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Chapitre V. Exploitation minière et contraintes d’urbanisation dans le BMG

3. Risque d’inondation dans les villes minières

A l’exception de Moularès, les autres villes minières sont soumises au risque d’inondation. Le risque est accentué par la concentration illicite sur les rives des oueds sans respect les zones de servitude.

3.1. Risque d’inondation dans la ville de Métlaoui

Quatre oueds traversent la ville du nord vers le sud (carte 42), dont certains sont bouchés par des constructions ou par les rejets des Laveries (photo 14.1.). De ce fait, la CPG décape périodiquement les couches de phosphate sédimentées (photo 14.2.) afin d’éviter le problème de débordement des oueds lors de période de crues. L’oued Larta, passe au sud- ouest de la Laverie, il est bouché par des constructions au niveau de la RN3 de la Cité Ennassim (photo 14.3.). En période de crues, cet oued sépare l’hôpital régional de Métlaoui du reste de la ville.

Carte 42: Risque d’inondation dans la ville de Métlaoui (Source : PAU, 2009 et CDRA, 2012 et Google Earth, 2016)

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14.1. Rejets des Laveries avant grattage (05-01-2015)

14.2. Rejets des Laveries après grattage (26-01-2015)

14.3. : Rejets des Laveries après inondation (29/03/2015)

Photo 14 : Aménagement Oued Métlaoui (Source : Salhi B., 2015)

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3.2. Risque d’inondation dans la ville de Mdhilla

La ville de Mdhilla est implantée sur un plan incliné qui joint l’anticlinal du Séhib à la plaine de Gafsa. Les roches qui affleurent sont de faible résistance à l’érosion hydrique, et le creusement des oueds créée un paysage de bad-lands (CRDA, 2014). Trois oueds traversent la ville du nord vers le sud (carte 42). Oued Mdhilla traverse l’est de la ville, oued Quous se prolonge entre la Cité centrale et la Cité ouvrière 1, et oued Guibli se prolonge dans le long de Cité Guibli. Le passage de ces oueds dans les zones urbaines nécessite des zones de servitudes de 25 à 30 m sur les deux rives, qui ne sont pas respectées. C’est principalement le sud-est de la ville qui risque d’être inondé en période de crues. Régulièrement les habitats de cette partie de la ville sont soumis au risque des inondations.

Carte 43 : Risque d’inondation dans la ville de Mdhilla (Source : Municipalité de Mdhilla, 2014 et image Landsat 2014)

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3.3. Rdeyef : Stock minier et inondation du 23 Septembre 2009

Le 23 Septembre 2009, de graves inondations ont marqué la ville de Rdeyef., il y a eu 17 morts et 24 blessés ainsi que d’importants dégâts matériels selon la municipalité de Rdeyef. La situation foncière complexe de Rdeyef est l’une des causes principales de l’aggravement de la situation. D’une part, la propriété des terrains revient à la CPG, d’autre part, le faible pouvoir de la municipalité dans la gestion de l’espace urbain aboutit à des constructions sans autorisations à bâtir. Les habitats sont implantés dans et aux alentours du lit d’oued Dekhle, sans aucun respect de la zone de servitude. L’occupation du sol de la ville de Rdeyef constitue en effet un aléa majeur, puisqu’elle est traversée par l’Oued Dekhle ainsi que par ses affluents. Les inondations du 23-09-2009 sont dues à de fortes pluies atteignant 150 à 160 mm, entre 3h et 7h du matin alors que la moyenne annuelle des pluies de la région est de 150 mm/an. Avec un débit d’écoulement48

supérieur à 280 m3/s, la quantité totale d’eau qui avait inondé la ville était de 2.25 millions de m3, emportant avec elle d’énormes quantités de boues, de sédiments et de déchets miniers.

Ainsi, les rejets miniers forment la principale source de dégâts d’inondation. La carte 44 montre que l’accumulation des déchets au niveau de croisement d’Oued Zalles et Oued Eddouaher ont dévié le sens d’écoulement des eaux ruisselées vers Oued Eddouaher au lieu d’Oued Tebedditt, principal oued dans la région. Aussi, le tassement des polluants le long d’Oued Eddouaher constitué de rejets miniers, digues à boues, zones de stériles en amont d’Oued Dekhle) a bloqué en partie le ruissellement des eaux pluviales. Dans ce contexte, l’étude réalisée par le Groupe-conseil Génivar Inc. en (1999) décrit « …l'inondabilité des terrains avoisinants… d’autant plus que la diminution de la capacité de stockage des lits se traduit par la diminution de leur capacité d'amortissement des crues ».

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Landsat (24/08/2009) Carte 44 : Diffusion des rejets miniers dans le réseau hydrographique Moularès-Rdeyef

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Une visite sur terrain réalisée, à pied, le 01-10-2015, permet de voir s’il existe encore des traces de rejets miniers dans le réseau hydrographique Moularès-Rdeyef.

Il est certain qu’il existe des rejets miniers dans les Oueds Tebedditt, Zalles, Eddouaher, et Dekhle. Par sa coloration gris foncé, les déchets miniers de phosphates se répartissent le long des oueds formant une couche de quelque centimètre d’épaisseur. L’épandage continu des eaux boueuses dans les lits principaux forme une strate fissurée, plus ou moins imperméable, avec une granulométrie fine et dont l’épaisseur varie de quelques centimètres à quelques dizaines de centimètres (photos 15.1, 15.2 et 15.3).

Ce qui est étrange, c’est le déversement des stocks de stérile de la CPG directement dans les lits majeurs. La hauteur de ces tas atteint jusqu’à deux mètres. Ce stocks de déchets forment une véritable barrière devant le ruissellement des eaux pluviales dans l’oued (photos 15.4 et 15.5). Des grands tas en amont d’Oued Eddouaher et Oued Dekhle s’étendent sur quelques kilomètres en parallèle avec les deux rives (photos 15.6 et 15.7). La hauteur décroit d’une dizaine de mètres, causant ainsi l’effondrement et l’écoulement de stocks de stériles dans le lit majeur. Mais ce qui est encore plus grave, c’est que ces facteurs accentuant le risque d’inondation.

Photo 15.1. : Oued Dekhle (Sud Rdeyef)

Photos 15.2. et 15.3. : Couches de phosphates sèches

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Photos 15.4. et 15.5. : Tas de stériles placés dans le réseau hydrographiques

Photos 15.6. et 15.7. : Des grands tas d’étendent en parallèle avec les rives de réseau hydrographiques

Photo 15 : Expansion des déchets miniers dans le réseau hydrographique du Moularès- Rdeyef, (Source : Salhi B., 01-10-2015)

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Conclusion

Les villes minières du Gafsa se caractérisent par une dichotomie urbaine : dans chaque ville nous distinguons bien les habitats programmés, réalisés par la CPG et les sociétés immobilières, et les autres habitats anarchiques dont la ségrégation socio-spatiale est frappante. La CPG avait joué un rôle important, mais cette fonction lui a échappé complètement dès les années 1940 et jusqu’à lors. Des problèmes liés à l’urbanisation sont apparus : pollution, dégradation de cadre de vie, risque d’inondation,…

Seule Métlaoui rassemble à une ville, partiellement. Les autres sont simplement de modestes agglomérations pour Moularès et Rdeyef, et très modeste pour Mdhilla. L’aménagement de ces villes doit tenir compte de l’infrastructure minière en tant qu’élément propriétaire du milieu.

La CPG est appelée à organiser l’ouverture des carrières dans les limites sécuritaires par rapport aux groupements résidentiels. Cette Compagnie avec ses éminents ingénieurs du génie civil de haute technicité, d’une part, et les municipalités, avec les représentants de la population au sein du conseil municipal, d’autre part, ont dû faire pacte et étalage de leurs connaissances théoriques et pratiques et d’esprit d’analyse, pour coordonner leurs efforts. L’objectif est de mettre à la disposition des habitants de la ville un plan d’extension viable et vivable, épargnant les zones vulnérables (affaissements, éboulements, inondations…). Dans ce sens, la CPG doit prendre plusieurs dispositions pour obtenir un large soutien de la communauté locale et veiller à ce que les citoyens participent de manière significative aux processus décisionnels relatifs au développement durable des projets miniers.

En outre, la Compagnie peut devenir un support aux activités régionales ; support technologique de ses ingénieurs, de ses techniciens et de ses ateliers. Certains dommages sont inévitables sur les citoyens ainsi que leurs propriétaires surtout que les cités qui entourent l’infrastructure minière, se caractérisent par de fortes densités suite à l’accroissement démographique dans le BMG même avec la migration vers le littoral.

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