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Sur la période étudiée, on constate une forte évolution des buts des associations d’éducation populaire. En début de période, le but est principalement lié aux questions d’hygiène publique et de lutte contre les maladies contagieuses, comme la tuberculose. En fin de période, les questions d’hygiène sont encore présentes, mais elles sont passées au second plan au profit des questions d’éducation. L’avènement des totalitarismes et les conflits mondiaux ont poussé à une véritable réflexion sur la nécessité de mettre en place une éducation populaire. Plusieurs phases se succèdent :

1896 - 1914 :

C’est une phase d’expériences des municipalités, les villes de Lyon et de Paris créent leurs premières colonies de vacances. Celles-ci ont pour mission de résoudre des problèmes de santé publique en permettant à des enfants des classes populaires de passer trois semaines à la campagne avec une alimentation saine. L’aspect éducatif de ces colonies n’est aucunement mis en avant. La colonie de vacances du Serverin est fondée dans une propriété mise à la disposition de la ville de Lyon par M. Fisch.

1914 - 1918

Durant cette période, le public visé par ces colonies de vacances s’élargit. Il s’agit de s’occuper également des enfants orphelins de guerre ou séparés de

leurs parents à cause du conflit. Un programme éducatif est alors mis en place dans les centres. La colonie de vacances du Serverin ouvre toute l’année pour accueillir des enfants orphelins.

1918 - 1934

Durant ces années, la préoccupation de santé et d’hygiène publique reste forte, mais le discours éducatif est de plus en plus important. Les œuvres d’éducation populaire sont le résultat d’initiatives privées venant d’associations diverses. Ces associations reçoivent un soutien de la mairie de Lyon de manière directe (subvention) ou des prêts de locaux dans les différents groupes scolaires (dans les archives, les versements de subventions apparaissent facilement, contrairement aux prêts de locaux qui laissent peu de traces). On est également dans une période d’interrogation sur les moyens de continuer l’action éducative en direction des adolescents qui ne sont plus concernés par l’obligation scolaire. Dans les articles du Réveil du Rhône, les termes d'« éducation post-scolaire » ou d'« éducation civique » apparaissent dans le sens d’une formation des adolescents comme citoyens, en évitant qu’ils subissent l’influence de l’Église et, après 1934, celle des mouvements d’extrême droite.55

1934 - 1940

Cette courte période est une mise en route des décisions politiques prises par le Front populaire. L’action éducative laïque se structure autour de grandes fédérations :

55 Allemand-Martin, dans le Réveil du Rhône de mars 1934, propose pour les adolescents des séjours de vacances et de sports d’hiver, ce qui permet de continuer l’œuvre éducative scolaire, les autres actions comme l’Œuvre des Enfants à la Montagne de Beauvisage ne prenant les enfants que jusqu’à 14 ans.

- UFOLEP (Union Fédérale des Œuvres Laïques d’éducation Physique) pour les pratiques physiques

- UFOLEA (Union Fédérale des Œuvres Laïques d’éducation Artistique) pour la musique, les arts

- UFOCEL (Union Fédérale des Œuvres du Cinéma Éducateur) : mise en place de séances de cinéma et d’émissions de radio éducative sur la station de la Doua.

Ces années-là sont marquées par une innovation importante avec une prise de conscience des problèmes sociaux et politiques liés à la jeunesse. Une organisation plus efficace apparaît qui correspond à la circulaire de 1937 de Jean Zay sur les loisirs éducatifs dans les écoles et qui trouve une application au Lycée du Parc de Lyon56.

C’est également dans cette période du milieu des années trente, qu’apparaît une demande d’un renforcement du contrôle des œuvres de vacances par l’administration, en particulier par l’éducation Nationale57. Il semble que ce souhait d'un contrôle plus fort résulte de la crainte de voir des organisations fascistes créer des mouvements de jeunesse à l’image de ce qui se fait dans l’Italie de Mussolini et l’Allemagne d’Hitler. On peut penser que les mouvements cléricaux58 sont également visés. Cette volonté de contrôle des œuvres de vacances et des mouvements de jeunesses conduit aussi à la mise en place des premiers stages de formation de moniteurs. Ceux-ci sont co-organisés

56 Archives départementales du Rhône 1 T 2612

57 Le ministère de L’Instruction Publique prend le nom de ministère de l’éducation Nationale en 1932.

58 Le Réveil du Rhône dénonce régulièrement l’emprise de l’Église sur la jeunesse, en particulier en dénonçant des mouvements comme les Jeunes Ouvriers Chrétiens, Les Jeune Agriculteurs Chrétiens et les Jeunes Étudiants Chrétiens, sans oublier la Fédération Nationale Catholique du général de Castelnau. De Castelnau s’oppose d’ailleurs à Herriot quand ce dernier exprime sa volonté de laïcisation de l’Alsace Lorraine.

par le GDEL, les Éclaireurs de France et l’organisation de « l’Hygiène par l’Exemple ».

1940 – 1945

Cette séquence est particulièrement complexe dans le cadre de notre étude. Après la défaite de 1940, si la formation de la jeunesse est bien une priorité du gouvernement de Vichy, la politique globale de la ville de Lyon ne change pas de manière radicale. La différence de politique que l’on peut noter tient à l’ouverture de subventions à des mouvements clairement confessionnels, en particulier catholiques.

Des changements dans les pratiques ont également lieu, mais il s’agit le plus souvent d’adaptation aux circonstances (réfugiés, difficultés de circulation, etc.). La création d’un Commissariat à la jeunesse, qui a pour but de centraliser et contrôler les actions, montre l’importance, pour le gouvernement de Vichy, des problèmes liés à la formation de la jeunesse.

Il convient de remarquer que l’antenne lyonnaise de ce commissariat soutient de manière active l’organisation de stages de formation du personnel d’encadrement de colonies de vacances. Un stage de ce type, identifié à Lyon, a lieu en août 1940 et est organisé par le GDEL (Groupement Départemental de l’Enseignement Laïque). Il est surprenant de noter qu’il se situe immédiatement après la débâcle de juin 1940. Il semblerait qu’il y ait eu jusqu’à trois stages organisés par an jusqu’en 1943. Le soutien de la ville de Lyon se fait par le prêt de locaux comme l'internat de Tourvielle. Les stages sont organisés dans cet internat jusqu’à ce que celui-ci soit utilisé en qualité de centre pour l’enfance en difficulté59.

Il est difficile de savoir si d’autres stages de formation ont eu lieu par la suite. Il est tout à fait possible qu’ils se soient déroulés sur d’autres sites. Le Réveil du

Rhône ayant cessé de paraître en 1940, le principal moyen de suivre ces stages

disparaît ainsi.

Après 1945

L’éducation populaire devient un objet de politique publique, avec la création du Ministère de la jeunesse et des sports. Dans ce contexte, la ville de Lyon perd une partie de son pouvoir d’initiative en matière de politique d’éducation populaire, avec la centralisation des politiques de jeunesse.