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A Saint-Brieuc, l’école des « Bleus »

Chapitre 3 : Les sociétés locales

2. A Saint-Brieuc, l’école des « Bleus »

A) Des partisans dans l’ombre

A Saint-Brieuc, l’idée de fonder une école mutuelle est en germe dès 1816 mais il faut attendre la fin de l’année 1818 pour voir le projet se concrétiser. Pourtant, à l’origine, la nouvelle méthode possède un soutien d’importance en la personne du préfet, le comte Pépin de Bellisle, mais celui-ci n’a pas le temps de passer au stade de la réalisation134. A ses côtés, d’autres notables s’intéressent également à l’enseignement mutuel. Pépin de Bellisle cite ainsi un dénommé Rouxel. Il déclare à son propos : « Vous allez avoir une école d’enseignement mutuel à Saint-Brieuc (…), je me réjouis surtout de voir que le conseil municipal ait voté une somme pour les premiers frais d’établissement, parce que cela prouve que le révérend père Prudhomme135 aura été converti à la nouvelle méthode par notre ami Rouxel136. » Il s’agit sans doute de Claude Rouxel, négociant à Saint-Brieuc et également conseiller municipal au moment de la Restauration137. Sous l’Empire, il dirigeait à la fois une filature de coton où il

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AM, Landerneau, série R, états de situation de l’école mutuelle de Landerneau, avril, juin, octobre, novembre et décembre 1820 ; état nominatif des élèves à l’époque du 21 juillet 1828 ; AN, F17, 11 778, états de situation de l’école mutuelle de garçons de Landerneau, 2e et 3e trimestres 1822. D’après ces états, le nombre des élèves de cette école oscille entre 30 et 60 élèves, suivant les périodes. En 1822, Tourrette évalue à 1 200 francs les

dépenses annuelles. Celles -ci doivent être couvertes par les rétributions des élèves payants. Il indique 2 francs de rétribution mensuelle à cette époque. A ce tarif, cinquante élèves payants sont nécessaires, nombre que l’école n’atteint pas. Il faut en déduire que, soit les fondateurs se servent de leurs fonds personnels pour régler la différence, soit ils réduisent les appointements du maître.

134 Pépin de Bellisle est préfet des Côtes -du-Nord du 15 juillet 1815 au 3 mai 1816, extrait du répertoire nominatif du personnel préfectoral, 1800-1880, Archives Nationales, 1999.

135 Il s’agit du maire de Saint-Brieuc. L’expression employée par le préfet pour le désigner est tout à fait ironique et se moque de la bigoterie du personnage.

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Bulletins et mémoires de la Société d’Emulation des Côtes-du-Nord, 68 (1937), « La Restauration dans les Côtes-du-Nord : le préfet comte Pépin de Bellisle », extraits de la correspondance de Pépin de Bellisle adressée à Mlle Le Loutre, directrice de la poste à Saint-Brieuc, lettre du 12 septembre 1818, pp. 129-130.

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AD 22, 3 M 492, extrait de l’ordonnance du roi qui nomme Claude Rouxel aux fonctions de conseiller municipal de la ville de Saint-Brieuc, 6 juin 1816.

employait 120 ouvriers et une tannerie qui en occupait une vingtaine d’autres138. Son attitude politique le situe entre bonapartisme et libéralisme. Pendant les Cent-Jours, il fait partie de l’éphémère conseil municipal nommé par l’Empereur139. Il est également élu représentant à la Chambre où il siège dans la majorité. Cela ne l’empêchera pas d’être réélu député au début de la deuxième Restauration, soutenant le ministère contre les ultras140. Outre ce négociant, on connaît l’engouement que mit Pierre-Ange Chevalier141, rédacteur du Journal des Côtes-du-Nord, pour informer l’élite locale sur les progrès de cette nouveauté142.

Cependant, avec l’arrivée du nouveau préfet, Conen de Saint-Luc, la situation devient moins favorable. En effet, ce dernier ne paraît pas aussi enthousiaste que son prédécesseur. N’étant sans doute pas très enclin à encourager la nouvelle méthode, il déclare au ministre de l’Intérieur : « L’instruction mutuelle n’a pas encore beaucoup de partisans dans ce département. Les mœurs antiques des Bretons se familiarisent difficilement avec les nouvelles découvertes (…) Votre Excellence m’approuvera sûrement de n’avoir rien brusqué, et de n’avoir pas voulu faire violence aux habitudes143. »

Pourtant, en avril 1817, le conseil municipal de Saint-Brieuc avait, tout en souhaitant le rétablissement des Frères des Ecoles chrétiennes, émis le vœu que ceux-ci s’approchassent le plus possible de l’enseignement mutuel. Cela indiquait que certains membres de l’assemblée municipale soutenaient déjà ce type d’enseignement. D’ailleurs, l’opinion des conseillers municipaux continuera d’évoluer par la suite. Ainsi, un an après, en juin 1818, ils envisagent la coexistence des deux écoles en accordant 1 800 francs à celle des Frères et 1 200 francs à celle dirigée selon la nouvelle méthode. Enfin, en décembre 1818, ils attribuent la même somme aux deux établissements concurrents. Cette opinion de plus en plus favorable à l’enseignement mutuel désolera le maire, Prud’homme, farouche défenseur des Frères et allié du clergé dans cette affaire.

L’attitude timorée du préfet, au-delà de son sentiment personnel, est sans doute à mettre au compte de l’opposition cléricale qui s’est dessinée dès qu’il fut question d’implanter les nouvelles écoles dans le département. Son chef de file, Jean-Marie de La Mennais, vicaire

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AM, Saint-Brieuc, 2 F 9, état des établissements industriels présents à Saint-Brieuc, 10 octobre 1810. 139

AD 22, 3 M 492, arrêté de nomination du conseil municipal, 4 mai 1815. 140 Jean Pascal, Les députés bretons, Paris, PUF, 1983, p. 126.

141 Patricia Sorel, La Révolution du livre et de la presse en Bretagne, 1780-1830, Rennes, PUR, 2004, p. 257. 142Journal des Côtes-du-Nord, AD 22, 4 Mi 6, R 4. Nous avons compté sept articles traitant de l’enseignement mutuel entre décembre 1815 et avril 1816, soit cinq mois de parution. La première mention des nouvelles méthodes a été faite à travers une annonce en faveur du Journal d’Education, le 2 novembre 1815, n° 752. Il s’agissait d’un journal politique contrôlé étroitement par le préfet. Il est vraisemblable que ce dernier ait eu une influence sur la parution de ces articles. D’ailleurs, après son départ du département, en mai 1816, il faut attendre un an avant de voir un article consacré à ce sujet.

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général du diocèse, a engagé un combat sans merci contre elles. Ainsi, il déclare sans ambages au ministre de l’Intérieur : « Depuis deux ans il est question d’établir dans le département des Côtes-du-Nord des écoles d’enseignement mutuel ; je m’y suis opposé pour deux raisons : 1) parce que je crois cette méthode dangereuse ; 2) parce que dans ce pays-ci elle n’a pour partisans que les ennemis de Dieu et du Roi144. » Son but est alors de faire venir le plus vite possible les Frères à Saint-Brieuc pour concurrencer les écoles que le gouvernement et les libéraux veulent mettre en place.

B) Les partisans se manifestent

Déjà, la décision du conseil municipal en faveur de l’enseignement mutuel, avait encouragé ses partisans mais la pression exercée par Laîné, ministre de l’Intérieur, va leur permettre d’agir au grand jour. En effet, ce dernier insiste auprès du préfet pour que des écoles selon la nouvelle méthode soient fondées. Il s’étonne que le département des Côtes-du-Nord soit le seul de Bretagne à n’en avoir aucune. Du coup, Conen-de-Saint-Luc, peut-être inquiet pour sa future carrière, va s’employer à satisfaire les désirs de son supérieur. Il demande au maire de former une souscription pour aider à la fondation d’une école mutuelle à Saint-Brieuc. Celle-ci aura l’avantage, lui écrit-il, de compléter les 1 200 francs accordés par le conseil municipal dans sa séance du 8 juin 1818145. Mais le maire n’est pas dupe. En effet, il craint qu’une telle initiative n’encourage ses adversaires et ne leur confère une légitimité dans la direction du futur établissement. Comme il ne peut plus empêcher l’école honnie de s’établir, il tente de sauver l’essentiel en imposant, comme préalable à toute souscription, la désignation d’un maître dévoué au clergé. Pour ce faire, il s’arrange avec les deux principaux curés de Saint-Brieuc, Messieurs Nais et Glen, pour faire le tri parmi les nombreuses candidatures qui ont été déposées et proposer un nom que le comité cantonal n’aura plus qu’à entériner146. Cette manœuvre est toutefois déjouée par le conseil municipal qui préfère un maître venu de Paris147.

144 Jean-Marie Robert de La Mennais, Correspondance générale, tome deuxième, 1818-1832, textes réunis et annotés par Frère Philippe Friot, Rennes, PUR, 2001, lettre 817, p. 88, lettre adressée au ministre de l’Intérieur et écrite avant novembre 1818.

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AD 22, 1 T 152, extrait du registre des délibérations du conseil municipal de la ville de Saint-Brieuc, 8 juin 1818.

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AD 22, 1 T 152, extrait du registre des délibérations du comité gratuit d’instruction primaire, 31 août 1818. D’après ce document, on s’aperçoit que seuls sont présents, Prud’homme, maire de la ville de Saint-Brieuc, Nais, curé de la cathédrale, également président du comité cantonal, et Glen, curé de Saint-Michel.

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Quant à la souscription pour financer l’école mutuelle, celle-ci réussit pleinement, rapportant près de 1 400 francs148 versés par 51 personnes. Ces derniers font partie de l’élite briochine de l’époque. On relève, parmi eux, la présence de personnages importants dont Legeard de la Diriais, procureur du roi, Prissé, directeur des contributions directes, Latimier-Duclésieux, receveur général, Chaplain, président du tribunal de commerce et Guynot-Boismenu, vice-président du tribunal de première instance. Le préfet, lui-même, voulant sans doute montrer sa bonne volonté, a souscrit pour cent francs, soit la plus grosse somme. Il faut aussi remarquer l’absence du maire qui tient alors à marquer publiquement son désaccord avec l’enseignement mutuel.

Si l’on considère la situation sociale des donateurs, dix-huit ont des professions de justice, soit le milieu le plus représenté, rassemblant plus du tiers des souscripteurs149. Douze sont des fonctionnaires appartenant pour la plupart à des administrations financières ou fiscales. Dix autres se déclarent propriétaires. On note quatre professions libérales : deux notaires, un pharmacien et un médecin. A l’opposé, le monde l’artisanat et du commerce semble sous-représenté dans une liste où figurent seulement un orfèvre, un tailleur, un libraire et un marchand. Enfin, avec un seul officier, les militaires sont pratiquement absents150.

148 AM, Saint-Brieuc, 1 R 2, souscription proposée par les personnes qui désirent concourir à l’établissement d’une école d’après le mode d’enseignement mutuel, 11 décembre 1818. La somme exacte était 1391,85 francs. Voir annexe 3.

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Parmi ces dix-huit professions de justice, on relève six avocats, trois avoués, trois juges, deux greffiers, le président du tribunal de commerce et trois fonctionnaires importants : le procureur du roi, son substitut et le vice-président du tribunal de première instance.

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Il faut signaler deux souscripteurs dont nous n’avons pas pu déterminer la situation sociale. Il s’agit de Gouyon-Thaumatz et Peyrode.

Situation sociale des souscripteurs pour l’enseignement mutuel à Saint-Brieuc151 professions de justice 34% fonctionnaires 24% propriétaires 20% professions libérales 8% commerce et artisanat 8% militaires 2% situation non connue

4%

Concernant les sommes versées, les trois-quarts sont inférieures ou égales à 30 francs. Parmi les plus généreux donateurs, il faut signaler Conen-de-Saint-Luc, le préfet, et Latimier-du-Clésieux, le receveur général, dont la souscription s’élève, pour chacun d’eux, à 100 francs. Remarquons également Houvenagle, Guynot-Boismenu, Chaplain et Ropartz dont la contribution dépasse 50 francs, ceux-ci feront partie des membres les plus actifs de la commission qui sera instituée quelques mois plus tard pour surveiller le nouvel enseignement.

L’action des partisans de l’enseignement mutuel à Saint-Brieuc aurait pu en rester là. En effet, ceux-ci ont recueilli une somme importante pour aider à la fondation de l’établissement souhaité et il ne paraît pas nécessaire de constituer une société de souscripteurs comme à Nantes. C’est le maître, Rémond, qui confronté à l’opposition cléricale et voulant être plus soutenu, se tourne vers la Société de Paris afin qu’elle intervienne en ce sens. Celle-ci réagit sans tarder. Elle en appelle à l’action du ministre et du nouveau préfet, Rousseau de Saint-Aignan152. Dans un premier temps, ce magistrat, malgré ses sympathies

151 La situation sociale des souscripteurs a pu être établie à l’aide des trois documents suivants :

1°. AM, Saint-Brieuc, 1 R 2, souscription proposée par les personnes qui désirent concourir à l’établissement d’une école d’après le mode d’enseignement mutuel, 11 décembre 1818. Annexe 3.

2°. AM, Saint-Brieuc, 1 R 12, lettre de la commission pour l’enseignement mutuel adressée aux souscripteurs pour les inviter à la distribution des prix du 25 août 1819.

3°. AD 22, 1 T 152, pétition des habitants de Saint-Brieuc en faveur de Rémond, datée du 9 juillet. Annexe 4. 152

AD 22, 1 T 152, lettre de la Société pour l’Instruction élémentaire au ministre de l’Intérieur, 25 juin 1819 ; lettre de la Société pour l’Instruction élémentaire au préfet des Côtes-du-Nord, 27 juin 1819.

pour la nouvelle méthode, préfère attendre avant de nommer la commission voulue par Rémond. Mais le temps presse car les menaces sur l’école mutuelle se font, chaque jour, plus lourdes. Ainsi, le maître s’est vu enlever ses meilleurs moniteurs par les manœuvres de quelques prêtres. Pour le soutenir, en juillet 1819, une pétition est signée par 205 habitants de Saint-Brieuc153. Parmi eux, non seulement des notables mais aussi des gens du peuple.

C) Une commission plutôt bleue

Finalement, le 14 août 1819, le préfet réunit les souscripteurs. Sur les 51 personnes concernées, seules 35 se déplacent. Le magistrat les invite à former une société et à choisir en leur sein une commission. Le but de celle-ci est clairement définie : « exercer une surveillance active et continue sur les écoles d’enseignement mutuel de Saint-Brieuc ; pourvoir en tant que besoin, à tout ce qui peut assurer à ces établissements les moyens de se développer et de s’accroître ; les protéger et les défendre ; et enfin correspondre, pour tous les objets qui intéressent la prospérité et la propagation des dites écoles, soit avec les autorités locales, soit avec le conseil d’administration de la société établie à Paris, près le ministère de l’intérieur154. » Le préfet, Rousseau de Saint-Aignan, annonce également qu’il en sera le président. Ensuite, on procède au vote des membres qui doivent faire partie de cette commission. Au préalable, il est rappelé que les membres du conseil municipal ne sont pas éligibles, étant donné qu’ils pourront être amenés à délibérer sur des propositions émanant de cette commission. Les résultats du scrutin donnent, pour 35 votants :

Boullé, avocat, 33 voix.

Houvenagle, propriétaire, 32 voix.

Chaplain, président du tribunal de commerce, 31 voix. Bienvenüe, avocat, 31 voix.

Leuduger-Fortmorel, propriétaire, 29 voix.

Guynot-Boismenu, vice-président du tribunal civil, 28 voix. Ducouëdic, avocat, 27 voix.

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AD 22, 1 T 152, pétition des habitants de Saint-Brieuc en faveur de Rémond, directeur de l’école modèle mutuelle de Saint-Brieuc, 9 juillet 1819.

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AD 22, 1 T 152, procès verbal de l’assemblée des souscripteurs pour l’enseignement mutuel, et de la nomination de la commission de la société, 14 août 1819.

La commission, de par sa composition, confirme la part prépondérante des professions de justice, ce que l’on avait déjà noté chez les souscripteurs. Elle l’amplifie même puisque sur sept sièges, cinq sont occupés par des hommes de loi. Les deux autres sièges se voient attribués à des propriétaires. Notons qu’aucun fonctionnaire n’en fait partie alors qu’ils représentent presque un quart des souscripteurs. Quatre de ces hommes sont assez jeunes. Il s’agit de Boullé, 32 ans, Houvenagle, 41 ans et Ducouëdic, 45 ans ainsi que Guynot-Boismenu dont on ne connaît pas l’âge précis155. Les trois autres appartiennent à une génération plus âgée : Leuduger-Fortmorel a 56 ans, Bienvenüe, 59 ans et Chaplain, 63 ans.

Concernant leur opinion politique, il est intéressant d’examiner à quel courant ils appartiennent. On connaît la crainte du préfet quant à l’esprit de parti qui pourrait animer ceux qui soutiennent l’école mutuelle mais qu’en est-il vraiment ? Vu la suspicion qui règne pendant la Restauration et la surveillance active du clergé, il ne faut pas s’attendre à trouver dans les documents consultés des déclarations qui pourraient trahir une pensée partisane. Cependant, les fonctions que ces notables ont occupées ou occuperont renseignent suffisamment sur leur appartenance politique.

Ainsi, Germain Boullé est le fils de l’ancien préfet des Côtes-du-Nord, en exercice pendant tout le premier Empire156. Lui-même a été sous-préfet de l’arrondissement de Vannes de 1809 à 1815 et sera préfet du Finistère pendant la monarchie de Juillet, de 1836 à 1848157.

Louis Bienvenüe est un ancien patriote. Secrétaire en chef du district de Lamballe en 1791, il faillit cependant devenir victime de son opposition aux injonctions jacobines. Avocat depuis 1781, il fait une brillante carrière dans la justice. Il devient juge en 1811, puis vice-président du tribunal de Saint-Brieuc158. Pendant les Cent-Jours, il fait partie de l’éphémère conseil municipal nommé par l’empereur et est également élu représentant à la Chambre. Chassé de ses fonctions au tribunal par la Seconde Restauration, il redevient simple avocat. C’est lui qui va bientôt rédiger un long pamphlet en faveur de l’enseignement mutuel pour répondre à une brochure de Jean-Marie Robert de La Mennais contre la nouvelle méthode.

Leuduger-Fortmorel a été deux fois maire de Saint-Brieuc, une fois sous le Premier Empire, de 1809 à 1814, et une autre fois pendant les Cent-Jours, prouvant ainsi sa fidélité à

155 Jean-Marie Robert de La Mennais, Correspondance générale, op. cit., tome premier, 1810-1817, lettre 302, à M. Bruté de Rémur, 10 août 1815, pp. 324-325. Jean-Marie Robert de La Mennais déclare dans cette lettre :

« On vient de nous donner un nouveau maire : C’est Mr. Bois(menu), jeune avocat, qui va remplir cette place si importante . Nous sommes contents de ce choix. »

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René Kerviler, op. cit. D’après cet ouvrage, Jean-Pierre Boullé, père de Germain Boullé, a été préfet des Côtes-du-Nord, de l’an VIII à 1814. Il a été également nommé baron de l’Empire en 1809.

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Ibid. 158

Jacques Brengues, Les francs-maçons dans la ville, Saint-Brieuc, 1760-1990, Rennes, éditions Soreda, 1995, pp. 142-143.

Napoléon159. Marc Ducouëdic sera membre du conseil municipal sous le régime de Juillet160. Houvenagle, riche propriétaire, ancien conseiller de préfecture pendant l’Empire161, sera dans le conseil municipal après 1830 où il est considéré comme appartenant à l’opposition démocratique de centre gauche162. Guynot-Boismenu est sans doute le plus modéré de tous puisque c’est lui qui avait été choisi par les autorités pour remplacer Louis Bienvenüe, chassé de la vice-présidence du tribunal de première instance en 1816. C’est également lui qui avait remplacé, au même moment, Leuduger-Fortmorel, dans ses fonctions de maire de Saint-Brieuc163. Jean-Marie de La Mennais, dont on connaît les opinions ultra-royalistes, avait d’ailleurs, à cette époque, approuvé ce choix164. Quant à Chaplain, il semble être en retrait de la vie politique et on ne connaît pas son opinion.

En résumé, la plupart de ces hommes ont, soit été liés au régime impérial, ou seront favorables à celui de la monarchie de Juillet. Si on ajoute que quatre, parmi eux, sont ou ont été francs-maçons, tels Leuduger-Fortmorel, Chaplain, Bienvenüe et Ducouëdic165, que ceux qui ont des enfants ne craignent pas de les envoyer à l’école mutuelle où ils côtoient les fils du peuple166, on peut considérer que ces notables sont assez imprégnés des idéaux de 1789 et de l’esprit des Lumières. Dans cet ensemble plutôt cohérent idéologiquement, seul Guynot-Boismenu paraît avoir eu une opinion modérée, sans appartenance particulière. On comprend alors, les foudres de Jean-Marie de La Mennais qui voit en ces hommes des opposants au roi et à la religion.

159 Jules Lamare, Histoire de la ville de Saint-Brieuc, Saint-Brieuc, 1884, réédition, 1995, p. 266 ; AD 22, 3 M 492, arrêté de nomination du conseil municipal, 4 mai 1815.

160 AD 22, 3 M 492, extrait des registres du conseil municipal de la ville de Saint-Brieuc, 28 novembre 1831. Avec 48 voix obtenues lors de l’assemblée électorale, Marc Ducouëdic est le mieux élu de tous les conseillers.