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4.1 Protocole général

4.1.2. Triangulation des mesures

Les choix méthodologiques faits au travers de la triangulation engagent à l'utilisation d'outils de collecte de données pertinents et divers, permettant de couvrir l'ensemble des sources et types d'informations. Trois outils sont donc proposés pour leur complémentarité et leur capacité à traiter et à aborder différemment les données et les processus mis en jeu : la grille d'observation, l'entretien, et le questionnaire.

Représentation du système « équipe » Cadre

organisationnel

Pratiques de

Management Type de tâches

Mode de travail en équipe Efficacité estimée Observateur extérieur Observation

Manageur Entretien et Questionnaire Membre de

l’équipe Questionnaire

Tableau 3 – Triangulation des sources et des mesures Triangulation of sources and measures

4.1.2.1. La grille d'observation

La grille d'observation proposée sert la source « observateur ». L'objectif est de collecter les informations relatives au contexte organisationnel des équipes via la lecture et l'étude de documentation (organigramme, projets, lettres de missions …) et/ou via l'observation active de temps de réalisation des équipes.

L'observation est un exercice méthodologique difficile et, pour cette raison, peu utilisé en psychologie. Elle permet pourtant l'observation de systèmes humains complexes, comme l'ont démontré l'anthropologie ou l'ethnologie, qui utilisent beaucoup plus cet exercice. Ces sciences ont développé, durant les années 1920, avec l'Ecole de Chicago, l'observation participante (ou méthode d'observation directe), qui peut se définir comme « l'enregistrement des actions perceptibles dans leur contexte naturel » (Gauthier, 1984). Cette méthode exige une maitrise et une connaissance suffisante des objets d'étude. Il faut également connaître précisément les informations/données qui doivent être collectées, suivant des indicateurs prédéfinis et des hypothèses clairement formulées.

Or, dans les recherches ici proposées, les systèmes observés se révèlent très complexes et flous. Aujourd'hui, encore, la notion d'équipe de travail est difficile à circonscrire à des situations professionnelles précises. Le terme est en soit encore galvaudé. Par ailleurs, les éléments du système sont également complexes de par les rôles différenciés qu'ils peuvent et doivent occuper, et par les types de communication qu'ils peuvent soutenir. L'observation des variables psychologiques « représentations du système » et « efficacité » paraît donc difficile si les observables à relever ne sont pas clairement définis, ce qui reste compliqué tant sur le plan pratique que théorique.

Ainsi, pour collecter un nombre suffisant de données via la source « observateur », en restant assurer d'une prise d'information efficace, il semble difficile de construire des indicateurs pré-définis et pertinents. Il est donc préféré, dans les recherches menées, une observation plus libre des éléments, similaires à une « prise de note » des différentes informations qui peuvent renseigner le chercheur sur les modèles construits et les concepts choisis. Cinq aspects des phénomènes et des processus observés sont considérés ; ils correspondent aux quatre dimensions de la modélisation du système « équipe » proposée et à la modélisation de l'efficacité : le cadre organisationnel ; les pratiques de management ; le type de tâche ; le mode d'organisation du travail en équipe ; et l'efficacité estimée.

Mais, ce choix engage le chercheur dans deux règles à respecter. Tout d'abord, le chercheur doit, avant toute observation, s'assurer de la maîtrise complète des théories et des concepts qu'il a posés, pour pouvoir identifier et sélectionner les informations nécessaires et utiles. Et, il s'engage également à n'utiliser ces données qu'à titre de confirmation de résultats, portés par d'autres données plus valides et fiables (en l'occurrence les données quantitatives apportées par le questionnaire). Ainsi, le chercheur s'assure de ne pas faire reposer ses interprétations et ses conclusions sur un ensemble de données sélectionnées, réinterprétées et favorables à sa conception. Les données recueillies par l'observation ne doivent pas directement nourrir les hypothèses, mais doivent médiatiser/modérer, d’autres résultats plus fiables, et permettre une lecture critique et plus psychologique de ces derniers.

4.1.2.2. La grille d'entretien

La grille d'entretien sert à recueillir les données auprès de la source « manageur ». Cet entretien est couplé à la passation d'un questionnaire, issu de la version du questionnaire soumis aux membres de l'équipe. L'emploi de ces deux outils pour la source « manageur » vise à obtenir des informations, tant quantitatives que qualitatives, qui puissent être croisées aux informations recueillies auprès des membres de l’équipe et auprès de l'observateur.

La réalisation d'un entretien à des fins scientifiques est un exercice courant et connu en psychologie, mais il est sans doute tout aussi complexe que celui de l'observation. De nombreux biais, tant dans sa

construction que dans sa conduite, existent et ont fait l'objet de nombreuses réflexions et études traditionnelles. Des ouvrages de référence en exposent régulièrement l'essentiel.

Dans le cadre des recherches ici proposées, il faut cerner l'objectif fixé pour comprendre les choix opérés. L'objectif de la triangulation de la mesure sur l'axe « manageur » est de recueillir auprès de celui-ci (1) des informations suffisantes pour construire sa représentation du système, conformément à la modélisation réalisée, et (2) des informations permettant l'analyse de l’activité réelle de l'équipe, par le croisement avec les données « observateur ». C'est ce double objectif, ce double besoin, qui conduit à l'utilisation des deux outils : entretien et questionnaire. Ce dernier, inspiré du questionnaire soumis aux membres d'équipes, reprend les items permettant de modéliser leur représentation du système, c’est-à-dire les questions à choix multiples (cf. annexe 1). Le questionnaire répond donc au premier objectif, et permet de mettre en parallèle la représentation du manageur à celle des membres d'équipe. L'utilisation de l'entretien se centre sur le second objectif. A cette fin, la forme de l'entretien retenue est celle d'un entretien semi-directif, basé sur cinq questions générales qui permettent de compléter les informations recueillies par questionnaire et de croiser ces informations « observées ». Ainsi, une liberté suffisante est laissée au manageur pour apporter toutes informations complémentaires qu'il estimerait utile à la compréhension du fonctionnement de son équipe. Les cinq questions posées sont les suivantes. Elles correspondent aux quatre concepts de la modélisation du système « équipe » et au concept de l'efficacité groupale :

− « Comment définiriez-vous la culture, l’organisation de l’association ? »

− « Que diriez-vous de votre pratique de directeur, votre pratique managériale ? Présentez-la. » − « Comment définiriez-vous la tâche et l’activité que doivent réaliser vos animateurs ? » − « Pourriez-vous nous dire comment vous concevez l’organisation de vos animateurs, leurs

méthodes de travail ? Présentez-les. »

− « Le travail de votre équipe correspond-il à ce que vous attendiez ? Est-il efficace ? »

Servant à ouvrir sur les thématiques, les réponses du manageur sont laissées libres. Par ailleurs, cet entretien précède le questionnaire qui est soumis au « manageur ». Et, pour mettre chaque membre d'équipe dans un contexte équivalent pour répondre au questionnaire, des questions ouvertes leur sont proposées, comme expliqué dans le point suivant.

4.1.2.3. Le questionnaire

Le questionnaire construit (cf. annexe 2) est proposé à la source « membre d'équipe ». Il apparaît comme l’outil le plus intéressant pour guider le sujet dans la formulation de ces représentations, sur un mode standard, et dans un processus d’auto-attention (Lemoine, 2007). Etant donné le nombre de sujets nécessaires par recherche – une équipe compte nécessairement plusieurs membres – cet outil est le plus approprié pour une mesure standardisée et le recueil de données

quantitatives et qualitatives dans le même temps. Il comprend deux types de questions : des questions ouvertes et des questions à choix multiples.

Les questions ouvertes servent, à l'image de l'entretien du manageur, à introduire la thématique et à induire chez le sujet une réflexion de fond sur le thème. C'est à la suite de chacune de ces questions que sont proposées les questions à choix multiples, qui servent à construire la modélisation de la représentation du membre quant à son système.

Parmi les questions ouvertes, certaines ont néanmoins une fonction supplémentaire. Il s'agit des questions portant sur la dimension « mode de travail en équipe » : les questions 6, 7, 9, 10, 11 et 12. Plus nombreuses que les autres, les informations qu'elles apportent enrichissent la compréhension du système et du type de travail en équipe sur des dimensions supplémentaires à l'habilitation et l'interdépendance : l'organisation au quotidien, l'évolution, les rôles de chacun, la prise de décision.

− 6/ Comment votre groupe s’est-il organisé au quotidien pour réaliser ce travail : forme, rythme … ? (répartition des tâches, réunions régulières …)

− 7/ Cette organisation a-t-elle évolué dans le temps ? Si oui, pour quelles raisons ? Décrivez ces évolutions.

− 8/ Décrivez votre rôle au sein du groupe. Qu'avez-vous, selon vous, apporté ? Donnez en la raison.

− 10/ Comment définiriez-vous les relations au sein du groupe ?

− 11/ Représentez les interactions et échanges entre vous et les membres du groupe. (Vous êtes la croix centrale. Placez les autres membres sous formes d’autres points, et, à l’aide de flèches plus ou moins importantes, indiquez les interactions.)

− 12/ Combien de personnes prennent des décisions au sein de votre groupe ?

A noter que la question 11 est en fait la construction par le membre d'équipe d'un sociogramme (Moreno, 1934), représentant schématiquement les échanges et communications entre les membres. Leur comparaison au sein des équipes constitue également une prise d'information intéressante, et courante sur l'étude des groupes.

A noter également que le terme « groupe » est préféré au terme « équipe » dans la formulation des questions. Ceci pour ne pas induire chez les membres une représentation « fantastique » de leur système, le terme de groupe apparaissant plus neutre.

Les questions à choix multiples sont construites sur des échelles de Likert (Likert, 1932), à six échelons : « Jamais », « Rarement », « Quelquefois », « Assez souvent », « Habituellement » et « Toujours ». Le choix et la construction des 52 items proposés correspondent à une approche théorique rationnelle, et non à une approche statistique et factorielle (Pourtois & Desmet, 1997). Cela signifie que la construction résulte d'une démarche déductive, partant des modèles théoriques retenues

(Quinn, 1988 ; Pearman, 1998…). Quelques items (3 à 6) ont donc été créés par dimension. Ce qui signifie au total : 12 pour le cadre organisationnel, 12 pour les pratiques de management, 8 pour le type de tâches, 12 pour le mode de travail en équipe, et 12 pour la modélisation de l'efficacité estimée. Quant cela fut possible, c'est inspiré des outils existants que les items ont été choisis, comme dans le cas du questionnaire FOCUS pour le modèle de Quinn, où 12 items ont été sélectionnés.

Ces questions sont soumises et regroupées par concepts dans le questionnaire, et introduites par une question ouverte qui permet d'initier la thématique. A l'intérieur de ces regroupements, les items ont été aléatoirement positionnés. L'appariement des items aux dimensions figure en annexe 3.

Ces questions à choix multiples ont fait l'objet d'une évaluation inter-juges, auprès d'étudiants en Master Ressources Humaines. Quelques corrections ont été apportées dans la formulation des items. Aucune validation statistique et/ou factorielle n'a été réalisée, et ce pour deux raisons, l'une matérielle, l'autre théorique. En effet, il faut se le rappeler l'objectif de la mesure n'est pas la connaissance de la représentation en tant que tel, mais des distances entre ces représentations. L'outil n'a donc pas tant besoin d'être valide que sensible. La mesure de la représentation, en elle-même, est importante, mais n'est pas un objectif. Lui est préféré sa distance par rapport aux autres.

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