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II. Ignifugation des polymères

II.3. Ignifugation du PBT

II.3.2. Utilisation des composés phosphorés

Les recherches les plus récentes sur l’ignifugation du polybutylène téréphtalate sont principalement basées sur l’incorporation de composés phosphorés tels que le DOPO (9 ,10-dihydro-9-oxa-10-phosphaphénantrène-10-oxyde) et ses dérivés, l’aluminium diéthylphosphinate (AlPi-Et) ou encore hypophosphite d’aluminium (AHP), comme le présente le Tableau I- 6.

Tableau I- 6 : Principaux retardateurs de flamme phosphorés utilisés dans la littérature pour l’ignifugation du PBT.

Références [88] [89] [39, 88, 90-92] [46, 87, 93]

Type d’ignifugeant

AHP

De manière générale, les composés phosphorés provoquent une diminution de la température de début de dégradation du PBT, ainsi qu’une augmentation du taux de char formé en ATG. En effet, ces composés se dégradent à des températures plus faibles que le polymère et catalyse sa dégradation, ce qui permet aux produits libérés par les ignifugeants phosphorés (notamment des acides), de réagir avec les produits de décomposition thermique du PBT et ainsi former un char. Ainsi, avec l’ajout d’AlPi-Et [88], la température de début de dégradation (pour 2% de perte de masse), subit une diminution d’une dizaine de degrés, indépendamment du taux d’ignifugeant introduit (6,5%m ou 20%m), alors qu’avec l’introduction de 15%m ou 20%m d’AHP [46], le Tonset (pour une perte de masse de 3%) est réduit de 20°C et 27°C respectivement.

En ce qui concerne l’inflammabilité du PBT contenant de tels composés (Tableau I- 6), le classement V-0 semble difficile à obtenir. En effet, seuls les mélanges PBT contenant 20%m d’AlPi-ET ou 20%m de DOPO-MAH permettent d’atteindre un tel résultat, avec un LOI très élevé de 45,4%v dans le premier cas, et de 25,7%v dans le second [88, 89]. Pour tous les autres composés phosphorés présentés dans le Tableau I- 6, il semble nécessaire de les associer à d’autres composés (comme des charges ou des composés azotés).

En effet, tout comme dans le cas du polypropylène, la synergie entre les composés phosphorés et les composés azotés, tels que des sels de mélamine [44, 46], semble être une solution efficace pour améliorer le comportement au feu du PBT. Les retardateurs de

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flamme phosphorés peuvent combinés entre eux [50, 93] ou également être utilisés avec des charges afin d’améliorer la cohésion du char [39, 87, 90].

Yang et al. ont par exemple étudié les améliorations que pouvait engendrer l’ajout de dérivés de mélamine ou d’argile dans des mélanges PBT/AHP ou PBT/AHP/fibres de verre respectivement [46, 87]. Pour cela, ils ont effectué les tests d’inflammabilité ainsi que des mesures au microcalorimètre de combustion sur différentes formulations. Leur résultats sont résumés dans le Tableau I- 7.

Tableau I- 7 : Comportement au feu des formulations étudiées par Yang et al. [46, 87].

Composition des formulations (%m)

PBT AHP polyphosphate Mélamine

(MMP) Mélamine cyanurate (MC) Fibres de verre modifiées MMT PBT 100 PBT/AHP15 85 15 PBT/AHP20 80 20 PBT/AHP15/MPP5 80 15 5 PBT/AHP15/MC5 80 15 5 GRPBT-AHP15 55 15 30 GRPBT-AHP20 50 20 30 n-GRPBT-AHP15 50 15 30 5

Comportement au feu des formulations

LOI (%v ±0,5) UL-94 pHRR (W/g) a THR (kJ/g)a Résidu à 700°C (%m)b PBT 20 - 485 18,7 2,9 PBT/AHP15 26,5 V-2 476 16,1 19 PBT/AHP20 28 V-2 417 14,8 24,1 PBT/AHP15/MPP5 29 V-0 344 14,1 19 PBT/AHP15/MC5 30,5 V-0 320 13,9 18,7 GRPBT-AHP15 28 V-1 204 9,3 46,9 GRPBT-AHP20 29 V-0 189 8,7 50,5 n-GRPBT-AHP15 29 V-0 164 8,5 53,1

a : mesuré au microcalorimètre de combustion et b : mesuré en ATG sous azote

où GR = « Glass reinforced » et n = « nanoclays ».

Pour la première série de tests [46], les résultats obtenus par les auteurs montrent qu’avec 20%m d’additifs, l’association de l’AHP et des dérivés de mélamine améliore le comportement au feu du PBT. En effet, la substitution de 5%m d’AHP par 5%m de MPP et MC, permet à la fois d’augmenter le LOI et d’atteindre un meilleur classement à l’UL-94. Les auteurs expliquent que l’AHP et les dérivés de mélamine vont agir en synergie, à la manière d’un système intumescent. Le premier composé va plutôt agir en phase condensée, favorisant la formation du char, comme le montre le Tableau I- 7, alors que les composés azotés permettent la dilution de la phase gazeuse.

En revanche, pour les formulations contenant les fibres de verre [87], l’ajout de 50%m d’additifs n’apporte rien de plus sur l’inflammabilité du PBT par rapport aux formulations

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contenant les dérivés de mélamines. En effet, la présence de fibres de verre permette également de diminuer les pHRR et THR (mesurés au PCFC) par rapport aux matériaux PBT/AHP15 et PBT/AHP20. Si l’on compare les formulations PBT/AHP15 et GRPBT/AHP15, le pHRR est diminué de 57% et le THR de 42% avec la présence des 30%m de fibres de verre. La diminution du THR suggère que la présence de fibres de verre favorise la formation d’un char. Par ailleurs, avec l’ajout de 5%m d’argiles (n-GRPBT/AHP15), l’amélioration du comportement au feu du GRPBT/AHP15 est visible au microcalorimètre de combustion avec une diminution du pHRR et du THR de plus de 20% et 8% respectivement. En outre, le classement UL-94 passe de V-1 pour GRPBT/AHP15 à V-0 avec l’ajout d’argiles, et le taux de résidus augmente de 6,1%m. (ce qui correspond à 1%m près à la quantité d’argiles ajoutée). Yang et al. expliquent que l’AHP favorise la création du char autour des fibres de verre, diminuant ainsi les transferts de masse et la concentration en gaz combustibles libérés. Lorsque 5%m d’AHP sont remplacés par 5%m d’argiles, la diminution du pHRR et l’augmentation du taux de résidu sont plus importantes. Les auteurs proposent alors un mécanisme d’amélioration du comportement au feu pour le système n-GRPBT-AHP15, dans lequel ils expliquent que, non seulement l’exfoliation des charges permet une amélioration de l’effet barrière, mais elle favorise aussi l’action de l’AHP en phase condensée. En effet, il semble que les produits de décomposition du composé phosphoré puissent être contenus dans les feuillets de l’argile, leur permettant ainsi de mieux réagir avec les produits de décomposition du PBT.

Tous ces exemples montrent que différentes stratégies peuvent être envisagées afin d’améliorer le comportement au feu du polybutylène téréphtalate. La plupart des études montrent cependant, qu’il faut un minimum de 20%m pour que l’ignifugation soit efficace aussi bien sur l’inflammabilité, que sur la diminution du débit calorifique. Seules les formulations proposées par Gallo et al. [39] à base d’AlPi et d’oxyde de métallique permettent d’améliorer le comportement au feu du PBT à faible taux de charges (<11%m). Par exemple, le mélange PBT/AlPi/TiO2, contenant 8%m d’AlPi et 2%m de TiO2 (de D50 égal à 21 nm), permet d’atteindre le classement V-0 et un LOI de 28%v. En outre, les résultats obtenus au cône calorimètre à 50kW/m² montrent une diminution du pHRR d’environ 17%, ce qui reste néanmoins assez faible par rapport à des formulations contenant de plus forts taux d’additifs (par exemple avec 20%m d’un mélange AlPi/RXP, où RXP est le résorcinol-bis(di-2,6-xylyl phosphate) et 30% de fibres de verre, le pHRR au cône diminue d’environ 76% [90]). Dans la formulation PBT/AlPi/TiO2, l’AlPi va agir en phase gazeuse par inhibition de la flamme et l’oxyde métallique aura une action en phase condensée via le mécanisme décrit au II.3.1 (à savoir une réaction acido-basique entre Ti4+ et les fonctions carbonyles, amenant à la formation d’anhydrides et d’espèces polyaromatiques). Notons qu’il y a ici un

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découplage total entre les résultats au cône calorimètre et le classement UL-94, puisque la formulation PBT/AlPi/TiO2 est classé V-0 avec un pHRR élevé (supérieur à 1000 kW/m²). Finalement, sur le choix des systèmes pour l’ignifugation du PBT, Köppl et al. [90] concluent en disant : « Un compromis doit donc être effectué entre inflammabilité, processabilité et propriétés mécanique globales, selon l’application visée. ». Ce qui peut bien entendu être élargi à tous les polymères.

Pour conclure ce paragraphe, nous avons vu que contrairement au PP, l’ajout de charges dans le PBT ne permet pas d’améliorer sa stabilité thermique en ATG. En ce qui concerne les tests au feu, malgré le fait que le PBT soit un polymère qui charbonne, la plupart des études recensées proposent, tout comme dans le cas du polypropylène, d’ignifuger ce polyester à partir de systèmes contenant 20%m d’additifs, agissant souvent en synergie (un composé favorisant le charbonnement, et un composé agissant plutôt en phase gazeuse). De tels taux d’additifs peuvent être contraignants selon les propriétés mécaniques potentiellement visées pour des applications industrielles. Dans notre étude, seuls les travaux réalisés par Gallo et al. suggèrent qu’il est possible d’améliorer les propriétés au feu du PBT (notamment le LOI et le classement UL-94) en incorporant moins de 10%m d’un mélange AlPi/TiO2. On peut donc se demander s’il existe d’autres techniques pouvant permettre d’ignifuger les polymères à faibles taux de charges.