Groupement d’Intervention et de Soutien aux Travailleurs Immigrés (GISTI) a rappelé que « La Communauté

européenne et les Etats membres ont conclu des accords d’association ou de coopération avec la quasi-totalité des Etats tiers, dont le principal objectif est d’instituer une coopération économique. Toutefois certains comportent un volet social intéressant, selon les cas, les conditions de travail et de rémunération, la protection sociale et le droit de travailler et de séjourner dans un Etat membre » : GISTI, La circulation des étrangers dans l’espace européen, Plein Droit, Supplément n° 39, Expressions, Paris, septembre 1998, 47 p., p. 29.

701 Protocole additionnel, signé à Bruxelles le 23 novembre 1970, conclu, approuvé et confirmé au nom de la Communauté économique européenne par le règlement (CEE) n° 2760/72 du Conseil du 19 décembre 1972, JO n° L 293, p. 1.

702 Décision n° 1/80 du Conseil d’association, institué par l’accord d’association, 19 septembre 1980, relative au développement de l’association.

salariée de son choix »703. Pour l’effet utile de cette disposition, la Cour de justice a décidé que ledit travailleur turc peut résider sur le territoire de l’Etat membre où il exerce son activité704.

Cela n’a malheureusement pas empêché les autorités allemandes de refuser l’octroi d’un titre de séjour à un travailleur turc, faisant partie du marché régulier de l’emploi et de l’expulser. Saisie sur renvoi préjudiciel, la Cour rappelle qu’un tel ressortissant turc, qui a travaillé sur le territoire de l’Etat membre en cause pendant une période ininterrompue de quatre années au moins, y bénéficie du droit d’occuper l’emploi salarié de son choix et du « droit corrélatif de séjour »705. Mais un problème se posait à propos de la loi allemande sur les étrangers, dont l’article 8 § 2 dispose qu’un « étranger qui a été expulsé ou reconduit à la

frontière ne peut pas revenir en Allemagne ou y séjourner. Aucun titre de séjour ne lui sera délivré, même si les conditions lui conférant un droit à un tel titre selon la présente loi sont remplies. Les effets décrits dans la première et la deuxième phrase seront généralement assortis d’un délai s’il en est fait la demande. Le délai commencera à courir au moment de la sortie du territoire ». Concernant donc la question relative aux rapports entre les dispositions

de la décision n° 1/80 et celles du droit national sur les étrangers, la Cour affirme qu’un Etat membre n’est pas autorisé à modifier unilatéralement la portée du système d’intégration progressive des ressortissants turcs dans le marché de l’emploi. Par conséquent, l’Etat membre d’accueil ne saurait adopter une réglementation en matière de police des étrangers, ni appliquer une mesure relative au séjour sur son territoire d’un ressortissant turc, de nature à entraver l’exercice des droits expressément conférés par le droit communautaire à un tel

703 Ibid.

704 CJCE, arrêt du 20 septembre 1990, S-Z Sevince contre Staatssecretaris Von Justitie, aff. C- 192/89, Rec. I- p. 3497 ; Conclusions de l’avocat général M. M. Darmon, présentées le 15 mai 1990, Rec. I- p. 3473. Dans cette affaire, la Cour reconnaît l’effet direct de la décision 1/80. De la même manière, certaines dispositions d’un accord de partenariat peuvent se voir reconnaître un effet direct, nonobstant le fait que la mise en œuvre de ces dispositions est effectuée sur la base de recommandations d’un conseil de coopération : voir l’accord de partenariat et de coopération établi entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, et la Fédération de Russie signé le 24 juin 1994 et approuvé le 30 octobre 1997, et tout spécialement l’article 23 § 1 (posant une interdiction de discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération ou de licenciement, des ressortissants russes légalement employés sur le territoire d’un Etat membre par rapport aux nationaux de cet Etat membre) dont l’effet direct a été reconnu par la CJCE dans son arrêt du 12 avril 2005, Igor Simutenkov c/ Ministerio de Educación y Cultura et Real Federación Española de

Fútbol, aff. C- 265/03, pt. 25, Rec. I- p. 2596 ; Conclusions de l’avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées

le 11 janvier 2005, Rec. I- p. 2581.

705 CJCE, arrêt du 19 novembre 2002, Bülent Kurz contre Land Baden-Württemberg, pt. 31, aff. C- 188/00, Rec. I- p. 10712 ; Conclusions de l’avocat général M. P. Léger, présentées le 25 avril 2002, Rec. I- p. 10694.

Sur la notion de travailleur, voir les pts. 30 à 36, de même que le développement explicatif du Professeur CARLIER (J.-Y.), La libre circulation des personnes …, op. cit., supra note n° 589, sp. p. 83.

ressortissant. Selon la Cour, il en résulte que « lorsqu’un ressortissant turc qui remplit les

conditions prévues [par] la décision 1/80 et, partant, bénéficie des droits que celle-ci lui confère a fait l’objet d’une expulsion, le droit communautaire s’oppose à l’application d’une réglementation nationale en vertu de laquelle la délivrance d’un titre de séjour doit être refusée tant que les effets de ladite mesure d’expulsion n’ont pas été limités dans le temps »706.

202. Concernant les droits reconnus aux ressortissants turcs, il est prévu à l’article 14 § 1 de la décision n° 1/80 que les Etats membres ne peuvent les limiter que pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique. D’après la jurisprudence de la Cour, cette exception d’ordre public doit être interprétée de la même manière que celle prévue notamment par les dispositions du traité relatives à la circulation des travailleurs. Dans une décision en date du 11 novembre 2004, la Cour de justice relève que, « aux fins de décider si un

ressortissant d’un autre Etat membre peut être expulsé dans le cadre de l’exception tirée des raisons d’ordre public, les autorités nationales compétentes doivent déterminer au cas par cas si la mesure ou les circonstances qui ont donné lieu à [la] condamnation font apparaître l’existence d’un comportement personnel constituant une menace actuelle pour l’ordre public »707. La Cour ajoute que des limites analogues s’imposent auxdites autorités lorsqu’elles prennent une mesure d’expulsion à l’encontre de ressortissants turcs708.

Dès lors, un ressortissant de nationalité turque, qui entre dans le champ d’application de l’article 6 § 1 tiret 3 de la décision 1/80, c’est-à-dire qui a travaillé régulièrement pendant au moins quatre ans dans un Etat membre, peut accéder à l’activité salariée de son choix dans cet Etat et y séjourner. Des limitations peuvent être prises par ledit Etat membre pour les mêmes motifs d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique qui pourraient être invoqués à l’encontre d’un ressortissant d’un autre Etat membre.

203. Ces règles jurisprudentielles d’interprétation sont-elles applicables lorsque le travailleur turc est détenu ou incarcéré ? Car, dès lors qu’il est privé de sa liberté, la question se pose de savoir s’il fait toujours partie du marché régulier de l’emploi. Si oui, le migrant

706 Id., pt. 70. Cette décision est commentée par IDOT (L.), in Europe, janvier 2003, n° 1, comm. n° 15, p. 19.

707 CJCE, arrêt du 11 novembre 2004, Cetinkaya, op. cit., supra note n° 518, pt. 44.

708 Id., pt. 46. Voir sur cet arrêt le commentaire de MARIATTE (F.), Europe, janvier 2005, n° 1, comm. n° 8, p. 13. De même, voy. la très bonne analyse de CHV, in « Chronique de jurisprudence de la Cour de justice et du Tribunal de première instance des Communautés (juillet-décembre 2004) », Rev. aff. eur., 2003-2004, n° 4, pp. 656-672.

continue de relever de l’article 6 § 1 tiret 3 et ne peut donc faire l’objet d’une expulsion automatique du territoire de l’Etat membre d’accueil. Sinon, il perd le bénéfice de ses droits de travail et de séjour, et pourrait être frappé d’une expulsion automatique. Selon l’article 6§2 de la décision 1/80, certaines absences sont assimilées aux périodes d’emploi régulier, d’autres, sans être assimilées à ces périodes, ne portent pas atteinte aux droits acquis en vertu de la période d’emploi antérieure709. L’incarcération n’est malheureusement pas expressément prévue parmi les causes de ces absences.

Dans l’hypothèse d’une détention préventive d’une durée d’un an suivie d’une condamnation à une peine d’emprisonnement prononcée avec sursis, la Cour de justice a cependant estimé qu’une telle détention n’entraîne pas la perte pour l’intéressé de ses droits de travail et de séjour, le sursis ne l’écartant pas du marché de l’emploi710. En revanche, que se passe t-il dans l’hypothèse d’une peine d’emprisonnement ferme ? la Cour a résolu le problème dans son arrêt Dogan du 7 juillet 2005 concernant un travailleur turc condamné à trois ans de prison711. Dans un premier temps, elle observe qu’à partir du moment où le migrant turc satisfait aux conditions de l’article 6 § 1 tiret 3, le paragraphe 2 n’a plus lieu de s’appliquer712. Dans un second temps, la Cour considère que l’article 6 § 1 tiret 3 doit être interprété « en ce sens qu’[il] ne vise pas le seul exercice d’un emploi (…) [mais aussi l’arrêt d’une] activité professionnelle pour en rechercher une autre (…) »713. Elle note en effet que cette disposition « n’exige pas l’exercice (…) ininterrompu d’un emploi »714. Par conséquent, dans l’hypothèse d’une telle interruption, le travailleur turc continue d’appartenir au marché régulier de l’emploi. La Cour précise toutefois qu’il en va ainsi « quelle que soit la cause de

l’absence de l’intéressé du marché du travail de l’État membre d’accueil, pour autant que cette absence revêt un caractère provisoire »715. Or, une absence provisoire peut être due à l’exécution d’une peine d’emprisonnement ferme. A l’inverse, dans le cas où l’intéressé, une fois libéré, ne pourrait plus intégrer le marché du travail ou aurait dépassé le délai raisonnable

709 Plus précisément, l’article 6 § 2 dispose que « Les congés annuels et les absences pour cause de maternité,

d’accident de travail ou de maladie de courte durée sont assimilés aux périodes d’emploi régulier. Les périodes de chômage involontaire, dûment constatées par les autorités compétentes, et les absences pour cause de maladie de longue durée, sans être assimilées à des périodes d’emploi régulier, ne portent pas atteinte aux droits acquis en vertu de la période d’emploi antérieure ».

710 CJCE, arrêt du 10 février 2000, Nazli, aff. C- 340/97, Rec. I- p. 957.

711 CJCE, arrêt du 7 juillet 2005, E. Dogan, aff. C- 383/03, Rec. I-p. 6239.

712 Id., pt. 16.

713 Id., pt. 18.

714 Ibid.

pour trouver un autre emploi, il ne pourrait plus être considéré comme appartenant au marché régulier de l’emploi.

Il résulte de cette jurisprudence que le travailleur turc, qui remplit les conditions de l’article 6 § 1 tiret 3 de la décision n° 1/80, conserve le droit d’accéder à l’activité salariée de son choix, même s’il est incarcéré, à partir du moment où son absence n’est que provisoire et peut dès lors être expulsé, non pas automatiquement en raison d’une condamnation pénale, mais, uniquement si son comportement personnel révèle un risque concret de nouvelles perturbations graves de l’ordre public.

204. Dans le même sens, le bénéficaire de l’article 7 alinéa 1 de la décision 1/80, lequel porte sur le libre accès à l’emploi des membres de la famille des travailleurs turcs716, ne peut être expulsé automatiquement au motif qu’il aurait été condamné à une longue peine de prison suivie d’une cure de désintoxication de longue durée717. Cette interprétation de la Cour « s’impose d’autant plus que, à la différence de l’article 6 § 1 de la décision nº 1/80

concernant les travailleurs turcs, la naissance des droits en matière d’emploi des membres de la famille d’un tel travailleur est subordonnée, conformément à l’article 7 alinéa 1 de cette décision, non pas à l’appartenance de ces membres de la famille au marché régulier du travail de l’État concerné et à l’exercice d’une activité salariée pendant une certaine durée, mais simplement à une condition de résidence effective avec le travailleur, dont ils tirent leurs droits, durant une période initiale de trois ans »718. Comme le souligne F. MARIATTE, cette différence crée une discrimination entre les travailleurs turcs et les membres de leur famille, étant donné que les motifs d’expulsion sont plus nombreux pour les premiers que pour les seconds719. Il remarque en effet que « compte tenu que le membre de la famille du travailleur

n’est, lui, pas soumis à la condition tenant à l’appartenance au marché régulier de l’emploi (…), il faut nécessairement en déduire que, une fois consolidé son droit, il n’est plus expulsable que sur le seul fondement de l’article 14 »720.

716 L’article 7 alinéa 1 de la décision n° 1/80 prévoit que « Les membres de la famille d’un travailleur turc

appartenant au marché régulier de l’emploi d’un État membre, qui ont été autorisés à le rejoindre : 1 - ont le droit de répondre – sous réserve de la priorité à accorder aux travailleurs des États membres de la Communauté - à toute offre d’emploi lorsqu’ils y résident régulièrement depuis trois ans au moins ; 2 - y bénéficient du libre accès à toute activité salariée de leur choix lorsqu’ils y résident régulièrement depuis cinq ans au moins ».

717 CJCE, arrêt du 7 juillet 2005, C. Aydin Li, aff. C- 373/03, pt. 28, Rec. I- p. 6183.

718 Id., pt. 29.

719 MARIATTE (F.), note in Europe, octobre 2005, n° 9, comm. n° 335, pp. 21-22.

205. Selon l’article 7 alinéa 2 de la décision 1/80, « Les enfants des travailleurs turcs ayant

accompli une formation professionnelle dans le pays d’accueil pourront, indépendamment de leur durée de résidence dans cet Etat membre, à condition qu’un des parents ait légalement exercé un emploi dans l’Etat membre intéressé depuis trois ans au moins, répondre dans ledit Etat membre à toute offre d’emploi ». Ce second alinéa étant moins strict que le premier

alinéa du même article, les ressortissants turcs qui entrent dans son champ d’application ne peuvent pas être traités de manière plus restrictive que les bénéficiaires du premier alinéa de l’article 7. Les limitations de leurs droits découlant de ce second alinéa ne devraient donc pas

être plus nombreuses que celles prévues pour ledit alinéa premier. Prenons le cas de M. Torun, fils d’un salarié turc. Ayant terminé en Allemagne une formation professionnelle, il

bénéficie d’un droit à l’emploi et du droit corrélatif de séjour en vertu de l’article 7, second alinéa. Condamné à trois ans et trois mois de prison pour vol à main armée et acquisition illégale de stupéfiants, il est incarcéré en 1998. Les autorités nationales compétentes prennent une décision d’expulsion à son encontre en 1999. Or, la Cour considère dans son arrêt rendu sur cette affaire le 16 février 2006 que « les limites aux droits conférés par l’article 7, second

alinéa, de la décision n° 1/80 ne peuvent être que de deux ordres, à savoir soit la présence du travailleur migrant turc sur le territoire de l’Etat membre d’accueil constitue, en raison de son comportement personnel, un danger réel et grave pour l’ordre public, la sécurité ou la santé publiques, au sens de l’article 14 § 1 de la même décision, soit l’intéressé a quitté le territoire de cet Etat pendant une période significative et sans motifs légitimes »721. Il en résulte en l’espèce que M. Torun ne peut pas être privé de son droit à l’emploi et de son droit de séjour pour non-exercice d’un emploi dû à une peine privative de liberté de plus de trois ans. Pour l’expulser, les autorités allemandes devront donc rechercher si son comportement personnel risque de perturber gravement l’ordre public, la sécurité publique ou la santé publique. Dans son arrêt, la Cour précise que l’article 7 alinéa 2 de la décision n° 1/80 ne vise pas seulement les enfants mineurs des travailleurs turcs appartenant au marché régulier de l’emploi, mais aussi leurs enfants majeurs722.

206. Pendant longtemps, il y a eu un décalage dérangeant entre ces étrangers, bénéficiant de règles favorables du fait d’un accord d’association, et les ressortissants non

721 CJCE, arrêt du 16 février 2006, E. Torun, aff. C- 502/04, pt. 25, Rec. I- p. 1565.

722 Id., pt. 27. La Cour de justice explique en effet que l’article 7 alinéa 2 de la décision n° 1/80 ne s’adresse pas expréssement qu’aux seuls enfants mineurs, et qu’opérer pareille interprétation viderait ladite disposition de sa substance et serait plus restrictive que ce qui est prévu à l’alinéa premier du même article.

communautaires qui résident et/ou travaillent régulièrement dans un Etat membre depuis une certaine durée et qui, eux, ne peuvent pas exercer les droits et libertés communautaires. Concernant les résidents de longue durée, il a notamment été demandé que leur soit attribué un droit de séjour propre723.

207. Un nombre important d’étrangers, qui participent activement par leur travail au développement économique des Etats membres et résident en toute légalité sur le territoire de l’Union, attendait que leurs droits soient clairement définis724. Tandis que les droits des ressortissants communautaires évoluent, lentement mais sûrement, à travers leur statut de citoyens européens, ceux des travailleurs non communautaires ont été longtemps mis à mal par un immobilisme déconcertant de la politique communautaire. A ce titre, B. VILÁ COSTA a exprimé son regret quant à l’« absence délibérée d’une véritable « déclaration systématique

des droits » formulée en termes clairs et suffisamment précis et applicable à tous les étrangers qui sont intégrés et occupent un emploi rémunéré au sein de l’Union européenne »725. Il est donc apparu inadmissible que la situation juridique de ces personnes demeure aussi précaire. Il suffisait que leur permis de travail ne soit pas renouvelé pour qu’ils puissent faire l’objet, faute de permis de séjour, de mesures d’expulsion dans des conditions qui ne pouvaient pas être satisfaisantes au regard notamment de leur vie familiale.

208. Dès lors, il appartenait à la Communauté de mettre en place un ensemble de règles régissant le « statut minimal » de ces personnes installées durablement dans les Etats membres et permettant véritablement leur intégration726. Le Conseil a adopté le 25 novembre 2003, sur la base de l’article 63 du TCE, la directive n° 2003/109 « relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée »727, qui pose les conditions

723 En 2000, le Parlement européen a déploré que les ressortissants des Etats tiers qui sont nés dans un Etat membre de l’Union et qui y séjournent, ou qui y vivent depuis l’enfance ne bénéficient pas, au même titre que ceux faisant partie de la famille d’un ressortissant communautaire, d’un statut privilégié. Il a estimé que le problème se pose également pour les personnes établies de longue date sur le territoire de l’Union et qui ont des

liens culturels, sociaux et familiaux dans le pays de séjour. Voir la résolution du Parlement européen du 6 septembre 2000 sur le rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l’application des