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CHAPITRE II. La transition entre secondaire et supérieur

D. Une administration peu connue voire inconnue

Les étudiants à l‟université ne rencontrent pas les mêmes administrations qu‟au lycée. Ni le rôle ni la responsabilité de l‟administration ne sont identiques. Il n‟y a pas de suivi à l‟université. Au lycée le suivi des élèves fait partie des devoirs de l‟administration. Ils suivent les élèves, leur absence est importante et doit être justifiée par l‟élève et ses parents. Les élèves se sentent responsables, aller au lycée est un devoir pour eux. « L‟établissement scolaire est ainsi assimilé à un espace public, espace de citoyenneté dans lequel on s‟attend à ce que les élèves soient mis en conditions favorables à leurs prises de responsabilité » (Rayou, 2000).

À l‟université cette responsabilité est d‟autant plus requise. Leurs absences ne sont pas remarquées, ce qui d‟ailleurs leur donne le sentiment d‟être laissé à eux-mêmes ou même abandonnés.

La façon de donner les informations aux étudiants n‟est pas identique au lycée. Les informations sont affichées. Ils ne sont pas informés de la même manière qu‟ils l‟étaient au lycée plutôt en contact direct. Ainsi il y a des informations ratées car elles n‟ont pas bien été repérées. Il y a beaucoup de dispositifs dont les étudiants ignorent l‟existence.

L‟inscription, la préinscription, trouver les dates des examens, les changements concernant les cours et les salles, les absences des professeurs, les délais, les activités, etc. sont tous informatisés d‟une manière indirecte. Les étudiants sont plutôt en contact virtuel que physique. Ceux qui ne sont pas très aptes en informatique risquent d‟être moins informés ou même pas du tout informés. Les étudiants se sentent ainsi encore plus perdus à l‟université. Cela prend du temps pour s‟y adapter et apprendre les canaux d‟informations. Ce qui d‟ailleurs oblige les étudiants à se mettre en contact avec les autres. Alors les timides peuvent être les victimes de cette défaillance de la démarche administrative !

Pour un étudiant novice « le surnombre est peu propice à la socialisation d‟étudiants qui sont « perdus » aussi bien dans l‟espace que dans la programmation de leur cursus universitaire »

(Coulon et Paivandi, 2008).

Comment l‟étudiant peut-il persévérer malgré cette errance. Tinto (1975, 1987) a développé un modèle interactionniste fondé sur les concepts d‟intégration et d‟appartenance à la communauté universitaire. Pour lui, la persévérance doit être conçue comme « un processus longitudinal d‟interactions entre l‟étudiant et les systèmes académiques et sociaux de l‟établissement. Ce sont les expériences vécues par l‟étudiant dans ces différents systèmes qui modifient de façon continuelle ses buts et ses engagements envers l‟établissement, de façon à favoriser soit la persévérance soit l‟abandon » (Coulon et Paivandi, 2003).

On ne peut pas dire qu‟il n‟y a pas d‟interaction à l‟université avec l‟administratif mais il faut noter que l‟interaction y est très différente. Cette différence exige une nouvelle manière de gérer les informations. « L‟intégration sociale est quant à elle définie par l‟interaction entre les intervenants du système (les professeurs, les pairs) et est mesurée aussi par le degré de congruence entre l‟étudiant et l‟environnement social de l‟établissement » (Coulon et Paivandi, 2008).

Cette interaction est parfois minimisée à l‟université. À titre d‟exemple abordons les interactions dans les cours magistraux.

II.4.1.2 Le cours à l’université : ses problèmes, ses exigences et ses techniques

Les cours à la fac représentent un autre élément externe. « Le passage de l‟enseignement secondaire à l‟enseignement universitaire constitue une rupture encore plus considérable à maints égards : cours assurés en grands groupes rendant difficile l‟adaptation au niveau effectif des étudiants, cours plus denses et plus rapides supposant des bases solides, enseignants-chercheurs spécialisés dans des domaines pointus éprouvant des difficultés à se mettre à la place de néophytes, etc. » (Wathelet, Vieillevoye, Romainville 2010).

Ce sont surtout les cours magistraux qui posent problème car ils représentent une réelle nouveauté pour l‟ex-lycéen. La relation avec les enseignants est bien différente notamment dans ces cours à l‟université. « On observe moins de tentatives de négociation des règles du jeu comme c‟était le cas au lycée. Ceci tient d‟une part à la dimension magistrale des cours laissant peu de places aux négociations, et d‟autre part au fait que le poids de la sélection (surtout dans les premières années) fait de l‟enseignant le juge et l‟arbitre de la compétition » (Rayou, 2000). Ainsi Rayou a proposé un « comportement participatif » pour établir un lien qui invite l‟étudiant à persévérer.

Une différence entre les tâches exigées à l‟université et celles demandées au lycée réside dans les exigences différentes surtout dans les cours magistraux qui ne sont pas forcément adéquates avec les habitudes et les vécus des nouveaux étudiants. Pour Coulon et Paivandi (2003) « les échecs et les abandons sont nombreux au cours de la première année, c‟est précisément parce que l‟adéquation entre les exigences universitaires, en terme de contenus intellectuels, de méthodes d‟exposition du savoir et des connaissances, et les habitus des étudiants, qui sont encore des élèves, n‟est pas réalisée. L‟élève doit s‟adapter aux codes de l‟enseignement supérieur, apprendre à utiliser ses institutions, à assimiler ses routines ».

À ce stade, les cours magistraux qui pourraient être des lieux d‟échange, sont devenus un lieu de „„solitude‟‟ (Coulon, 1987) et d‟isolement. Les enseignants confirment cette observation : « bien que les données empiriques issues des enquêtes soient peu abondantes, on peut trouver des témoignages d‟enseignants relatant le sens de ces échanges et l‟ambiance générale des cours » (Coulon et Paivandi, 2008).

La socialisation dans les cours magistraux nécessite l‟acquisition d‟une certaine culture qui a ses propres exigences.