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5. Le développement du droit uniforme, cadre général du déve-loppement du droit de la vente internationale, est chaotique de par la diversité des méthodes d'harmonisation choisies: unification matériel-le ou conflictuelmatériel-le, unification globamatériel-le ou limitée aux situations inter-nationales, unification absolue ou relative.

matérielle ou conflictuelle. La Convention de Vienne procède d'une unification des règles matérielles de la vente. Elle tend à la suppression des conflits de lois par l'adoption d'une loi unique. Plus modeste dans son objectif est l'unification interna-tionale des règles de conflit, qui tend à apporter une solution unique à la détermination de la loi applicable. Est ainsi en vigueur en Suisse la Convention de La Haye de 1955 sur la loi applicable aux ventes internationales d'objets mobiliers corpo-rels19. Pour le seul domaine de la vente internationale, ces deux méthodes d'harmonisation internationale du droit coexistent en Suisse, et doivent donc être respectivement délimitées.

globale ou limitée. L'unification du droit à laquelle procède la Convention de Vienne est limitée aux contrats internationaux, à l'exclusion des contrats internes20. L'adoption de la

Conven-18 LOOKOFSKY, p. 404.

19 RS 0.221.211.4

20 Sur 1 'impossibilité de parvenir à une unification globale du droit de la vente, cf.

HoNNOLD, p. 57' n° 13; BoNELL in: BrANcAIBONELL, Introduction, n°2.1' qui prend

tion de Vienne implique donc une scission du régime juridique applicable à la vente dans chaque Etat contractant, le régime des contrats internes côtoyant le régime des contrats internatio-naux. Dans d'autres domaines, l'effort d'unification est plus global en ce qu'il tend à la suppression de la pertinence du critère d'extranéité, le régime juridique adopté internationale-ment se substituant aux régimes internes des Etats contrac-tants21. Une telle démarche gagne en simplicité dans les rap-ports entre droit uniforme et droit interne, mais perd en spéci-ficité dans la résolution des problèmes inhérents à l'internatio-nalité.

absolue ou relative. L'unification du droit est absolue lorsque le régime juridique qu'elle introduit dans les législations des Etats contractants s'impose aux juges de ces Etats indépen-damment de tout rattachement de 1' état de fait à un Etat contractant. Telle est la philosophie des Conventions de La Haye de 1964 portant loi uniforme sur la vente d'objets mobi-liers corporels et sur la formation des contrats de vente interna-tionale, ancêtres de la Convention de Vienne, non ratifiées par la Suisse, qui rejettent expressément les règles de droit interna-tional privé22, et qui se déclarent par ailleurs applicables aux contrats de ventes «entre des parties ayant leurs établisse-ments sur le territoire d'Etats dif.férents»23, sans exiger qu'il s'agisse d'Etats contractants. Cet impérialisme de la loi uni for-la défense de for-la Convention contre les critiques que cet aspect limité de l'unification du droit de la vente internationale a suscité.

Voir également l'intéressante perspective politique ouverte par le conseiller fédéral A. KOLLER in: Bulletin officiel du Conseil des Etats 1989, p. 231: «Hier tun wir einen Schnitt zur Rechtsvereinheitlichung, wir sind freilich noch lange nicht dort, wo ( ... ) wir ja auch im internen Bereich ein internationaler Abkom-men zum Landesrecht gemacht ha ben. Das ist hier eindeutig noch nicht der Fall, wtire aber vielleicht das Femziel».

21 Tel est le cas par exemple de la Convention de Genève portant loi uniforme sur les lettres de change et billets à ordre du 7 juin 1930 (RS 0.221.554.1), ou de la Convention de Genève portant loi uniforme sur les chèques du 19 mars 193 2 (RS 0.221.555.1).

22 Art. 2 EKG: «les règles de droit international privé sont exclues pour l'applica-tion de la présente loi, sauf dans les cas où celle-ci en dispose autrement».

23 Art. 1 EKG; art. 1 EAG.

me, imprégné de l'idée optimiste selon laquelle «la loi unifor-me étant la unifor-meilleure avait une vocation universelle»2\ est à la fois effrayant pour les Etats soucieux de réciprocité25 et peu efficace dans sa prétention à exclure les règles de droit interna-tional privé26

L'unification du droit apportée par la Convention de Vienne est au contraire relative, en ce qu'elle n'a vocation à s'appliquer qu'aux contrats conclus entre des parties établies dans des Etats différents contractants (art. 1 al. 1 let. a CV), ou lorsque les règles de droit international privé désignent le droit d'un Etat contractant (art. 1 al. 1 let. b CV). Des trois types de rapports qui peuvent traditionnellement s'instituer entre le droit unifor-me et les règles de conflit, soit les rapports de rejet, d'indiffé-rence ou de soumission27, les Conventions de La Haye de 1964 optaient pour le premier (rejet exprès des règles de conflit), alors que la Convention de Vienne conjugue les deux seconds (indifférence par rapport aux règles de conflit dans le cas de 1' article 1 alinéa 1 lettre a CV; soumission aux règles de conflit dans le cas de l'article 1 alinéa 1 lettre b CV). Une telle solution a le mérite du respect de la réciprocité internationale. Elle a pour conséquence négative que les juges d'un Etat contractant peuvent être amenés à appliquer à un contrat de vente interna-tionale au sens de la Convention de Vienne un autre droit que le droit uniforme, tant que celui-ci n'a pas été universellement adopté.

24 BELLET, Pierre, Travaux du comité français de droit international privé, 1964-1966, p. 103, cité par PELICHET, p. 30. Cette prétention à l'universalité a notamment pour conséquence que le juge d'un Etat contractant doit appliquer systématiquement le droit uniforme, même s'il est saisi d'un contrat conclu entre des parties établies dans deux Etats non contractants, à l'encontre même de l'attente des parties auxquelles Je droit uniforme est parfaitement étranger.

25 Des possibilités dè réserves ont pour cette raison été aménagées aux art. III, IV et V EKG, et III, IV EAG, Voir à ce sujet PELICHET, p. 30, 31; MERTENS/

REHBINDER, ad art. 1/2 EKG, n°7 à 13.

26 MERTENS/ REHBINDER, ad art. 1/2 EKG, n°5 et 6.

27 PELICHET, p. 28.