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l’apprentissage des langues par ordinateur

2.3 Théories pédagogiques

Dans cette section, nous décrivons rapidement les théories du béhavio-risme, du socio-constructivisme et de la collaboration. Les théories de l’ap-prentissage ont été considérablement influencées par lebéhaviorisme (Skin-ner, 1954). Cette théorie se base sur le renforcement des connaissances (rein-forcement). L’acquisition des connaissances est vue comme un procédé mé-canique. L’apprenant est exposé à des stimuli dont la répétition renforce les connaissances. Celles-ci sont vues comme des habitudes. Skinner prône l’in-dividualisation de l’enseignement à travers des machines à enseigner. L’en-seignement doit alors déclencher une réaction chez l’apprenant, de sorte à modeler son comportement futur. Le contenu de la connaissance est frag-menté en pas discrets, de manière très directive et les apprenants reçoivent unfeedback (rétroaction, §2.4) immédiat, pour le renforcement des connais-sances (Levy, 1997).

Vygotsky (1962) a élaboré la théorie du socio-constructivisme, basé sur le constructivisme (Piaget, 1969) : l’individu est inséparable de son milieu social ; par conséquent la pensée et la connaissance se développent en fonc-tion de condifonc-tions sociales et historiques particulières. Ainsi, la langue et la culture influencent le développement cognitif, car elles ont un effet sur la manière qu’ont les humains d’appréhender, d’expérimenter, de commu-niquer et de comprendre la réalité et de se comporter socialement (Oxford, 1995). La connaissance est donc un processus de co-construction de savoir au cours d’une activité sociale.

La langue s’apprend par une régulation sociale puis par l’auto-régulation.

5. Pour récolter des matériaux, on se heurte souvent au problème du copyright.

Vygotsky postule l’existence d’unezone de développement proximal:

"[The Zone of Proximal Development is] the distance between the actual developmental level as determined by independent problem solving and the level of potential development as de-termined through problem solving under adult guidance, or in collaboration with more capable peers." (Vygotsky, 1962)

Appelée également zone de croissance (Oxford, 1995), cette zone peut être définie comme un ensemble de connaissances non encore acquises par l’apprenant mais qu’il a la capacité d’assimiler, avec une aide externe et des tâches de renforcement. Ces tâches doivent être intéressantes et d’une difficulté progressive. Elles doivent attirer l’attention vers les points critiques et cibler vers la forme correcte. Le but est de permettre à l’apprenant de les appliquer de manière autonome.

L’apprentissage collaboratif part de l’observation que les apprenants en tandem (ou en plus grands groupes) obtiennent des résultats supérieurs à ceux des apprenants qui résolvent un problème tout seuls (Renié et Cha-nier, 1995; Dillenbourg et al., 1996; Mendelsohn et Jermann, 1997; Cha-pelle, 2003). Chaque étape de la résolution d’un problème doit être discutée et le raisonnement doit être précisé, révisé ou réfuté. Le fait de verbali-ser ses connaissances amène l’apprenant à les renforcer en les appliquant à un contexte précis en expliquant son raisonnement à son/ses partenaires (Dillenbourg, 1994). Cette interaction entre participants peut être perma-nente, ou alors les tâches sont réparties entre les apprenants et les résultats de chacun sont ensuite assemblés. Au niveau cognitif, les apprenants se par-tagent la charge : l’apprenant au clavier ou à la souris doit se concentrer sur ses gestes et sur la frappe au clavier, tandis que l’autre ou les autres peuvent se concentrer sur le résultat. C’est pourquoi, spécialement dans le cadre de l’étude des langues, il est important de s’assurer de l’alternance des rôles, par exemple lors de la rédaction d’un texte. Il est également nécessaire de s’assurer de l’homogénéité des groupes (Dillenbourg et Schneider, 1995), au niveau des connaissances, de l’âge et d’autres facteurs distinguant les participants.

2.4 Feedback

La rétroaction (ou feedback) est un mécanisme qui traite une entrée et effectue une action ou apporte une réponse en sortie (Heift et Schulze, 2007).

Dans le domaine de l’ALAO, il s’agit de traiter une réponse de l’apprenant

et de l’évaluer de manière adéquate afin de faciliter la remédiation et le pro-cessus d’apprentissage. Selon les théories socio-constructivistes, l’apprenant doit être actif dans le processus de remédiation (Chapelle, 1998) et il ne faut pas immédiatement donner la solution correcte6. Le feedback doit être adapté au niveau de l’apprenant et ne doit pas l’induire en erreur7.

Le feedback le plus basique consiste à signaler simplement si le résultat est juste ou faux. On distingue généralement une rétroactionintrinsèque, in-hérente à la tâche, et la rétroactionextrinsèque, qui apporte des informations additionnelles. On distingue de nombreuses variantes de feedback :

– reformulation : le système énonce la phrase correcte, par exemple dans un dialogue, en accentuant le point où l’erreur a été commise ;

– feedback direct ou indirect, où l’apprenant est invité à vérifier certains points ou certaines règles, ou doit faire des exercices de remédiation ; – feedback écrit, oral ou visuel ;

– feedback progressif : partant du général, on précise de plus en plus le feedback si l’apprenant ne trouve pas ;

– feedback immédiat ou retardé ;

– feedback contrôlé par le système ou déclenché par l’apprenant ; – toutes les erreurs en même temps ou une erreur à la fois ;

– toutes les erreurs sont signalées ou seulement la ou les plus importantes d’après le niveau de l’apprenant.

Lister et Ranta (1997) proposent les types de feedback suivants, dans le cadre de l’enseignement oral par des êtres humains :

i. correction explicite : l’erreur est signalée et corrigée ; ii. reformulation : la phrase est reformulée sans erreur ;

iii. demandes de clarification : un signe de mécompréhension (pardon?) ou une question (que voulez-vous dire par ...?) ;

6. Cependant, Allen (1997) prône que les erreurs sans importance soient corrigées auto-matiquement et ne donnent pas lieu à des pénalités. Les signes de ponctuation manquants ou superflus ou les majuscules manquantes non significatives entrent dans cette catégorie.

7. Demaizière et Dubuisson (1992) soulignent qu’il peut être perturbant pour un appre-nant de voir un message du type "je ne comprends pas votre réponse" car il peut induire l’illusion que la machine est intelligente, alors que la plupart du temps, elle signifie que le concepteur du programme ou de l’exercice n’a pas anticipé ou pris en compte la réponse de l’apprenant. Cette illusion peut être accentuée par l’emploi de personnages animés dans les logiciels qui semblent dialoguer avec l’apprenant.

iv. feedback métalinguistique : commentaires, questions ou indication d’une erreur sans donner de correction (il y a une erreur,pouvez-vous décou-vrir votre erreur?, X est au masculin, etc.) ;

v. incitation (elicitation) : l’apprenant doit compléter la phrase (c’est un...), ou répondre à une question (comment ça s’appelle?, how do we say X in French?, etc.) ;

vi. répétition : la phrase est répétée en accentuant le lieu de l’erreur ;

Parfois les enseignants combinent ces différentes stratégies. La reformula-tion n’est pas efficace car elle n’incite pas l’apprenant à s’autocorriger, ni la correction explicite. Les autres stratégies sont bien plus efficaces et favorisent l’assimilation (Lister et Ranta, 1997). Heift et Schulze (2007) soulignent qu’il est important de prendre en compte le facteur temps. Une erreur déjà com-mise dans une session bien antérieure pourrait avoir moins de poids qu’une erreur commise dans la même séance.