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Un projet charitable ou une mode bourgeoise

Chapitre 3 : Les sociétés locales

1. Un projet charitable ou une mode bourgeoise

A) L’expérience parisienne

C’est un an environ après sa création que la Société pour l’Instruction élémentaire commence à s’occuper de l’enseignement des filles. Lors de l’assemblée générale du 23 août 1816, le baron de Gérando lit un rapport sur ce sujet. Il y développe une conception très traditionnelle du rôle des femmes dans la société. Pour les désigner, il emploie l’expression de

« sexe timide et faible247 ». L’importance de leur instruction n’en est pas moins nécessaire, selon lui, et cela essentiellement pour des raisons morales. De Gérando explique : « Epouses, mères, chargées des soins domestiques, les exemples des femmes influeront sur tout ce qui les entoure ; leur activité, leur esprit d’ordre présideront à cette économie intérieure nécessaire au bien-être des familles. Leur corruption au contraire est contagieuse, non seulement dans l’enceinte de leur demeure, mais dans la société toute entière, empoisonne la jeunesse, rompt les liens les plus sacrés de la nature, et d’un seul désordre fait souvent sortir un affreux torrent de vices248. » Outre la garantie morale qu’elle apporte aux familles et à travers elles à toute la société, l’instruction des filles les rend également capables de mieux diriger leur futur ménage. Elles pourront ainsi tenir les comptes et même remplacer quelquefois leur mari. Une fille instruite ne se place-t-elle pas mieux qu’une qui ne l’est pas ? Et, si la vie leur donne quelques loisirs solitaires, la lecture n’est-elle pas celle qui convient le mieux à une femme ?

« De bons livres seront pour elles une paisible et agréable récréation jusque sous le toit des chaumières249 », s’enthousiasme le philanthrope. Il faut remarquer que les propos du baron de Gérando, s’ils mentionnent bien le travail manuel des femmes, n’évoquent jamais la réalité du travail auxquelles elles sont confrontées. La femme n’est jamais perçue dans son rôle économique mais dans sa place d’épouse et de mère. Pourtant, l’immense majorité des femmes du peuple, outre le soin apporté à leurs enfants, travaillent pour subvenir aux besoins de leur famille que ce soit à l’atelier, à la boutique, à la manufacture ou aux champs. Il projette ainsi une vision bourgeoise de la femme, celle qui est toute consacrée à l’éducation de ses enfants et à l’entretien du ménage.

Concernant l’opportunité de l’enseignement mutuel vis-à-vis des filles, il ne fait aucun doute dans l’esprit du philanthrope. Comme ce mode d’instruction est économique et prompt,

247

Journal d’Education, tome II, rapport sur les écoles de filles et sur le comité des dames, par M. le baron de Gérando, président, dans la séance générale du 23 août 1816, p. 299.

248

Ibid. 249

il est particulièrement adapté à l’instruction des filles. En effet, les filles, ont peu de temps à consacrer à l’instruction car leurs mères ont besoin d’elles pour entretenir la maison et il n’est d’ailleurs pas souhaitable qu’elles s’en éloignent pendant une trop longue période. En outre, leurs parents dépensent moins pour leur instruction que pour celle des garçons250. Les écoles de filles seront organisées, à l’instar de celles des garçons, sur le modèle anglais. La grande différence était que les écolières devaient consacrer la moitié du temps à des activités d’aiguille. Cela aboutissait donc à un temps d’instruction deux fois moins important pour elles que pour les garçons. Dans les écoles anglaises, l’enseignement de l’écriture et de l’arithmétique était même négligé et n’avait pas lieu tous les jours. Le docteur Bally, rédacteur du Guide de l’enseignement mutuel, déplore cette situation251. En France, pour corriger cette moindre instruction des filles, sans toutefois remettre en cause l’importance des travaux d’aiguille, le comité des dames252 décide, dès 1816, d’augmenter la journée scolaire d’une heure en été. Bally voudrait même qu’on adopte l’emploi du temps ayant cours dans les hospices des sœurs de Saint-Vincent-de-Paul où les enfants sont occupés pendant dix heures quotidiennement253. En 1818, on s’accorde sur le principe suivant : le matin sera consacré à la lecture, l’écriture et l’arithmétique tandis que l’après-midi auront lieu les activités manuelles254. Les classes qui concernent les travaux d’aiguille sont alors au nombre de dix. La couture, le tricot et la broderie au plumetis255 doivent être enseignés.

Cependant, des modifications ont encore lieu peu de temps après. L’unique guide de l’enseignement mutuel de filles, rédigé par Madame Quignon et publié en 1819, en préconise quelques unes256. Tout d’abord, il s’agit de supprimer l’arithmétique pour les moins instruites des quatre premières classes et de leur donner, à la place, une leçon supplémentaire d’écriture. Ensuite, on abandonne la broderie et le tricot. On ne retient des travaux d’aiguille que la couture. On revient donc à un programme moins ambitieux et une volonté de se démarquer, cette fois, de l’enseignement dispensé aux garçons. On sait que les prescriptions données dans le manuel de Madame Quignon ont été appliquées par elle-même dans la grande école qu’elle

250

Journal d’Education, tome II, rapport sur les écoles de filles et sur le comité des dames, par M. le baron de Gérando, président, dans la séance générale du 23 août 1816, p. 301.

251

Docteur Bally, Guide des fondateurs et des maîtres, Paris, Colas, 1816, p. 277.

252 Le comité des dames est une instance formée au sein de la Société pour l’Instruction élémentaire afin de surveiller et encourager les écoles mutuelles de filles.

253 Docteur Bally, Guide des fondateurs et des maîtres, Paris, Colas, 1816, p. 278. 254

Docteur Bally, Guide de l’enseignement mutuel, Colas, Paris, 1818, pp. 247-248. 255

Sorte de broderie faite à la main avec du coton, définition trouvée dans le Dictionnaire national, tome deuxième, quatrième édition, Garnier frères, Paris, 1856, p. 915.

256

Madame Quignon, Manuel des écoles élémentaires pour les jeunes filles ou Précis de la méthode d’enseignement mutuel appliquée à la lecture, à l’écriture et à la couture, Paris, Colas, 1819. (cote BNF, 8-R-13672), pp. 20-22 et pp. 33-35.

dirigeait alors à Paris, celle de la Halle-aux-draps. Il est probable qu’elles furent également l’objet des leçons qu’elle procurait aux futures maîtresses mutuelles.

Ayant brièvement décrit les principes et l’organisation pédagogique, il s’agit maintenant de rendre compte des premières réalisations. La première école mutuelle de filles est établie par les protestants de confession luthérienne dans leur local de la rue des Billettes à Paris où les garçons sont instruits selon la même méthode. Les écolières sont au nombre de 43 et appartiennent presque toutes à des familles aisées. Cette institution ne peut donc avoir valeur d’exemple pour la société propagatrice du nouvel enseignement257. Un deuxième établissement féminin est fondé au mois d’août 1816 sous les auspices du préfet de la Seine, Chabrol de Volvic. Situé dans la rue du Pont-de-Lodi, à Paris et destiné à des enfants de milieu populaire, il est le premier vraiment conforme aux vues des fondateurs de l’enseignement mutuel. L’école est dirigée par les sœurs de l’ordre de Saint-Joseph-de-Cluny dont la supérieure et fondatrice est Anne-Marie Javouhey. La congrégation, de fondation récente, est peu nombreuse et vit assez misérablement258. La direction de cette école encouragée par les autorités est sans doute pour les sœurs de se développer et d’établir une notoriété. Ayant fait preuve de leurs capacités, quatre d’entre elles seront envoyées cinq mois plus tard sur l’île Bourbon (actuelle île de La Réunion) sous la houlette du gouvernement259. La troisième école de filles est, à l’instar de la première, d’origine protestante mais concerne, cette fois, ceux qui pratiquent le culte réformé. Elle a été créée au même moment que celle de la rue du Pont-de-Lodi, au mois d’août 1816. Elle est située rue du Coq à Paris et est due à la philanthropie de la famille Delessert260. Pour donner un véritable essor aux écoles mutuelles de filles, il est prévu de fonder un grand établissement dans une partie de la Halle-aux-draps destiné à recevoir 500 écolières. Un autre est prévu dans l’ancien collège des Grassins, tout près de l’école mutuelle de garçons de la rue Saint-Jean-de-Beauvais. En dehors de Paris, à cette époque, seules trois écoles de ce genre existent. Une à Jouy (actuel département des

257

Journal d’Education, tome II, rapport sur les écoles de filles et sur le comité des dames, par M. le baron de Gérando, président, dans la séance générale du 23 août 1816, pp. 302-303.

258

Abbé Louis Saluden, Un centenaire à Brest, 1er octobre 1826-1er octobre 1926, l’œuvre de la vénérable Anne-Marie Javouhey, fondatrice de la congrégation de Saint-Joseph-de-Cluny, Brest, 1926, p. 14. La congrégation a été autorisée par Napoléon le 12 décembre 1806.

259

Abbé Louis Saluden, op. cit., p. 26. Desbussyns de Richemont, gouverneur d’une des colonies, vint visiter l’école de la rue du Pont-de-Lodi. Il proposa à Anne-Marie Javouhey d’envoyer ses sœurs sur l’île Bourbon pour enseigner les petits enfants Noirs. Le 10 janvier 1817, quatre religieuses s’embarquent à Rochefort pour cette mission. Ainsi, les sœurs de Saint-Joseph peuvent être considérées comme le premier ordre de femmes missionnaires

260

Journal d’Education, tome II, rapport sur les écoles de filles et sur le comité des dames, par M. le baron de Gérando, président, dans la séance générale du 23 août 1816, p. 303. L’auteur du rapport explique que cette école est due à Etienne Delessert, banquier protestant, dont la mort est ré cente (1816). Ses fils, Benjamin, baron d’Empire, ainsi que François font partie des premiers membres de la Société pour l’Instruction élémentaire (Journal d’Education, tome I, p. 98 et p.99).

Yvelines) à l’initiative de l’industriel Oberkampf, la seconde à Anzin (Nord) ouverte grâce aux soins des actionnaires des mines. Enfin la troisième est dirigée à Villeneuve-Saint-Georges (actuel département du Val-de-Marne) par la congrégation de Saint-Joseph-de-Cluny déjà citée précédemment.

Ces nouvelles écoles devaient être surveillées et encouragées par deux comités de dames, l’un constitué au sein de la Société pour l’Instruction élémentaire, l’autre sous la houlette du préfet de la Seine. Dans le premier, on trouvait les épouses des fondateurs de l’enseignement mutuel, à savoir la baronne de Gérando, la comtesse de Laborde et la duchesse de Doudeauville. Dans le second, se distinguait la duchesse de Duras qui avait fondé une des premières écoles mutuelles de Paris à l’intérieur même de son hôtel particulier. On y remarquait également la comtesse de Chabrol, la femme du préfet de la Seine261. D’ailleurs, à côté de ces dames, il faut distinguer le premier magistrat de Paris parmi les hommes qui agissent particulièrement en faveur de l’enseignement des filles. C’est lui, en effet, qui impulse la création de l’école de la rue du Pont-de-Lodi et qui favorise celle de la Halle-aux-draps. Il cherche encore à en implanter une autre dans le faubourg Saint-Honoré262. Enfin, voulant prolonger son oeuvre, il établit, en avril 1817, un cours normal pour la formation des maîtresses à l’exercice de la nouvelle méthode, le premier du genre263. Il confie cette institution aux soins de Madame Quignon, directrice de la plus importante des écoles mutuelles de filles de la capitale. Poursuivant sa tâche de formatrice, celle-ci rédigera, à l’instar de Nyon et Bally, un guide pédagogique spécifique pour aider les maîtresses à conduire leur établissement264.

Trois ans plus tard, le 28 avril 1819, le comité des dames de la Société rendait un rapport dans lequel elles signalaient l’existence de sept écoles mutuelles de filles à Paris. Outre les deux écoles protestantes et celle fondée par les religieuses de Saint-Joseph-de-Cluny, existant déjà en 1816, on comptait désormais l’école installée à la Halle-aux-draps qui était, de loin, la plus nombreuse avec ses 319 élèves. Celle qui avait été projetée dans l’ancien collège des Grassins était également en pleine activité et réunissait 100 écolières. Enfin, deux établissements fondés par deux dames notables avaient vu le jour. Le premier était dû à la générosité de la duchesse d’Orléans et l’autre à celle de la marquise de Pastoret. Au total, c’était 763 écolières qui étaient scolarisées dans les écoles mutuelles de la capitale à cette

261

Journal d’Education, tome II, liste des dames inspectrices des écoles de filles, p. 349. 262

Journal d’Education, tome II, rapport sur les écoles de filles et sur le comité des dames, par M. le baron de Gérando, président, dans la séance générale du 23 août 1816, pp. 302-305.

263

Journal d’Education, tome IV, rapport sur les travaux du conseil d’administration fait à l’assemblée générale du 16 avril 1817, par M. Jomard, l’un des secrétaires, p. 45.

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époque265. Les inspectrices sont satisfaites de la marche de tous ces établissements. Elles regrettent cependant que dans l’école de la rue du Pont-de-Lodi, l’écriture ne soit pas portée à un degré suffisant de perfectionnement. Elles pensent que l’instruction élémentaire des petites filles pauvres doit durer assez longtemps pour être efficace. En cela, leur jugement diffère de ce que Gérando exprimait trois ans plus tôt. Elles affirment ainsi : « Les exercices de lecture, d’écriture et d’arithmétique, sont très satisfaisants, lorsque les parents laissent les jeunes filles à l’école le temps nécessaire pour y terminer leurs classes. Le comité des dames fait à cet égard tous ses efforts pour conserver les enfants le plus possible ; car il sent quelle importance il y a pour ces jeunes filles à ce qu’elles ne quittent l’école qu’après y avoir passé assez de temps pour y recevoir l’impression des idées religieuses et morales, base principale de toute éducation266. »

Au début de l’année 1820, Jomard compte 807 écoles mutuelles en activité sur tout le territoire national. Parmi elles, 67 sont des écoles des filles, ce qui fait environ une école de filles pour 11 écoles de garçons267. Il est évident qu’elles avaient été délaissées par les philanthropes et les notables locaux. Elles ne figuraient pas parmi les priorités. Cependant, c’était la première fois qu’on assistait à une tentative d’organiser à l’échelle du pays un système d’enseignement cohérent pour elles et qui se rapprochait de celui de leurs homologues masculins. En outre, on contribuait à les détacher de la tutelle congréganiste qui avait marqué leur instruction jusque là, surtout pour les plus pauvres.

Au total, les débuts de l’enseignement mutuel pour les filles étaient marqués par les préjugés du temps sur le rôle des femmes dans la société. Celles-ci n’étaient vues qu’à travers leur destin d’épouses et de mères. Elles étaient la matrice sur laquelle la morale des individus se formait. Pour les philanthropes de la Société pour l’Instruction élémentaire, il était nécessaire que les futures mères devaient être instruites. Ainsi, elles pourraient éduquer leurs enfants selon les meilleurs principes moraux. Les protestants avaient été les premiers à s’engager dans l’aventure. Du côté catholique, un ordre de religieuses, celui fondé par Anne-Marie Javouhey, s’était aussi distingué en ralliant la cause de l’enseignement mutuel décrié

265

Journal d’Education, tome VIII, rapport du comité des Dames inspectrices des écoles élémentaires d’enseignement mutuel établies à Paris (présenté à l’assemblée générale du 28 avril 1819), pp. 48-51. A cette époque, il existe sept écoles mutuelles de filles : l’école de la Halle-aux-draps (319 élèves), l’école située dans l’ancien collège des Grassins (100 élèves), l’école de la rue du Pont-de-Lodi (70 élèves), l’école fondée par la duchesse d’Orléans, rue Coquenard (48 élèves), l’école fondée par la marquise de Pastoret, faubourg du Roule (76 élèves), l’école luthérienne, rue des Billettes (80 élèves) et l’école du culte réformé, rue du Coq-Saint-Jean (70 élèves).

266

Journal d’Education, tome VIII, rapport du comité des Dames inspectrices des écoles élémentaires d’enseignement mutuel établies à Paris (présenté à l’assemblée générale du 28 avril 1819), p. 49. 267

Journal d’Education, tome IX, rapport fait à l’assemblée générale du 3 février 1820, sur le nombre et les progrès des écoles de France, pp. 270-271.

alors par la plupart des ecclésiastiques. Enfin, de grandes bourgeoises, certaines à l’instar de leurs maris, avaient fondé des établissements et encourageaient le développement de l’instruction féminine.

La mentalité de l’époque considérait que les filles devaient en savoir moins que les garçons. Héritées du système anglais, les écoles mutuelles de filles confirmaient cette vision. Elles accordaient ainsi une part importante aux travaux d’aiguille. La moitié du temps leur était consacrée. Mais rapidement, on avait senti que cela était préjudiciable aux enseignements intellectuels. Le comité des dames chargé de surveiller les écoles de filles avait alors commencé par vouloir allonger la journée des écolières. Mais, sans doute, constatant l’inefficacité de cette mesure, elles avaient fini par encourager l’allongement de leur scolarité. En prônant ces changements d’habitude, elles montraient leur désir d’élever l’instruction des filles au niveau de celui des garçons. Ainsi, à l’instigation de ces bourgeoises philanthropes, apparaissait une volonté émancipatrice, certes timide mais cependant remarquable.

B) En Bretagne, des initiatives timides et privées

Dans le Finistère, des écoles pour la bourgeoisie

La seule ville, en Bretagne, à l’époque de la Restauration, qui tente de fonder des écoles mutuelles gratuites pour les filles indigentes, c’est Brest. L’idée d’un tel établissement s’était fait jour assez tôt parmi les autorités locales mais l’urgence devait être d’abord portée sur les écoles de garçons. Au début de l’année 1820, la municipalité brestoise ayant financé leur installation, le maire relance l’idée d’une école pour les filles268. Cependant, l’ensemble de son conseil, sans être opposé sur le principe, pense qu’il vaut mieux ajourner cette décision. Les conseillers objectent qu’il faudra établir deux écoles, comme pour les garçons, l’une du côté de Brest, l’autre du côté Recouvrance. Ils estiment alors que la dépense sera trop forte269.

Cette réponse ne satisfait pas certains notables, notamment le sous-préfet qui déclare :

« Si l’établissement des deux écoles est nécessaire, il ne l’est pas qu’elles soient fondées toutes les deux dans le même temps et qu’on ne doit pas s’abstenir de faire un peu de bien

268

AM, Brest, registre de correspondance du maire de Brest avec le sous-préfet, document non coté, lettre adressée le 31 janvier 1820.

269

parce qu’on ne peut pas réaliser simultanément tout celui qu’on désire270. » Ce dernier soutient le plan élaboré par un membre du comité cantonal d’instruction primaire, Jossic. Ce dernier a prévu l’organisation d’une école pour 150 filles dans un local loué par la mairie. Il a établi le financement du projet qui s’élève à 2 574 francs sans compter la rémunération de la maîtresse et le loyer271. C’était beaucoup plus que ce qu’avaient coûté les premiers frais d’établissement pour l’école mutuelle des garçons de Recouvrance, à savoir 1 500 francs272. Il faut dire qu’en organisant une école de filles, on devait prendre en compte du matériel nécessité par les travaux d’aiguille. Jossic avait évalué cette seule dépense à 1 500 francs. La municipalité ne retiendra pas ce projet. Le coût de l’opération avait sans doute pesé dans le choix des conseillers.

On ne reparlera plus de ce projet par la suite, surtout après 1822, lorsque la municipalité prendra ses distances avec l’enseignement mutuel qu’elle avait encouragé pleinement jusque là. Désormais, les destinées de l’instruction primaire féminine seront confiées aux congréganistes. En 1823, les sœurs de la Providence arrivent à Brest et fondent une école dans laquelle elles instruisent rapidement 200 petites filles273. Deux ans plus tard, la municipalité décide d’accorder à ces religieuses 1 600 francs274. Elle paraît ainsi satisfaite de l’œuvre que les sœurs accomplissent dans leur ville où elles scolarisent maintenant 250 élèves indigentes gratuitement275. En 1827, sans doute encouragé par cet exemple, on décide d’accepter l’installation d’une école dirigée par les sœurs de Saint-Joseph-de-Cluny pour la