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Le modèle de comportement de l’interface a été identifié sur la base des évolutions du rumpling mesurées, liées à des cyclages thermiques réalisés à plusieurs températures. Avant d’exploiter ce modèle et d’utiliser ses sorties (contraintes et déformations de l’interface) pour bâtir un modèle d’endommagement interfacial, nous avons cherché à vérifier la concordance des tendances prévues en terme de rumpling avec des observations expérimentales effectuées pour des conditions de vieillissements thermiques autres que celle du cyclage thermique standard avec palier d’une heure.

Dans un premier temps, nous avons comparé des mesures de rumpling aux estimations fournies par le modèle, pour des vieillissements thermiques isothermes. La Figure 6.16 présente cette comparaison (les valeurs expérimentales ayant été déterminées en suivant toujours la même méthodologie) pour les trois températures dont les effets en oxydation cyclique ont déjà été étudiés.

Chapitre 6 : Exploitation du modèle de rumpling

- 145 - Figure 6.16 : Évolution du rumpling en fonction de la température d’oxydation. Données expérimentales

et courbes calculées par le modèle identifié

Nous constatons que le modèle ainsi identifié ne prévoit pas correctement le rumpling généré par des vieillissements thermiques isothermes du système. On observe d’ailleurs que les prévisions sous conditions isotherme ou cyclique sont très semblables, ce qui semble a priori surprenant. Sur ce point, il faut signaler d’une part, comme cela est expliqué dans [Vaunois 2013], que les différences entre le rumpling induit par des oxydations cyclique ou isotherme dépendent sensiblement de la géométrie de l’ondulation, notamment de sa longueur d’onde. Il s’avère que dans notre cas d’étude, où la longueur d’onde a été fixée à 50 µm, ces différences sont en grande partie masquées ; en traitant de longueurs d’onde plus grandes, le modèle prévoit des différences entre des conditions d’oxydation cyclique ou isotherme plus perceptibles. Un autre facteur contribue à la similitude de nos prévisions, pour des conditions d’oxydation différentes ; il s’agit des lois de comportement de la sous-couche et de la barrière thermique (modifiée pour cette dernière lors de l’identification) considérées alors comme plus résistantes en fluage, notamment à basse température, comparativement à celles étudiées par Balint & Hutchinson. On pourrait palier cet effet en considérant une loi de fluage avec une double énergie d’activation selon les gammes de températures considérées.

Nous sommes donc malheureusement contraints de conclure que notre modèle, dans son état d’identification actuel, ne décrit pas de manière satisfaisante le rumpling sous des conditions d’oxydation isotherme. Plusieurs solutions peuvent être envisagées pour corriger ultérieurement ce défaut, qui seront discutées au paragraphe 6.4. Ces solutions n’ont pas pu être explorées par manque de temps dans la présente étude.

Cette réserve étant faite, nous avons néanmoins vérifié que les prévisions du rumpling en conditions cycliques sont en bon accord avec des observations expérimentales issues de la littérature. Nos prévisions peuvent par exemple être comparées avec des observations de

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[Tolpygo 2008]. Nous avons pour cela exploité le modèle sans barrière thermique (3 couches), en traitant d’une ondulation telle que Rq0 = 1 µm et L = 38 µm (données par

l’auteur). Deux types de cyclage sont traités : l’un avec des paliers d’une heure, et l’autre avec des paliers de 10 min (avec des transitoires identiques, de la température de palier à la température ambiante). Nous avons fait le choix de conserver nos propriétés matériaux, bien que l’étude citée porte sur un système avec un substrat en CMSX-4, susceptible de modifier les propriétés de la sous-couche en Ni(Pt)Al. La comparaison entre ses données de rumpling et nos résultats de calculs sera donc qualitative, portant non pas sur les valeurs en absolu, mais sur leur évolution.

Nous avons en l’occurrence constaté une bonne adéquation entre les données expérimentales et les valeurs calculées : dans le cas d’un cyclage thermique avec des paliers d’une heure (à 1150°C), l’auteur mesure un rumpling RMS (paramètre Rq) de 3,2 µm après 200 heures de palier cumulées, tandis que notre prévision est de 3,3 µm (Figure 6.17). Pour des cycles avec un palier de 10 min, après également 200 heures de palier cumulées, les mesures donnent un rumpling RMS sensiblement plus grand, d’environ 6,5 µm, alors que notre prévision le porte à 5,1 µm (Figure 6.17).

Figure 6.17 : Comparaison des prévisions de rumpling avec des données de la littérature

Un article antérieur du même auteur [Tolpygo 2004] présente les résultats obtenus sur le même système, toujours sans couche de zircone, mais portant sur des échantillons dont la surface avait été polie initialement. Dans ce cas, il s’est avéré que la longueur d’onde mesurée restait constante au cours de l’oxydation cyclique. Nous avons traité avec notre modèle la géométrie d’ondulation considérée par Tolpygo, telle que : Rq0 = 0,1 µm et L = 41 µm,

soumise à des cycles comportant un maintien d’une heure à 1150°C.

Après 400 h de cyclage thermique, le paramètre Rq mesuré est d’environ 7 µm, alors que le modèle prévoit un Rq de 5 µm. Comme dans la précédente comparaison, la différence peut être attribuée au fait que le système étudié expérimentalement ne correspond pas exactement à celui qui a été modélisé.

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- 147 - Ainsi, le modèle de comportement interfacial, tel que nous l’avons identifié, donne des prévisions de rumpling compatibles avec les observations expérimentales, du moins pour des conditions cycliques d’oxydation.

6.4 - Conclusion

Le modèle de comportement interfacial a été identifié sur des données expérimentales du rumpling généré par un cyclage thermique, obtenues selon une méthode portant sur l’analyse de profils micrographiques. Une grande partie des propriétés matériaux fournies en entrée de ce modèle ont été soit déterminées expérimentalement, soit sélectionnées parmi des données de la littérature. Nous avons pu vérifier que ce modèle de comportement prévoyait des tendances de rumpling cohérentes avec la littérature, dans le cas de sollicitations thermiques cycliques.

Toutefois, les résultats de calcul du rumpling induit par des vieillissements thermiques isothermes ne sont quantitativement pas acceptables. Plusieurs voies peuvent être envisagées pour améliorer ces prévisions :

- La première consisterait à reconsidérer la loi de fluage de la sous-couche pour tendre vers un comportement en fluage moins résistant à haute température. En effet, cette loi a été identifiée sur des essais d’indentation réalisés entre 700 et 800 °C, donc dans une gamme de températures où les mécanismes de fluage diffèrent peut-être de ceux mis en jeu entre 1050 et 1150 °C. L’extrapolation de cette loi à cette gamme de températures, dans laquelle on souhaite étudier les effets de l’oxydation, est sans doute discutable. Mais avec la même réserve, une loi correctement identifiée pour les hautes températures peut ne pas être valable à faible température, en dessous de 700°C par exemple. On peut d’ores et déjà envisager de modifier la loi de fluage de la sous-couche pour cette région « froide », car la résistance au fluage dans le modèle actuel y est si élevée qu’elle bloque complètement l’effet de la transformation martensitique sur le rumpling. Or ceci est en contradiction avec ce qui est évoqué dans la littérature [Balint 2005].

- Par ailleurs, en ne changeant ni la géométrie de l’ondulation, ni la loi de fluage de la barrière thermique, on pourrait identifier à nouveau le modèle en modifiant la limite d’élasticité de l’alumine. Cela pourrait conduire à une différence plus marquée entre les prévisions du rumpling en conditions cycliques ou isothermes.

- Enfin, une loi de durcissement progressif de la sous-couche (lié à son vieillissement qui entraîne la transformation de la phase  en phase ’) pourrait être introduite. Cela pourrait permettre de modifier la forme de l’évolution du rumpling qui n’apparaît pas conforme, dans son ensemble, avec les observations (les courbes calculées présentent une forme en « S » alors que la tendance expérimentale apparaît plus linéaire).

A priori toutes ces modifications nécessiteraient d’effectuer des réajustements sur certaines

composantes du modèle. Nous avons décidé d’en rester à cette première version. Malgré ces imperfections actuelles, on peut souligner le fait que l’exploitation de ce modèle de prévision du rumpling telle que nous l’avons réalisée, en nous appuyant sur une large base expérimentale n’avait pas été, à notre connaissance, entrepris avant. Nous considérons pour notre part que la qualité (même imparfaite) des résultats obtenus avec cette première identification nous assure du potentiel du modèle, et nous permet dès à présent d’exploiter ses capacités, en utilisant certains de ses résultats pour bâtir le modèle d’endommagement interfacial, travaux qui font l’objet du prochain chapitre.

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PARTIE IV : PREVISION DE LA DUREE DE VIE PAR UNE