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3.3 Analyse syntaxique et détection d’erreurs

3.3.1 Typologies des erreurs

Dans cette section, nous définissons la notion d’erreur et présentons quel-ques typologies. Cornu (1997) distingue les erreurs des locuteurs natifs de celles d’apprenant d’une langue seconde. Il définit une erreur comme "un écart par rapport à l’usage bien défini de la langue" (p. 3). Dans un premier temps, Cornu (1997) et Danna (1997) adoptent une analyse contrastive selon laquelle les apprenants d’une langue seconde ont tendance à transférer à la langue seconde des structures de la langue première. Ces erreurs sont appeléesinterférences ou transfert négatif:

Niveau orthographique : address prend deuxd en anglais etadresse un seul en français ;

Niveau morphologique :des francophones écriront*the book of Jack au lieu de Jack’s book;

Niveau syntaxique : par exemple l’ordre des mots, avec un *gris mur par rapport àa grey wall ouil veut être *un médecin (← he wants to be a doctor) ;

Niveau lexical :les faux-amis commelibrary(bibliothèque) ↔librairie (bookshop).

Cependant, les apprenants commettent également des erreursintralangue, pour lesquelles ils tentent d’appliquer des règles qui n’ont pas lieu d’être :

Surgénéralisation de règles:

Niveau morphologique : règle régulière appliquée aux verbes irré-guliers (*allerai pour irai) ;

Niveau syntaxique : des règles d’inversion applicables aux inter-rogatives directes appliquées aux interinter-rogatives indirectes (*je ne sais pas où iras-tu) ;

Niveau sémantique : des mots sont appliqués à un contexte inap-proprié (?cette voiture est séduisante, où l’on attribue des carac-téristiques humaines à un objet ; l’acceptabilité de cette tournure est une question de style, de niveau de langue et d’interprétation, d’où le point d’interrogation) ;

Simplification excessive :des éléments sont omis, comme dans*je gar-çon, où le verbe être serait omis par un locuteur d’une langue où ce verbe peut être omis ou n’existe pas ;

Surélaboration : cette construction est l’inverse de la précédente ; l’ap-prenant construit une structure trop compliquée (*la femme dont au sujet de laquelle je t’ai parlé).

Les apprenants développent aussi des stratégies pour éviter les erreurs.

Ils auront ainsi tendance à utiliser des périphrases pour pallier leur manque de vocabulaire, ils éviteront aussi certaines tournures difficiles à maîtriser.

Tassoet al.(1992) distinguent l’erreur decommission et l’erreur d’omis-sion, qui sont deux faces de l’erreur commise par un apprenant. L’erreur de commission consiste à appliquer une mauvaise règle par méconnaissance des règles. L’erreur d’omission est le fait d’ignorer l’existence d’une règle. Ces deux problèmes doivent être pris en compte pour analyser les erreurs des apprenants.

Dans sa thèse, Keller (2000) propose une théorie sur les degrés de gram-maticalité (gradience). Ce phénomène concerne selon lui tous les aspects de la grammaire. On trouve une autre théorie chez Prost (2008). Nous revien-drons sur cette notion par la suite.

Vandeventer Faltin (2003, pp. 4–5) liste les erreurs faites par des appre-nants d’une langue :

Erreurs de dérivation : création de mots inexistants en utilisant un mauvais schéma de dérivation. Ex : *nonpossible.

Erreurs d’homophonie :confusion d’un mot avec un mot plus fréquent et proche phonologiquement. Ex :reine au lieu de reigne.

Erreurs d’ordre des mots : les contraintes d’ordre ne sont pas respec-tées, souvent par analogie avec la langue maternelle de l’apprenant.

Ex .*Il jamais n’a vu.

Erreurs de genre des mots. Ex :*la soleil.

Erreurs d’auxiliaire.Ex . *j’ai né.

Erreurs d’euphonie. Ex :*ce endroit.

Erreurs de ponctuation. Ex : * il mange, et il boit.

Payette (1990) définit plusieurs critères stylistiques pour juger une phrase :

éléments lexicaux : il convient de choisir des mots appartenant à un registre adéquat suivant le type de texte ;

éléments syntaxiques : l’organisation de la phrase et de ses différents membres reflète la clarté. Il faut utiliser les bons éléments pour une transition et varier les types de phrase ;

éléments rhétoriques : il faut enrichir la prose en utilisant des expres-sions imagées et figuratives ;

éléments structuraux : la structure du discours est essentielle. Un pa-ragraphe doit être un groupe de phrases exprimant et développant une idée commune, en les co-articulant de manière adéquate.

Enfin, pour Heift et Schulze (2007), il est crucial de définir des classes d’erreurs qui conviennent à la vérification grammaticale, afin de rendre ef-ficaces à la fois la détection des erreurs et la rétroaction apportée aux ap-prenants (§2.4). Ainsi, la description d’une erreur et la rétroaction seront tout deux basés à la fois sur l’erreur individuelle et sur la classe d’erreur.

Une description cohérente aide aussi à définir les erreurs fréquemment com-mises par le même apprenant, grâce aux données contenues dans le modèle de l’apprenant (§§2.7.4.2, 2.7.4.3). Mais ces classifications posent souvent des problèmes de couverture et d’homogénéité. Nous pouvons aussi ajouter qu’il faut trouver un compromis entre les impératifs linguistiques, pédago-giques et computationnels : il est aussi important, comme nous le verrons par la suite, de ne pas alourdir le processus d’analyse ou de ne pas définir un type d’erreurs qui n’aurait qu’un bas taux de rappel des erreurs, alors qu’une granularité moins fine offrirait néanmoins une meilleure couverture.

Pour le systèmeGerman Tutor (§B.4.23), Heift et McFetridge (1999) utilise une classification hiérarchique qui permet différents niveaux de granularité, qui sont ensuite utilisés pour une rétroaction plus ou moins spécifique.

Pour terminer, mentionnons encore les ouvrages de Carbonell et Hayes (1984), Druard (1993), Schwind (1995), Ramírez Bustamante et Sánchez León (1996), James (1998), Cordier-Gauthier et Dion (2003) et Mirzaiean et Ramsay (2005), qui contiennent des typologies intéressantes.