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Le travesti héroïque, ou celui qui ne se dit pas

Première partie : Le travestissement du héros viril, entre rire et injure

2. Le travesti héroïque, ou celui qui ne se dit pas

Si le grec ancien ne dit pas le terme, les auteur·e·s antiques ne disent pas mieux le travesti. En effet, il est remarquable que plusieurs sources antiques, dont les auteurs sont aujourd’hui, pour nous, des références en matière de mythologie grecque, taisent les épisodes où les héros masculins se travestissent. Deux hypothèses peuvent, dès lors, se formuler. La première serait que ces auteurs, de différentes époques, n’avaient pas connaissance de ces épisodes de travestissement. La deuxième serait que ces auteurs ont délibérément tu les travestissements pour des raisons notamment morales.

Une deuxième hypothèse vers laquelle il est tentant de pencher après la lecture de ceux-ci.

2. 1. Un historien : Diodore de Sicile

Diodore de Sicile est un écrivain grec du Ier siècle avant J.-C., écrivant sa Bibliothèque historique à l’époque de Jules César . Dès lors, une première remarque s’impose : au vu de la date 55 d’écriture relativement tardive, dans le sens où huit siècles d’antiquité grecque la précèdent, il semble peu probable que Diodore n’ait pas eu connaissance des traditions relatant les travestissements des héros mythiques grecs (sachant que, dans l’Antiquité, les auteur·e·s écrivaient avant tout selon les principes de l’imitatio et l’aemulatio56). De plus, la Bibliothèque historique est à mettre dans une perspective particulière : celle de l’historiographie. En effet, Diodore de Sicile a tenté, dans les quarante livres qui composaient originellement son œuvre, de relater l’ensemble de l’histoire du monde connu. C’est-à-dire qu’il se plaça dans la posture de l’historien, parcourant probablement la Méditerranée afin de récolter de nombreux témoignages de ses yeux (car l’opsis, ou la vue, était alors la preuve suprême pour l’historien antique). Et à ceux-ci s’ajoutaient tous les témoignages écrits qu’il trouva notamment dans les archives romaines . De fait, Diodore de Sicile 57 brassa probablement énormément de sources parmi lesquelles se trouvaient sans doute des références à ces histoires mythiques où les grands héros grecs revêtaient des vêtements féminins.

Il peut sembler paradoxal pour un·e Moderne, de parler de mythologie et d’histoire dans un même paragraphe, ayant aujourd’hui fait une distinction nette entre le mythe (que l’on place du côté

Pour rappel, on donne les dates suivantes pour la vie de Jules César : 100 avant J.-C. - 44 avant J.-C.

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L’imitatio et l’aemulatio sont des principes littéraires antiques : les auteur·e·s n’essayaient pas de faire une

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création littéraire originale au sens moderne du terme, ils reprenaient au contraire des thèmes et traditions déjà écrites (l’imitatio) et tentaient alors de surpasser les récits déjà existant sur ces thèmes et traditions (l’aemulatio).

« Au point de départ de cette entreprise, nous avons utilisé […] l’abondance à Rome de ce qui se rapporte

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au projet envisagé. » cf. DIODOREDE SICILE, Bibliothèque Historique, Livre I, 4, 2-3, trad. Michel Casevitz, cité dans la « Préface » à DIODOREDE SICILE, Mythologie des Grecs. Bibliothèque historique, Livre IV, trad.

Anahita Bianquis, Paris, Les Belles Lettres, coll. « La roue à livres », 1997, p.IX.

de la fiction) et l’histoire (que l’on place du côté de la vérité concrète des faits). Toutefois, il faut se rappeler que pour un historien antique, cette scission n’existait pas aussi nettement : même s’il est vrai que ces historiens entamèrent un processus d’exclusion du mythe, il n’en reste pas moins que beaucoup l’utilisèrent encore dans leur récit historiographique car, derrière les fabulations des poètes, au cœur du mythe se trouvait un noyau historique . De même, Diodore de Sicile utilisa le 58 mythe dans son œuvre, commençant par relater l’époque mythique pour, chronologiquement, remonter vers les temps historiques et finir sur l’établissement de l’hégémonie romaine avec le début de la guerre entre les Romains et les Celtes. Il consacra ainsi les six premiers livres à ces temps mythiques, retraçant des récits antérieurs à la guerre de Troie et dont la chronologie est floue.

S’intéressant d’abord à la mythologie barbare, il arriva progressivement à la mythologie grecque à l’aide, notamment, de figures mythiques servant de pont entre les pays barbares et grec : Dionysos et Héraclès.

Ces deux personnages mythologiques prennent notamment place dans le quatrième livre de la Bibliothèque historique qui, selon Philippe Borgeaud, opère en tant que livre de transition . À la 59 fois une transition chronologique, dirigeant le lecteur progressivement vers les temps historiques, et une transition géographique, puisque le propos se déplace des croyances barbares aux croyances grecques : après avoir exposé ce que disent les Barbares, « dans ce livre-ci, nous exposerons ce que racontaient les Grecs dans les temps les plus anciens à propos des héros et des demi-dieux les plus illustres » . Dans ce cadre, Dionysos et Héraclès sont de bons opérateurs de transition, le premier 60 étant réclamé par de nombreux peuples barbares et le second ayant voyagé aux quatre coins du monde civilisé et barbare. En cela, ils occupent une place importante du quatrième livre de Diodore, celui-ci s’ouvrant d’ailleurs sur Dionysos dont les cinq premiers chapitres traitent, tandis que les récits d’Héraclès s’étendent sur trente-deux chapitres, du VIII au XXXIX. L’importance des récits d’Héraclès s’explique également par le fait que le sujet de Diodore, dans ce livre, touche aux

« héros et des demi-dieux les plus illustres » et, comme lui-même le dit, « par l’importance, en effet, de ce qu’il [Héraclès] a accompli, on considère unanimement qu’il a surpassé tous les

cf. Suzanne SAÏD, « Muthos et historia dans l’historiographie grecque des origines au début de l’Empire »

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dans Danièle AUGER et Charles DELATTRE (dir.), Mythe et fiction, Nanterre, Presses universitaires de Paris Nanterre, coll. « Humanités classiques », 2010, p.69-96, [en ligne], mis en ligne le 30 janvier 2013, URL : https://books.openedition.org/pupo/1806 : Suzanne Saïd y propose une analyse de l’utilisation du muthos dans l’historiographie grecque, révélant que l’histoire s’est construite à partir du mythe et qu’elle s’est développée en lien permanent (d’exclusion ou non) avec ce mot polysémique de muthos.

cf. Introduction au Livre IV, dans DIODORE DE SICILE, Mythologie des Grecs. Bibliothèque historique,

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Livre IV, op. cit., p.2.

DIODOREDE SICILE, Bibliothèque historique, Livre IV, I, 5.

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héros » . Le fils de Zeus et d’Alcmène jouit d’une popularité impressionnante, menant à la création 61 d’une geste héroïque complexe dont il est difficile de rationaliser l’ensemble des épisodes. Diodore de Sicile tenta tout de même de retracer le cycle héracléen. Et, au cœur de celui-ci se déploie l’épisode d’Héraclès au service d’Omphale.

Diodore de Sicile le place à la suite des Douze Travaux d’Héraclès : le héros, refusant d’avoir d’autres enfants de sa première femme Mégara, la donne en mariage à Iolaos et cherche une autre épouse ; il courtise alors Iole, fille d’Eurytos, roi d’Œchalie qui lui refuse la main de son enfant (de peur qu’Héraclès soit repris d’un accès de folie le poussant à tuer de nouveau ses enfants) ; le héros est furieux et, pour se venger, chasse les juments d’Eurytos ; Iphitos, fils d’Eurytos qui croit en la culpabilité d’Héraclès, part à la recherche des juments ; Héraclès finit par accuser Iphitos et le tue ; de ce meurtre, Héraclès s’en trouve souillé et doit donc se purifier ; malgré les rites de purification administrés par Déiphobe, fils d’Hippolyte, le mal ne le quitte pas et l’oracle d’Apollon lui annonce que la souillure ne le quittera qu’une fois qu’il se sera vendu lui-même en esclavage et qu’il aura envoyé le prix reçu aux enfants d’Iphitos . 62

Cet exposé que Diodore donne de la cause de l’esclavage d’Héraclès met en lumière certains détails. Premièrement, il apparaît que l’épisode suit de près la fin des Travaux d’Héraclès, période où le héros se trouvait en servitude auprès d’Eurysthée qui lui imposa les Douze Travaux.

Deuxièmement, Héraclès se sépare de sa première femme Mégara dans le but d’avoir un mariage plus fertile et heureux avec une autre femme (le premier s’étant soldé par la mort de ses enfants) et, dans ce but, il cherche à obtenir la main d’Iole : la femme est perçue comme un moyen reproducteur permettant au héros de perpétuer sa descendance (masculine de préférence). Troisièmement, le héros fait preuve de sauvagerie et de brutalité, tuant Iphitos alors qu’il est lui-même coupable, la folie ne servant cette fois pas de prétexte à ses tueries. De ces trois remarques ressort une image du héros : le héros civilisateur (notamment visible par sa volonté d’avoir une descendance) est marqué par la brutalité, caractéristique ambivalente mais bien présente qui devient alors la cause de ses servitudes permanentes (d’esclave d’Eurysthée, suite au meurtre de ses enfants, il devient ensuite esclave d’Omphale, provoqué par le meurtre d’Iphitos). Cette brutalité pousse Héraclès à la faute qui le rend impur, il est atteint du miasma, impureté perturbant l’ordre et l’harmonie, d’où la nécessité d’une purification qui passe par la servitude.

DIODOREDE SICILE, Bibliothèque historique, Livre IV, VIII, 1.

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Tout ce récit préliminaire à l’épisode de l’esclavage d’Héraclès à Omphale se trouve chez DIODORE DE 62

SICILE, Bibliothèque historique, Livre IV, XXXI, 1-5.

Forcé donc d’obéir à l’oracle, il navigua avec quelques amis vers l’Asie. Là, il fut de son plein gré vendu par l’un de ses amis et devint l’esclave d’une jeune vierge (pathenou), fille d’Iardanos, Omphale, qui gouvernait alors les Méoniens que l’on appelle maintenant les Lydiens. 63

Son esclavage se fait donc au service d’Omphale, reine de Lydie. Ce qui apparaît alors est l’éloignement géographique d’Héraclès : cet éloignement peut se justifier par le fait qu’Héraclès devient esclave d’une femme, cela ne peut dès lors être possible qu’en dehors de Grèce (où la domination masculine est effective). Héraclès se trouve donc plongé en Asie, Orient exotique sur lequel se déploie un imaginaire de luxure et d’extravagance, permettant ce renversement de situation. La luxure peut être renforcée par le fait qu’Omphale est présentée comme une parthenos, c’est-à-dire une jeune fille en âge de se marier mais encore vierge . Cela signifie donc qu’Omphale 64 est disponible au mariage, pouvant offrir à Héraclès une possibilité d’union et de descendance.

Supposition qui se confirme par la suite, quand Héraclès chassa ceux qui pillaient le territoire de la reine (les Cercopès, Syleus et les Itoniens) :

Omphale reconnut le courage (tên andreian) d’Héraclès et, quand elle eut appris qui il était et qui étaient ses parents, elle admira sa valeur (tên aretên) ; elle l’affranchit, s’unit à lui et enfanta Lamos. 65

À défaut de s’unir à Iole, Héraclès finit par s’unir à Omphale, ayant d’elle un nouveau fils. Il continue par là sa mission civilisatrice, s’affranchissant et assurant en territoire barbare une dynastie grecque. L’équilibre est rétabli, il est de nouveau pur et libéré de sa souillure, alors sont reconnues son andreia (son courage) et son aretê (sa vertu). C’est parce que celles-ci sont reconnues qu’Héraclès retrouve sa qualité d’homme libre et s’unit à Omphale. Ce qu’il y a, dans ce passage, est une mise en avant de l’andreia d’Héraclès, à savoir son courage mais surtout sa virilité, sa qualité d’homme. L’épisode d’Héraclès chez Omphale se clôt alors sur la précision qu’il a également eu un fils d’une esclave (il ne s’arrête donc jamais de procréer, quelque soit son statut), et son retour dans le Péloponnèse, en Grèce. Il apparaît donc net que Diodore de Sicile passe sous silence tout ce qui a trait à un quelconque travestissement du héros masculin chez la reine de Lydie.

Ce silence est à considérer dans la perspective historiographique dans laquelle se place Diodore de Sicile. Sa volonté est d’écrire une histoire universelle tendant vers l’hégémonie romaine

DIODOREDE SICILE, Bibliothèque historique, Livre IV, XXXI, 5.

63

Claude CALAME, L’Éros dans la Grèce antique, op. cit., p.141.

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DIODOREDE SICILE, Bibliothèque historique, Livre IV, XXXI, 8.

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du Ier siècle avant J.-C. et, bien qu’il use du mythe, il tente d’historiciser ces histoires anciennes. En effet, il ne doute pas qu’en chaque mythe se trouve un noyau historique véridique qu’il tente de retrouver. Pour ce faire, il met en place un dispositif évhémériste, hérité d’Évhémère que Diodore 66 considère comme un historien . Ce dispositif consiste en une rationalisation du mythe, le 67 dépouillant de tout son merveilleux pour le faire rentrer dans l’histoire. Dès lors, les héros se présentent comme des humains qui ont été divinisés par la suite, — Héraclès n’a pas été divinisé car il était divin, fils de Zeus, mais parce qu'il avait accompli de grands exploits civilisateurs. Diodore contourne l’idée de puissance divine d’Héraclès en précisant que les gens « jugent la puissance d’Héraclès à l’aune de la faiblesse des hommes d’aujourd’hui, de sorte que la grandeur exceptionnelle de ses travaux rend incroyable le récit » , c’est-à-dire qu’il rationalise la puissance 68 mythique d’Héraclès en disant simplement, qu’aujourd’hui, l’homme n’a plus les forces d’antan et c’est cet écart qui crée l’incroyable force du héros. Cette rationalisation du mythe prend place dans le programme de Diodore de Sicile : il use des figures mythiques pour en faire des modèles, précédents de l’histoire et servant de « préambule nécessaire à la compréhension » de celle-ci. 69 Héraclès acquiert une nouvelle dimension puisqu’il devient un modèle, s’élevant à un statut d’exemplum intemporel. Ayant dépassé ses contemporains par ses actions civilisatrices, il devient une image de l’idéal hellénistique (et romain) du chef d’État et de l’homme d’élite . En cela, 70 Philippe Borgeaud voit même en Héraclès un émule de Jules César . Dès lors, si Héraclès a valeur 71 d’exemplum dans la Bibliothèque historique, le silence sur son travestissement chez Omphale devient évident. En taisant cette tradition, Diodore de Sicile évite d’associer au modèle de l’homme d’élite des scènes de lascivité et des scènes comiques, ne montrant que son côté civilisateur et conquérant. Il ne valorise que l’andreia du héros qui doit primer avant tout chez le Grec (ou la virtus chez le Romain). Alors que Diodore faisait dire à Héraclès, au Livre III de sa Bibliothèque historique, « qu’il serait scandaleux, pour lui qui avait résolu d’être le bienfaiteur de l’ensemble du

Évhémère est un mythographe grec de l’époque hellénistique, daté aux alentours de 316 avant J.-C. et 260

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avant J.-C.

Suzanne SAÏD, « Muthos et historia dans l’historiographie grecque des origines au début de l’Empire »,

67

art. cit.

DIODOREDE SICILE, Bibliothèque historique, Livre IV, VIII, 3.

68

Philippe BORGEAUD, « Préface : La mythologie comme prélude à l’histoire », dans DIODOREDE SICILE,

69

Mythologie des Grecs. Bibliothèque historique, Livre IV, op. cit., p.XXV.

cf. Introduction au Livre IV, dans DIODORE DE SICILE, Mythologie des Grecs. Bibliothèque historique,

70

Livre IV, op. cit., p.10.

Philippe BORGEAUD, « Préface : La mythologie comme prélude à l’histoire », op. cit., p.XXVI.

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genre humain, de tolérer que certains, parmi les peuples, fussent gouvernés par des femmes » , il 72 ne pouvait le présenter par la suite comme un héros dévirilisé, portant la robe safran féminine et se soumettant entièrement à la puissance féminine d’Omphale.

Ainsi, il apparaît que le silence de Diodore révèle, non pas une méconnaissance des traditions existantes, mais une volonté propre de l’auteur pour des questions morales : en taisant le travestissement d’Héraclès, il évite toute moquerie et ne reste alors que la valorisation de l’andreia du héros, conquérant finalement Omphale. Un silence qui se répète chez d’autres auteurs.

2. 2. Un mythographe : le Pseudo-Apollodore d’Athènes

En effet, d’autres ouvrages postérieurs à Diodore de Sicile reprennent également les grands mythes grecs et dans lesquels se retrouve le silence autour du travestissement, notamment d’Héraclès. Ainsi se déroule une lecture analogue dans la Bibliothèque d’Apollodore.

Apollodore d’Athènes est un scholiaste et grammairien grec qui travailla à Alexandrie au cours du IIe siècle avant J.-C. C’est à lui qu’on attribua l’écriture de la Bibliothèque, un condensé des grands cycles mythiques grecs. Toutefois, après une lecture attentive, il apparaît que l’attribution est mauvaise : en effet, dans l’ouvrage se trouve une référence à l’auteur Castor de Rhodes qui écrivit des Chroniques autour de 61 avant J.-C., c’est-à-dire un siècle après la mort d’Apollodore d’Athènes. À moins que cette référence soit un ajout tardif au texte originel de la Bibliothèque, il paraît improbable qu’Apollodore d’Athènes, grammairien du IIe siècle avant J.-C., en soit l’auteur (auquel il vaut mieux se référer en tant que Pseudo-Apollodore) . Dès lors se pose 73 la question de la datation de l’ouvrage : d’une façon générale, les chercheur·se·s ont tendance à dater la Bibliothèque plutôt aux alentours du premier (voire deuxième) siècle après J.-C. Ce qui apparaît donc de ces premières remarques est que l’œuvre est postérieure aux écrits de Diodore de Sicile et, s’il était déjà improbable que celui-ci ne soit pas au courant des traditions au sujet du travestissement d’Héraclès, il en va de même pour ce Pseudo-Apollodore.

Celui-ci écrit donc un condensé des grands cycles mythiques : à l’inverse de la tendance hellénistique (dans laquelle s’inscrivait encore Diodore de Sicile), il n’a ni une approche historiographique ni même une approche de rationalisation du mythe. En effet, l’auteur semble

DIODORE DE SICILE, Bibliothèque historique, Livre III, 55, 3 (trad. B. Bommelaer) cité dans Philippe

72

BORGEAUD, « Préface : La mythologie comme prélude à l’histoire », op. cit., p.XVIII.

cf. Introduction à APOLLODORED’ATHÈNES, The Library of Greek Mythology, trad. Robin Hard, Oxford,

73

Oxford University Press, 1997, p.10-11 : d’autres analyses (d’ordre stylistique notamment) s’ajoutent pour démontrer que la Bibliothèque est postérieure au IIe siècle avant J.-C.

avoir « une approche d’antiquaire, accompagné par un goût de l’archaïque et du pittoresque » , 74 regroupant dans une œuvre unique les grands cycles mythiques organisés selon une lecture généalogique. La Bibliothèque apparaît comme une sorte d’anthologie des mythes grecs (le Pseudo-Apollodore ne s’intéressant qu’à la culture grecque, délaissant Rome malgré la date d’écriture sous l’époque romaine). Pour ce faire, il semble que le Pseudo-Apollodore condensa différentes sources (allant des mythographes aux historiens, en passant par les poètes épiques) pour écrire ce qui peut s’apparenter à un canon du mythe. En cela, certain·e·s spécialistes ont vu dans la Bibliothèque un but avant tout d’utilisation scolaire , ce qui pourrait expliquer la forte dimension encyclopédique 75 qui ressort de l’œuvre (proposant alors un ouvrage de référence recensant les traditions des grands mythes grecs). Et, parmi ces grands cycles, se trouve finalement celui d’Héraclès, ce qui n’étonnera personne, lui-même étant le héros panhellénique par excellence.

Le cycle d’Héraclès prend place au Livre II de la Bibliothèque et s’étend des chapitres 4 à 7 (qui sont suivis par l’épisode des Héraclides, soit la descendance d’Héraclès). Sa geste prend de nouveau une place centrale, occupant la moitié du Livre II, témoignant de l’importance que le héros a eue au cours de l’Antiquité. Et, au cœur de celle-ci, le·la lecteur·rice retrouve l’épisode de servitude d’Héraclès chez Omphale.

De même que chez Diodore, l’épisode fait suite aux Douze Travaux d’Héraclès et une situation préliminaire similaire se déploie : le héros a donné Mégara en mariage à son neveu, le mariage n’ayant plus d’avenir possible (au vu du massacre de leurs enfants), et il tente de se remarier. Cependant, à la différence de l’historien, il courtise Iole, fille d’Eurytos, suite à un concours lancé par le roi : l’homme qui le vaincra, ainsi que ses fils, au tir à l’arc emportera la main de sa fille. Héraclès l’emporte avec aisance, mais « bien qu’il eût battu ses adversaires au tir à l’arc » , la main d’Iole lui est refusée par tous, excepté Iphitos qui reconnaît la victoire du héros. À 76 la suite de ce concours, un troupeau de bœufs d’Eurytos est volé par Autolycos, et le roi accuse prestement Héraclès du vol ; encore une fois, Iphitos est le seul du côté du héros, ne croyant pas en sa culpabilité. Iphitos part donc à la recherche d’Héraclès pour le convaincre de rechercher ensemble le troupeau volé, celui-ci accepte et le reçoit en ami. « Mais, dans un nouvel accès de folie, il [précipite Iphitos] du haut des murs de Tyrinthe » , provoquant la mort du prince et, par là, 77

De même que chez Diodore, l’épisode fait suite aux Douze Travaux d’Héraclès et une situation préliminaire similaire se déploie : le héros a donné Mégara en mariage à son neveu, le mariage n’ayant plus d’avenir possible (au vu du massacre de leurs enfants), et il tente de se remarier. Cependant, à la différence de l’historien, il courtise Iole, fille d’Eurytos, suite à un concours lancé par le roi : l’homme qui le vaincra, ainsi que ses fils, au tir à l’arc emportera la main de sa fille. Héraclès l’emporte avec aisance, mais « bien qu’il eût battu ses adversaires au tir à l’arc » , la main d’Iole lui est refusée par tous, excepté Iphitos qui reconnaît la victoire du héros. À 76 la suite de ce concours, un troupeau de bœufs d’Eurytos est volé par Autolycos, et le roi accuse prestement Héraclès du vol ; encore une fois, Iphitos est le seul du côté du héros, ne croyant pas en sa culpabilité. Iphitos part donc à la recherche d’Héraclès pour le convaincre de rechercher ensemble le troupeau volé, celui-ci accepte et le reçoit en ami. « Mais, dans un nouvel accès de folie, il [précipite Iphitos] du haut des murs de Tyrinthe » , provoquant la mort du prince et, par là, 77