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La Ticéitude vue comme un environnement propice au développement de l’appétence curieuse

Chapitre 2. Qu’est-ce donc que la Ticéitude alors?

2.14. La Ticéitude vue comme un environnement propice au développement de l’appétence curieuse

Je n’ai pas de don particulier, je suis juste passionnément curieux (Albert Einstein) L’esprit est comme un parachute, il ne fonctionne bien que s’il est ouvert (Thomas Dewar)

Albert Einstein disait qu’«il ne faut pas perdre la sainte curiosité». La curiosité est une composante de la soif d’apprendre. Pendant longtemps, les philosophes envisageaient la curiosité comme un mal. Pour Plutarque (46 ap. J.-C. et mort vers 125: philosophe, biographe, moraliste,), la curiosité est la maladie des envieux et des calomniateurs. La tradition philosophique ou religieuse condamnait la curiosité comme attention à l’inessentiel, alors que la tradition naturaliste de la Renaissance tendait au contraire à réhabiliter ce qu’ils appelaient la connaissance sensible. Dans la tradition augustinienne, la curiosité était vue comme invitation au voyage: «ce qu’on appelle curiosité n’a pas d’autre fin que la joie qui naît de la connaissance des choses. C’est la puissance d’un Dieu artiste et soucieux de réveiller sans cesse le sens de l’émerveillement». Pour Aristote, «tous les hommes ont par nature le désir de connaître».

Le mot «curiosité» vient de «cura», qui veut dire «la cure, curatif: prendre soin».

L’adjectif «curieux» vient du latin «curiosus» qui veut dire «qui a soin de, avoir le souci de quelque chose». On comprendra qu’il convient de se débarrasser à jamais de la phrase idiote que nous avons tous et toutes entendue dans notre enfance: «la curiosité est un vilain défaut». La curiosité conduit à l’étonnement. Apprendre à connaître quelque chose consiste à trouver des réponses aux questions que

concernant. Le cerveau subit des modifications qui permettent d’apprendre plus facilement mais aussi de retenir les informations mémorisées sur le long terme. «La curiosité met le cerveau dans un état d’éveil permettant d’apprendre et de retenir toutes sortes d’informations, tel un tourbillon qui aspire ce que l’apprenant est motivé à apprendre, mais aussi ce qu’il y a autour.»

La Ticéitude implique une attitude curieuse et ouverte par essence!

En Ticéitude et donc dans notre approche hybride, on invite l’apprenant à prendre connaissance par lui-même de nouvelles informations, et ce, grâce aux modules accessibles en ligne (textes, articles, vidéos, dossiers audio, etc.). La séance en présentiel est alors consacrée à résoudre des problèmes, à répondre aux questions des apprenants, à présenter d’autres exemples. Le questionnement stimule et éveille la curiosité. Nous l’avons vu, en Ticéitude, l’apprenant est à la fois produit et producteur de son environnement d’apprentissage. Il faut pouvoir créer une démarche qui doit avoir du sens pour l’apprenant afin qu’il soit, reste curieux et créatif.

La Ticéitude soutient un environnement personnel d’apprentissage (EPA). Il s’agit d’une logique de construction des compétences centrée sur l’apprentissage. Il s’agit de développer un enseignement davantage centré sur la construction de connaissances et de compétences par l’apprenant lui-même, tout en lui mettant à disposition un ensemble de ressources éducatives qu’il devra s’approprier avec l’aide de l’enseignant. Mais un EPA n’est pas une nouvelle forme de «devoir à rendre». Un EPA est basé sur la notion de tâche qui stimule la créativité et la curiosité. L’apprenant qui apprend à l’intérieur d’un EPA devient plus curieux car il appartient à:

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une communauté de pratique;

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une communauté de projets (Centrée sur la tâche);

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une communauté épistémique, c’est-à-dire sur la création collégiale des connaissances. On devient plus curieux en partageant des «autrui significatifs» (Mead, 1963). Nous l’avons dit, apprendre en Ticéitude, c’est apprendre dans un écosystème. La construction d’un EPA va conforter l’écosystème. L’hommo Sapiens retiolus (l’homme qui pense en réseau) est en quête d’apprendre, il enquête, il fouille, il s’enquiert. La Ticéitude donne envie d’apprendre. En Ticéitude, l’enseignant est au service de l’élève et non pas du savoir. C’est en fait un espace holistique. Le désir d’apprendre et la curiosité sont liés au plaisir de vivre. C’est inné! En Ticéitude, l’apprenant est un peu comme un bébé: il avale son environnement: il regarde, il touche (Mobile learning), il écoute. Mais le désir se nourrit des obstacles que l’apprenant va rencontrer. Pour susciter la curiosité, il faut que l’apprentissage soit un défi. Mais un défi n’est jamais difficile! Il est évident que l’enseignant joue un grand rôle dans ce processus car un professeur passionné est toujours écouté! En Ticéitude, il y a «l’à prendre et l’apprendre». C’est quand on a quelque chose à prendre qu’on est curieux et donc qu’on apprend. Il vaut mieux être curieux qu’intelligent. Le curieux ne répond pas à un instinct mais

à des besoins: le besoin de s’enquérir, la soif de la nouveauté et le besoin de distraction qui répond à l’ennui. L’environnement peut donc susciter la curiosité, mais l’important est sûrement de satisfaire la curiosité de l’apprenant.

En Ticéitude, on satisfait la curiosité de l’apprenant en l’invitant et en l’encourageant à:

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se remettre en question constamment (garder l’esprit ouvert);

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ne jamais prendre les choses pour acquise (Don’t take anything for granted); on évolue avec son apprentissage;

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se questionnant constamment pour booster sa créativité et en questionnant les autres ou l’enseignant sur le réseau;

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en ne qualifiant jamais quelque chose d’ennuyeux ou de difficile (pour ne pas saboter la curiosité);

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en considérant l’apprentissage en ligne comme un jeu (Un jeu n’est jamais un fardeau!);

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en lui suggérant d’élargir ses lectures (Nous essayons d’encourager la lecture sur notre dispositif en ligne).

Nous dirons que la Ticéitude est un environnement ouvert qui est propice à satisfaire la curiosité des apprenants qui s’impliquent dans le système. Mais la Ticéitude ne change pas la pédagogie, elle invite seulement à questionner. Il s’agit d’un «environnement congenial» (sympatique) pour reprendre l’expression de Mihaly Csikszentmihalyi.

Mais il y a plus, car en Ticéitude, la curiosité des uns stimule celle des autres! Il se crée ce que nous appelons «une curiosité collégiale» ou «une collégialité curieuse». La curiosité en Ticéitude étend la zone de confort et diminue l’anxiété, favorise la créativité, développe les facultés d’adaptation, libère l’autodidacte qui sommeille, augmente la diversité des expériences et l’épanouissement personnel, augmente les sentiments positifs et élargit les horizons, évite l’ennui, améliore l’humeur (source de plaisir et de joie) et développe l’ouverture d’esprit. En un mot, la curiosité est un attracteur d’apprenance.

Nous relatons ici un exemple de «curiosité collégiale» avec un groupe d’étudiants de terminale (year 12) du lycée de Toowoomba Grammar School à Toowoomba dans le Queensland. Seize élèves ont participé à ce projet car ils utilisent notre dispositif en ligne depuis plus d’un an. Les étudiants venaient de finir le module en ligne sur les changements climatiques. Le professeur leur avait demandé de faire plus amples recherches sur le sujet. Quelques jours plus tard, chaque élève avait posté et stocké sur le réseau de la plateforme des documents audio, des vidéos et des textes (PDF). Notons que leur professeur avait fait de même. D’abord, précisons que chaque élève et leur professeur

un lien Youtube sur le merveilleux film de Yann Arthus-Bertrand Planet Océan

(https://www.youtube.com/watch?v=QWn6ttf9NRg). Quelques jours plus tard, tous les élèves

avaient vu le film à la maison et étaient capables d’en discuter en classe. Le film de Yann Arthur- Bertrand avait suscité la curiosité de toute la classe. Tous les élèves avaient également téléchargé l’application Planet Océan pour en savoir plus directement sur leur Smartphone. Un autre étudiant avait posté une autre vidéo-interview de Jacques Perrin sur la beauté animale (https://www.youtube.com/watch?v=sgpYFdeJ0AY). Ajoutons que tous les apprenants avait posté un texte, un lien vidéo, voire même un enregistrement audio (MP3) intéressant pour le reste de la classe. La classe s’est enrichie de la curiosité de chacun. Un élève encore plus curieux - dirons-nous- est allé filmé avec son Iphone le parc national de Noosa (à une heure et demie au nord de Brisbane) avec ses plages magnifiques (Vidéo de 2 minutes) et ses Koalas et y a ajouté un commentaire, et, bien sûr, a posté la vidéo sur la page de la classe sur le réseau du dispositif. Il est même allé jusqu’à y mettre des sous-titres en français. Précisons que cet élève est également musicien, donc un artiste. Nous voyons ici un exemple d’apprentissage spontané déclenché par la curiosité des apprenants, puis par la curiosité du groupe. Notons que le sujet de l’environnement était l’un de ceux qui étaient ensuite examinés formellement à la fin de l’année. On constate donc que la curiosité n’est pas un vilain défaut en Ticéitude, bien au contraire!