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CHAPITRE 1. LES ENGAGEMENTS DE CONSERVATION D'ACTIONS

1.3. PRÉSENTATION DES HYPOTHÈSES TESTÉES

1.3.5. Variables de contrôle

1.3.5.1. La taille de l’entreprise

Une variable dont il est essentiel de contrôler l'effet concerne la taille de l'entreprise. En

effet, elle peut potentiellement influencer certaines variables de notre analyse. Par exemple,

Bhushan (1989) montre que le nombre d'analystes suivant une entreprise est positivement

influencé par sa taille, et ce pour deux raisons. Tout d'abord, les firmes les plus importantes

attirent plus l’attention du marché, ce qui réduit l’asymétrie d’information et entraîne un coût de

production d'information plus faible pour les analystes. Ensuite, les entreprises de grande taille

génèrent plus de transactions, ce qui les rend plus intéressantes pour les analystes. Au total, il

semblerait que la rentabilité de la production d'information par les analystes soit une fonction

croissante de la taille de l'entreprise. Brennan et Hughes (1991) confirment la présence de ce lien

aux États-Unis, de même que Amans-Labégorre (2003) sur un échantillon d'introductions en

bourse intervenues sur la période 1994-2000 sur le marché français. Les mesures relatives à la

structure de l’actionnariat sont aussi susceptibles de dépendre de la taille de l'entreprise, comme le

remarquent Demsetz et Lehn (1985). La concentration du capital devrait être d'autant plus

réduite que la taille est importante. Finalement, la taille et la structure du conseil d'administration

seront aussi influencées par la taille de l'entreprise. Raheja (2005) explique que la taille et la

structure du conseil d'administration vont varier avec la maturité de la firme. Selon cet auteur, la

quantité d'informations disponibles sur l’entreprise et le coût de vérification de ses projets

d'investissement devraient diminuer au fur et à mesure que la firme arrive à maturité, ce qui

entraînerait une augmentation du nombre optimal d'administrateurs externes. À partir d'un

modèle structurel appliqué à un échantillon de 563 entreprises françaises sur la période

1988-1994, Godard (1997) montre que la structure du conseil d'administration s'adapte à la stratégie

suivie par l'entreprise. En particulier, la stratégie de diversification augmente la proportion

optimale d'administrateurs externes au conseil d'administration. Une stratégie de diversification se

traduisant généralement par une augmentation de la taille de la firme, il est possible d’observer

une relation positive entre la taille de la firme et le nombre d’administrateurs externes. De même,

plus la taille et la diversification augmentent, plus la complexité augmente, ce qui devrait entraîner

l'agrandissement du conseil d'administration. La liste des interactions possibles que nous venons

de citer n’est évidemment pas exhaustive et la taille est susceptible d’influencer bien d’autres

variables.

1.3.5.2. Le risque spécifique de l’entreprise

Nous avons aussi inclus une mesure du risque spécifique de l'entreprise, conformément aux

modèles de Courteau (1995) et Brau et al. (2005). En effet, pour un même niveau d'asymétrie

d'information, il est démontré que les entreprises dont le risque spécifique est plus élevé pourront

se signaler avec un engagement de conservation moins long. L'intuition est que pour un même

engagement de conservation, le coût du signal est croissant avec le risque spécifique de la firme.

Toutes choses égales par ailleurs, nous devrions observer une relation négative entre le risque

spécifique et la longueur des engagements de conservation.

1.3.5.3. La période de l’introduction en bourse

Certaines recherches montrent l'existence de cycles à la fois dans le niveau de

sous-évaluation initiale et dans le nombre d'introductions en bourse (Ibbotson et Jaffe [1975], Ritter

[1984] parmi d’autres). Il semblerait que les périodes où la sous-évaluation initiale est

particulièrement importante soient suivies par une forte augmentation du nombre d'introductions

en bourse, qui sera suivie à son tour par une période de faible sous-évaluation initiale. Autrement

dit, un cycle de forte sous-évaluation initiale déclencherait un cycle de forte concentration du

nombre d'introductions en bourse qui à son tour engendrerait un cycle de faible sous-évaluation

initiale (Lowry et Schwert [2002]). On trouve deux explications différentes de ce phénomène

dans la littérature. D'une part, les entreprises chercheraient à profiter d'une période où le marché

surévalue les actions

14

; et d'autre part, il y aurait des cycles où l'information disponible sur

certains secteurs serait plus abondante et permettrait une introduction à un moindre coût. Il

semble donc important d’intégrer dans l’analyse une mesure de l’intensité des introductions.

L’influence de cette variable ne peut être déterminée de manière certaine. En effet, si les périodes

d’introductions intenses sont dues à une surévaluation temporaire, le risque de sélection adverse

pour l’investisseur est plus fort dans ces périodes et en conséquence, des engagements de

conservation plus longs seraient nécessaires pour le convaincre de souscrire. Par contre, si les

périodes d'introductions intenses sont dues à un cycle où l’information est abondante, alors

l'asymétrie d'information devrait s'en trouver réduite, entraînant des engagements de conservation

moins longs toutes choses égales par ailleurs.

1.3.5.4. Le secteur d’activité de l’entreprise

Il est aussi important de tenir compte du secteur d'activité de l'entreprise introduite en

bourse. En effet, certains secteurs sont caractérisés par une asymétrie d'information en moyenne

plus importante. À ce titre, les entreprises des secteurs liés à la haute technologie sont

susceptibles de présenter une asymétrie d'information plus importante. Espenlaub et al. (2001),

14 Il ne faut pas se laisser tromper par le terme sous-évaluation initiale qui peut prêter à confusion. En effet, il est au premier abord surprenant de dire qu’après des périodes de forte sous-évaluation initiale, on observe un nombre important d’introductions car les entreprises veulent profiter d’une surévaluation par le marché. La sous-évaluation initiale n’est autre que la rentabilité du cours de l’action sur le premier jour de cotation et si cette dernière est très forte, cela peut s’interpréter comme un excès de valorisation par le marché et pas forcément comme une sous-évaluation délibérée qui serait le fait des banques introductrices.

Brau et al. (2005) incluent une variable dichotomique prenant la valeur 1 si l'entreprise appartient

au secteur de la haute technologie.

1.3.5.5. Le niveau d’endettement de la firme

L'endettement est aussi susceptible d'avoir un effet sur les engagements de conservation si

ces derniers s’avèrent être utilisés comme substitut ou complément à d’autres mécanismes de

gouvernance. Jensen et Meckling (1976) et Jensen (1986) montrent que le niveau de la dette est

un mécanisme de gouvernement d'entreprise permettant de limiter le comportement

opportuniste des dirigeants. Ces derniers doivent réfréner leurs prélèvements privés pour honorer

le service de la dette, sous peine de voir leur entreprise mise en faillite. Dans la perspective d'une

analyse des engagements de conservation sous l'angle du gouvernement d'entreprise, la prise en

compte de l'endettement s'impose. Plus l'endettement est élevé, moins les dirigeants peuvent

favoriser leurs intérêts au détriment des investisseurs, ce qui devrait donc diminuer la nécessité de

mettre en place un engagement de conservation. La dette a aussi été envisagée comme un signal

de la valeur de l'entreprise par Ross (1977). En augmentant le niveau de la dette, les dirigeants

informent le marché que l'entreprise disposera de liquidités suffisantes dans le futur pour payer

les charges financières. Si les engagements de conservation sont un signal de la valeur de

l'entreprise, alors, là aussi, un niveau de dette élevée devrait être associé à des engagements de

conservation moins longs.

1.3.5.6. Les options de croissance

Finalement, il nous a semblé nécessaire d'inclure dans l'analyse une mesure des options de

croissance. Gaver et Gaver (1993), Skinner (1993), Smith et Watts (1992) affirment que les

options de croissance sont difficiles à observer à cause de l'incertitude liée aux actions des

dirigeants qui affectent leur valeur. Ainsi, les options de croissance augmentent l'asymétrie

d'information entre dirigeants et investisseurs. Hossain, Ahmed et Godfrey (2005) confirment le

lien entre options de croissance et asymétrie d’information sur un échantillon de 245 firmes

étudiées sur la période 1991-1995 en Nouvelle-Zélande. Ils montrent que la divulgation

d'informations par les dirigeants est croissante avec le niveau d'asymétrie d'information. Ces

mêmes auteurs affirment que les options de croissance facilitent le comportement opportuniste

des dirigeants, car elles dépendent de leurs choix largement discrétionnaires en matière

d'investissement. Hutchinson et Gul (2004) montrent que les mécanismes classiques de

gouvernance affectent positivement la valeur de l’entreprise lorsque les options de croissance

sont importantes. Ainsi, du point de vue de la théorie de l’agence comme de celui de la théorie du

signal, les options de croissance sont susceptibles d’avoir une influence sur les engagements de

conservation. Si l'asymétrie d'information est positivement liée aux opportunités de croissance,

alors il devrait en être de même pour les engagements de conservation dans une optique de

signalisation. Ainsi, dans une perspective de gouvernance, nous devrions observer une association

positive entre les engagements de conservation et la présence d’options de croissance.