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Stratégies pédagogiques

2.2.4 Une théorie intégratrice de la dynamique motivationnelle

De nombreux auteurs ont tenté de définir une théorie intégratrice de la dynamique motivationnelle qui pourrait tenir compte des éléments les plus importants de ces trois théories dans leur interaction (Viau, 2009; Eccles et Wang, 2012; Chouinard et Roy, 2008; Skinner et Pitzer, 2012). C’est en se concentrant sur ce qui relie ces différentes théories qu’on peut s’approcher d’un modèle synthétique de la dynamique motivationnelle des étudiants. Plusieurs chercheurs se sont intéressés à établir des relations entre besoins, buts et valeurs associés aux apprentissages. Par exemple, une recherche de Plante, O’Keefe et Théorêt (2013) étudiant la relation entre

le modèle des buts d’apprentissage et celui de la valeur attendue, a permis de valider que pour des enfants de 11 à 14 ans (n= 697, dans 14 écoles du Québec) la valeur attendue peut prédire les buts d’apprentissage et non le contraire. Les résultats sont similaires pour les deux domaines d’apprentissage testés, soit les mathématiques et le français. Ils en concluent que, malgré que les chercheurs collectent des données empiriques isolément pour l’un ou l’autre de ces deux modèles, il y a une relation vérifiée entre les buts d’apprentissages et la valeur attendue qui permet de mieux comprendre la dynamique motivationnelle des apprentissages.

D’autres chercheurs s’intéressent à un modèle intégrateur : Eccles et Wang (2012) ont élargi leur modèle de la valeur attendue pour englober les buts et les besoins, qu’elles associent à la dimension de la valeur perçue : « Nous assumons que la motivation est à son apogée lorsque les exigences de la tâche correspondent à la fois au sentiment de pouvoir agir [sense of agency] de la personne (lié à son expectative de succès) et ses valeurs, besoins et buts » (traduction libre, page 142). Il est possible d’établir des liens entre chacun des besoins et certains éléments des deux autres modèles, car un besoin comblé influence positivement les valeurs et les buts d’apprentissage : Par exemple, un bon sentiment de compétence peut amener une bonne expectative de succès, un fort sentiment d’appartenance peut entrainer une perception de valeur élevée de la tâche, un sentiment d’autonomie bien développé pourrait orienter favorablement les buts d’apprentissages vers la maitrise plutôt que seulement pour la performance, ou l’évitement. Un bon modèle synthétique de la dynamique motivationnelle devrait pouvoir prendre en compte l’ensemble de ces variables.

La figure 14 présente le modèle de la motivation selon Viau (2009), qui peut constituer un modèle synthétique adéquat de la dynamique motivationnelle, car il prend en compte les perceptions des étudiants en mettant l’emphase sur celles qui sont plus directement à la source de la motivation, soit la valeur accordée à l’activité (liée également aux besoins et aux buts de l’apprenant) ainsi que les sentiments de

compétence et de contrôle (tous deux associés au sentiment de pouvoir agir). Cette figure est incomplète; elle ne représente que la motivation sans ses manifestations (engagement et persévérance) qui seront traitées dans la section suivante.

Figure 14. Modèle conceptuel de la motivation selon Viau (2009).

2.3 L’

ENGAGEMENT ÉTUDIANT

Le construit de l’engagement, tel que présenté dans la littérature scientifique, est polysémique. Les conceptions de Kuh et al. (2006) et Vedder-Weiss et Fortus (2012) ont été présentées en même temps que quelques résultats de recherche, à la section 1.3.5, en précisant deux composantes à l’engagement, de même que les différents paliers d’engagement selon Skinner et Pitzer (2012). Kuh et al. (2006) distingue une composante liée à l’étudiant (temps et l’effort investis dans ses activités d’apprentissage) et une autre liée à l’institution (moyens institutionnels mis en place favoriser la réussite). Cette deuxième composante, plus administrative, est en lien direct avec la fonction première du concept d’engagement tel qu’il a d’abord été élaboré à ses débuts. Selon Finn et Zimmer (2012),

Student engagement (and disengagement) was conceptualized in the 1980s as a way to understand and reduce student boredom, alienation, and dropping out. Educators argued that the school setting mediates student involvement and engagement which are, in turn, necessary for learning (page 99).

Perceptions des étudiants

Valeur accordée à l'activité Sentiment de compétence Sentiment de contrôle MOTIVATION

Cette conception de l’engagement émane donc à l’origine d’une posture psychopédagogique axée sur un objectif de rétention des effectifs étudiants. Elle se situe, sous cet angle, assez près du concept de persévérance. Selon Wolters et Taylor (2012), l’histoire de la recherche sur l’engagement étudiant est « peuplée principalement par des psychologues en milieu scolaire initialement concentrés sur la compréhension des comportements de participation des étudiants en milieu académique » (page 636, traduction libre). Une des toutes premières publications sur l’engagement est attribuée à Newman (1981). Dans son ouvrage de 1992, Newman présente la définition initiale du concept d’engagement tel qu’il l’avait publiée à l’époque (page 12) :

Engagement was defined as “the student’s psychological investment in and effort directed toward learning, understanding, or mastering the knowledge, skills, or crafts that academic work is intended to promote.”

On y retrouve, indirectement, les deux composantes de Finn et Zimmer (2012) : “psychological investment in”, l’implication, et “effort directed toward”, qui vise l’action ou la participation. Dans ce même ouvrage, Newman (1992) se dégage de sa définition originale pour mettre un peu plus l’accent sur l’aspect psychologique que sur le comportement observable : «Rather, engagement is a construct used to describe an inner quality of concentration and effort to learn » (Ibid., p. 13). Cette tendance s’est accentuée dans les deux décennies qui ont suivi. Depuis les travaux initiaux de Newman, de nombreux chercheurs se sont intéressés à l’engagement dans ses dimensions plus internes, dont les auteurs cités dans les deux sections qui suivent; le concept s’est précisé, étayé, et la définition s’est complexifiée pour englober d’autres dimensions de l’engagement que celles qui sont directement observables par un comportement. Le concept est devenu construit.