• Aucun résultat trouvé

Vers un renforcement de la gestion des compétences

Chapitre III La formation professionnelle : un domaine essentiel pour la FFB

2. Vers un renforcement de la gestion des compétences

Au-delà de la formation initiale et de son utilisation dans le cadre de stratégies de recrutement, les entreprises du bâtiment se doivent désormais de développer davantage la gestion des compétences de leurs salariés. Plusieurs arguments militent en ce sens : l’évolution de leurs activités et l’émergence progressive d’une demande de la part des salariés. Ces deux points seront examinés successivement.

a) Un développement de la formation continue

qui devrait se poursuivre

Les arguments évoqués précédemment sur l’importance de la qualité de la main-d’œuvre, dans la réussite de l’entreprise comme sur la concurrence entre les secteurs, conduisent aujourd’hui les chefs d’entreprise à développer la gestion de leurs ressources humaines, notamment dans le cadre de la formation continue, afin de fidéliser les salariés formés.

Le recours à la formation continue s’est développé progressivement dans les entreprises du bâtiment depuis le début des années soixante-dix dans le cadre de dispositifs professionnels. Jusqu’à cette période, elle était peu formalisée, l’évolution des compétences se faisant principalement par transmission du savoir sur chantier ou au contact des industriels. Les entreprises du bâtiment de dix salariés et plus participent, pour leur part, à un système professionnel mutualisé depuis 1971. Celui-ci est incitatif. Il bénéficie, en priorité, aux entreprises qui décident de développer de la formation et perçoivent un accompagnement financier au-delà du montant de leur cotisation professionnelle, au détriment de celles qui paient uniquement leur cotisation à l’organisme professionnel. Le développement de la formation continue dans les entreprises artisanales s’est effectué plus tardivement, notamment pour des raisons institutionnelles. La mise en place du dispositif de financement de la formation continue découle directement de l’accord du 23 juillet 1989 créant le fonds d’assurance formation des salariés du bâtiment (FAF.SAB). De ce fait, et jusqu’à cette période, les entreprises supportaient en totalité les coûts des actions de formation, ce qui ne les incitait pas nécessairement à en développer.

Les entreprises du secteur du bâtiment, quelles que soient leur taille et leur activité, sont aujourd’hui confrontées à une évolution de leurs marchés sous l’impulsion de trois séries de facteurs :

Les évolutions techniques et changements réglementaires (réglementations sanitaire,

201) Certaines entreprises artisanales acceptent de fonctionner de cette façon, notamment celles qui travaillent en sous- traitance pour les cuisinistes ou grandes surfaces de bricolage qui proposent aujourd’hui une prestation globale aux particuliers (conseil, vente de matériaux, pose).

personnes handicapées, nouvelles normes comme la « haute qualité environnementale »…) Ils s’imposent régulièrement au domaine de la construction mais connaissent une accélération depuis plusieurs années, liée à la volonté des pouvoirs publics de faire évoluer les bâtiments en matière de confort, d’accessibilité pour les personnes âgées ou handicapés, de consommation énergétique ;

Les changements de comportement des clients publics ou privés : les clients formulent

des exigences accrues et sont mieux informés ; ils attendent plus souvent un engagement sur les résultats et non seulement sur la réalisation et apprécient des services complémentaires ; ils souhaitent un interlocuteur unique sur le chantier qui puisse leur proposer un ensemble de prestations dans le cadre d’une offre globale (maintenance, financements, conseils…) ; • La transformation des conditions d’exécution des chantiers : les interventions sur sites occupés deviennent de plus en plus fréquentes et exigent de fortes adaptations (sécurité, pollution sonore, poussières…). Les délais sont de plus en plus courts pour réaliser les chan- tiers ; l’interdépendance est plus forte entre les entreprises, les contentieux plus fréquents.

Ces mutations constituent des changements réels pour une profession à forte culture technique, peu habituée à proposer des services complémentaires aux clients dans le cadre d’une démarche structurée. Ils incitent les chefs d’entreprise à recourir davantage à la formation continue afin d’adapter les compétences de leurs salariés – notamment dans le domaine réglementaire – et pouvoir se positionner sur tous types de marchés, publics ou privés. En effet, si elles ne s’adaptent pas aux nouvelles exigences de leur clientèle, les entreprises du bâtiment risquent de se voir supplanter par de nouveaux intervenants (prestataires de services, courtiers de travaux, fournisseurs d’énergie…) susceptibles de définir les prestations en lieu et place de l’entreprise du bâtiment, et de cantonner celle-ci à un rôle d’exécution ou de sous-traitance. L’enjeu est un risque majeur de dépendance et de perte de valeur ajoutée pour les entreprises du bâtiment, que la majorité d’entre elles ne veulent courir à aucun prix 201.

D’autres motifs peuvent inciter les chefs d’entreprise à vouloir développer une gestion globale des compétences au sein de leur entreprise : l’accompagnement des demandes individuelles de leurs salariés ; le souhait d’avoir une meilleure connaissance des ressources internes ; la valorisation de leur entreprise ; le besoin d’évolution de l’activité liée à l’obtention de

nouveaux marchés. Cette démarche, encouragée par la Fédération depuis plusieurs années, passe notamment par un recours plus fréquent à la formation continue.

L’analyse statistique conduite sur les dix dernières années confirme cette montée en puissance du recours à la formation continue. Ainsi, en dix ans, entre 1998 et 2008, le nombre de stagiaires ayant bénéficié d’une action de formation continue dans les entreprises de dix salariés et plus a augmenté de 116 %, passant de 72 333 à 156 276 stagiaires. Pour les salariés des entreprises artisanales, le nombre de stagiaires est passé de 16 431 en 1998, à 50 403 en 2008, ce qui correspond à une progression de 307 %. à cela, il conviendrait d’ajouter les stages de formation suivis par les artisans non salariés et leur conjoint. Ils représentent entre 20 000 et 25 000 stagiaires par an et connaissent peu de variations. La figure 4 ci-après reprend l’évolution, année par année sur la période 1998-2008, du recours à la formation pour l’ensemble des salariés. On y observe une progression régulière dans les entreprises de dix salariés et plus : cela correspond à une véritable évolution de fond. Dans le cas des entreprises artisanales, l’évolution est plus contrastée et dépend notamment de l’ajustement de critères financiers de prise en charge des formations 202. La progression n’en demeure pas

moins remarquable dans des entreprises pour lesquelles le départ en formation du salarié pose souvent des difficultés d’organisation interne.

Figure 4 : évolution du recours à la formation continue dans le bâtiment

0 20 000 40 000 60 000 80 000 100 000 120 000 140 000 160 000 180 000 19 98 19 99 20 00 20 01 20 02 20 03 20 04 20 05 20 06 20 07 20 08 Nom br e de st ag iai re s

Entreprises de 10 salariés et + Entreprises de - de 10 salariés

Sources : Opca Bâtiment, FAF.SAB.

202) En effet, le FAF.SAB ajuste régulièrement les critères financiers de prise en charge de formation, en fonction de ses propres ressources et de la demande des entreprises. Dans la mesure où la quasi-totalité des coûts sont pris en charge (coûts pédagogiques + salaires et charges), la variation de la dépense globale peut être très forte. à l’inverse, pour les entreprises de 10 salariés et plus, elles sont amenées à participer financièrement à la prise en charge des formations. On observe de ce fait, moins de variations dans les critères de prise en charge de l’Opca bâtiment et dans le nombre de demandes de formation des entreprises.

203) Loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie publiée au Journal officiel du 25 novembre 2009.

204) De nombreux salariés, notamment parmi les ouvriers et les plus âgés, répugnent encore à partir en formation continue pour différentes raisons qui ont fait l’objet d’analyses : refus de retourner à l’école dont ils ont parfois gardé un mauvais souvenir ; sentiment qu’ils maîtrisent leur métier sur chantier et n’ont pas à être évalués par des tiers ; difficultés avec l’écrit… Par ailleurs, le droit individuel à la formation (DIF) étant mis en œuvre dans le cadre d’une codécision entre l’employeur et le salarié, les formations engagées dans le cadre du Dif, sur un plan statistique, ne sont pas isolées des actions engagées dans le cadre du plan de formation lorsque celles-ci se déroulent sur le temps de travail, ce qui est le cas en règle générale.

b) Une demande progressivement à l’initiative du salarié

Initialement engagé sur proposition du chef d’entreprise qui en garde encore aujourd’hui la maîtrise dans le cadre du plan de formation, l’accès à la formation continue devient progressivement un enjeu d’évolution partagé entre l’employeur et les salariés. La création par les partenaires sociaux du droit individuel à la formation (Dif), dans le cadre de l’accord national interprofessionnel du 5 décembre 2003, marque dans ce domaine un jalon notoire. Une nouvelle étape vient encore d’être franchie, en 2009, dans le cadre de l’adoption de la loi relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie 203 qui crée un droit

à l’information, à l’orientation et à la qualification professionnelles. Elle stipule, dans son article premier, l’objectif de « permettre à chaque personne, indépendamment de son statut, d’acquérir

et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle, ainsi que de progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle ».

Par ailleurs, la loi organise la transférabilité du Dif, ce qui signifie que désormais, un salarié confronté à une rupture professionnelle pourra utiliser les droits acquis dans son emploi précédent et non utilisés, pour compléter sa formation professionnelle et accéder à un nouvel emploi.

Cette mesure s’inscrit dans la volonté partagée par les partenaires sociaux et les pouvoirs publics de sécuriser davantage les parcours professionnels des individus, de les rendre acteurs de leurs propres évolutions et d’utiliser la formation pour faciliter les évolutions individuelles sur le marché du travail.

Dans les entreprises du bâtiment, les demandes à l’initiative du salarié sont pour le moment relativement peu nombreuses et sous-estimées 204 mais elles devraient connaître, comme dans

205) L’organisation politique de la Fédération Française du Bâtiment est reprise en annexe 2. Le Comité exécutif, composé d’une douzaine de membres, se réunit tous les mois, tout comme le Bureau, composé d’une soixantaine de membres et dont la composition est déterminée dans les statuts (annexe 1).

206) Exemple : Commission formation de l’Union française de la charpente, menuiserie, parquets ou Commission formation de la Fédération française des industries électriques (FFIE).

3. Les moyens consacrés par la Fédération du Bâtiment