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Chapitre 2 : Les perspectives de développement du projet

2. Une révolution freinée par l’environnement complexe des données

L’apparition de cette masse de données est un bouleversement important pour les entreprises, notamment pour les institutionnels du tourisme qui se demandent encore comment pouvoir l’exploiter. En effet, c’est un processus lourd puisqu’il faut trouver le moyen de récolter, stocker, traiter, analyser, croiser et restituer une grande quantité de données, de manière à ce que les territoires puissent en tirer des bénéfices.

Le big data est une technologie complexe puisque chaque donnée est différente. Ainsi, on ne va pas traiter les données de la même manière. Par exemple, les données issues

des réseaux sociaux nécessitent l’utilisation d’outils pensés pour le web sémantique alors que les données de géolocalisation seront traitées différemment. Néanmoins, il faut être en mesure de croiser ces données afin d’établir des liens entre-elles, éventuellement de cause à effet, dans l’environnement concerné.

35 Joncour Ida. La gestion collaborative de données au service de l'attractivité touristique des territoires. Le cas du réseau

53 L’utilisation des technologies liées au big data semble ainsi délicate pour les acteurs touristiques. Il est nécessaire de les sensibiliser autour de la culture de la donnée et de l’acquisition de nouvelles compétences.

2.2. La nécessité de sensibiliser les acteurs au big data

2.2.1. Le management autour de la culture de la donnée

Les big data doivent être apprivoisées par les structures touristiques pour une utilisation optimale. Comme nous l’avons déjà évoqué précédemment, il faut développer une dynamique d’intelligence collective au profit du développement des territoires. L’utilisation des technologies liées aux big data doit s’inscrire dans une démarche globale de la structure mais aussi du territoire. Pour ce faire, il faut repenser la manière de fonctionner et privilégier des méthodes de travail et des processus transversaux en s’affranchissant des barrières liées à chaque service d’une entreprise.

Ainsi, les responsables des offices de tourisme doivent au niveau de leur management trouver des moyens d’impliquer les salariés autour d’un projet d’observation commun. À ce sujet, comme l’évoque Marie Kusek, « le big data ne concerne pas seulement un pôle webmarketing comme les aprioris pourraient le laisser penser mais bien tous les services et missions d’un office de tourisme. Les données peuvent être traitées aussi bien au niveau de l’accueil, la promotion, la commercialisation ou encore autour du développement touristique mais à des degrés différents »36.

2.2.2. L’apparition de nouvelles compétences et de nouveaux métiers

L’émergence du big data et de ses nouvelles technologies dans les systèmes d’informations touristiques nécessitent l’acquisition de nouvelles compétences notamment au niveau informatique, statistique, mathématique et même en droit.

C’est pourquoi, de nouveaux métiers spécialisés sur la data voient le jour. Différents profils sont recherchés dans la gestion de la data jusqu’au développement de stratégies adaptées.

36 Kusek Marie. L’exploitation de la donnée, des enjeux pour les offices de tourisme. Mémoire de master 1 tourisme TIC,

54 Figure 8 - Les différents métiers dans la famille big data37

Le Chief Data Officer (CDO) est le directeur de la data, il dirige une équipe spécialisée dans la gestion de la donnée. Le Data Protection Officer (DPO) s’occupe de la gestion et de la protection des données dans la structure tout en respectant le Règlement Général sur la Protection des Données.

Selon la taille de la structure, on compte surtout sur un Data Scientist et/ou Data Analyst.

C’est eux qui sont en mesure d’extraire, d’analyser et de comprendre des données. Ils aident les décisionnaires à utiliser les outils mis à leur dispostion et à interpréter les

données pour prendre les meilleures décisions possibles. La principale différence entre un Data Analyst et un Data Scientist est au niveau de la programmation informatique. En effet, le Data Scientist sera plus en mesure de proposer des méthodes et des algorithmes issus du machine learning et de la datascience pour développer des plateformes alors que le Data Analyst sera plus à l’aise dans l’analyse, la corrélation et la restitution des données au travers de la Data Visualisation pour orienter les prises de position des acteurs décisionnels.

37 Osons L’industrie du futur. Le Big Data, des métiers à découvrir. [en ligne]. Disponible sur : http://www.industrie-

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2.3. L’apparition de problèmes éthiques

2.3.1. Une marchandisation de la donnée privée

Si de nouveaux métiers apparaissent, ce n’est pas pour autant que les institutionnels du tourisme ont tendance à engager ce type de profil pour améliorer leur

observation, valoriser leurs données et accroître la compétitivité de leur territoire. En effet, ils n’ont pas forcément un budget qu’ils peuvent mettre à disposition et sont assez

réticents aux changements que cela pourraient impliquer.

À l’inverse, les acteurs privés se sont vite rendus compte de la valeur de l’exploitation des données, à l’image des « GAFA ». Il s’agit d’un surnom donné aux premiers acteurs à avoir été présents sur ce créneau : Google, Apple, Facebook et Amazon. Dans le tourisme, certains acteurs privés ont des données utiles pour l’observation puisque l’activité touristique fait intervenir plusieurs acteurs, sans oublier TripAdvisor et les réseaux sociaux. Par conséquent, on assiste à une « guerre » de la donnée entre les acteurs publics et privés. À ce sujet, Christophe Terrier explique que « si l’on se place au plan de la connaissance, il est inquiétant de constater que les faits et gestes, et même les pensées, des individus du monde sont accessibles à quelques grands acteurs mais ni à la statistique publique, ni aux chercheurs ou aux observateurs. La connaissance privée, à but commercial ou sécuritaire, est en train de s’accroître démesurément tandis que la connaissance publique stagne ou même régresse sous les coups de l’austérité budgétaire. » 38

Les territoires sont en effet assez rapidement évincés de la course aux données puisqu’ils ne peuvent déjà pas acquérir les données par manque de moyens, sans parler des coûts d’analyse que cela représente par la suite. Ainsi, cette marchandisation de la donnée privée est aujourd’hui un réel frein pour le développement durable des territoires. C’est pourquoi, Il est nécessaire de réfléchir à une collaboration entre les acteurs privés et les acteurs publics, au profit des territoires. D’autre part, Christophe Terrier explique qu’il serait

38 Terrier Christophe. La guerre des traces est déclarée. Les Cahiers Espaces, Big Data, traces numériques & Observation,

56 nécessaire de « légiférer pour obliger les opérateurs à transmettre les données à l’Insee ou au service statistique public concerné, avec ou sans compensation financière ».

2.3.2. Le Règlement Général sur la Protection des Données

À l’heure où le développement économique repose pour beaucoup sur l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication dans la consommation de biens et de services, il est nécessaire que les consommateurs aient confiance. Pour cela, il faut être en mesure de les protéger des abus occasionnés par l’utilisation et l’exploitation de leurs données personnelles par les organismes privés mais aussi publics.

Les données à caractère personnel sont des « informations se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable, directement ou indirectement »39. Elles sont courantes

pour le nom, une adresse, une date de naissance, un téléphone ou bien sensibles quand il s’agit des opinions religieuses, philosophiques, l’appartenance syndicale, par exemples. C’est dans ce contexte que le Règlement Général sur la Protection des Données est entré en vigueur le 24 mai 2016 et applicable depuis le 25 mai 2018. Ce règlement de l’Union Européenne est là pour supprimer les faiblesses présentes dans les lois nationales et être en cohérence avec les nouveaux défis de sécurité liés à internet, aux réseaux sociaux, au big data et au marketing comportemental. L’objectif étant de renforcer la protection des données personnelles des personnes physiques au sein de l'Union européenne.

Ainsi, quelque soit la nature de l’organisation, grande comme petite, si elle traite des données personnelles, elle est concernée par le RGPD. Pour ce faire, elle doit les traiter en respectant 6 grandes principes qui s’articulent autour de la responsabilité40 :

Licéité, loyauté et transparence au regard de la personne concernée.

Limitation des finalités : L’objectif du traitement doit être explicite et légitime.

Minimisation des données : Il ne faut pas collecter plus de données dont on a

réellement besoin.

Exactitude des données : Elles doivent être complètent et mises à jour.

39 Foucault Jacques, Panhaleux Loïc,Renaud Dominique, Bégasse Pierre. RGPD : le comprendre et le mettre en œuvre.

Paris : Editions ENI, 2018, 263p.

57  Conservation des données : Elle doit être limitée au strict minimum.

Sécurité des données.

Figure 9 - Passer au RGPD en 4 étapes41

En parallèle, afin de permettre aux personnes concernées de mieux contrôler leur données et l’utilisation qui en est faite, les organisations doivent respecter leurs différents droits : à l’information, de rectification, d’accès, d’effacement, à la limitation du traitement, à la portabilité des données, d’opposition et ceux liés à la prise de décision automatique. Le RGPD suscite plusieurs débats. En effet, les organismes sont plutôt longs à se mettre en conformité et certains trouvent que cela bloque le processus d’innovation et juge la protection des données trop excessives. Toutefois, il est nécessaire que les acteurs touristiques travaillent avec ce respect du règlement pour mieux gérer leurs données.

3. Une nouvelle approche de l’observation, mieux adaptée aux territoires