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Section 2 : Découverte et exploitation du pétrole

1.2.4. Type de contrat entre le Tchad et le consortium

L'Etat tchadien et le consortium sont liés par un type de contrat où les recherches, l’exploitation et la commercialisation du pétrole est l’affaire exclusive du consortium. Ce dernier est détenteur d’un droit minier de recherche et d’exploitation pour une période de 5 ans renouvelables deux fois. Au cas où, la recherche s’avérerait concluante, le consortium obtiendrait un droit d’exploitation et de commercialisation du pétrole pendant 50 ans renouvelables. D’ailleurs c’est ce type de contrat similaire qui avait prévalu dans la plupart des pays producteurs de pétrole notamment dans la région du golfe persique en particulier en Arabie Saoudite car ces pays à l’époque n’avaient pas une maîtrise de l’industrie pétrolière15.

Ainsi, le Tchad peut bénéficier des recettes16 sous forme des redevances ou royalties (indemnisation du propriétaire du sous-sol) qui s’élèvent à 12,5% (les pays du Proche – Orient avaient signé en 1948 le même taux de royalties mais celui-ci avait été remis en cause par la suite) de la production brute et de la taxe sur les profits (bénéfices) nets du consortium.

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Voir l’histoire accablante du pétrole et des affaires bancaires dans la guerre privatisée de l’Angola dans Global Witness.

15

Voir le marché du pétrole, Août 1999 16

R=12,5%(p – t - d).Q où : R : revenus pétroliers tirés de la redevance p : prix d’un baril de pétrole sur le marché international

t : coût unitaire de transport d : la décote

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A ces deux revenus principaux, il faut ajouter les dividendes de la participation au capital de Totco et Cotco, et la taxe sur le pipeline.

Cependant, le consortium bénéficie des exonérations fiscales sur une période de 10 ans pour compter de la date de sortie sur le marché international du 1er baril de pétrole. Ces exonérations prennent en compte tous les investissements réalisés par le consortium depuis la prospection en 1969, en passant par les équipements, l’exploitation et les prospections qui s’effectueront sur les différentes localités du pays que leur permis couvre.

En somme, les avantages que le Tchad doit tirer de l’exploitation du pétrole semblent être dérisoires par rapport à ceux du consortium, vu les nombreuses exonérations accordées à ce dernier. Pour preuve, l’article 4 de l’avenant n°2 à la convention de recherches stipule : " A l’exception de la redevance sur la production et de l’impôt direct sur les bénéfices, le consortium, ses actionnaires et les sociétés affiliées sont exonérées de tout autre impôt direct sur le revenu frappant les résultats des opérations pétrolières, les bénéfices et les distributions de bénéfices, et de toute taxe, droit, impôt ou contribution de quelque nature que ça soit frappant la production ou la vente des hydrocarbures et tout revenu y afférent, ou exigible sur les opérations pétrolières ou à l’occasion de l’établissement et du fonctionnement du consortium".

En effet, le contrat pétrolier est fonction de la haute rentabilité de l’or noir à exploiter et d’une facilité d’exploitation du gisement, or le Tchad ne remplit pas totalement ces conditions. L’exploitation du gisement tchadien ressemble plus à une exploitation off-shore puisque le coût est très élevé à cause de la construction du pipeline, et compte tenu de sa qualité, le prix du baril tchadien doit subir une décote de l’ordre de 3 dollars par baril par rapport au prix du baril de Brent et enfin l’enclavement du pays font que le consortium ne pourrait accepter des taux d’imposition fiscaux très élevées à l’image des grands pays pétroliers où les compagnies se bousculent à leur porte malgré une taxation à plus de 70%.

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Ainsi, le rédacteur en chef de la lettre Afrique Energies (entretien du 16 mai 2000) trouve ce contrat légal par rapport à la pratique existante dans le milieu pétrolier et la Banque mondiale l’estime raisonnable. Cependant, si ce contrat est conforme par rapport au milieu, et que son champ d’application couvre les trois zones (Komé – Miandoum – Bolobo) sont encore raisonnables. Mais le fait que le contrat s’étend au delà des produits des gisements actuels semble être anormal surtout que le pipeline sera amorti et le coût d’exploitation des éventuels nouveaux gisements seront faibles. C’est ce que certains (députés d’opposition de l’assemblée nationale tchadienne) qualifient d’une "vaste braderie" à cause de multiple avantages fiscaux consentis.

Parmi ces exonérations nous pouvons citer :

- la taxe sur les véhicules, sauf ceux à usage privé ;

- la contribution foncière relative aux propriétés bâties, sauf pour les immeubles à usage d’habitation ;

- la contribution foncière relative aux propriétés non bâties ; - la patente ;

- les droits de timbre ;

- la taxe forfaitaire sur les salaires ; - la taxe sur les primes d’assurance.

Il faut noter que la taxe sur le bénéfice net varie entre 40% et 65% pour les trois champs pétroliers actuels et 50 % pour l’exploitation des gisements futurs et ces taux sont fonction du prix brut du baril de pétrole donc du cours de pétrole, des investissements réalisés en amont et de la quantité de production brute.

Donc, les recettes sont indexées sur l’évolution du prix du baril sur le marché international du pétrole autrement dit, la consistance de ces revenus est liée à une évolution favorable du prix du baril. Mais dans tous les cas, le Tchad qui étant un des pays les plus pauvres de la planète trouve une occasion unique, pour le financement de son développement et partant l’amélioration substantielle du niveau de vie de sa population.

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Ces revenus allaient être encore plus consistants si ceux qui ont eu la responsabilité de négocier les accords avec les entreprises multinationales, l’ont fait avec professionnalisme. Il faut se dire que les accords pétroliers devraient être conclus en tenant compte de l’intérêt primordial de son pays tout en laissant une marge acceptable aux entreprises étrangères d’exploitation.

Mais cela suppose que le pays devrait être doté des cadres hautement qualifiés dans le domaine ou au besoin faire appel à une expertise en dehors de la société d’exploitation, car le développement actuel de la technologie permet de mieux cerner les risques inhérents à l’exploration pétrolière et fournira une large gamme des données sur le sous – sol national car "un bon relevé géologique et une bonne campagne sismique permettent déjà un premier calcul du degré de probabilité de découverte dans chaque zone " ( EDIAFRIC 1983 ).

Aussi le plus souvent les compagnies étrangères égrènent une panoplie des risques d’exploitation pétrolière en Afrique et dans d’autres pays du tiers monde au moment des signatures des contrats pour leur permettre de voiler les réalités et de maximiser les capitaux qu’elles ont investis. Pourtant les risques, qu’ils soient politiques ou climatique sont plus élevés dans les pays développés qu’en Afrique. Qu’on se souvient dès 1979 de l’instauration des lois sur la taxation des superprofits des compagnies pétrolières en Norvège, en Grande – Bretagne et aux Etats – Unis. Les investissements en capitaux et les conditions d’exploitation du pétrole dans les zones comme en mer du Nord, en Alaska, en Sibérie, dans l’Antarctique ou dans le désert d’Arabie, sont – ils meilleurs et moins périlleux que ceux d’Afrique en on- shore ou en off – shore ?

En faite, il s’agit plutôt d’un " mythe " et d’une exagération. C’est pourquoi, la connaissance de tous ces éléments semblent être indispensable aux cadres nationaux qui ont la lourde responsabilité de discuter des accords pétroliers qui engagent leur pays et où les intérêts en jeu se comptent en terme des centaines de millions de dollars.

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