• Aucun résultat trouvé

a. Réserves prévues par le droit uniforme

81. La Suisse a ratifié la Convention de Vienne sans émettre de réserve. Pour autant, les réserves émises par les Etats contractants étrangers ne sont pas sans effet sur l'application du droit conventionnel en Suisse. Cet effet, loin d'être homogène, dépend de la nature de la réserve étrangère.

Cinq types de réserve sont envisageables, aucune autre réserve n'étant admise que celles qui sont expressément autorisées par la Convention300 (art. 98 CV):

une réserve au sens de l'article 92 concernant la Il ème ou la IIIème partie de la Convention;

une réserve au sens de l'article 93 CV limitant l'entrée en vigueur de la Convention à certaines entités au sein d'un Etat fédéral;

une réserve au sens de l'article 94 CV permettant aux Etats au bénéfice d'une unification ou d'un rapprochement légal régio-nal en matière de vente mobilière de préserver ce régime juridique au détriment du droit uniforme;

une réserve au sens de l'article 95 CV concernant l'article l alinéa 1 let. b CV;

une réserve au sens de l'article 96 CV concernant la forme des actes juridiques liés au contrat de vente.

82. Certaines réserves ne concernent l'application de la Convention en Suisse que dans la mesure de la détermination du concept d'Etat contractant au sens de l'article 1er CV. Ainsi l'article 93 CV permet-il aux Etats fédéraux au sein desquels le droit des contrats n'est pas unifié de déclarer que la Convention nes' applique qu'à certaines de ses

300 Outre ces réserves, des déclarations peuvent être émises, comme la déclaration allemande concernant 1' interprétation par 1 'Allemagne d'une réserve au sens de l'art. 95 CV. Cf. HERBERICzERWENKA, ad art. 98, n° 2.

unités territoriales. L'application de la Convention au sens de 1' article 1 alinéa 1lettre a ou b CV dépend donc de 1' établissement de 1' une des parties au contrat dans cette unité territoriale.

Alors que l'article 93 CV prévoit l'hypothèse d'une pluralité de régimes juridiques au sein d'un même Etat, l'article 94 CV prévoit au contraire l'hypothèse d'une identité de régimes juridiques entre des Etats contractants (art. 94 al. 1 CV) ou entre un Etat contractant et des Etats tiers (art. 94 al. 2 CV). Dans un tel cas, cette coopération légale n'est pas compromise par la Convention de Vienne qui ne s'applique pas lorsque les parties au contrat sont établies dans des Etats partici-pant à ce régime juridique commun. Un juge suisse saisi d'un litige dont les deux parties sont établies dans des Etats bénéficiant de ce régime juridique voisin ou identique devra 1' appliquer, à l'exclusion du droit uniforme301.

83. D'autres réserves ont au contraire pour effet d'amputer le texte conventionnel de certaines de ses dispositions, et donc d'en altérer le contenu. Ainsi une réserve au sens de l'article 95 CV ampute-t-elle la Convention de l'article 1 alinéa 1 lettre b CV, une réserve au sens de l'article 92 CV affecte-t-elle une partie entière de la Convention, une réserve au sens de l'article 96 CV exclut-elle de la Convention toute disposition de l'article 11, de l'article 29 ou de la deuxième partie de la Convention autorisant une autre forme que la forme écrite pour les actes juridiques liés au contrat de vente. Ces réserves ne concernent plus la seule qualité d'Etat contractant des Etats réservataires, mais bien la substance même du droit uniforme. Leurs effets sur l' applica-tion de ce droit uniforme dans un Etat contractant non réservataire comme la Suisse mérite donc un examen plus approfondi.

84. De façon générale, la question de 1' effet d'une réserve pour un Etat non réservataire s'inscrit dans la problématique plus générale de l'effet réciproque des réserves en droit international public. L'article 21 alinéa 1lettre b de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (ci après CVDT) prône cette réciprocité: «Une réserve établie à 1 'égard d'une autre partie ( .. )modifie les dispositions (du traité) dans la mesure (prévue par cette réserve) pour cette autre

301 HEUZE, n° 117; HERBER in: VON CAEMMERER/SCHLECHTRIEM, ad art. 94 n° 9; voir cependant CZERWENKA, p. 140; HERBER/CzERWENKA, ad art. 94 n° 8.

partie dans ses relations avec l'Etat auteur de la réserve»302Lors des travaux de l'Institut de droit international en la matière, cette règle a cependant été considérée comme sommaire, et peu adéquate pour les traités intéressant le droit privé, en particulier les traités portant uniformisation internationale du droit privé matérieP03La règle en la matière est plutôt celle de la non réciprocité304.

D'ailleurs 1' article 21 CVDT ne prévoit d'effet réciproque que

«dans la mesure prévue par (la) réserve». C'est donc essentiellement au texte même de la réserve qu'il faut se rapporter, l'effet des réserves étant chaque fois expressément spécifié par le texte conventionnel:

Un Etat réservataire au sens de l'article 95 CV n'est <<pas lié par l'article 1 alinéa 1 lettre b CV»305.

Un Etat réservataire au sens de l'article 92 CV n'est pas un

<<Etat contractant» pour la partie de la Convention concernée par la réserve,

Une réserve au sens de 1' article 96 CV implique que les règles uniformes affectées par cette réserve «nes 'appliquent pas».

302 Sur l'effet réciproque des réserves en général, cf. HoRN Franck, Reservation and interpretative Declarations to Multilateral Treaties, TMC Asser Instituut, North Holland 1988.

303 Cf. Annuaire de 1 'Institut de droit International 1982 vol. 59-II (Session de Dijon), Le champ d'application des règles de conflit ou de droit matériel uniforme prévues par des traités (rapporteur: A. E. VON OvERBECK), p. 15 2: «Pout le rapporteur, la réglementation de la Convention de Vienne (sur le droit des traités) est des plus sommaires et, comme le confirment plusieurs auteurs, convient mieux aux traités de nature politique qu'à ceux intéressant le droit international privé et, surtout, portant uniformisation du droit matériel».

304 Annuaire de l'institut de droit Internationa11982 vol. 59-II (Session de Dijon), p. 172, au sujet précisément d'une réserve au sens de l'art. 95 CV.

305 Cette réserve est une parfaite illustration de l'inadéquation de l'art. 21 CVDT pour résoudre les problèmes posés par les réserves du droit uniforme: selon 1' art.

95 CV, un juge américain (Etat réservataire) n'appliquera pas la Convention à un contrat entre un vendeur établi aux Etats-Unis et un acheteur établi en Belgique (Etat non contractant). Il appliquera par contre la Convention à un contrat entre un vendeur établi aux Etats-Unis et un acheteur établi en Suisse (Etat contractant) en vertu de l'art. 1 al. Il et. a CV. Peut-on dès lors parler d'une réserve américaine «à l'égard» de la Suisse au sens de l'art. 21 al. 1 CVDT?

b. Prise en compte par le juge suisse d'une réserve au sens de l'article 95 CV

85. Une difficulté apparaît lorsque l'une des parties est établie dans un Etat réservataire au sens de l'article 95 CV et que les règles de conflit du for désignent le droit de cet Etat. L'article 95 CV permet en effet aux Etats contractants de se déclarer non liés par l'article 1 alinéa 1 lettre b CV. Pour le juge de cet Etat, l'effet de cette réserve est clair:

il ne devra appliquer les règles de la Convention que lorsque les parties au contrat sont établies dans deux Etats contractants306. La question s'est cependant posée en doctrine de l'impact d'une telle réserve sur l'application de la Convention par le juge d'un Etat tiers, lorsque le droit de l'Etat réservataire est applicable selon le droit international privé du for307.

86. Si les parties sont établies dans deux Etats contractants (réser-vataires au sens de l'article 95 CV ou pas), la Convention est applicable en vertu de l'article 1 alinéa 1 lettre a CV, et la question d'une éventuelle réserve au sens de l'article 95 CV ne se pose pas. Un juge suisse devant se prononcer sur un contrat entre deux parties établies l'une en Suisse et l'autre aux Etats-Unis appliquera les règles conven-tionnelles en application de l'article l alinéa 1 lettre a CV, applicable tant en Suisse qu'aux Etats-Unis. La réserve américaine concernant l'article 1 alinéa 1 lettre b CV n'a donc aucune conséquence308

306 La situation est cependant moins claire pour le juge d'un Etat réservataire si ses règles de conflit désignent le droit d'un Etat contractant non réservataire. Voir à ce sujet AUDIT, p. 24; PLANTARD, p. 320; SIEHR, pp. 587, 605; WINSHIP, p. 1-31 let.c; VEKAS, p. 345 let. c; PELICHET, pp. 41, 44; HERBER in: VON CAEMMERERf SCHLECHTRIEM ad art. 9 5 n° 4; Ev ANS in: BIANcAfBoNELL, ad art. 9 5 n° 3; HoNNOLD, pp. 90 ss; PÜNDER, p. 871: Le juge d'un Etat réservataire qui doit appliquer le droit d'un Etat étranger en vertu de ses règles de droit international privé doit appliquer les règles de ce droit étranger applicables à la cause (cf. art. 13 LDIP), et donc le droit uniforme s'il est applicable à la cause selon ce droit étranger.

307 Notamment: SroFFEL, in: SJZ, pp. 169, 173; SIEHR, p. 602; VEKAs, p. 345;

WINsHIP, p. 1-27; PELICHET, p. 40; VoLKEN, p. 95; HERBER in: VON CAEMMERERI ScHLECHTRIEM, ad art. 95 CV, n° 4, EvANs in: BIANcAIBoNELL, ad art. 95, n° 3.4;

HoNNOLD, p. 93; NEUMAYERIMING, ad art. 1, n° 8.

308 PLANTARD, p. 319; VEKAS, p. 342, n° 2; WINSHIP, p. 1-32; HoNNOLD, p. 87, 89;

SCHLECHTRIEM, in: PJA, p. 345.

Telle sera la situation qui se présentera le plus fréquemment au juge suisse: ses propres règles de compétence (for ordinaire de l'éta-blissement du défendeur en Suisse309) et les règles de rattachement objectif du droit international privé suisse (droit de l'établissement du vendeur310) impliquent qu'un juge suisse soit en général appelé à se prononcer sur un contrat soumis selon les règles de conflit suisses au droit d'un Etat étranger réservataire au sens de l'article 95 CV lorsque l'une des parties est établie en Suisse et l'autre partie dans l'Etat (contractant) réservataire. L'autonomie de la volonté des parties, tant en ce qui concerne le for qu'en ce qui concerne le droit applicable311,

de même que l'existence de fors autres que celui de l'établissement d'une partie (for du lieu d' exécution312 ou for du séquestre313 par exemple) peuvent néanmoins conduire à ce que le juge suisse soit confronté à une situation plus complexe.

87. Si l'une des parties est établie dans un Etat non contractant, la Convention ne peut plus être appliquée selon son mécanisme d'appli-cation autonome. Si le juge compétent est celui d'un Etat contractant non réservataire, doit-il appliquer la Convention, lorsque le droit applicable selon ses règles de conflit est le droit d'un Etat contractant réservataire? Un juge suisse appelé à se prononcer au sujet d'un litige entre des parties établies respectivement aux Etats-Unis (pays contrac-tant réservataire) et en Angleterre (pays non contraccontrac-tant), et arrivant à la conclusion que le droit américain est applicable en vertu des règles de conflit suisses, devra-t-il appliquer la Convention de Vienne confor-mément àl 'article 1 alinéa 1lettre b CV, ou le droit national américain?

En d'autres termes, la réserve américaine s'impose-t-elle au juge suisse?

88. Dans une logique conflictuelle, on pourrait considérer que le droit suisse, dont les règles de conflit désignent un droit étranger, se

309 Art. 113 al. 2 LDIP.

310 Art. 118 al. 1 LDIP; art. 3 CLH-1955.

311 Art. 5 al. 1 LDIP et art. 17 de la Convention de Lugano concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commercial du 16 décembre 1988 (ci-après Convention de Lugano).

312 Art. 113 LDIP et art. 5 de la Convention de Lugano.

313 Art. 4 LDIP; art. 52 LP; art. 57 al. 1 de la loi d'organisationjudiciaire Genevoise;

voir cependant art. 3 141m• tiret de la Convention de Lugano.

«désintéresse» du litige et que le juge suisse doit donc appliquer la Convention comme le droit étranger applicable selon les règles de conflit. Le juge suisse devrait donc se mettre dans la position d'unjuge de l'Etat étranger, et tenir compte de la réserve314.

Un tel raisonnement néglige cependant le fait que la Convention s'impose au juge suisse préalablement à toute règle de conflit (art. 1 al.

2 LDIP), l'article 1 alinéa !lettre b CV devant être considéré par le juge comme une norme d'application autonome315La Convention de Vien-ne Vien-ne s'applique pas comme droit étranger, mais comme droit univer-sel dès lors que ses propres conditions d'application sont réunies.

Confronté à un contrat de vente internationale, le juge doit appliquer en premier lieu l'article 1 •r de la Convention, et ne doit recourir aux règles de conflit que pour examiner si la condition de l'article 1 alinéa 1 lettre b CV est réalisée. C'est ajouter à cette disposition une condition supplémentaire, non justifiée par son texte, que d'exiger que le droit international privé désigne le droit d'un Etat contractant non réserva-taire. Si, conformément au texte de l'article 1 alinéa !lettre b CV, le droit international privé suisse conduit au droit d'un Etat contractant, la Convention est applicable indépendamment de l'éventuelle réserve de cet Etat contractant étranger316: le juge suisse n'applique pas la

314 Dans ce sens: VEKAs, p. 345, n° 3 let. b.: «Das Gericht eines Vertragstaates wendet zwar das Abkommen an, jedoch nur dann, wenn und soweit es im Staat des anzuwenden Rechts gilt.».; WINSHIP, p. 1-27, qui rappelle cependant le rejet lors de la conférence de Vienne d'une version alternative de l'art. 95 CV proposée par la Tchéchoslovaquie qui résolvait la question dans le même sens:

«This Convention does not apply if the rules of international private law lead to the application of the law of a State making a declaration under the preceding paragraph unless places of business of the parties to the contra ct are in different Contracting States.»; EvANs in: BIANCAIBONELL, ad art. 95, n° 3.4; HoNNOLD, n°

47 (Example 1 H); ScHLECHTRIEM, p. 346; PONDER, p. 871; HEUZE, n° 118;

FoucHARD in: CV et incoterms, p. !55; MoUL Y in: CV et Incoterms, p. 58; ERDEM n° !53; BoNELLI, in: La vendita internazionale, p. 96; VoLKEN in: CoLLOQUE DE LAUSANNE, p. 36; DoRE, p. 537; LünERITZ ad art. 1, n° 12; MAGNUS, p. 82;

QUINoNEs EscAMEz, p. !53; NEUMAYERIMING, ad art. 1, n° 47.

315 Cf. supra n° 75.

316 Dans ce sens: SIEHR, p. 602 let. b: «Verweist also das IPR eines Nichtvorbe-haltsstaates auf das Recht eines VorbeNichtvorbe-haltsstaates, so haben die Gerichte des Nichtvorbehaltsstaa tes na ch Art. 1 I 1 i t. b UN- WK G das UNkaufrecht und nicht das autonome Sachrecht des Vorbehaltsstaates anzuwenden. Ais Begründung für diese Antwort genügte eigentlich der Hinweis darauf, dass die nach Art. 1 I lit.b UN-WKG notwendingen Bedingungen erfllllt sind.»; PLANTARD, p. 320 ch.

Convention comme droit étranger, mais comme son propre droit susceptible de s'appliquer en vertu de l'article 1 alinéa 1 lettre b CV.

89. Cette interprétation est d'ailleurs confirmée par le libellé de l'article 95 CV, selon lequel l'Etat réservataire n'est pas lié par l'article 1 alinéa !lettre b CV. Par opposition au texte de l'article 92 CV, selon lequel un Etat contractant réservataire au sens de cette disposition «ne sera pas considéré comme un Etat contractant au sens de 1 'article premier de la Convention» pour la matière visée par la réserve, la formulation de l'article 95 CV souligne le fait qu'une réserve au sens de cette disposition n'a d'effet que pour l'Etat qui en fait la déclaration. Si les auteurs de la Convention avaient voulu qu'une réserve au sens de l'article 95 CV ait pour effet que les Etats réserva-taires soient considérés comme des Etats non contractants au sens de l'article premier de la Convention, on ne voit pas pour quelle raison ils n'auraient pas employé la formulation très claire à laquelle ils ont eu recours à l'article 92 alinéa 2 CV. C'est donc une interprétation doublement «contra /egem» que l'interprétation selon laquelle la Convention n'est pas applicable au sens de l'article 1 alinéa 1 lettre b CV lorsque le droit international privé du for désigne le droit d'un Etat réservataire au sens de l'article 95 CV:

premièrement parce que l'article 1 alinéa 1 lettre b CV ne précise pas qu'il doit s'agir d'un Etat contractant «non réser-vataire»,

deuxièmement parce que la formulation de l'article 95 CV ne permet pas de considérer que les conséquences d'une réserve au sens de cette disposition sont identiques à celles d'une réserve au sens de l'article 92 CV.

90. Plus fondamentalement, c'est le statut même du droit uniforme qui est enjeu: le droit uniforme n'est pas seulement le droit national des Etats contractants, mais un droit à ambition universelle, dont la voca-tion est de transcender la logique territoriale. Les premières

Conven-2; SroFFEL, in: SJZ p. 173 et in: Cedidac p. 28; HERBER, p. 101; LoEWE, p. 16;

CzERWENKA, p. 159; HERBER/CzERWENKA; ad art. 1, n° 19; HERRMANN in: Berner Tage, p. 89; KAROLLUS, p. 31; PELICHET, p. 39; PILTz, in: NJW p. 619; SACERDOTI, pp. 741 ss; KINDLER, in: RIW 1988, p. 778; CARBONE, p. 523 et in: BIANCA, ad art.

95; voN OvERBECK, Annuaire de 1 'institut de droit internationa11982, vol. 59 II, p. 172: «La solution contraire reviendrait à donner à la réserve un curieux effet de réciprocité contraire aux tendances actuelles».

tions de 1964 devaient s'appliquer indépendamment de toute logique de rattachement, dès que le juge d'un Etat contractant était saisi d'un contrat de vente internationale317Le caractère impérialiste de ce système a conduit les auteurs de la Convention de Vienne à poser une règle alternative de rattachement du contrat au droit uniforme318:

l'article 1 alinéa 1 lettre a ou l'article 1 alinéa 1 lettre b. Certains Etats exigent un lien plus fort du contrat avec le droit uniforme, en excluant le rattachement de l'article 1 alinéa 1 lettre b par une réserve au sens de l'article 95 CV. Pour les Etats qui n'ont pas fait cette réserve, la réalisation d'une des hypothèses de la règle alternative de rattachement du contrat au droit uniforme demeure suffisante pour que le droit uniforme soit applicable. La question de savoir si le juge de l'Etat contractant désigné par les règles de droit international privé du for appliquerait lui-même cette Convention n'est pas rel evan te.

91. Le juge suisse n'aurait à tenir compte d'une réserve au sens de 1' article 95 CV que si la Suisse était elle-même un Etat réservataire, ou si le législateur suisse lui en avait fait l'injonction, comme c'est le cas en Allemagne319. Ainsi un juge allemand saisi d'un contrat conclu entre un vendeur établi en Chine (pays contractant réservataire au sens de l'article 95 CV) et un acheteur établi en Angleterre (pays non contrac-tant) sera-t-il contraint par ses règles de droit international privé (par.

28 EG-BGB en l'absence d'une élection de droit) et par cette

déclara-317 Cf. supra n° 5, sur le caractère «absolu» des lois uniformes de 1964.

318 Ou, selon l'expression de NEUMAYERIMING, ad art. 1, n° 4, une «relation déterminée par l'article 1er al. 1 avec un ou plusieurs Etats contractants». C'est à chaque Etat contractant de déterminer quelle est s~n exigence quant à l'inten-sité de cette relation.

319 Voir l'art. 2 de la loi allemande relative à la Convention de Vienne, «Gesetz zu dem Übereinkommen der Vereinten Nationen vom Il. April 1980 über Vertrâge über den internationalen Warenkauf sowie zur Ânderung des Gesetzes zu dem Übereinkommen vom 19. Mai 1956 über den Befôrderungsvertrag im internatio-nal en Strassengüterverkehr (CMR)» vom 5. Juli 1989 (BGBI. II. S. 586), et la réserve Allemande apportée à la Convention de Vienne; HERBER in: VON CAEM-MERER/ScHLECHTRIEM, ad art. 1, n° 45; SCHLECHTRIEM in: VON CAEMMERERfSCHLECH-TRIEM, VertragsG ad art. 2; REINHART ad art. 1, n° 8: «Mit dieser Regelung will die Bundesrepublik Deutschland die Entscheidung BGHZ 96, 313, zum Haager Einheitlichen Kaufrecht unterlaufen, derzufolge Vorbehalte, die von anderen Vertragsstaaten eingelegt wurden, für die inlândischen Gerichte unbeachtlich sind».

ti on allemande d'appliquer le droit interne chinois, alors que 1' Allema-gne partage avec la Chine un droit commun de la vente internationale!

En l'absence d'une telle injonction de son législateur, le juge suisse n'a pas à tenir compte des réserves des Etats étrangers320 et pourra, dans cet exemple, appliquer le droit uniforme qui lui est certainement plus familier que le droit interne chinois.

92. Un problème supplémentaire se pose cependant si les parties au contrat sont établies dans des Etats parties à la Convention de La Haye de 1955. Cette Convention est, au sens de l'article 90 CV, un «accord international déjà conclu qui contient des dispositions concernant les matières régies par la présente Convention (de Vienne)», qui a donc le pas sur la Convention de Vienne321. Le juge suisse serait dès lors tenu

92. Un problème supplémentaire se pose cependant si les parties au contrat sont établies dans des Etats parties à la Convention de La Haye de 1955. Cette Convention est, au sens de l'article 90 CV, un «accord international déjà conclu qui contient des dispositions concernant les matières régies par la présente Convention (de Vienne)», qui a donc le pas sur la Convention de Vienne321. Le juge suisse serait dès lors tenu