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II. REVUE DE LITTÉRATURE

1. Streptococcus suis

1.8. Approches thérapeutiques et prophylactiques

1.8.2. Vaccination

Comme il n’existe présentement aucun vaccin contre S. suis commercial disponible pour usage en médecine humaine ou vétérinaire, la prévention de la transmission aux humains dépend d’abord et avant tout du contrôle de la maladie chez le porc (8). Des mesures de santé publique accompagnées de campagnes de sensibilisation, concernant notamment les mesures

d’hygiène ou les dangers de certains plats traditionnels (comme le Tiet Canh au Vietnam, mets à base de sang cru de porc), permettront de réduire le nombre d’infections humaines (8).

Afin de prévenir le développement de maladies causées par S. suis chez les animaux, la vaccination est la mesure la plus recommandée. Toutefois, il existe très peu d’information concernant son efficacité et peu de fermes au Canada utilisent un vaccin (133). De plus, le plus grand problème auquel font face les études de vaccination est la faible immunogénicité de S. suis (133). Entre autre, la CPS, faiblement immunogène, masque les composants sous- capsulaires qui eux le sont (134, 135). De plus, S. suis a développé plusieurs mécanismes pour déjouer les différentes étapes de la réponse adaptative. En effet, il a récemment été démontré que S. suis, en partie par l’entremise de sa CPS, interfère dans la présentation antigénique par les DCs, que ce soit en retardant/compromettant l’expression du complexe majeur d’histocompatibilité de classe II (CMH-II) et/ou en interférant dans la production d’interleukine (IL)-12p70, impliquée dans la différenciation des lymphocytes T CD4+ (136).

Ceci a pour conséquence une activation sous-optimale des lymphocytes T, des lymphocytes B et de la réponse adaptative globalement (133, 135, 137). Néanmoins, différents types de vaccins expérimentaux ont été testés au cours des dernières années (133).

1.8.2.1. Bactérines

Les bactérines sont généralement le premier choix et sont présentement les seuls vaccins utilisés sur le terrain (133). Elles sont constituées de la bactérie entière inactivée, soit par traitement à la chaleur (rare) ou au formaldéhyde (très courant) (133). Une alternative à la possible altération des épitopes protecteurs lors de l’inactivation au formaldéhyde serait l’inactivation par traitement avec un antibiotique (138). Néanmoins, l’efficacité des bactérines demeure controversée, notamment par le faible nombre d’études sur le terrain qui ont été rapportées, mais également par les erreurs au niveau de la conception de ces études qui ne permettent pas d’évaluer de manière appropriée la protection (3, 133). Une utilisation populaire des bactérines est dans la création de vaccins autogènes qui sont préparés à partir d’une souche isolée au sein d’un troupeau donné pour être administré exclusivement au troupeau d’origine (133).

1.8.2.2. Vaccins sous-unitaires protéiques

Outre les bactérines, l’approche vaccinale étudiée est l’utilisation de vaccins sous- unitaires de la bactérie, en particulier composés de protéines purifiées. Ceux-ci sont cependant encore tous au stade expérimental. Dans ce type de vaccin, l’antigène choisi doit idéalement être présent chez plusieurs souches et/ou sérotypes de S. suis afin de conférer une protection « universelle » contre le pathogène (133). Bien qu’un grand nombre de protéines ont été étudiées, ces vaccins ne sont pas encore commercialement disponibles (133).

Parmi ces protéines candidates, nous retrouvons les trois principaux marqueurs de virulence de S. suis, soit la SLY, l’EF et la MRP. Ces trois protéines ont déjà été démontrées comme étant hautement immunogènes dans plusieurs études employant divers modèles animaux et protocoles d’immunisation (133). En plus du sérotype 2, la protéine MRP a également été détectée chez des souches pour les sérotypes 1, 1/2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 12, 14, 15, 16, 18, 21, 22, 26 and 28 (133). De plus, des souches produisant l’EF ont été identifiées chez les sérotypes 1, 2, 1/2, 14 et 15 (133). Également, la SLY est présente dans la majorité des souches virulentes des sérotypes 2 et 9 en Europe, et a également été détectée chez les sérotypes 1, 1/2, 3, 4, 5, 7, 8, 10, 12, 14, 15, 18, 19, 23 et 30 (133). Vu la grande distribution parmi les sérotypes S. suis de MRP et SLY, et la distribution plus limitée d’EF, il a été suggéré que ces protéines peuvent servir d’antigènes avec un large spectre de protection. Plusieurs études réalisées avec ces protéines ont produit des résultats contradictoires, avec une influence importante du choix de l’adjuvant et un manque d’association entre protection et la présence d’anticorps spécifiques (133). Ainsi, la production de hauts titres d’anticorps contre MRP, EF et/ou SLY ne garantit pas la protection, ce qui limite leur application comme vaccins sous- unitaires.

Esgleas et al. (139) ont identifié en 2008 une nouvelle protéine de surface de 52 kDa liant la fibronectine comme une énolase exprimée par tous les sérotypes de S. suis. En plus d’être une protéine hautement conservée, la détection d’anticorps anti-énolase dans des sérums

de porcs convalescents font de cette protéine un excellent candidat pour un vaccin universel contre les infections à S. suis (133). Malheureusement, une étude chez la souris (avec Quil-A® comme adjuvant) n’a pas mené à la protection, malgré une forte réponse IgG, de même qu’une immunisation passive avec un sérum hyperimmun de lapin anti-énolase n’a pas conféré de protection (140). D’autres études employant l’adjuvant complet de Freund (FCA) ont permis de démontrer la protection conférée par l’énolase chez la souris (141, 142). Ainsi, malgré son grand potentiel comme antigène universel, des études additionnelles avec l’énolase en évaluant différents adjuvants et la protection chez le porc sont requises.

Li et al. (143) ont identifié en 2006 une protéine de 110 kDa qu’ils ont nommé « surface antigen one » (Sao) comme une protéine membranaire de surface et réagissant avec des sérums de porcs convalescents. Sao a également été détectée parmi les sérotypes 1, 2, 1/2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 17, 18, 19, 21, 23, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31 et 33. Lors d’une immunisation réalisée chez la souris (avec Emulsigen-Plus® comme adjuvant), Sao a été démontrée comme étant hautement immunogène, mais cependant cette réponse n’était pas protectrice. Lors d’une seconde étude réalisée chez la souris et chez le porc, avec le Quil-A® comme adjuvant cette fois-ci, l’immunisation de Sao a conféré une protection (144). Des résultats similaires ont également été obtenus par d’autres, en plus de démontrer une protection croisée contre des sérotypes autres que le 2 (141, 145-147). Contrairement aux protéines mentionnées précédemment, Sao n’est pas un facteur de virulence critique, ce qui illustre le fait qu’antigènes protecteurs et facteurs de virulence ne sont pas nécessairement synonymes (148).

1.8.2.3. Vaccins sous-unitaires à base de CPS

Un vaccin basé sur la CPS de S. suis offre de nombreux avantages : d’abord, la CPS étant la couche la plus externe de l’enveloppe bactérienne, les anticorps la ciblant sont connus pour être hautement opsonisants et protecteurs, tel que déjà démontré pour plusieurs pathogènes encapsulés d’importance en médecine humaine, tels que S. pneumoniae, GBS, Neisseria meningitidis et Haemophilus influenzae (149-151). De plus, les anticorps dirigés

contre la CPS offrent une protection pan-sérotype, car toutes les souches encapsulées d’un même sérotype expriment la même CPS, indépendamment de la variation génotypique et phénotypique parmi ces souches, ce qui est particulièrement vrai dans le cas du sérotype 2 de S. suis (133). Au commencement de ce projet de doctorat, aucun vaccin de ce genre n’a encore été rapporté pour S. suis. Cependant, compte tenu du fait que les polysaccharides sont reconnus comme étant très pauvrement immunogènes (voir plus loin), le développement d’un vaccin de ce type comporte des défis de taille.

2. La capsule polysaccharidique (structure, locus capsulaires et