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Chapitre III. Spécifité de la région minière de Gafsa

2. Variation spatiale du gouvernorat de Gafsa

Le terme générique d’espace se rapporte simplement à l’étendue sur laquelle se déploient des phénomènes à référence géographique. L’espace est découpé en diverses unités spatiales dont le nombre et la forme varient selon le type de spatialisation retenu. L’espace géographique n’est pas l’étendue seulement ; c’est la société, la plate-forme, les réseaux, les espacements et les interrelations entre les lieux qui constituent sa structure.

La région est une entité homogène, individualisée par certains caractères marquants en commun, souvent d’ordre naturel ou culturel, qui la distingue suffisamment des autres régions : relief, climat, ressources, histoire, ethnies, langue, culture, activités, mentalité, (Belhedi A., 2013)…L’entité d'une région en Tunisie n’existe pas dans la fiction tunisienne que si elle devient le gouvernorat dans la plupart des cas. Cette grande confusion était probablement

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intentionnelle entre la région, le gouvernorat et même le niveau local (délégation) et c’est le cas pour notre étude ; entre le BMG, la région minière de Gafsa et le gouvernorat de Gafsa. De ce fait, la notion de multi-échelles doit être adoptée dans l’étude de notre espace géographique conjointement à des niveaux d’observation différents (figure 14). Il s’agit de déduire de la même base de données, d’autres bases de données avec des niveaux de détails plus ou moins importants et comportant moins d’informations à référence spatiale. Nous citons par exemple le passage de l’échelle d’une délégation, à celle passant d’une ville, puis à l’échelle des cités.

La démarche Evolution de la conceptualisation (dans le temps) L’échelle en cartographie

De l’échelle aux niveaux de détails dans la

représentation

Des niveaux de détails aux observations multi-

niveaux de l’échelle à la représentation de la représentation à la modélisation de la modélisation à l’analyse Fonctionnalités SIG concernées

Figure 14 : Principe de cartographie multi-échelle (Source : Bordin P., 2006)

La notion de limite passe toujours par la présence d’un seuil (limen) dans le sens de rupture dans la continuité d’un phénomène qui marque, à la fois, un changement qualitatif et quantitatif (Belhedi A., 2013b). Cette limite pose un problème de représentation cartographique précise Dhieb M., (2012) dans la mesure où elle n’est pas souvent une ligne claire qui s’inscrit dans l’espace. Donc, il nous semble intéressant d’étudier la variation des limites de la région Gafsa puis focaliser les recherches sur le BMG.

2.1. Gafsa : un gouvernorat aux limites fluctuantes

Historiquement, les limites territoriales du gouvernorat de Gafsa ont connu des fluctuations importantes (carte 10). Dans les années 1980, après l'affaire de Gafsa, à la suite d’évènements frontaliers Algéro-Libyenne, l’Etat a créé trois nouveaux gouvernorats dans le Sud : Tozeur, Kébili, et Tataouine qui sont, en fait, des zones frontalières détachées de leurs anciens gouvernorats ; respectivement Gafsa, Gabès et Médenine. Puis, en 1974, est créé Sidi Bouzid, un gouvernorat d’ex-nihilo comme un petit centre de contrôle militaire et de petit

Multi-niveaux Multi-représentations

Multi-échelles

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relais économique attaché aux grands centres de gestion des domaines phosphatier (Gafsa) et portuaire (Sfax et Gabès).

Carte 10: Le gouvernorat de Gafsa : fluctuations des limites administratives (Source : Signoles P., 1985)

2.2. Le Bassin Minier de Gafsa, espace de différenciation

Dans le gouvernorat de Gafsa, trois espaces majeurs peuvent être différenciés ; la partie ouest du gouvernorat comportant le BMG, la partie Est qui est essentiellement agricole et entre les deux espaces, s’intercalent le chef-lieu du gouvernorat qui se dote d’un rôle de fédérateur et de services. Le BMG est sans équivoque un territoire différencié du reste du gouvernorat et même de l’ensemble de la région du sud-ouest. Il a été structuré en rapport étroit avec les ressources physiques, naturelles et sectorielles. Le BMG est un espace à vocation industrielle par excellence, minière et chimique dont la CPG et le GCT sont les principaux monopoles industrialo-économiques dans la région.

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2.3. Le Bassin Minier de Gafsa et la variation de la toponymie

Comme les limites du gouvernorat de Gafsa sont fluctuantes, la toponymie est aussi inconstante. Selon le dictionnaire Larousse, la toponymie (du grec tópos) fait «partie de l'onomastique qui étudie les noms de lieux, leur origine, leurs rapports avec la langue parlée actuellement ou avec des langues disparues», mais aussi les contextes et motivations de leur détermination et leur impact sur les sociétés. En revanche, la toponymie n'est pas une science exacte. Elle n'est pas une étude historique ou géographique mais elle peut servir ces matières. L’étude de Dhieb M., (2009)28

montre que la transcription toponymique des noms de lieux géographiques sur un Atlas ou un autre document cartographique pose problème notamment dans des pays où il n’y a pas de tradition ou de "politique toponymique". Les noms des "villes tunisiennes" portent indéniablement des origines berbères ou romaines ; Gafsa (Capsa, fondée par les Romains au IIe siècle avant J-C.), Sfax (Syphax ou Sfakes Thaphura), Tunis (ex- Tunez) (Tounis), Nabeul (Neapolis), Tabarka (Tbarka ou Thrabaka, comptoir phénicien), Zaghouan (Zaghwène) et Tozeur (Thuzuros ou Tifurus).

Au septième siècle, plusieurs lieux existants ont vu leur nom se transformer pour subir les contraintes de la langue arabe : Capsa devient Gafsa. Ensuite, la colonisation française a créé de nouvelles localités portant des noms français ou a changé certains noms existants notamment en milieu urbain en noms à obédience bien française.

En somme, le tableau 1, transcrit les noms tels que prononcés localement, même si dans certains cas le résultat semble éloigné de l’original. Certains toponymes tunisiens comportent naturellement des articles au début comme El en arabe parlé (Al en arabe littéral) (Dhieb M., 2009) précédent Métlaoui, quelquefois appelé El Métlaoui. C’est une dérivation de l’arabe littéral qui a été la plupart du temps transformée en Le (ou La). Les indications d’orientation accompagnant certains noms comme Nord, Sud, Est et Ouest ont été tout simplement changés par l’équivalent en arabe : exemple Gafsa El Janoubia29

Pour faciliter la tâche au lecteur de ce manuscrit, nous avons employé les noms après leur modification par ce qu’ils sont utilisés dans diverses données municipales et administratives (PAU, INS, CRDA30…) bien qu’il existe parfois une certaine dissemblance.

28http://icaci.org/files/documents/ICC_proceedings/ICC2009/html/nonref/12_6.pdf 29 El Janoubia = du Sud

30 INS : Institut National de la Statistique

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Tableau 1 : Gouvernorat de Gafsa ; les toponymes originaires et leur modification (Source : Dhieb M., (2009), modifié par Salhi B., 2015)

Toponymes originaire Après modification Traduction en arabe

El Métlaoui Métlaoui ٕ٘هتًنا

Er Rdayyef Rdeyef فٚدزنا

Oum El Araïs Moularès سئازؼنا وا

El Mdhilla Mdhilla خهٛظًنا

Gafsa El Janoubia Gafsa Sud خٛثُٕدنا خصفق

El Gsar El Gsar زصقنا

Gafsa Ech Chamalia Gafsa Nord خٛنبًشنا خصفق

Sidi Ïch Sidi Aîch شٛػ ٘ذٛس

Belkhir Belkhir زٛخهث

Es Snad Sened ذُسنا

El Gtar Guettar ربطقنا