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Le modèle IMACLIM

II. Statique comparative à l'horizon de projection

II.3. Traits saillants

II.3.1. Refus du paradigme d'une croissance « en âge

d'or »

IMACLIM ne présuppose pas un équilibre de premier rang avec croissance « en âge d'or » et perfection des marchés; le respect de telles hypothèses serait en effet contradictoire avec la volonté affichée en introduction à ce chapitre de se donner les moyens de représenter des théories économiques variées, et aussi de prendre en compte ceux des déterminants du deuxième dividende caractéristiques d'une économie de second rang58.

Notamment, la modélisation d'un chômage d'équilibre cautionne un effet distorsif des prélèvements sur le travail, ce qui permet à IMACLIM d'intégrer l'un des principaux points de la controverse macroéconomique en matière de double dividende (cf. chap. II). La représentation d'un impact de l'évolution du chômage dans la détermination du salaire nominal modère l'effet de la diminution de ces distorsions : il convient de simuler des hypothèses où, tout au long de la trajectoire dynamique implicite de la fig. IV.1, une partie de la baisse des prélèvements obligatoires sur le travail est

58 On peut pourtant qualifier l'exercice d'analyse « en équilibre général », en revenant au sens premier de l'expression, quelque peu malmené par l'hégémonie des paradigmes néoclassiques : les résultats obtenus doivent être compris comme ceux d'un nouveau sentier d'équilibre de long terme, aboutissement du rééquilibrage consécutif aux perturbations introduites.

revendiquée par les salariés sous forme de hausse du salaire réel. La spécification retenue pour représenter cette éventualité (équation 33) est voulue assez souple pour représenter des hypothèses contrastées en la matière, et permet d'éviter une prise de position tranchée dans un débat qui dépasse le cadre de nos travaux.

II.3.2. Endogénéisation du progrès technique induit

L'endogénéisation du progrès technique induit par les réformes considérées est opérée sur des prémisses simples :

• on considère un taux de formation brute de capital fixe constant, ce qui à

revenu disponible donné détermine le niveau total de FBCF Qk;

on soustrait à cette FBCF totale les investissements d'offre QkE et de demande QkEi (consommations intermédiaires) et QkEc (consommations des ménages) spécifiquement énergétiques, pour obtenir une FBCF de productivité générale, qui détermine un coefficient de progrès technique hicksien Φ selon un exercice d'économétrie détaillé en annexe IV.1.

L'effet d'éviction ainsi représenté peut être tempéré par le jeu d'une variable de contrôle, le taux τév, représentant la mesure des investissements spécifiquement énergétiques sans incidence sur la productivité générale : un taux de 1 signifie un effet d'éviction complet où la perte de productivité, liée à une moindre innovation, est proportionnelle à la baisse de la FBCF non énergétique; une valeur inférieure à 1 suppose qu'une mesure des investissements énergétiques bénéficient au progrès technique général par des externalités positives (phénomène de spill over).

II.3.3. Représentation des saturations de l'efficacité

dynamique des signaux prix

Nous avons souligné précédemment que l'ordre de grandeur des contraintes carbone justifiées par le niveau d'alerte scientifique climatique implique des coûts marginaux non négligeables. La modélisation de ces contraintes se doit donc de représenter des phénomènes de saturation des réactions aux prix (asymptotes technologiques, butée sur des besoins incompressibles), avec pour conséquence directe le rejet de l'utilisation d'élasticités constantes sur tout l'espace étudié, que ce soit pour les fonctions de demande ou les fonctions de production.

Ce choix impose de renoncer à l'utilisation de formes fonctionnelles courantes (Cobb- Douglas, CES, LES) assurant l'explicitation conjointe, en amont de fonctions de

production et d'utilité, et en aval (via le lemme de Shephard ou l'identité Roy) de fonctions de demandes de facteur et de demandes marshalliennes. Soulignons cependant que de telles spécifications ne sont à l'origine que des approximations ad

hoc des observations réelles, essentiellement utilisées pour des questions de tractabilité

analytique qui perdent de leur pertinence dans un cadre calculable.

La procédure suivie—dont le détail technique est présenté au chapitre suivant dans le cas d'un couplage avec le modèle POLES—consiste à interpréter les résultats des modèles énergétiques pour un niveau de taxe donné (ou plus précisément pour une variation de cette taxe à partir de ce niveau) comme des élasticités prix à revenu ou niveau de production constant, puis à révéler au voisinage de cette taxe la seule fonction (de consommation ou de production) compatible avec les contraintes d'équilibre général et les principes macroéconomiques les plus fondamentaux—égalité des coûts et des productivités marginales, loi de Walras. L'approximation est répétée pour chaque niveau de taxe, et, lorsqu'on s'approche des asymptotes de progrès technique que la modélisation technico-économique ne peut manquer de révéler la fonction de production macro-économique prend une allure de fonction Leontief. En définitive, l'entreprise revient à révéler la fonction enveloppe des fonctions de demande de facteurs ou de biens induites par les signaux-prix; cette fonction débouche sur des élasticités ponctuelles non constantes sur l'espace étudié, plus ou moins optimistes selon le caractère des résultats du modèle énergétique couplé.

Ce choix fort fait écho au premier volet de la controverse technique présentée plus haut; l'articulation sur laquelle il débouche est assez générale pour permettre le couplage d'IMACLIM à tout modèle bottom-up, voire l'évaluation de pures hypothèses techniques, explicitées par une asymptote et une vitesse de déplacement vers cette asymptote, comme c'est le cas dans les résultats présentés au chapitre VI.

Conclusion

On peut résumer en cinq points les forces du modèle IMACLIM ainsi constitué : les spécifications retenues dans sa construction lui permettent

• de se prêter au couplage avec les résultats de tout exercice de modélisation

technico-économique, des plus optimistes aux plus pessimistes en matière d'efficacité dynamique du signal prix sur la demande d'énergie et les substitutions entre énergies, de coût d'investissement des techniques économes

en carbone, et d'horizon technologique (asymptotes de saturation des substitutions);

• d'intégrer la déformation induite par les écotaxes des fonctions de production

hors énergie, en cohérence avec la réponse du secteur énergétique et sur la base de principes microéconomiques fondamentaux;

• d'expliciter les effets d'éviction entre FBCF d'offre et de demande d'énergie, et

FBCF directement liée à la productivité générale des facteurs, ainsi que les hypothèses sur les externalités technologiques susceptibles de les atténuer;

• de représenter des équilibres de long terme en sous-emploi, et où l'évolution du

salaire net dépend du rapport de force en matière salariale, lui-même fonction du taux de chômage selon une formulation simple se prêtant à la représentation d'hypothèses contrastées;

• de prendre en compte les impacts sur la compétitivité internationale et donc la

balance commerciale dans l'hypothèse d'une application unilatérale d'une politique climatique.

Soulignons que le modèle, à l'image sans doute de l'ensemble des exercices de modélisation couramment utilisés, est en perpétuel développement : d'une part, dans le seul cadre d'analyse circonscrit par les chapitres VI, VII et VIII, toute nouvelle utilisation suppose une adaptation de la version de base présentée dans ce chapitre; d'autre part des extensions sont prévues à plus ou moins court terme, et notamment le développement de versions désagrégées par secteurs d'activité et par niveaux de revenu (cf. chap VII), ou la construction d'une version multi-régionale, composée de la simple mise en parallèle de versions du modèle avec bouclage des balances de paiement nominales et réelles au niveau mondial.

Chapitre V

IMACLIM-POLES :