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Section 3 : La gestion préconisée des revenus pétroliers

1.3.2 Les organes de surveillance et de contrôle

L’adoption d’une loi bien ficelée soit-elle et sa promulgation ne constituent pas des gages d’assurances pour montrer que les revenus pétroliers seront bien gérés dans l’intérêt de la population conformément aux objectifs du départ. Pour preuve, déjà en 2001, le consortium a versé au gouvernement Tchadien un " bonus " de 17 milliards de FCFA et la gestion non orthodoxe de ce fonds a soulevé des vives réactions des bailleurs de fonds dont notamment la Banque Mondiale, car une partie de ce fonds a été prélevé pour l’achat de matériel militaire21 alors qu’il devrait servir à financer les secteurs sociaux. Donc, les risques d’un dérapage financier semblent être prévisibles. Mais, il faut se dire que les vrais problèmes naîtront, dès que le pétrole commencera à couler à flot. Aux regards des différentes critiques, du caractère controversé de ce projet et de la gestion déficiente de l’État tchadien la mise en place d’une structure nationale et internationale de surveillance s’avère indispensable.

1.3.2.1. Les structures nationales

Le souhait des tchadiens et même de la Banque Mondiale de voir la gestion des ressources pétrolières assurée par un organisme indépendant s’est concrétisé à travers la loi réglementant la gestion des revenus pétroliers laquelle loi crée une institution indépendante de contrôle dénommé : Collège de contrôle et de surveillance des ressources pétrolières (CCSRP). Le collège est sous la coordination du Comité Technique National de Suivi et de Contrôle (CTNSC) des activités pétrolières qui s’occupe du contrôle des aspects environnementaux à savoir biophysique, socio-économique, santé et sécurité.

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Chapitre 1 : Le Tchad à l’ère pétrolière ________________________________

En effet, le collège comprend neuf (9) membres dont quatre (4) représentants de la société civile et les cinq (5) autres membres sont représentés par : un magistrat membre de la cour suprême, un député, un sénateur, le directeur national de la BEAC et le directeur du Trésor, qui sont désignés et nommés pour un mandat de trois ans renouvelables une seule fois sauf deux personnalités qui sont membres de par leur fonction (le directeur national de la BEAC et celui du Trésor).

Le collège est chargé de contrôler l’allocation des revenus issus des trois champs pétroliers aux secteurs prioritaires et autorise le décaissement des financements pour les projets validés. Autrement dit le contrôle du CCSRP s’effectue uniquement sur les recettes directes (redevances et dividendes) déposées dans les comptes spéciaux du trésor qui sont logés dans deux banques commerciales au niveau national, la société générale de banque tchadienne (SGTB) et la Commercial Bank Tchad (CBT SA). Le fonctionnement de ces comptes obéit aux procédures d’approbation, de décaissement, de suivi et de contrôle du budget général de l’Etat. Mais en plus de toutes ces procédures, il faut en fait une volonté politique qui doit lever tous les obstacles à la réduction de la pauvreté, puisque l’expérience des Etats pétroliers22 est très édifiante car les contrats publics sont souvent massivement gonflés et que les proches du cercle du pouvoir montent des sociétés dans le but uniquement de rafler des contrats financés par des revenus pétroliers et en suite les sous traités avec d’autres entreprises.

En effet, cinq décrets d’application devront soutenir la loi sur la gestion des revenus pétroliers dont trois ont été adoptés. Il s’agit des décrets n°238/PR/MEF/03 sur la stérilisation des revenus pétroliers excédant la capacité d’absorption ; n°239/PR/MEF/03 sur la stabilisation des dépenses financées sur ressources pétrolières et le n°240 qui précise les contours des attributions du collège. Le tableau n°8 permet de voir le mécanisme de fonctionnement et de contrôle des revenus pétroliers.

Tableau n°8 : Organigramme de gestion des revenus pétroliers

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- Loi N°001/PR/99 du 11 janvier 1999 portant gestion des revenus pétroliers (3 champs pétrolifères) - Décret N°238/PR/MEF/03 du 1er juillet 2003 : Mécanisme de stérilisation des revenus pétroliers - Décret N°239/PR/MEF/03 du 1er juillet 2003 : Mécanisme de stabilisation des dépenses

- Décret N°240/PR/MEF/03 du 1er juillet 2003 : Collège de Contrôle et de Surveillance des Ressources Pétrolières (CCSRP) - Décret N°xxx/xx/xx/xx : Fonds pour Génération Futures (FGF)

- Décret N°xxx/xx/xx/xx : Régions productrice

Ressources Ressources

directes indirectes (art 1)

TOCTO (art 2) (art 2)

- Impôts 8,90% Sociétés Dividendes Redevance - Taxes Etat d'exploitation (mensuelle) - Droits de

Tchadien du pipeline douanes

2,80% 85% 80%

COTCO

(art3) (art 3) 100%

10% (art 7 - D238)

Compte séquestre

90% offshore dans une

(art 9) Banque IFS internationale

Commerciale

(art 11) (art 3 - D 238)

Cpte spécial

duTrésor B E A C

Cpte de Répartition

Assurer l'éfficacité des dépenses financées (art 4 - D 238) des revenus directs

par les revenus pétroliers (art 8) Eviter la surliquidité de l'économie

Versements trimestriels des montants 80% (art 5 - D 238) 5% 15% (durant 5 ans) Revenus excédant les dépenses nécessaires à l'exécution du budget (art 23 - D 240) financées sur ressources budgéta

Cpte de la

Cpte de Région Cpte courant Stabilisation Productrice du Trésor

Ordonnateur (art 4 - D 239)

(art 13) (art 14) Secteurs Région Budget de Légende

CONTRÔLE prioritaires productrice fonctionnement Art 0 : Article de la loi de 1999

Budget de Revenus pétroliers Revenus pétroliers Ressources Art 0 - D 000 : Article du décret N° 000

l'Etat directs pré-affectés directs alloués à la budgétaires non région productrice pré-affectées

Chb des comptes Santé publique

(Cour Suprême) (2) Enseignement Gestion

Infrastructures spécifique

Dév. Rural Décret ND

Env. et eau (art 7)

(1) Vérifie la conformité des engagements sur les comptes spéciaux avec la loi de finance (art 18)

Autorise et contrôle les décaissements des comptes spéciaux et l'affectation des fonds (art 18)

Contrôle le fonctionnement du mécanisme de stabilisation (art 14 - D 239)

Contrôle des dépenses financées sur le compte de la région productrice (art 28 - D 240)

Contrôle les ressources pétrolières directes et indirectes (art 14 - D 240)

(2) Contrôle de légalité sur le fonctionnement du compte de stabilisation (art 14 - D 239)

Financier du MEF

Epargne si revenus directs préaffectés

Consortium (Esso, Pétronas, Chevron)

Contrôleur CCRSP (1)

effectifs > prévisions budgétaires

Décret ND Epargne pour les générations futures

(art 26/27/28 - D 240)

Investie à Long Terme

Gestion spécifique

Revenus des trois champs pétrolifères

(Komé, Miandoum, Bolobo)

Mécanisme de stérilisation D 238 Mécanisme de stabilisation D 239

Chapitre 1 : Le Tchad à l’ère pétrolière ________________________________

Par ailleurs, en vue d’atténuer les effets pervers de l’exploitation du pétrole dans la zone du projet, il a été créé sous tutelle du CTNSC, un fonds pour les actions concertées et les initiatives locales (FACIL). L’objectif du FACIL est de lutter contre la pauvreté à travers l’octroi des crédits à un taux relativement bas par rapport aux institutions bancaires, aux groupements communautaires, aux populations et aux petites et moyennes entreprises (PME) locales ; pour permettre aux bénéficiaires de réaliser des infrastructures sociales (écoles, dispensaires, forages des puits), développer des activités génératrices de revenus et le renforcement des capacités de gestion et de formation. Comme tant d’autres projets réalisés dans ce pays et que l’aboutissement n’ont pas été concluant du fait de la politisation23 à outrance de certains projets, celui-ci échappera-t-il à la règle ? C’est ce que nous chercherons à vérifier à travers une enquête dans la localité pour voir, quelle est l’incidence de ce projet (FACIL) sur la réduction de la pauvreté (voir chapitre 4).

1.3.2.2. Les structures internationales

Malgré les structures de contrôle internes, la Banque Mondiale pour s’assurer de la bonne conduite du projet pour que celui-ci puisse atteindre son objectif, la réduction de la pauvreté au Tchad, a mis en place un Groupe International Consultatif (GIC). Le GIC a pour mission d’identifier et d’analyser les problèmes qui naîtront dans l’utilisation des ressources pétrolières et d’en informer la Banque Mondiale et au besoin faire des recommandations aux autorités tchadiennes.

De manière générale, les questions qui touchent la gouvernance, la gestion de l’environnement et aux impacts sociaux de la gestion des revenus pétroliers. Pour s’imprégner des réalités sur le terrain, les membres du GIC en fonction de l’évaluation des besoins, pourront se rendre au Tchad au minimum deux fois par an. Au cours de leur visite du terrain, en dehors des autorités publiques et des responsables des projets concernés, ils pourront recevoir les préoccupations sur les impacts sociaux des projets exprimés par les populations affectées.

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Il faut noter que, le mandat du GIC est étalé sur une période de 10 ans pour compter de la période de développement des champs pétroliers et construction de l’oléoduc, ainsi que les 6 premières années de production pétrolières et de disponibilité de ces revenus. La prorogation de ce mandat sera fonction d’évaluation d’ensemble de l’utilité de leurs activités. Le caractère d’indépendance du GIC se reflète notamment à travers la position de ces membres qui ne sont, ni des ressortissants du Tchad et du Cameroun, ni ayant été un employé du groupe de la banque mondiale ou avoir travailler pour le compte du consortium. Ce groupe est composé de personnalité issue du milieu universitaire, de la société civile et des gouvernements européens, américains et africains24.